Algérie Droits de l'Homme









Algérie : Chronique des droits de l'Homme


Mise à jour : 3 janvier 2008
©Pascal Holenweg, Genève, 2008

Lettre ouverte d'Amnesty International aux candidats à l'élection présidentielle en Algérie

Rapports d'Amnesty International Rapport alternatif de la FIDH sur la situation des droits de l'Homme en Algérie
Le rapport 1999 de la Fédération Internationale des ligues des droits de l'Homme (FIDH) sur l'Algérie
Chronique des droits de l'Homme en Algérie 1998-2000
Chronique des droits de l'Homme en Algérie 2000-ad libitum
La visite en Algérie des ONG de défense des droits de l'homme (printemps 2000)
L'Algérie devant le Comité des droits de l'Homme de l'ONU
Chronique de la liberté de la presse et des media en Algérie
Le massacre de Serkadji
Asile politique et immigration : les parias algériens
Code de la famille ou code de l'infamie ?
Algérie : quelle solidarité ? (la prise de position de la CSSI)


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ALGERIE - DROITS DE L'HOMME POUR TOUS ( D H T )

6 rue Neuve POPINCOURT
75011 Paris
algeriedht@hotmail.com                        

En Algérie, le régime militaro-policier continue d'apporter deuil et misère à une société en otage depuis l'indépendance du pays en 1962.

Organisations non gouvernementales, observateurs et journalistes dénoncent régulièrement des violations graves et répétées des droits de l'homme : disparitions, tortures, exécutions extra-judiciaires, viols, atteintes à la liberté d'expression …

Face à tous ces drames le pouvoir en place continue d'opposer la parade factice, la dénégation cynique et le refus de toute investigation régulière.

La confiscation des libertés, de la justice et de la force publique par une bureaucratie autoritaire attachée à ses privilèges a, de longue date, consommé la rupture entre la société et les appareils d'Etat. Ainsi en a-t-il été au moment de l'arrêt du processus électoral de janvier 1992, une guerre larvée contre des populations innocentes est volontairement entretenue depuis 10 ans dans l'opacité la plus totale. Le chiffre de 100 000 morts annoncé en 1996 maintenant dépassé.

Désarmée, la société subit une terreur permanente, empêchant toute possibilité d'organisation, de mobilisation, d'action collective et citoyenne. Elle ne peut occuper que le champ étriqué de sa survie quotidienne sans perspective. Cette situation imposée par les lois d'exception encourage toutes les formes de manipulations collectives et des comportements d'exclusion.

Les Algériens à l'étranger vivent douloureusement le profond traumatisme imposé à leur pays : accrochés aux journaux, radios, télévision et Internet, ils sont à l'affût de tout ce qui peut contribuer à leur permettre de comprendre et d'agir pour retrouver la paix et la sérénité . D'une manière générale, ils se posent la question : " Que faire pour aider à retrouver la paix ? "

Nous devons remonter le courant et contribuer à installer le potentiel démocratique qui anime la société sur le socle stable du respect des valeurs universelles des droits de l'Homme pour tous, sans exclusive, permettant de hâter l'émergence d'Institutions basées sur la liberté et la justice.

Il s'agit pour nous dans ce cadre de promouvoir une Association rassemblant le plus grand nombre autour de ces valeurs universelles telles que définies dans la Charte des Nations Unies pour agir en vue de rejeter la violence, de combattre les lois d'exception et les méthodes autoritaires de gouvernement, d'exiger le respect des libertés démocratiques et de recourir au dialogue et à la négociation pour dégager des solutions aux problèmes auxquels fait face la société algérienne.

Notre Association déploiera ses activités pour atteindre les objectifs suivants :

Notre Association sera organisée selon des principes clairs :

- Son action aura pour référence principale la situation des " droits de l 'homme pour tous " sur le terrain.

- Son autonomie sera jalousement préservée à la fois des partis politiques et des appareils organiques, médiatiques et policiers du pouvoir.

- Le rassemblement s'opérera selon des principes de transparence, de démocratie et de respect mutuel dans le fonctionnement de l'Association qui sera ouverte à tous sans exclusive, sur base de convictions en matière de " droits de l'homme pour tous "

Diverses actions pourront être entreprises :

- Recherche, analyse et diffusion des informations relatives à la situation des droits de l'homme en Algérie

- Formation des militants par des séminaires, stages, actions sur le terrain

- Campagnes thématiques ciblées

- Collecte de fonds à destination des organisations en Algérie qui poursuivent les mêmes objectifs



2002

(Corr 5.1 / LADDH, Liberté, El Watan, Quotidien d'Oran 6.1) Le Tribunal de Relizane a rendu le 5 janvier son verdict dans le procès opposant le chef de milice, et ancien maire, Hadj Fergane (et plusieurs membres de sa milice) au responsable régional de la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme (LADDH), Hadj Smaïn, en condamnant ce dernier pour "dénonciation calomnieuse" et "diffamation" à deux mois de prison ferme, une amende de 50'000 DA* et à 10'000 DA* de dommages et intérêts à verser à chacun des neuf plaignants, que Hadj Smaïn et les familles de disparus accusaient d'être responsables d'enlèvement et de d'exécutions sommaires, après la découverte à Sidi M'hamed Benaouda et Jediouia, dans la région de Relizane, de charniers (emplis par les groupes islamistes selon Fergane et ses miliciens, par Fergane et sa milice selon Smaïn et les familles de "disparus". Les deux parties ont annoncé leur intention (pour Had Fergane) ou la possibilité (pour Hadj Smaïn, qui a cependant déclaré que le verdict lui importait peu et qu'il pouvait parfaitement purger sa peine pour mettre à nu les dessins du "système", de faire appel du verdict.

En mars 1994, Hadj Fergane avait organisé une milice, baptisée "Groupe armé anti-terroriste" (GAT), placée selon la LADDH "sous le contrôle direct des responsables de la DRS" (Sécurité militaire) de la wilaya. La LADDH accuse le GAT d'avoir envoyé des centaines de lettres de menaces à des citoyens, d'avoir commis des "attentats aveugles" contre les sympathisants du FIS, de s'être livré à des "enlèvements suivis de disparitions" et à des "assassinats à grande échelle", d'avoir détruit (en 1995) une quarantaine d'habitations de personnes en fuite ou en prison, d'avoir opéré des ratissages et d'avoir transformé les bureaux du syndicat intercommunal "en salles de torture, avant exécutions extra-judiciaires". En 1995, un attentat contre le fil du Maire de Djediouia, Abed Mohammed, a provoqué un massacre collectif : selon la LADDH, doute personnes ont été assassinées par les miliciens de Fergane, reconnu par les familles de victimes. Hadj Smaïn accuse également Fergane d'avoir fait assassiner l'un de ses propres hommes, Chahloul Salah, qui refusait les méthodes et les exactions de son chef. Finalement, Fergane a été arrêté à un barrage de gendarmerie avec dans son coffre un homme pieds et poings liés. Hadj Smaïn avait filmé des charniers alors qu'ils étaient en passe d'être déplacés, mais la vidéo lui avait été confisquée par la gendarmerie. Lui-même fait l'objet d'une mesure de contrôle judiciaire depuis février 2001 et il lui est interdit depuis octobre 2001 de quitter la wilaya de Relizane.


Communique de la Ligue Algérienne de Défense des Droits de l’Homme. LADDH

Le 05 janvier 2002, Mohamed Hadj Smain, représentant de la l’ADDH dans la wilaya de Relizane, a été condamné par le tribunal correctionnel de cette wilaya a deux mois de prison ferme, 5000 DA d’amande et 10000 DA pour chacun des neuf plaignants.

Ce jugement est la confirmation d’une injustice qui fait suite à un harcèlement judiciaire qui dure depuis quatre ans, car il n’est pas fondé sur l’examen objectif des faits, mais uniquement sur l’engagement de l’accusé en faveur de la défense des Droits de l’Homme.

Les trois armes de la lutte contre les graves violations des droits de l’Homme, restent pour Hadj Smain et pour tous les militants des droits de l’Homme, la vérité des faits, la force du droit et la volonté d’aller jusqu’au bout malgré les menaces pour découvrir la vérité. Parler vrais quand d’autres se taisent, condamner les graves violations des droits de l’Homme quand d’autres les approuvent et les justifient, est un devoir pour entraîner l'adhésions intellectuelle et militante des citoyens. La vérité est une valeur politique et la cacher est incompatible avec la défense des droits de l’Homme.

Quel sont donc les faits? : En décembre 1997 et janvier 1998 l’épicentre de la violence s’est déplacé du centre avec notamment les massacres de Bentalha, Rais, Beni Messous, vers l’Ouest du pays notamment à Rélizane. En mars 1994, Hadj Fergan, organise un groupe paramilitaire clandestin baptisé G.A.T (Groupe Armé anti-térroriste). Ce commando de la mort est placé sous le contrôle direct des responsables de la DRS au niveau de la wilaya de Relizane. Le G.A.T a envoyé des centaines de lettres de menaces à des citoyens, suivies par des attentats aveugles perpétrés contre des citoyens soupçonnés d’être sympathisants du FIS. A partir de juillet 1994, commencent les enlèvements suivis de disparitions, et des assassinats à grande échelle.

En 1995, une quarantaine d’habitations de personnes en fuite ou en prison ont été détruites. Les ratissages se faisaient de jour et de nuit avec des véhicules de l’administration. Les bureaux du syndicat intercommunal de Rélizane furent emménagés en salles de torture, avant exécutions extra- judiciaires.

L’attentat en 1995 contre le fils de Abed Mohamed DEC de la commune Djediouia, entraîne un massacre collectif. Douze personnes ont été assassinées de nuit, au seuil de leur domicile, par les miliciens de Hadj Fergan DEC de la ville de Rélizane, reconnu par les familles des victimes qui ont déposé des plaintes auprès du ministère de l’intérieur, et du général Bekkouche commando de la deuxième région militaire. Les massacres répétés, les excusions sommaires sont expliquées par le pouvoir comme étant des règlements de compte, des affrontements fréquents entre le GIA et l’AIS. Hadj Férgan, devenu président de la ville de Relizane, a été arrêté à un barrage dressé par les gendarmes, qui ont découvert dans la malle de son véhicule, Mekadam, membre de l’O.N.E.C. Organisation Nationale des Enfants des Martyrs, pieds et poings liés.

Durant cinq ans, Hadj Fergan et Hadj Abed et leurs milices cagoulées, ont semé la mort, multipliant torture, excusions extra judiciaires, disparitions forcées, démolitions de maisons. Ils jouissent de l’impunité car ils ont déclaré «avoir pris les armes sous le contrôle de l’autorité militaire pour combattre le terrorisme».

Le journal El watan du 08 janvier 1998 souligne que «trois autres massacres se sont soldés selon un communiqué des services secrets par la mort de 62 personnes».

Le pouvoir peut il se livrer à une auto critique et révéler l’emplacement des charniers ou sont ensevelis les corps de centaines de personnes?. Des témoignages accablants pour le pouvoir grossissent chaque jour les dossiers des disparus. Des massacres collectifs, des excusions extra judiciaires, des tortures et des enlèvements suivis de disparitions ont été perpétrées par les groupes Islamistes armés, l’armé et les service de sécurité, les groupes armés occultes ou commando de la mort..

Tout ce qui met à découvert au grand jour le visage répressif du pouvoir est réduit au silence.

La difficulté de poursuivre et de condamner les criminels est sans doute un des problèmes qui se pose avec acuité.

L’impunité est un déni de justice. Les crimes sont plus faciles à prouver dans les pays ou ils sont commis, mais si cela n’est pas possible en Algérie ou les conditions politiques et juridiques ne sont pas réunies pour juger, parce que la justice est assujettie au pouvoir, il faut faire appel à la justice internationale qui vient de faire ses premiers pas. Ce ne sont pas seulement les exécutants qu’il faut juger, mais les commanditaires de ces crimes qui sont au sommet de l’Etat bénéficiant de l’immunité du fait de leur prééminence au sein de l’Etat qui les absout de tous les crimes.

La convention internationale sur la torture, fait obligation aux Etats qui l’ont ratifié de déférer sur leur territoire en justice tout tortionnaire, quelque soit sa nationalité et celle des victimes et quelque soit le pays ou il se trouve réfugié et vit en exil doré, ou est seulement de passage.

Un jugement peut être critiqué du point de vue juridique et politique mais ne doit être respecter que si les juges sont respectables, sont indépendants et impartiaux et obéissent seulement à la loi. Le jugement à l’encontre de Hadj Smain est politique et non juridique, rendu par le juge non selon la loi et en son âme et conscience, mais sous la dicté du pouvoir politique, qui tient la justice sous tutelle au nom de la raison d’Etat. Le tribunal de Relizane n’est pas un lieu ou la justice est rendue mais une instance politique ou le pouvoir a jugé son adversaire, Hadj Smain, un défenseur des droits de l’Homme.

La soumission organique et fonctionnelle de la justice au pouvoir est totale.

L’indépendance de la justice, qui n’est pas la propriété du pouvoir mais celle des justiciables, devient aussi urgente qu’indispensable. Elle est liée à la mise en place d’un système politique démocratique, respectueux de la souveraineté du droit, de la séparation et de l’équilibre du pouvoir.

Alger le 06 janvier 2002. 

Maître Ali Yahia Abdennour 
Président de la LADDH


Communiqué du Collectif des familles de disparus

Alger le 05/01/2001

Le tribunal de Rélizane vient de prononcer son verdict dans le procès en diffamation intenté par Hadj Fergan, ancien DEC de Rélizane et chef « patriote » contre Hadj Smain militant des Droits de l’Homme et représentant de La LADDH. Le verdict condamne Mr Hadj Smain à deux mois de prison ferme, 5000 DA d'amende et 10000 DA de dommages et intérêts pour chacun des 09 plaignants. Une telle décision prouve, encore une fois, que la justice algérienne et loin d'être impartiale, et ne fait que renforcer l'inquiétude éprouvée par les familles de disparus de voir se faire, un jour la vérité et la justice tant réclamées.

Consterné par ce verdict, le collectif des familles de disparus en Algérie dénonce avec fermeté cette injustice, et rappelle à l'union européenne qui vient de parapher un accord d'association avec l'Algérie, que cet accord est lié au respect des Droits de l'Homme. Et qu'une telle décision porte atteinte au respect de ces droits.

Le collectif des familles de disparus en Algérie réitère son entière solidarité à Hadj Smain et appelle à la mobilisation les défenseurs des Droits de l'Homme et leurs avocats pour faire face au non-respect du droit.

P/le collectif des familles de disparus 
Nassira Dutour


Communiqué de "Algérie - Droits de l’Homme pour tous" (ADHT)

Le 06.01.2001

Coup dur pour les défenseurs algériens des droits de l’Homme

Accusé de diffamation, Mohamed SMAÏN vient d’être condamné par le tribunal de RELIZANE, à 2 mois de prison ferme et une lourde amende, pour avoir dénoncé un chef de milice déjà emprisonné puis libéré par un tribunal militaire en 1998, et d’ailleurs publiquement reconnu par des témoins au cours du procès. Il va faire appel.

Manifestement cette condamnation est destinée à faire taire Mohamed SMAÏN connu pour son engagement en faveur des familles de disparus.

Le charnier de RELIZANE est célèbre pour avoir fait l’objet de plusieurs campagnes de presse. Récemment Mohamed SMAÏN a été surpris « en flagrant délit » par les gendarmes alors qu’il filmait le lieu du charnier qui venait d’être déplacé. Il a été victime de la confiscation de ses pièces d’identité, ce qui équivaut dans un pays sous état d’urgence à une interdiction de circuler, de travailler et de jouir de ses droits les plus élémentaires.

Dans la réalité Mohamed SMAÏN est depuis 4 ans l’objet d’intimidations, de pressions et de menaces. A ce jour il refuse de se soumettre à la loi du silence et de renoncer à son combat en faveur des droits de l’Homme. L’ADHT lui exprime sa solidarité tout en saluant son courage de militant.

L’ADHT dénonce un procès qui n’avait pas lieu d’être. Mohamed SMAÏN n’est en réalité que le porte parole des victimes et des familles de disparus en sa qualité de représentant de la LADDH (ligue algérienne de défense des droits de l’Homme).

L’ADHT attendait de la justice que la lumière soit faite sur la réalité du charnier, sur ses auteurs voire sur ses commanditaires. En réalité l’appareil judiciaire s’acharne sur un citoyen qui n’a fait dans la légalité que ce que lui dicte sa conscience.

L’ADHT attire l’attention de l’opinion publique nationale et internationale sur la situation de Mohamed SMAÏN, victime de ses convictions. Elle demande aux militants des droits de l’Homme de se mobiliser afin qu’il soit rétabli dans ses droits, et en particulier que lui soient restitués ses papiers d’identité.


ALGERIE : Condamnation arbitraire d'un défenseur des droits de l'Homme

Communique de L'OBSERVATOIRE pour la Protection des Défenseurs des Droits de l'Homme(programme commun de la Fédération internationale des ligues des droits de l'Homme (FIDH) et de l'Organisation mondiale contre la torture)

Genève, Paris, le 5 janvier 2002

L'Observatoire a été informé que M. Mohamed Smain, responsable de la section de Relizane de la Ligue Algérienne pour la Défense des Droits de l'Homme (LADDH) a été condamné ce 5 janvier 2002 à 2 mois de prison ferme, 5000 dinars d'amende et 10 000 dinars de dommages et intérêts à verser à chacun des neuf plaignants.

M. Smain avait été appelé à comparaître le 29 décembre 2001 devant le tribunal de Rélizane (une ville située à l'Ouest de l'Algérie, près d'Oran). Il était poursuivi pour diffamation, sur la base d'une plainte déposée par Hadj Fergane, ainsi que huit ex-membres d'une milice dite de légitime défense. Cette plainte avait été introduite après que M. Smain eut alerté la presse algérienne, le 3 février 2001, sur la découverte et l'exhumation de charniers par les services de gendarmerie et la milice de Fergane (ex-maire de Rélizane). Lors de l'audience, à laquelle l'Observatoire avait mandaté un observateur, le Procureur de la République avait requis un an de prison - sans préciser s'il demandait une peine ferme ou avec sursis - et 5000 dinars d'amende contre lui. M. Smain a déclaré à l'Observatoire son intention d'interjeter appel de la décision prononcée aujourd'hui.

De 1994 à 1998, deux maires, El Hadj Fergane, maire de Rélizane surnommé " le chérif " et Hadj Abed, maire de Jdiouia, ont constitué une milice composée de membres de leurs familles et d'anciens combattants de la guerre de libération. Cette milice, que la population nomme " les cagoulés " a été responsable durant des années de plusieurs dizaines d'enlèvements, suivis de disparitions, d'extorsion de fonds et d'expéditions punitives contre les familles réputées proches des membres du FIS ou des groupes armés. En avril 1998, les deux maires ainsi que plusieurs autres miliciens ont été arrêtés et relâchés trois jours après malgré leur inculpation de crimes graves (enlèvements, assassinats et extorsions de fonds). Leur procès ne s'est toujours pas tenu.

L'Observatoire dénonce avec la plus grande fermeté cette condamnation arbitraire, qui sanctionne l'exercice par un défenseur des droits humains de son droit à "promouvoir la protection et la réalisation des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ", conformément à la Déclaration des Nations unies sur les défenseurs des droits de l'Homme. Les activités de M. Smain à Oran et Relizane en faveur des familles de disparus et son action pour que la vérité soit faite sur les violations perpétrées en Algérie sont reconnues au niveau international et national et lui valent d'être la cible des autorités. Il a aidé plusieurs ONG internationales lors de leurs missions d'enquête en Algérie courant 2000.

L'Observatoire rappelle que la condamnation de ce jour vient s'ajouter à toute une série d'actes de harcèlement dont est l'objet M. Smain. Il avait été arrêté par la police des frontières le 23 février 2001 à son arrivée à l'aéroport d'Oran alors qu'il revenait d'un voyage à Paris, à l'occasion duquel il avait rencontré divers responsables d'organisations internationales de défense des droits de l'Homme. Pendant son séjour en France, M. Smain avait appris qu'un mandat d'arrêt avait été lancé contre lui. Remis en liberté peu après, il fut toutefois placé sous contrôle judiciaire et privé de ses pièces d'identité, documents de voyage, ainsi que son permis de conduire. Jusqu'à ce jour, ses papiers ne lui ont pas été rendus, ce qui constitue une atteinte grave à sa liberté de mouvement et à l'exercice de ses activités professionnelles.

Ce procès, dont l'audience du 29 décembre s'est poursuivie cinq heures durant sous haute surveillance de la sécurité militaire et de la police, a donné lieu à l'audition de nombreux témoins et victimes qui se sont pour la première fois exprimés sur les violations des droits de l'Homme - exécutions extrajudiciaires, sommaires et arbitraires, disparitions, torture, pillages, etc. - perpétrées par Fergane et sa milice depuis 1993. De telle sorte que, de facto, le procès est davantage apparu comme celui des miliciens et des autorités dont elles avaient le soutient, que comme celui de M. Smain. Pour cette raison, l'Observatoire souligne que, en dépit du verdict inique qui en est issu, ce procès a néanmoins constitué une étape sans précédent dans la recherche de la vérité sur les atrocités perpétrées en Algérie depuis près d'une décennie.

L'Observatoire exprime son entière solidarité à M. Smain.

L'Observatoire saisit immédiatement la Représentante spéciale du secrétaire général des Nations unies sur les défenseurs des droits de l'Homme.

L'Observatoire demande aux autorités algériennes de :


L A D D H 
Bureau de la Wilaya de Relizane
13 Bd Zaghloul Relizane

le 12 janvier 02 

Lettre de M. Smaïn à Son excellence Monsieur le Président de la République Algérienne

          Devant le poids croissant de l'arbitraire, je m'adresse à votre
          haute autorité, pour interpellervotre esprit de justice en temps
          que premier magistratdu pays, et de solliciter de votre
          excellence d'user de son autorité où de sa bonne influence,
          auprès des autorités judiciaires à l'échelon que vous jugeriez
          utile, aux fins de faire lever la mesure du contrôle judiciaire à
          laquelle je me trouve depuis le 22/02./01.

          En vertu de ce contrôle judiciaire, mes documents personnels
          notamment le passe-port, ma carte d'identité Nationale et mon
          permis de conduire m'ontété retirés et, je me trouve dans
          l'obligation de me présenter tous les samedis devant les
          services de la Gendarmerie.

          Cette situation constitue non seulement une limitation
          draconienne de ma liberté de circuler maisun handicap sérieux
          à mon activité professionnelle et plus généralement jusqu'à
          l'impossibilité de percevoir mon traitement mensuel pour
          cause d'absence de document d'identité.

          Les avis juridiques à moi donnés par les Lois de la République,
          indiquent, que la mesure de contrôle judiciaire constitue une
          mesure de sûreté à caractère provisoire, elle perd sa raison
          d'être à l'issu de l'information judiciaire, ce qui met le tribunal
          en obligation de décider, sa levée au moment du prononcé du
          verdict. 

          Je rappelle à vote excellence, que le tribunal devant lequel, j'ai
          été renvoyé du chef de diffamation et dénonciation
          calomnieuse à rendu en date du 05/01/02 la décision, me
          condamnant a 2 mois de prison ferme + amende, sans pour
          autant prononcer la levée du contrôle judiciaire sous lequel,
          j'ai été placé en période d'instruction ni ordonner la restitution
          de mes documents personnels.

          Le parquet de Relizane saisi par mes avocats a décliné son
          incompétence en raison de l'appel interjeté par moi contre la
          décision du tribunal. Il me semble que l'attitude de l'autorité
          judiciaire, n'est pas favorable à la restitution de mes documents
          malgré l'aboutissement des actes d'instruction.

          Veuillez croire, votre excellence l'expression de mon profond
          respect.

          M.SMAÏN


(Quotidien d'Oran 19.1, HRW) L'ONG américaine de défense des droits humains "Human Rights Watch" a publié son rapport annuel sur la situation des droits humains dans le monde. S'agissant de l'Algérie. HRW estime à au moins 1500, sur la base des sources de presse et des ONG algériennes, le nombre des victimes de la violence terroriste en Algérie, violence qui selon l'organisation a considérablement "diminué par rapport au milieu des années quatre-vingt-dix", mais dont le niveau reste suffisemment élevé pour démentir les déclarations officielles la qualifiant de "résiduelle". HRW note que la loi d'amnistie de 1999 "n'a pas suffi à mettre fin à la violence" et qu'elle a largement contribué à instaurer un "climat d'impunité généralisée". Seuls 7 % de l'ensemble des combattants islamistes qui se seraient livrés aux autorités feraient l'objet de poursuite, sans d'ailleurs que l'on puisse vérifier le chiffre de 400 "repentis" faisant l'objet de poursuites.


(www.algeria-interface.com) Ali Mebroukine, avocat et ancien chargé de mission du président Zeroual, a été condamné à quatre ans de prison par le tribunal militaire de Blida, selon des "sources informées à Alger" évoquées sans plus de précision par "Algeria-Interface". Ali Mebroukine avait été arrêté à se retour de Paris en mai 2000, et détenu au secret pendant deux semaines. Alors qu'il était invité par un organisme du ministère français des Affaires étrangères, le Centre d'analyses et de prévisions (CAP), les autorités algériennes auraient demandé et obtenu des autorités françaises qu'elles le reenv oient en Algérie. On ignore quelles sont les charges retenues contre lui, et sa condamnation n'a pas été rendue publique.

(www.algeria-interface.com / Liberté 27.1) Un programme européen d'appui à la modernisation de la police algérienne, programme d'assistance technique d'un montant de 8,2 millions d'euros, sera lancé dans un délai de quatre mois après la mise en place de "structures d'assistance technique". Le projet porte notamment sur le respect des droits de l'homme et des libertés individuelles, et prévoit la création d'un Institut de recherche criminalistique et des stages de formation aux techniques d'investigation modernes. Dans le cadre du programme européen pour la démocratie et les droits de l'homme 2002-2004, l'Algérie a en outre été retenue (aux côtés de 28 pays) pour bénéficier d'une aide de 2,5 millions d'euros, pour des actions dans les domaines de la démocratisation, la gestion des affaires publiques, l'Etat de droit, la résolution des conflits et les droits des femmes.

(El Ribat 27.1 / Jeune Indépendant, IE-FIS 28.1 / Jeune Indépendant 30.1) La famille d'Ali Benhadj s'est adressée par écrit au président Bouteflika pour lui lancer un "dernier appel" à "mettre un terme à ceux qui planifient (la) mort" du leader islamiste en usant contre lui "de moyant inhumains". Cette lettre a été adressée au président après une visite, le 21 janvier, des proches d'Ali Benhadj à sa prison de Blida. Le fils d'Ali Benhadj, Abdelfatah, a dénoncé les brutalités dont aurait été victime son père au terme de cette visite : "deux malabars en tenue militaire sont venus mettre brutalement fin à la visite (...) (Ali Benhadj) a été brutalisé sous nos yeux et jeté à terre". Le frère du prisonnier a annoncé son intention de saisir le procureur général du Tribunal militaire de ces faits, et la famille envisage la possibilité de "soumettre le cas Benhadj aux instances internationales". Ils témoignent l'avoir trouver "incapable de marcher, de parler, de se tenir debout ou même de respirer" normalement. "Sa faiblesse et ses souffrances ne tont que s'accumulet" et un gardien l'aurait trouvé inanimé le 19 janvier. La famille de Benhadj accuse : "on le torture dans sa prison individuelle, dans un idolement total, meurtrier, comme s'il était la cause de toutes les tragédies connues depuis l'aube de l'histoire", et interroge : "Qui sont ceux qui envisagent son élimination physique et son assassinat" ? La famille d'Ali Benhadj demande au président d'"intervenir avant qu'il ne soit trop tard" et que le prisonnier ne soit mort. Le FIS s'est lui aussi, dans un communiqué du président de son instance exécutive à l'étranger, Rabah Kébir, adressé au président Bouteflika pour lui demander "d'assumer ses responsabilités constitutionnelles et morales pour assurer les droits du détenu Ali Benhadj", et annoncer qu'il saisissait les organisations de droits de l'homme pour qu'elles interviennent auprès du gouvernement algérien. Le bulletin de l'IE-FIS, "El Ribat", accuse le pouvoir algérien de chercher à "détruire" Ali Benhadj, ou "en tous cas, à rendre à la famille et à la société un homme tellement affaibli et malade qu'il ne pourra plus s'inmvestir dans la lutte politique". L'IE-FIS rappelle que Benhadj a accompli la peine de douze ans de prison à laquelle il a été condamné par un tribunal militaire.

(CCFIS 31.1) Après la famille d'Ali Benhadj et la délégation exécutive du FIS à l'étranger, le Conseil de coordination du FIS lance un "appel solennel aux organisations de défense des droits de l'Homme ainsi qu'à toute la classe politique algérienne pour qu'(elles) usent des moyens en leur pouvoir pour faire pression sur le régime d'Alger, avec à sa tête M. Bouteflika, pour que cesse la torture à laquelle est soumise Cheikh Benhadj", dont l'état de santé s'est gravement détérioré selon les informations rendues publiques par ses proches, et qui vit depuis plusieurs années dans un isolement que ne rompent que des visites familiales récemment écourtées, et parfois annulées par les responsables de sa détention à Blida.

(Corr 2.2) Le Collectif des familles de diaparu(e)s en Algérie signale la disparition, le 26 janvier, d'Omar Toumi, un résident de la Cité des 1600 logements à Alger (Eucalyptus), frère d'un autre "disparu", Saïd Toumi, enlevé le 30 septembre 1994 par les forces de sécurité, et dont la famille est sans nouvelles depuis. Deux jours après la disparition d'Omar Toumi, quatre hommes armés se sont présentés au domicile de la famille pour l'arrêter et, ne le trouvant pas, ont arrêté son père après l'avoir brutalisé. Selon la famille du "disparu", celui-ci a été arrêté après s'être rendu à l'hôpital pour une blessure de la main. Il aurait été ensuite détenu au commissariat central d'Amirouche, où on a affirmé qu'il était détenu au commissariat de Cavaignac, où on a renvoyé la famille au commissariat central...

(FIDH) La Fédération internationale des ligues des droits de l'homme (FIDH) présentera lors de la prochaine session de la Commission des droits de l'homme de l'ONU, qui se tiendra à Genève du 18 mars au 28 avril, une intervention sur la situation algérienne "caractérisée par des violations flagrantes, massives et systématiques des droits de l'Homme".

Sur les violations des droits civils et politiques, la FIDH rappelle que "la violence politique continue en Algérie" et que "chaque jour, des civils, des militaires, des agents des divers corps de sécurité sont assassinés dans des conditions atroces"; elle considère que "la lutte contre le terrorisme et la sécurité des Algériens relèvent non seulement du droit mais du devoir de l'Etat, sans pour autant autoriser celui-ci à s'affranchir du respect des obliogations internationales relatives à la protection des droits de l'Homme auxquelles il a souscrit". La FIDH constate que "la politique de Concorde civile (...) n'a pas permis de mettre un terme au conflit qui a commencé après l'interruption du processus électoral, en 1992", et estime que "l'impunité demeure la règle en Algérie", faute d'enquêtes "approfondies" sur les actes terroristes, de prise en charge "véritable" des victimes du terrorisme et d'"enquêtes sérieuses" sur les "violations flagrantes, massives et systématiques" des droits de l'homme "perpétrées ces dix dernières années". De plus, relève la FIDG, qui en donne pour exemple les poursuites dont fait l'objet le responsable de la Ligue algérienne de défense des droits de l'homme (LADDH) de Relizane, Mohamed Smaïn, "non seulement les auteurs de violations des droits de l'Homme ne sont pas inquiétés, mais ce sont les défenseurs des droits de l'Homme eux-mêmes, qui demandent que des enquiêtes soient diligentées afin d'identifier et de punir les responsables de violations, qui se trouvent poursuivis par la justice".

En ce qui concerne les droits économiques, sociaux et culturels, la FIDH accuse les autorités algériennes d'avoir "utilisé" le conflit qui marque l'Algérie depuis dix ans "pour faire reculer ces droits, sans craindre les réactions d'une population terrorisée" et "déstabilisée par les violences subies qu quotidien pendant ces dix années" de la part des groupes armés et des forces de sécurité, et qui "a en outre subi la négation de ses droits économiques, sociaux ou culturels". De plus, "les champs d'expression sociale, culturelle et politique (médias, associations, syndicats, partis, etc.) subissent l'autoritarisme du pouvoir politique" : Les syndicats autonomes subissent "d'importantes restrictions", la liberté de la presse est placée "sous la contrainte économique de l'Etat", la question linguistique est "instrumentalisée par les autorités", les femmes sont "mineures devant la loi, discriminées dans le monde du travail, exclues de la vie publique, )...) tout particulièrement touchées par les violations des droits économiques, sociaux, culturels, civils et politiques, et maintenues dans une situation d'infériorité".

"Au bout du compte, les Algériens sont soumis à un véritable enfermement économique, social et politique résultant de violations systématiques des droits de l'Homme", conclut la FIDH, qui rappelle que l'Algérie ne manque pourtant "ni de ressources ni de potentialité" et qui constate qu'alors que les réserves de change couvrent plus d'une année d0importations et que l'excédent budgétaire est en augmentation, "les Algériens voient aujourd'hui leurs conditions d'existence se dégrader, sans perspective d'amélioration", que le PNB par habitant chute, que "les inégalités en termes de consommation sont criantes", que le chômage atteint "un niveau dramatique", que "les droits sociaux des Algériens ont reculé", que l'"accès aux biens publics s'est profondément dégradé" et que les conditions de logement sont "particulièrement mauvaises".

"Dix ans après l'interruption des élections, la société algérienne est muselée, isolée du monde et appauvrie", écrit la FIDH, qui rappelle que près d'un quart de la population vit en dessous du seuil de pauvreté et que près de la moitié est plongée "dans la précarité".

- prendre des mesures pour garantir le respect des droits de l'Homme,
 conformément au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, au
 Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, à la
 Convention contre la torture, à la Convention pour l'élimination de toues les
 formes de discrimination à l'égard des femmes, à la Convention pour
 l'élimination de la discrimination raciale et à la Convention relative aux droits
 de l'enfant,
 - mettre en œuvre les recommandations formulées par les organes de
 supervision de ces conventions . 
 - répondre positivement à tous les mécanismes de la Commission des droits
 de l'Homme qui ont demandé l'autorisation de se rendre en Algérie, et
 d'inviter en outre la Rapporteuse spéciale de la Commission des droits de
 l'Homme sur le droit à l'éducation et le Rapporteur spécial sur le logement
 adéquat à se rendre en Algérie dans les plus brefs délais.
 - engager une politique de dialogue sur les droits de l'Homme, notamment
 avec les ONG internationales. Dans cet esprit, la FIDH renouvelle la
 demande qu'elle a adressée à trois reprises aux autorités algériennes au
 cours de l'année 2001, d'être de nouveau autorisée à se rendre dans le
 pays.

 - à inviter le plus rapidement possible et selon leurs " termes de référence "
 les rapporteurs spéciaux et groupe de travail qui lui adressé une demande
 de visite ;
 - à mettre en œuvre, dans les délais les plus brefs, les recommandations des
 comités des Nations unies à son égard ;


(Liberté 11.2) Trois hommes (Rabah Ghazal, Aïssa Tibaoui et Boudjemaâ Tibaoui) ont été condamnés à mort par contumace le 10 février par le tribunal d'Alger, pour appartenance à un groupe terrorisme armé et assassinat avec préméditation, commis en 1996.

(La Tribune 25.2) "La Tribune" annonce la création d'une ONG algérienne de "protection des droits de l'Homme et de protection de la culture de la citoyenneté", création qui serait formalisée le 28 février à Alger à l'initiative du député RND et chef de milices de la région de Chlef et d'Aïn Defla, Driss Zitoufi, qui reproche aux autres ONG de défense des droits de l'homme (et en particulier aux ONG internationales) d'opérer "par sélection". L'ONG de Zitoufi, dont "La Tribune" ne donne pas le nom exact, serait dirigée par neuf personnes, essentiellement des juristes, et présidée par l'avocat Ousmani Amine, pour qui l'Algérie doit se "remettre à niveau" dans le domaine de la culture des droits de l'Homme. La création de la nouvelle organisation se ferait en présence d'une vingtaine d'ambassadeurs et de représentants d'ONG internationales ("La Tribune" cite Amnesty International, Freedom House, Human Rights Watch, Médecins sans frontières, Avocats sans frontières), et de représentants du gouvernement (selon le quotidien : les ministres de l'Intérieur, des Affaires étrangères, de la Justice, de la Jeunesse et des sports et de la Solidarité nationale). L'organisation procéderait ensuite à la création de bureaux dans chaque wilaya.

(El Khabar, El Watan 28.2) Le professeur Ksantini, président de la nouvelle Commission nationale pour la promotion et la protection des droits de l'Homme, a appelé le 27 février, au forum du quotidien gouvernemental "El Moudjahid", à l'abolition de la peine de mort en Algérie, et a promis de trouver une solution au problème des "disparus", en signalant que 4670 cas de "disparitions forcées" sont répertoriés par sa commission, qui les a hérités de l'ONDH. Le président de l'instance (officielle, elle aussi) qui a succédé à l'Observatoire national des droits de l'homme a en outre reconnu l'existence de "dépassements", c'est-à-dire de violations des droits de l'homme, et a même admis que "l'Algérie est un pays où l'on torture, où il n'y a pas de droit", mais a tout de même repris de l'ancien président de l'ex-ONDH, Kamel Rezzag Bara, la dénonciation des ONG internationale de défense des droits humains, accusées de se faire les alliées des islamistes armés, et a attribué la mauvaise situation des droits de l'homme en Algérie "à la longue nuit coloniale et au terrorisme", faisant donc l'impasse sur les trente années séparant la fin de la première et le début du second.

(Jeune Indépendant 21.2) Objet régulier de mesures d'intimidation, et sous contrôle judiciaire depuis année à la suite d'une plainte déposée contre lui par l'ancien Maire et chef de milice de Relizane, El Hadj Ferguène, le responsable de Relizane de la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme, Mohammed Smaïn, a à nouveau été interpellé le 19 février par la gendarmerie, au motif d'incitation des habitants de Bendaoud à la protestation contre l'agression à l'arme à feu dont a été victime de la part du député RND Mokhtar Ben Aïssa un jeune habitant de la commune. Mohammed Smaïn assure n'avoir aucun lien avec la protestation des concitoyens de la victime, et être victime d'une campagne de harcèlement.

(El Khabar, Liberté, El Watan 25.2) Le tribunal de Relizane a condamné le 24 février le responsable de la ligue des droits de l'Homme de Relizane, Mohammed Smaïn (qui fera vraisemblablement appel de cette décision) à une année de prison et 5000 DA d'amende (et 30'000 DA de dommages intérêts) pour diffamation, insulte, mensonge et fausses déclarations, sur plainte de l'ancien Maire et chef de milice de Relizane, Mohammed Fergane, et de membres de sa milice. Cette condamnation renforce encore celle du 5 janvier, contre laquelle Mohammed Smaïn avait déjà fait appel, et qui était de deux mois de prison et 10'000 DA de dommages intérêts, pour des faits que Mohammed Smaïn nie.


Communiqué de l'observatoire des défenseurs des droits de l'homme aprés la condamnation de Mohamed Smail de la Ligue Algérienne des Droits de l'Homme.
Genève, Paris, 25 février 2002

ALGERIE : Condamnation arbitraire d'un défenseur des droits de l'Homme

Le 24 février, la Cour d'appel de Rélizane a condamné Mohamed Smaïn,
responsable de la section de Relizane de la Ligue algérienne pour la défense
des droits de l'Homme (LADDH), à une année de prison ferme, soit une peine
6 fois plus longue que celle prononcée en première instance, et à 210 000
dinnars d'amende (3200 euros) - presque cinq fois plus  qu'en première
instance.

Condamné pour diffamation le 5 janvier 2002 à 2 mois de prison ferme, 5000
dinnars d'amende et 10 000 dinnars de dommages et intérêts à verser à
chacun des neuf plaignants, M. Mohamed Smaïn, avait interjeté appel de
cette décision. M. Smaïn a déclaré à l'Observatoire (programme conjoint de
la FIDH et de l'OMCT), qui avait mandaté un observateur au procès en
première instance puis en appel, son intention de se pourvoir devant la Cour
suprême.

A l'origine de ce procès, se trouve une plainte déposée par Hadj Fergane,
ex- maire de Rélizane, ainsi que huit autres ex-membres d'une milice dite de
légitime défense. Cette plainte avait été introduite après que M. Smaïn ait
alerté la presse algérienne, le 3 février 2001, sur la découverte et
l'exhumation de charniers par les services de gendarmerie  et la milice de
Fergane.

L'Observatoire dénonce avec la plus grande fermeté la condamnation
arbitraire de M. Smaïn, qui vise à restreindre son action de protection des
droits de l'Homme et sanctionne l'exercice  par un défenseur des droits de
l'Homme de son droit à " promouvoir la protection et la réalisation des
droits de l'Homme et des libertés fondamentales ", conformément à la Déclaration
des Nations Unies sur les défenseurs des droits de l'Homme. Les activités
de M. Smaïn à Oran et Relizane en faveur des familles de disparus et son
action pour que la vérité soit faite sur les violations perpétrées en
Algérie sont reconnues au niveau international et national et lui valent d'être la cible
des autorités. Il a aidé plusieurs ONG internationales lors de leurs missions
d'enquête en Algérie courant 2000.

L'Observatoire saisit immédiatement la Représentante spéciale du Secrétaire
général des Nations Unies sur les défenseurs des droits de l'Homme.

L'Observatoire demande à la Commission des droits de l'Homme des Nations
Unies, dont la 58ème session s'ouvre à Genève le 18 mars, d'appeler
l'Algérie à se conformer à ses obligations internationales dans le domaine des droits
de l'Homme et d'accepter que le Rapporteur spécial sur les exécutions
extrajudiciaires, sommaires et arbitraires, le Rapporteur spécial contre la
torture et le Groupe de travail sur les disparitions forcées ou
involontaires se rendent en Algérie, comme ils ont demandé à le faire à plusieurs reprises sans jamais recevoir de réponse.

Informations complémentaires

De 1994 à 1998, deux maires, El Hadj Fergane, maire de Rélizane
surnommé " le shérif " et Hadj Abed, maire de Jdiouia, ont consituté une
milice composée de membres de leurs familles et d'anciens combattants de
la guerre de libération. Cette milice, que la population a surnommée " les
cagoulés " a été responsable durant des années de plusieurs dizaines
d'enlèvements, suivis de disparitions, d'extorsion de fonds et d'expéditions
punitives contre les familles réputées proches des membres du FIS ou des
groupes armés. En avril 1998, les deux maires ainsi que plusieurs autres
miliciens ont été arrêtés et relâchés trois jours après malgré leur
inculpation de crimes graves (enlèvements, assassinats et extorsions de fonds). Leur
procès ne s'est toujours pas tenu.

Le procès de Mohamed Smaïn est exemplaire du climat d'impunité qui
prévaut en Algérie, un pays qui demeure régit par le décret sur l'état
d'urgence du 9 février 1992. Alors que, selon les estimations les plus
basses, 7200 personnes au moins ont disparu en Algérie ces dix dernières années,
les familles de disparus et des défenseurs des droits de l'Homme comme
Mohamed Smaïn continuent de demander en vain la vérité et la justice sur le
sort de leurs proches. Non seulement les auteurs de violations des droits de
l'Homme - dont certains, comme Fergane et ses miliciens qui sont pourtant
connus de tous -  ne sont pas inquiétés, mais ce sont les défenseurs des
droits de l'Homme eux-mêmes, qui demandent que des enquêtes soient
diligentées afin d'identifier et de punir les responsables, qui se trouvent
poursuivis et condamnés à de lourdes peines par une justice aux ordres.

Pas plus que les disparitions forcées, les autres violations flagrantes,
massives et systématiques perpétrées ces dix dernières années -
arrestations arbitraires, détentions au secret dans des centres non
officiels, pratique généralisée de la torture et des mauvais traitements, exécutions
sommaires par des éléments des forces de sécurité ou des milices, non
respect des délais de garde à vue et de détention préventive, atteintes
graves au droit à un procès équitable, atteintes à la liberté d'association, de
manifestation et à la liberté de la presse - n'ont pas l'objet d'enquêtes
sérieuses. De même, les actes terroristes n'ont pas fait l'objet d'enquêtes
approfondies et les victimes du terrorisme n'ont pas été véritablement
prises en charge pour leur réhabilitation.

Ce procès a donné lieu à l'audition de nombreux témoins et victimes qui se
sont pour la première fois exprimés sur les violations des droits de l'Homme
- exécutions extrajudiciaires, sommaires et arbitraires, disparitions,
torture, pillages, etc. - perpétrées par Fergane et sa milice depuis 1993. De telle
sorte que, de facto, le procès est davantage apparu comme celui des
miliciens et des autorités dont elles avait le soutient, que comme celui de
M. Smaïn. Pour cette raison, l'Observatoire souligne que, en dépit du verdict
inique qui en est issu, ce procès a néanmoins constitué une étape sans
précédent dans la recherche de la vérité sur les atrocités perpétrées en
Algérie depuis près d'une décennie.

La condamnation de Mohamed Smaïn vient s'ajouter à toute une série
d'actes de harcèlement dont est il l'objet. Il avait été arrêté par la
police des frontières le 23 février 2001 à son arrivée à l'aéroport d'Oran alors qu'il
revenait d'un voyage à Paris, à l'occasion duquel il avait rencontré divers
responsables d'organisations internationales de défense des droits de l'Homme, parmi
lesquelles la Fédération internationale des ligues des droits de l'Homme
(FIDH), dont la LADDH est membre. Pendant son séjour en France, M.
Smaïn avait appris qu'un mandat d'arrêt avait été lancé contre lui. Remis en
liberté peu après, il avait toutefois été placé sous contrôle judiciaire et
privé de ses pièces d'identité, documents de voyage. Ces mesures constituent
des atteintes graves à sa liberté de mouvement et à l'exercice de ses
activités professionnelles. Son permis de conduire lui a été rendu tout
récemment mais, le 20 février, alors que, pour faire un plein d'essence, il
avait du dépasser d'un kilomètre environ le périmètre de la commune de
Rélizane, il a été interpellé par la gendarmerie et retenu plusieurs heures
pour un interrogatoire qui a donné lieu à un procès verbal, avant d'être
relâché.


(Quotidien d'Oran 27.2 / El Watan 28.2 / LAADH, Observatoire) La condamnation à une année de prison ferme du représentant de la Ligue algérienne de défense des droits de l'homme, Hadj Smaïn, a suscité l'indignation de la Ligue elle-même, mais également de plusieurs organisation de défense des droits de l'Homme, dont l'Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l'homme, programme commun de la FIDH et de l'Organisation mondiale contre la torture (OMCT), et même du président de la commission nationale algérienne, officielle (mais consultazive) de promotion et de protection des droits de l'homme (CNPPDH), Farouk Ksntini. Pour la LADDH, Mohammed Smaïn a été "condamné avant que le procès commence", et "en fonction des consignes données par le pouvoir", ce que la LADDH qualifie de "forfaiture". Pour Amnesty International, la condamnation de Hadj Smaïn illustre le prix fort que doivent payer en Algérie ceux qui se posent "des questions légitimes sur l'implication de l'Etat dans de sérieuses violations des droits humains". Amnesty rappelle que les crimes attribués à la milice de l'ancien maire de Relizane, Hadj Fergane (plaignant contre Smaïn), n'ont pas fait l'objet d'investigations, mais que ce sont "les hommes qui cherchent la justice en faveur des victimes silencieuses" de ces crimes qui sont condamnés.


COMMUNIQUÉ DE LA LIGUE ALGÉRIENNE DE DÉFENSE DES DROITS DE L'HOMME (LADDH)

La condamnation de Mohamed Smaïn, le 24/02/2001, responsable de la LADDH 
dans la wilaya de Relizane à un an de prison ferme, par la cour de justice 
de Relizane, alors que le tribunal l’avait condamné  le 05/01/2002 à deux 
mois de prison ferme, est attentatoire aux droits de la personne humaine, et 
porte gravement atteinte au droits, aux conventions et pactes internationaux 
relatifs aux droits de l’Homme ratifiés par l’Algérie.
Cet arrêt s’écarte de la lettre et de l’esprit de la constitution et du code 
pénal- il suffit que la raison d’Etat qui est le moment ou l’état déraisonne 
et perd la raison soit invoqué, pour que la justice se montre soumise aux 
injonctions du pouvoir- la cour de Relizane a été d’une grande sérénité avec 
Mohamed Smaïn, car ce que lui importait était de savoir ce qu’il est : 
défenseur des droits humains, et non ce qu’il a dit ou fait.
Cet arrêt qui ne doit rien au respect du droit, et n’a aucun rapport avec 
les faits reprochés, laisse l’impression pour ne pas dire la certitude que 
Mohamed Smaïn a été condamné avant que le procès ne commence.
Il y a dérive de la justice qui n’est pas sortie grandie  dans ce procès du 
fait que les juges n’ont pas jugé " en leur âme et conscience " mais en 
fonction des consignes données par le pouvoir.
Les juges de la cour de Relizane ont des réflexes et des comportements en 
harmonie avec le pouvoir qui les a désignés. Quand ceux qui bafouent les 
lois sont ceux qui sont chargés de la appliquer il y a forfaiture.
Quand une affaire comme celle de Mohamed Smaïn prend le contre pied de la 
volonté du pouvoir, il faut donner la justice qui transforme en délits, des 
faits politiques et sociaux... dans les pays démocratiques, comme des droits 
élémentaires des citoyens.
L’arbitraire au nom de la loi est dans ce procès, un élément fondamental  du 
jugement. Là où il n y a pas de magistrats  indépendants, il n y a que des 
délégués du pouvoir.
Il y a une intolérance envers toute pensée non conforme à l’idéologie du 
pouvoir, et une répression féroce de tous les comportements contraires à sa 
politique. Demander un procès équitable dans le cas de Mohamed Smaïn , sous 
l’état d’urgence, c’est pas selon l’expression politique consacrée " 
demander du lait à un bouc ".
C’est le temps des procès montés de toutes pièces, contre les journalistes 
et les militants des droits de l’Homme. Quand les juges obéissent aux 
orientations et aux instructions du pouvoir, les plateaux de la balance, 
symbole de la justice disparaissent pour laisser place au fléau.
La justice est entrée dans un dévoiement qui consiste à déclarer coupables 
des innocents et d’absoudre les criminels.
Ce n’est pas quand on fait l’histoire qu’on l’écrit. Elle sera écrite plus 
tard et chacun recevra sa part de volée de bois vert, la justice la 
première.
La justice est mise en délibéré, et le jugement serein mais ferme sera rendu 
après le retour à la paix civile, au fonctionnement régulier des 
institutions, et à la mise en oeuvre d’un état de droit.


(La Tribune, Le Matin, Liberté 4.3) Le représentant à Relizane de la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme (LADDH), Mohammed Smaïn, a annoncé qu'il allait porter plainte contre le commandant de la gendarmerie de Relizane pour menaces contre sa personne. La LADDH a annoncé qu'elle se constituerait partie civile pour le procès. Le président de la LADDH, Ali Yahia Abdennour, a situé l'affaire dans le contexte de "l'impunité dont continuent de bénéficier ceux qui commettent des crimes". Mohammed Smaïn a été condamné le 24 février a un an de prison pour diffamation à l'encontre de l'ancien Maire et chef de milice local, Hadj Ferguène. Mohammed Smaïn avait fait état de l'existence de charniers dans la région (près de Hmadna, Jdioui (Djedioua), Zemoura, Knanada, Sidi M'hammed Benaouda et Azrou), charniers dont il affirme avoir filmé les sites, les films lui étant ensuite confisqués par la gendarmerie -qu'il accuse également d'avoir fait, ou de l'avoir tenté, déplacer les corps pour les ensevelir dans d'autres lieux, encore secrets. Le représentant de la LADDH a cependant précisé que ni la responsabilité de celle-ci, ni celle des policiers ou des services de sécurités n'était engagée dans les exécutions sommaires (de 97 personnes) et les enlèvements (200 "disparus" ont été enregistrés dans la wilaya), dont il accuse la milice de Hadj Fergane, dont les membres se seraient déguisés en militaires. Par contre, il accuse le colonel Abdelfatah, chef du secteur militaire, et le responsable de la Sécurité militaire (DRS), Saïdi Moustafa, d'avoir couvert ces exactions. Le président de la LAADH relève que Mohammed Smaïn a été condamné sur la base de curieux aveux de "repentis" des GIA, qui ont donc pu, sous la protection des services spéciaux (DRS) avouer des meurtres en plein tribunal sans être inquiétés, alors que Mohammed Smaïn, lui, a été condamné à un an de prison. Hadj Smaïn a réclamé une confrontation avec Hadj Fergane devant la presse nationale, sur les faits. L'Observatoire international des défenseurs des droits de l'Homme a saisi le secrétaire général de l'ONU Kofi Annan, et la Haut Commissaire aux droits de l'Homme Mary Robinson, de l'affaire des charniers de Relizane et de la condamnation de Mohamed Smaïn.

(Corr) Un Comité de soutien au responsable de Relizane de la Ligue algérienne de défense des droits de l'homme a été formé. Le comité salue son courage de défenseur des droits de l'Homme et se tient à ses cotés pour obtenir sa relaxe et sa réhabilitation. Le vrai procès de RELIZANE est celui des charniers, de l'établissement de leur réalité et du jugement des vrais coupables et de leurs commanditaires.


(El Watan 3.3 / Le Matin, El Watan 4.3) Les représentants des organisations de familles de victimes du terrorisme devaient remettre le 2 mars au président de l'Assemblée nationale une plate-forme de revendication, appuyée par un sit-in devant l'Assemblée le 3 mars. Les associations revendiquent un statut particulier pour les victimes du terrorisme, la reconnaissance des victimes des groupes armés en tant que "martyrs" (au même titre que les combattants de la lutte pour l'indépendance), la prise en charge morale et matérielle des femmes victimes de viols et la prise en charge des orphelins. L'Organisation nationale des victimes du terrorisme (ONVT) revendique également un statut pour les membres des milices locales ("Patriotes" et "Groupes de légitime défense"). Le sit in du 3 mars a été marqué par des troubles, la police empêchant par la force quelques dizaines de participants de se diriger vers le siège de l'APN pour y remettre la plate-forme de revendication. Les représentants de l'ONVT, qui souhaitaient rencontrer le Premier ministre Benflis ou le président de l'Assemblée nationale se le sont vu refuser. Ils ont finalement rencontré deux vice-présidents de l'Assemblée et le président de la Commission des affaires sociales, qui s'est engagé à transmettre au Premier ministre la plate-forme de revendication.

A Blida, ce sont des familles de "disparus" qui ont manifesté devant le tribunal et ont été malmenées par les gendarmes alors qu'elles demandaient à être reçues par le procureur, deux mois après que celui-ci leur ait promis de répondre à leurs doléances dans un délai d'un mois.

En 1999, un projet de statut de victime du terrorisme avait été élaboré. Il répondait sur l'essentiel aux revendications des familles (reconnaissance de la qualité de martyr aux victimes des groupes armés, reconnaissance de la qualité de victimes du terrorisme aux autres victimes, promulgation d'un statut particulier pour les minices, protection sociale pour les ayant-droit des victimes), mais ce projet n'a jamais été adopté. Les familles demandent éamitenant qu'il le soit.

(Jeune Indépendant 4.3) Dans une conférence de presse tenue le 3 mars, le président de la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme (LADDH), Ali Yahia Abdennour, a dénoncé l'impunité des crimes commis en Algérie depuis des années, la responsabilités des corps de l'Etat dans certaines exactions et l'assujetissement de la justice au pouvoir en plane. "Le terrorisme d'Etat existe. Il a torturé et tué, tout comme les groupes terroristes islamiques et les groupes occultes dits commandos de la mort", a déclaré le président de la LADDH, qui s'est interrogé sur la volonté (ou l'absence de volonté) de poursuivre les auteurs des tueries, l'exemple de la condamnation du représentant de la LAADH a Relizane, Mohammed Smaïn, "coupable" d'avoir dénoncé l'existence de charniers recueillant les corps des victimes d'enlèvements et d'exécutions sommaires commis par les milices, illustrant le fait que l'on condamne non les responsables des crimes, mais ceux qui les dénoncent.

(Quotidien d'Oran 10.3) La Fédération internationale des ligues des droits de l'Homme (FIDH) a adressé un mémorandum à l'occasion de la 58ème session de la Commission des droits de l'Homme de l'ONU (Genève, 18 mars-26 avril), mémorandum dans lequel elle consacre deux paragraphes à la situation algérienne, notant que "la violence politique continue" et qu'en dehors des grandes villes, "chaque jour des civils, des militaires, des agents de divers corps de sécurité sont assassinés dans des conditions atroces", et affirmant que "la lutte contre le terrorisme et pour la sécurité des Algériens relèvent non seulement du droit mais du devoir de l'Etat, sans pour autant autoriser celui-ci à s'affranchir du respect des obligations internationales relatives à la protection des droits de l'homme auxquelles il a souscrit". La LIDH constate enfin que "dans un climat où l'impunité est la règle, non seulement les auteurs des violations des droits de l'Homme ne sont pas inquiétés, mais ce sont les défenseurs des droits de l'homme eux-mêmes qui demandent que des enquêtes soient diligentées afin d'identifier et de punir les responsables de violations, qui se trouvent poursuivis par la justice", à l'exemple du responsable de Relizane de la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme, Mohammed Smaïn.

(Le Matin 10.3 / Jeune Indépendant 11.3) Dans son rapport annuel sur l'état des droits de l'Homme dans le monde (sauf aux USA), le Département d'Etat américain estime qu'en Algérie la situation des droits humains "demeure faible" et que "des problèmes sérieux persistent". Le rapport constate une diminution du nombre des victimes tuées (de l'ordre de 35 % en un an, selon lui), qu'il évalue à 1980 en 2001, ou disparues, ainsi que de celui des exécutions extrajudiciaires (- 19 % par rapport à 2000, selon lui), mais impute la majeure partie, sinon la totalité, des "disparitions" recensées aux forces de sécurité, constate la poursuite de la pratique de la torture, et attribue à la peur de représailles le faible nombre de dénonciations publiques et de procédures judiaires de la part des victimes des violations des droits de l'homme ou de leurs proches. Selon le rapport, "les autorités ne respectent pas toujours les droits des citoyens à la défense et à l'indépendance du système judiciaire", et tentent de réduire la liberté de la presse, mais sans pour autant qu'il y ait censure "déclarée" de l'information. Le rapport relève également les entraves à l'organisation de manifestations publiques et le refus de légalisation de partis politiques (comme le Front démocratique) et de syndicats autonomes. S'agissant des "événements" de Kabylie, le rapport américain critique l'usage d'armes à feu contre les manifestants.

Les critiques américaines ont fait réagir le ministre algérien de la Justice, Ahmed Ouyahia, qui considère que "l'approche américaine est simpliste"

(Corr 18.3) Le Collectif des familles de disparu(e)s en Algérie et SOSD disparus ont organisé le 18 mars un rassemblement devant la représentation des Nations Unies à Alger, et une délégation des familles de disparus devait remettre à l'Ambassadeur de l'ONU, Paolo Lomba, un memorandum sur les disparitions et une lettre demandant audience à la Haut Commissaire aux Droits de l'Homme Mary Robinson. Un important dispositif de police a dispersé le rassemblement, et l'un des responsables de SOS Disparus, Abderrahmane Khelil, a été interpellé et gardé par la police pendantplus de trois heures. Des mères de disparus ont également été arrêtées, parfois violemment, et certaines d'entre elles insultées. L'Ambassadeur de l'ONU a du se déplacer personnellement au siège de SOS-disparus pour pouvoir prendre des nouvelles des personnes arrêtées.

(CCFIS 25.3) La Commission des droits de l'Homme de l'ONU, dont la session s'est ouverte à Genève, a été saisie d'une recommandation concernant l'Algérie, et plus précisément la détention des leaders du FIS Abassi Madani et Ali Benhadj. Le groupe de travail de la Commission considère que l'arrestation, le jugement et l'emprisonnement des président et vice-président du FIS sont arbitraires et contraires aux principes de la déclaration universelle des droits de l'Homme et du Pacte international relatif aux droits civils et politique (ratifié par l'Algérie).

Pour le groupe de travail, "la privation de liberté (d'Abassi Madani), tant celle résultant de son arrestation du 30 juin 1991 et sa condamnation par jugement du tribunal militaire du 15 juillet 1992, que celle résultant de la mesure d'assignation à domicile du 1er septembre 1997, ont un caractère arbitraire", car le leader du FIS " a été arrêté arbitrairement pour l'exercice de ses droits politiques". Son inculpation d'atteinte à la sûreté de l'État a aussi, pour le groupe de travail, "un caractère strictement politique, aucun fait précis pouvant recevoir une qualification pénale n'a pu être établi par l'accusation". Par ailleurs, la mesure d'assignation à domicile prise par les autorités contre Abassi Madani depuis le 1er septembre 1997, après qu'il ait accordé un entretien à un journaliste étranger, "n'a aucun fondement juridique dans la loi interne algérienne". Les raisons de cette assignation à domicile étant les mêmes que celles ayant motivé son arrestation et sa condamnation par le tribunal militaire, c'est-à-dire "le libre exercice de ses droits politiques", cette assignation est considérée par le groupe de travail comme aussi arbitraire que cette arrestation et cette condamnation.

Quant à Ali Benhadj, le groupe de travail relève qu'il a été condamné (le 15 juillet 1992) à 12 ans de réclusion criminelle par un tribunal militaire en son absence (il avait été expulsé du procès), et que depuis lors, il a été "soumis à divers régimes de détention et traité d'une manière différente selon qu'il ait été considéré par les autorités comme un interlocuteur politique ou comme un opposant". Le groupe de travail ajoute quÂli Benhadj aurait été l'objet de "brutalités physiques à plusieurs reprises" pendant sa détention dans la prison militaire de Blida entre juillet 1991 et avril 1993, qu'il aurait été . Il a été "détenu au secret dans une cellule exiguë sans aération ni possibilité d'hygiène" dans une caserne militaire du sud saharien entre janvier 1995 et l'automne 1997 et que la "dégradation de son état général de santé" fait craindre sa famille pour sa vie. Pour la groupe de travail, "Ali Benhadj a été condamné par un tribunal manifestement incompétent qui ne pouvait être ni équitable ni impartial, puisqu'il relevait du Ministère de la défense nationale et non de celui de la justice, et que les magistrats le composant étaient désignés par le Ministre de la défense" et "son procès s'est déroulé en son absence, sans public, et n'a pas été équitable".

Pour sa part, le gouvernement algérien affirme que dans le cas d'Abassi Madani comme dans celui d'Ali Benhadj, «(...) la législation algérienne a été correctement appliquée sur la base d'accusations précises et étayées, la procédure requise a été engagée et scrupuleusement suivie et l'affaire a été présentée aux autorités judiciaires compétentes qui ont rendu un verdict indépendant et impartial conformément à la loi». Le gouvernement algérien assure que «( ...) tout au long du processus, les personnes mentionnées ont été en mesure d'exercer tous les droits et les garanties qui leur sont reconnus par la loi. À cet égard, elles ont pu choisir leur propre conseil (... ) et ont exercé librement leur droit de faire appel du jugement prononcé par la juridiction du fond" (ces deux appels ayant été rejetés). Le gouvernement algérien n'a fait aucune observation à propos du constat du groupe de travail selon lequel "Abassi Madani et Ali Benhadj, qui sont respectivement président et vice-président d'un parti d'opposition, ont été poursuivis et condamnés en raison de leurs opinions et convictions politiques".

Pour le Groupe de travail, "la privation de liberté de M. Abassi Madani et de M. Ali Benhadj est arbitraire car elle va à l'encontre des articles 9 et 10 de la Déclaration universelle des droits de l'homme et des articles 9 et 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques". Le Groupe de travail prie donc le gouvernement algérien "de prendre les mesures nécessaires pour remédier à la situation et la mettre en conformité avec les normes et principes énoncés dans la Déclaration universelle des droits de l'homme et le Pacte international relatif aux droits civils et politiques", ce qui logiquement devrait entraîner la libération d'Ali Benhadj et la fin de la résidence surveillée d'Abassi Madani, et le cas échéant la réouverture d'un éventuel procès, mais conforme celui-là aux règles du droit international (et devant un tribunal civil).

Pour le Conseil de coordination du FIS, qui se félicite évidemment de la prise de position de l'instance internationale, celle-ci "ne laisse planer aucun doute sur l'aspect arbitraire et injustifié de la détention des deux leaders historiques du FIS (qui) sont tout simplement otages d'une junte qui s'est faite championne des violations les plus graves de la personne humaine".

(AFP 3.4 / La Tribune, El Watan, Le Matin 4.4) Au moins vingt détenus de la prison de Chelghoum-Laïd (w. Mila) sont morts et au moins 22 ont été blessés, dont neuf grièvement, le 2 avril dans l'incendie d'une cellule surpeuplée (42 détenus, tous en préventive, pour 15 places). 'incendie a été allumé par un détenu accusé d'homicide volontaire, dans un "acte de désespoir". La plupart des morts ont été asphyxiés, certains brûlés vifs. La prison compte 115 places de détention, mais "abrite" 233 détenus. Des proches de victimes ont accusé les gardiens de la prison d'avoir intentionnellement laissé périr les victimes; pour d'autres, les gardiens ne sont pas intervenus par crainte d'une mutinerie. Le sous préfet a expliqué l'absence c'intervention des gardiens par le fait qu'ils n'avaient "pas le droit d'ouvrir la cellule" en l'absence du directeur. Le ministre de la Justice, Ahmed Ouyahia, a reconnu la gravité de la situation carcérale en Algérie : toutes les prisons sont surchargées, et le pays compte, officiellement, 42'000 détenus, dont 28'000 prévenus. Pout la Ligue algérienne des droits de l'Homme (LADH), le drame est dû aux conditions incappectable dans lesquelles vivent les détenus dans l'ensemble du pays. La LADH appelle à une enquête approfondie, à la désignation d'une commission ministérielle avec des représentants d'ONG, et à "l'humanisation" des conditions de détention.

(Observatoire 4.4) Un militant de la Ligue algérienne pour la défense des droits de l'Homme (LADDH) de Labiod Sid Echikh (w. El-Bayadh), Larbi Tahar, condamné le 23 mars à six mois de prison pour "incitation à rassemblement illégal et résistance aux forces de l'ordre", a entamé une grève de la faim dans sa cellule. Il a été hospitalisé, d'abord à El Bayadh, puis à Saïda, le 29 mars, mais sa famille n'a pas été autorisée à lui rendre visite. Il avait été arrêté une première fois, avec treize autres personnes, après une manifestation dénonçant les conditions de vie des habitants de Labiod Sid Echikh, les 4 et 5 octobre 2001. Un manifestant avait été tué par un policier lors de cette manifestation, Larbi Tahar a été arrêté une seconde fois le 17 novembre alors qu'il faisait partie d'une délégation protestant auprès du chef de daïra (sous-préfet) contre les conditions de vie de la population. Victimes de mauvais traitement, insultés, privés de nourriture, d'eau, d'accès aux toilettes, les délégués ont finalement été relâchés, sauf Larbi Tahar, gardé depuis en détention. Son procès devrait avoir lieu le 30 avril devant la Cour d'appel de Saïda. L'Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l'homme proteste contre le harcèlement dont Larbi Tahar est victime.

(Liberté 7.4) Le président Bouteflika a invité le 6 avril la Commission nationale de protection et de protection des droits de l'homme (CNPPDH, instance officielle) à élaborer un "plan national des droits de l'homme" complétant les travaux des commissions de réforme de la justice, de l'éducation et de l'Etat. Dans une lettre adressée à la CNPPDH, le président lui a suggéré un "véritable audit" de la législation nationale algérienne, sous l'angle de sa conformité avec les normes du droit international auxquelles l'Algérie a souscrit. La Commission est invitée à présenter un rapport final avant le 31 mars 2003, et un rapport d'étape dans les six mois.

(El Khabar 8.4) Une délégation de la Cour Suprême américaine est arrivée à Alger le 7 avril, pour une visite de dix jours, lors de laquelle la délégation aura des discussions avec le Conseil constitutionnel algérien, notamment en ce qui concerne la situation et la défense des droits de l'Homme en Algérie.

(Le Matin 8.4) 300 familes de "disparus" ont manifesté le 7 avril devant le tribunal militaire de Blida pour dénoncer l'absence de solution au problème des "disparus", et exiger une intervention urgente du président Bouteflika pour "une solution politique courageuse".


LADDH
Ligue Algérienne de Défense des Droits de l'Homme

Déclaration liminaire au Rapport sur les évènements de Kabylie

          Les informations qui nous sont parvenues ces quinze derniers
          jours font état d'une situation d'émeute et de répression
          féroce de la part des forces de l'ordre sur des populations
          civiles non armées.
          En effet, des affrontements entre manifestants et forces de
          l'ordre dans les wilayates d'Ain Defla, de Saida, de Béjaïa, de
          Bouira, de Sétif et de Tizi-Ouzou ont fait, en quinze jours, six
          morts, dont deux adolescents de moins de 18 ans, et des
          dizaines de blessés dont certains ont été atteints par balles
          réelles et seraient toujours dans un état grave. 
          Les forces de l'ordre ont opéré des expéditions punitives,
          saccageant commerces et voitures de particuliers, viols de
          domiciles suivis d'actes de représailles sur des passants,
          utilisant des armes blanches pour réprimer des jeunes,
          plongeant ainsi des villages entiers dans une sorte d'Etat
          d'exception et de couvre feu où tout citoyen qui se risque de
          nuit comme de jour dans les rues, est passé à tabac puis
          arrêté. 

          En quinze jours d'affrontements, plus de deux cents
          arrestations ont été opérées dont certaines sont ciblées et
          arbitraires. Des arrestations ont été suivies de condamnations
          à des peines allant de 4 mois à 1 ans d'emprisonnements
          ferme. Contre certains d'entre eux, dix-huit chefs
          d'inculpations ont été retenus. Cette chasse aux manifestants
          s'est déroulée sous forme de rafles nocturnes avec des
          hommes armés et cagoulés à bord de voitures banalisées. La
          situation risque de s'aggraver d'autant plus que 400 mandats
          d'arrêts auraient été lancés contre des animateurs des "
          comités citoyens " des différentes localités de Tizi-Ouzou,
          Béjaïa, Bouira et Sétif.

          La révolte dure maintenant depuis un an et elle est loin d'être
          cantonné à la seule Kabylie puisqu'elle a touché plus d'une
          vingtaine de départements à travers l'Algérie. Ces
          manifestations de rue ont fait à ce jour plus de 80 exécutions
          arbitraires, plus de 5000 blessés dont 2000 handicapés et des
          milliers d'arrestations suivies de mauvais traitements, tortures
          et détentions arbitraires. Cette situation qui touche toutes les
          franges de la société et notamment les plus jeunes est une
          conséquence directe de l'absence d'Etat de droit et de " la mal
          gouvernance " de l'Etat Algérien. 
          Ces mouvements de protestations de rue sont aussi une
          conséquence du climat d'impunité qui a prévalu ces dernières
          années en Algérie. À ce jour, les auteurs de violations des
          droits de l'Homme, notamment, les gendarmes, policiers,
          GLD et militaires qui sont clairement identifiés comme étant
          responsables d'exécutions, de tortures, de vols et de
          destructions de bien privés, depuis avril 2001 ne sont pas
          inquiétés. Ce sont plutôt des citoyens qui, aujourd'hui, se
          retrouvent arrêtés et poursuivis par la justice. Ces faits
          risquent d'accentuer encore plus la fracture existante entre la
          population et les autorités et ne peuvent qu'encourager de
          nouvelles violences et de nouveaux affrontements entre les
          citoyens et les forces de l'ordre qui utilisent une violence, qui
          n'est ni strictement nécessaire ni conforme au principe de
          proportionnalité, risque d'entraîner d'autres mort sur les
          populations civiles. 

          De par ces violations au droit à la vie, le pouvoir algérien a
          violé les articles 2 et 3 de la Déclaration universelle des droits
          de l'homme, les articles 2, 4, 6 et 26 du Pacte international
          relatif aux droits civils et politiques et n'a pas respecté le droit
          à la vie des personnes âgées de moins de 18 ans qu'on
          retrouve expressément énoncé dans l'article 6 de la
          Convention relative aux droits de l'enfant.
          De plus, le Pacte international relatif aux droits civils et
          politiques, au paragraphe 2 de son article 4, et le principe 8
          des principes de base sur le recours à la force et l'utilisation
          des armes à feu par les responsables de l'application des lois,
          adopté par le Huitième Congrès des Nations Unies pour la
          prévention du crime et le traitement des délinquants, tenu à la
          Havane (Cuba) du 27 août au 7 septembre 1990, dispose
          qu'aucune circonstance exceptionnelle, comme l'instabilité de
          la situation politique intérieure ou tout autre état d'urgence, ne
          peut être invoquée pour justifier une quelconque dérogation
          au droit à la vie et à la sécurité de la personne. La
          reconnaissance générale du droit à la vie de chacun dans les
          instruments internationaux susmentionnés constitue la base de
          l'action du Rapporteur spécial sur les exécutions
          extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires .

          La Ligue Algérienne de Défense des Droits de l'Homme
          (LADDH) lance un appel urgent au rapporteur spécial sur les
          exécutions extrajudiciaires sommaires ou arbitraires pour que
          celui-ci intervienne, selon son mandat, en urgence et prenne
          toutes les mesures nécessaires en vue de prévenir de
          nouvelles violations du droit à la vie.

          La LADDH appelle aussi, la Commission des droits de
          l'homme à : 

          · Faire en sorte que le Rapporteur spécial assure le suivi les
          82 exécutions arbitraires déjà transmises par la LADDH en
          novembre 2001 ainsi que sur les 7 dernières, selon les termes
          de la résolution de la Commission des droits de l'Homme
          1996/76 

          · Soutenir les demandes de visites en Algérie des Rapporteurs
          spéciaux sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou
          arbitraires, le Rapporteur spécial sur les détentions arbitraires,
          le Rapporteur spécial sur la torture et le groupe de travail sur
          les disparitions forcées.

          · Faire en sorte que le gouvernement algérien cesse de
          réprimer les populations civiles, respecte ses engagements
          internationaux, notamment la Déclaration universelle des
          droits de l'homme, le Pacte International relatif aux droits
          civils et politiques, le Pacte International relatif aux droits
          économiques, sociaux et culturels, la Convention relative aux
          droits de l'enfant, et la Convention contre la torture et autres
          peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

          Alger, le 02 avril 2002


(Le Matin 11.4) A l'initiative du Rassemblement action jeunesses (RAJ), une réunion a eu lieu le 10 avril pour la création d'un comité ou d'un collectif national contre la répression et pour les libertés démocratiques. Plusieurs associations féminines, mouvements de défense des droits de l'homme, syndicats autonomes et partis politiques ont répondu à l'appel de RAJ. "Les arrestations, les condamnations et l'emprisonnement de centaines de jeunes ne peuvent plus avoir lieu dans l'indifférence totale", a déclaré le président de RAJ, Hakim Addad. Le Collectif, qui relancera aux partis politiques, syndicats et aux "simples citoyens" un appel à le rejoindre, sera créé formellement dans les prochains jours.

(Le Matin 11.4) La Fédération internationale des ligues des droits de l'Homme est intervenue le 9 avril lors de la 58ème session de la Commission des droits de l'Homme de l'Onu, à Genève, pour dénoncer la répression des manifestations en Algérie. La FIDH a donné lecture du rapport de la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme (LAADH) et a remis ce rapport au président de la Commission. La FIDH a appelé la Commission à faire accepter par l'Algérie la visite du rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires. Dans son rapport, la LADDH dénonce la reprise de la répression en Kabylie, répression qui a ajouté, en quinze jours, sept morts et des dizaines de blessés au bilan des "événements" de Kabylie -"événenements" qui pour la LAADH sont une "conséquence du climat d'impunité qui a prévalu ces dernières années en Algérie". La LAADH accuse les forces de sécurité de se livrer à des expéditions punitives contre la population, de saccager commerces et voitures particulières, de violer les domiciles privés et de se livrer à des représailles sur des passants.

Communiqué de la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme (LADDH) et de la Fédération Internationale des ligues des droits de l'Homme (FIDH)

Alger - Paris, le 09 avril 2002

La Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme (LADDH, affiliée de la FIDH) vient de rendre public un rapport sur la répression qui se poursuit depuis un an, en Algérie ("Répression du printemps noir, avril 2001-avril 2002"). La FIDH est intervenue aujourd'hui devant la Commission des droits de l'Homme pour alerter ses 53 Etats membres, de cette répression décrite par ce rapport. A la fin de son intervention orale sur l'Algérie, lors de la 58ème Commission des droits de l'Homme de l'ONU, la FIDH a remis ce rapport au président de la Commission ainsi qu'au Rapporteur spécial de l'ONU sur les exécutions extrajudiciaires.

Extrait de l'intervention orale :

"Monsieur le Président,

La FIDH appelle la Commission des droits de l'Homme à réagir avec la plus grande fermeté à la dégradation dramatique de la situation en Algérie où, en 15 jours, en Kabylie, 7 personnes ont trouvé la mort - certaines par arme blanche - portant à 90 le nombre de victimes depuis un an, dont certaines exécutées sommairement. 350 personnes au moins ont été arrêtées arbitrairement, dont une vingtaine d'adolescents. La FIDH appelle la Commission à demander à l'Algérie d'accepter les demandes de visites qui lui ont été adressées à plusieurs reprises par le Rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires, mais aussi par le Groupe de travail sur les disparitions forcées, pour enquêter sur les 7200 cas de disparitions recensés à ce jour par les associations - 4880 cas selon les autorités."

Déclaration de Me Ali Yahia Abdennour, président de la LADDH, 02/04/2002

(version actualisée au 09/04/02)

Les informations qui nous sont parvenues ces quinze derniers jours font état d'une situation d'émeute et de répression féroce de la part des forces de l'ordre sur des populations civiles non armées. En effet, des affrontements entre manifestants et forces de l'ordre dans les wilayates d'Ain Defla, de Saida, de Béjaïa, de Bouira, de Sétif et de Tizi-Ouzou ont fait, en quinze jours, sept morts, dont trois adolescents de moins de 18 ans, et des dizaines de blessés dont certains ont été atteints par balles réelles et seraient toujours dans un état grave. Les forces de l'ordre ont opéré des expéditions punitives, saccageant commerces et voitures de particuliers, viols de domiciles suivis d'actes de représailles sur des passants, utilisant des armes blanches pour réprimer des jeunes, plongeant ainsi des villages entiers dans une sorte d'Etat d'exception et de couvre feu où tout citoyen qui se risque de nuit comme de jour dans les rues, est passé à tabac puis arrêté.

En quinze jours d'affrontements, plus de deux cents arrestations ont été opérées dont certaines sont ciblées et arbitraires. Des arrestations ont été suivies de condamnations à des peines allant de 4 mois à 2 ans d'emprisonnement ferme. Contre certains d'entre eux, dix-huit chefs d'inculpations ont été retenus. Cette chasse aux manifestants s'est déroulée sous forme de rafles nocturnes avec des hommes armés et cagoulés à bord de voitures banalisées. La situation risque de s'aggraver d'autant plus que 400 mandats d'arrêts auraient été lancés contre des animateurs des " comités de villages " des différentes localités de Tizi-Ouzou, Béjaïa, Bouira et Sétif.

La révolte dure maintenant depuis un an et elle est loin d'être cantonné à la seule Kabylie puisqu'elle a touché plus d'une vingtaine de départements à travers l'Algérie. Ces manifestations de rue ont fait à ce jour plus de 90 morts, dont de nombreuses victimes d'exécutions arbitraires, plus de 5000 blessés dont 200 handicapés et des milliers d'arrestations suivies de mauvais traitements, tortures et détentions arbitraires. Cette situation qui touche toutes les franges de la société et notamment les plus jeunes est une conséquence directe de l'absence d'Etat de droit et de " la mal gouvernance " de l'Etat Algérien. Ces mouvements de protestations de rue sont aussi une conséquence du climat d'impunité qui a prévalu ces dernières années en Algérie. À ce jour, les auteurs de violations des droits de l'Homme, notamment, les gendarmes, policiers, Gardes communaux et militaires qui sont clairement identifiés comme étant responsables d'exécutions, de tortures, de vols et de destructions de bien privés, depuis avril 2001 ne sont pas inquiétés. Ce sont plutôt des citoyens qui, aujourd'hui, se retrouvent arrêtés et poursuivis par la justice.

Ces faits risquent d'accentuer encore plus la fracture existante entre la population et les autorités et ne peuvent qu'encourager de nouvelles violences et de nouveaux affrontements entre les citoyens et les forces de l'ordre qui utilisent une violence, qui n'est ni strictement nécessaire ni conforme au principe de proportionnalité, risque d'entraîner d'autres mort sur les populations civiles.

De par ces violations au droit à la vie, le pouvoir algérien a violé les articles 2 et 3 de la Déclaration universelle des droits de l'homme, les articles 2, 4, 6 et 26 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et n'a pas respecté le droit à la vie des personnes âgées de moins de 18 ans qu'on retrouve expressément énoncé dans l'article 6 de la Convention relative aux droits de l'enfant. De plus, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, au paragraphe 2 de son article 4, et le principe 8 des principes de base sur le recours à la force et l'utilisation des armes à feu par les responsables de l'application des lois, adopté par le Huitième Congrès des Nations Unies pour la prévention du crime et le traitement des délinquants, tenu à la Havane (Cuba) du 27 août au 7 septembre 1990, dispose qu'aucune circonstance exceptionnelle, comme l'instabilité de la situation politique intérieure ou tout autre état d'urgence, ne peut être invoquée pour justifier une quelconque dérogation au droit à la vie et à la sécurité de la personne. La reconnaissance générale du droit à la vie de chacun dans les instruments internationaux susmentionnés constitue la base de l'action du Rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires.

La LADDH lance un appel urgent au rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires sommaires ou arbitraires pour que celui-ci intervienne, selon son mandat, en urgence et prenne toutes les mesures nécessaires en vue de prévenir de nouvelles violations du droit à la vie.

La LADDH appelle aussi, la Commission des droits de l'Homme à :

Alger, le 02 avril 2002
P/LADDH
Président Ali Yahia Abdennour


(algeria-interface) Lors de la 58ème session de la Commission des droits de l'homme des Nations Unies, qui se tient à Genève jusqu'aui 28 avril, la représentante de la Fédération Internationale des ligues des droits de l'homme (FIDH) a invité la commission à "réagir avec une plus grande fermeté à la dégradation dramatique de la situation en Algérie", notamment en Kabylie, et à demander à l'Algerie "d'accepter les demandes de visites de la rapporteuse spéciale sur les exécutions extrajudiciaires et du Groupe de travail sur les "disparitions forcées".

La FIDH avait remis à la Commission et au rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires un rapport accablant sur les événements de Kabylie, rapport auquel le représentant de l'Algérie, l'ambassadeur Mohammed Salah Dembri, a répliqué en accusant la FIDH de participer à une "cabale" contre l'Algérie et d'être une ONG "colonialiste", qu'il a invités à "condamner la France pour ses violations des droits de l'homme en Corse ou en Bretagne". L'ambassadeur Dembri a réitéré contre la FIDH ses anciennes accusations de "lâcheté historique" et de "complicité" avec les tortionnaires français pendant la guerre d'indépendance. La représentante de la FIDH a qualifié cette réaction de "diversion", ne donnant aucune réponse sur le fond.

(AFP, CCFIS 17.4) Le fils de l'un des plaignants devant le justice française contre l'ancien ministre algérien de la Défense Khaled Nezzar, Ahmad Amine Boukezouha, âgé de 22 ans, a été enlevé à Alger dans la nuit du 16 au 17 avril, ont annoncé sa famille et ses avocats, qui accusent les services de sécurité de cet enlèvement. D'après les propos tenus par les auteurs de l'enlèvement et entendus par des témoins, celui-ci serait directement lié à la plainte déposée à Paris contre Nezzar par, notamment, Abdelouahab Boukezouha, requérant d'asile en France. Des témoins auraient entendu les auteurs de l'enlèvement lancer à Amine Boukezouha : "Tu paieras pour ton père". Dans un communiqué, les avocats des plaignants contre Nezzar, William Bourdon et Antoine Comte, appellent les autorités françaises à demander "sans délai" aux autorités algériennes de fournir "tout éclaircissement sur cet ellèvement et (la) mise en liberté immédiate" de celui qui en été l'objet. Les avocats estiment "extrêment vraisemblable que (les auteurs de l'enlèvement) soient intimement liés à l'appareil d'Etat algérien", et rappellent que les plaignants contre Nezzar ont déjà fait l'objet "de menaces et d'intimidations à Paris". Les avocats sont d'autant plus inquiets du sort dÂmine Boukezouha que "l'histoire récente en Algérie laisse craindre le pire sur l'issue de cette disparition". Pour les avocats, "cette nouvelle action, manifestement décidée et exécutés par Nezzar et ses complices, montre une fois encore le vrai visage de la junte militaire d'Alger".

(Liberté 21.4 / El Khabar, El Watan, Le Matin 22.4) Amnesty International a rappelé le 19 avril aux autorités algériennes leur devoir de respect des engagements pris avec l'Union européenne en matière de droits humains, ceci dans le cadre de l'accord d'association Algérie-UE. "Il est urgent que la clause relative aux droits humains, contenue dans l'accord, soit appliquée", estime Amnesty, qui considère que "si elle est prise au sérieux, cette clause peut permettre des avancées, tant du côté algérien que de la part des Etats membres de l'UE". Pour AI, "les mesures prises au cours des dix dernières années par les autorités algériennes en vue de combattre le terrorisme ont souvent violé de manière flagrante les normes internationales relatives aux droits humains", et "aucune leçon n'a été tirée du passé". Amnesty appelle à la création d'une "commission indépendante et impartiale" pour enquêter sur les homicides, les disparitions, la torture et les autres violations des droits humains, imputables tant aux forces de sécurité qu'aux groupes armés.


La Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme a quant à elle appelé l'UE à garantir le respect de l'article 2 du partenariat avec l'Algérie, article qui porte précisément sur le respect des droits de l'homme, et invite l'Europe à ne pas "sacrifier les droits humains en les dissociant du développement économique". La LADDH a dénoncé "l'impunité dont bénéficient les agents de sécurité" de l'Etat algérien. La gravité de la situation des droits de la personne humaine en Algérie est "exceptionnelle",dénonce la LADDH, pour qui "les violations graves des droits humains sont commises en connaissance de cause, couvertes et souvent ordonnées par les plus hautes autorités de l'Etat. La LAADH estime à 200'000 le nombre des morts de la "guerre sans image qui ne veut pas dire son nom", depuis dix ans. La torture est une pratique "courante" et une méthode d'emploi "systématique", et "la notion des droits humains telle qu'elle est perçue par le pouvoir ne progresse pas en direction des critères internationaux mais les font régresser", ajoute la LADDH, qui appelle les Etats européens à refuser l'extradition ou l'expulsion d'immigrants algériens, même en situation irrégulière, ayant fui l'Algérie pour échapper à la répression.

L'accord d'association entre l'UE et l'Algérie devrait être signé lors de la Vème Conférence ministérielle euro-méditerranéenne, qui s'ouvre à Valence le 22 avril.

Signature de l'accord d'association entre l'Union Européenne et l'Algérie :

Reporters sans Frontières exhorte l'UE à faire pression sur l'Algérie

          19 avril 2002 

          Dans une lettre adressée à Josep Piqué, ministre espagnol des
          Affaires étrangères qui signera, le 22 avril prochain à Valence,
          l'accord d'association entre l'Union européenne et l'Algérie,
          Reporters sans frontières (RSF) a rappelé que "cet accord
          comprend une clause
          (article 2) concernant les droits de l'homme". "Cette clause,
          qui constitue un élément essentiel de l'accord, a été, jusqu'à
          présent, ignorée dans le cadre par exemple des accords
          d'association entre l'Union européenne et la Tunisie, ou entre
          les instances de Bruxelles et Israël, deux pays récemment
          épinglés pour leurs violations des droits de l'homme." RSF a
          demandé au ministre "d'utiliser cet article comme un moyen
          de pression auprès des autorités algériennes" et "d'exhorter ce
          pays à prendre plusieurs engagements afin que la liberté de la
          presse soit garantie". A savoir, mettre un terme à toute forme
          de harcèlement à l'encontre des journalistes, mener et rendre
          publiques des enquêtes sur les brutalités policières à l'encontre
          des journalistes et des enquêtes sur les disparitions des
          journalistes, réviser les amendements du code pénal sur les
          affaires de presse et mettre fin à l'arbitraire relatif à
          l'autorisation de parution de nouveaux titres.

          Pour étayer ses inquiétudes, RSF a dressé un bilan de la
          situation de la liberté de la presse dans le pays. L'organisation
          a rappelé que, en mai 2001, le parlement algérien avait
          modifié le code pénal et alourdi les peines et amendes pour
          diffamation par voie de presse. Un durcissement de la
          législation qui s'est traduit par de nombreuses poursuites
          contre des journalistes de la presse privée.

          Durant les quatre premiers mois de l'année, de nombreux
          journalistes ont ainsi été entendus par la police judiciaire suite
          à des plaintes du ministère de la Défense pour "diffamation".
          Le 25 janvier 2002, le caricaturiste Ali Dilem a été entendu
          par la police judiciaire pour un dessin brocardant les
          militaires, publié en novembre 2001 dans le quotidien
          francophone Liberté. Le ministère de la Défense avait jugé le
          dessin "diffamatoire et attentatoire à la considération de hauts
          responsables de la hiérarchie militaire".

          Au cours des manifestations qui ont ponctué l'année écoulée,
          les journalistes ont également souvent été l'objet de menaces,
          de coups ou se sont vu confisquer du matériel. Le 13 mars
          2002, à Tizi Ouzou, alors qu'il couvrait des réactions de rue
          suite à un discours du président Bouteflika, Lotfi Bouchouchi,
          correspondant en Algérie de la chaîne de télévision française
          TF1, a été grièvement blessé par une grenade lacrymogène
          tirée du fusil d'un gendarme. Le journaliste a été touché alors
          qu'il n'était plus au milieu des manifestants et qu'il était
          clairement identifiable comme cameraman.

          Quant à l'hebdomadaire arabophone El Mouaad el Djazairi,
          dont le numéro daté du 26 novembre 2001 avait été retiré de
          la vente après distribution, il n'est plus reparu depuis. Par
          ailleurs, plusieurs entrepreneurs de presse n'ont pu obtenir
          d'autorisation pour éditer de nouveaux titres. La création,
          entre-temps, d'autres titres laisse penser qu'il existe une
          politique de deux poids deux mesures de la part des autorités
          qui procéderaient à une sélection.

          Il y a quatre ans, pratiquement jour pour jour, Aziz
          Bouabdallah, journaliste du quotidien arabophone El-Alam
          Es-Siyassi, disparaissait à Alger. Avant lui, quatre autres
          professionnels des médias, Mohamed Hassaïne, Kaddour
          Bousselham, Djamil Fahassi et Salah Kitouni, connaissaient le
          même sort. A l'issue d'une enquête menée sur le terrain en
          janvier 2001, Reporters sans frontières avait conclu que trois
          de ces disparitions, dont celle d'Aziz Bouabdallah, étaient
          l'¦uvre des services de sécurité. Depuis 1995, date de la
          première disparition, aucune enquête sérieuse n'a été menée
          par les autorités.


(Obs 25.4) L'Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l'Homme lance un appel en faveur de Larbi Tahar, militant de la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme de Labiod Sid Echikh (w. El Bayadh), condamné le 23 mars à six mois de prison pour "incitation au rassemblement illégal et résistance aux forces de l'ordre", et détenu depuis dans une cellule réservée aux condamnés à mort, et dans laquelle se trouvent plusieurs personnes accusées d'être impliquées dans des actes terroristes. L'Observatoire dénonce des conditions de détention "extrêmement précaires" et craint pour la sécurité et l'intégrité "physique et psychologique" de Larbi Tahar, qui a mené une grève de la faim l'ayant conduit à l'hôpital (où sa famille n'a pas été autorisée à lui rendre visite).

Larbi Tahar a été arrêté avec 13 autres personnes après une manifestation pacifique contre la dégradation de la situation économique et sociale, à Labiod Sidi Echikh, les 4 et 5 octobre 2001. Il a été le seul des manifestants arrêtés à avoir été placé sous contrôle judiciaire. Il a été arrêté une seconde fois le 17 novembre, alors qu'il faisait partie d'une délégation protestant auprès du chef de daïra (sous-préfet) contre les conditions de vie de la population.


(Corr 24.4 / Jeune Indépendant 28.4) L'Algérie et l'Union européenne ont signé le 22 avril leur accord d'association, sur fond de contestation au nom des droits de l'homme. Les organisations de familles de détenus libanais et de disparus algériens ont organisé, au moment de la signature de l'accord, plusieurs rencontres en Espagne (Valence, Barcelone) à l'occasion de la conférence ministérielle euro-méditerranéenne. Des représentants des familles de disparus algériens et libanais, avec l'aide d'avocats, de juristes, d'organisations de défense des droits de l'homme, ont établi un programme de travail et ont lancé un appel à l'Union européenne. Le 22 avril, un rassemblement de familles de disparus et de militants des droits de l'homme s'est déroulé à Valence pour exiger la vérité sur le sorr des disparus, la libération de ceux qui sont détenus et l'intervention de l'Union européenne.

Le président de la Commission contultative pour la promotion et la défense des droits de l'homme, Mohamed Ksentini, a proposé le 27 avril une indemnisation des familles des disparus : "L'Etat doit réparer s'il s'avère que des exécutions extrajudiciaires ont été commises". La Commission a constitué 4624 dossiers de disparus, mais son président n'a pas démenti le chiffre de 10'000 dossiers potentiels, avancé par certaines ONG. Les organisations de familles de disparus ont quant à elles constitué 7200 dossiers.

ALGÉRIE, LIBAN : LES FAMILLES DE "DISPARUS" INTERPELLENT L'UNION EUROPÉENNE

Les différents comités de familles de disparus en Algérie et au Liban, réunis en présence de la FIDH (Fédération Internationale des ligues des Droits de l'Homme), d'Amnesty International, de l'Association Catalane de défense des droits humains, et de SODEPAU, au Collegi d'Advocats de Barcelone, à l'invitation de la commission des droits de l'Homme du Barreau de Barcelone, ont adopté la déclaration suivante à destination de l'Union européenne.

L'Union européenne et l'Algérie doivent signer lundi 22 avril leur accord d'association. La signature d'un accord de la même nature avec le Liban doit également intervenir à très bref délai.

Les deux accords sont placés sous les auspices des droits de l'Homme. Pourtant tout laisse craindre que, loin de faire progresser les droits de la personne humaine, ils constituent pour l'Union européenne une véritable renonciation à les faire respecter.

Qu'on en juge:

Accord avec l'Algérie : malgré les déclarations des dirigeants algériens aucun progrès n'a été accompli sur la question des disparus. Non seulement leurs familles ne reçoivent aucune information mais leurs associations font l'objet d'intimidations, de harcèlement et de persécutions pour qu'elles cessent d'exiger vérité et justice.

Le sort de Mohammed Smaïn, représentant à Relizane de la Ligue Algérienne de Défense des Droits de l'Homme (LADDH), en témoigne tristement. Parce qu'il a osé dénoncer l'implication d'un responsable politique local (le maire de Relizane) dans une centaine de cas de disparitions, il a été condamné en appel début 2002 à un an d'emprisonnement pour "diffamation".

La Commission Nationale pour la Promotion et la Protection des droits de l'Homme, récemment mise en place par le Président algérien, apporte aux familles des disparus des réponses insatisfaisantes et strictement identiques à celles apportées par l'ONDH, qu'elle a remplacé.

Plus généralement, la conclusion de l'accord n'a pas été subordonnée à une quelconque amélioration de la situation des droits humains, au moins pour les violations clairement imputables aux autorités publiques ou para-publiques (Groupes de légitime défense, patriotes … ). L'impunité continue de régner. A celle des forces publiques s'est ajoutée, avec l'application laxiste de la loi de concorde civile, celle des membres de groupes armés ayant commis des crimes de sang.

Le texte même de l'accord peut être interprété comme légitimant l'action du pouvoir algérien. Dans une disposition sans précédent dans les accords d'association, les parties se voient en effet reconnaître le droit de prendre les mesures qu'elles jugent nécessaires en cas de "troubles internes". Dans la situation actuelle de l'Algérie, cela peut pour le moins s'analyser comme un blanc seing à une répression qui se caractérise par son mépris des droits humains.

(...)

Nous appelons l'Union européenne et ses Etats membres à subordonner la ratification des accords d'association avec l'Algérie et le Liban à la réalisation de progrès significatifs en matière de droits humains et d'une démarche effective d'établissement de la vérité sur les disparus.

S'agissant de l'Algérie, nous demandons prioritairement à l'Union européenne d'obtenir :

(...)

S'agissant des deux pays, nous demandons à l'Union européenne d'exiger le respect de la Déclaration des Nations-Unies sur la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées adoptée par l'Assemblée générale dans sa résolution 47/133 du 18 décembre 1992, et en particulier de son article 13 qui fait obligation aux Etats de procéder à des enquêtes impartiales et approfondies sur tout cas de disparition et de garantir que tout mauvais traitement, tout acte d'intimidation ou de représailles ainsi que toute autre forme d'ingérence lors du dépôt d'une plainte ou pendant la procédure d'enquête soient dûment sanctionnées.

Signataires :

Collectif des Familles de disparu(e)s en Algerie (CFDA), SOS-Disparus (Algerie), Comité des parents de personnes enlevees et disparues au Liban, Comité des familles de detenus libanais en Syrie, Mouvement SOLIDA (Soutien aux Libanais Detenus Arbitrairement), membre du Reseau Euro-Mediterraneen des Droits de l'Homme (REMDH)


Communiqué de la Ligue Algérienne de Défense des Droits de l'Homme

La signature de l’accord d’association Algérie - Union Européenne prévue à Valence (Espagne) le 22 avril 2002 intervient à un moment ou la situation que vit l’Algérie sur le plan des droits de la personne humaine revêt une gravité exceptionnelle.

Les violations graves des droits humains sont commises en connaissance de cause, couvertes, et souvent ordonnées par les plus hautes autorités de l’Etat.

La guerre sans image qui ne veut pas dire son nom a provoqué durant la décennie écoulée 200.000 morts, 20.000 disparus, un million de personnes déplacées, avec des violations massives des droits humains.

Les années de terreur, de massacres collectifs, d’exécutions extra judiciaires, d’arrestations arbitraires, ont fait naître au sein de la population, dont la peur, la répression brutale et continue de son niveau de vie, les souffrances connues et les détresses muettes, sont le fardeau quotidien, un immense besoin de paix.

La torture, avec ses conséquences les plus extrêmes, la mort ou l’handicap physique à vie, est une pratique administrative courante, employée de manière systématique.

Il n’est pas question pour le pouvoir de régler les problèmes, mais d’éliminer ceux qui les posent, de supprimer les contradiction en éliminant les contradicteurs.

La ligne rouge, celle du sang, a été franchie en Kabylie par les gendarmes qui ont tiré avec des armes de guerre sur de jeunes manifestants qui n’avaient que leurs mains nues et leurs poitrines à leur opposer.

Quelque soit l’habillage dont on voulu parer la violence des forces de sécurité, tous corps confondus, elle est criminelle.

Les auteurs des assassinats d’une centaine de jeunes, de milliers de blessés et de centaines d’handicapés, ont été identifiés mais non déferrés, pour la plupart, devant la justice pour crimes abominables, car ils jouissent d’une totale impunité.

Les informations qui nous parviennent depuis trois semaines font état d’une situation d’émeutes, de révoltes, et de répression dans tout le pays.

L’Algérie a signé et ratifié de nombreux pactes et conventions internationaux sur les droits humains- sans leur attribuer de l’importance quant à leur application, du fait que la pratique les méconnaît et les bafoue.

La notion des droits humains telle qu’elle est perçue par le pouvoir ne progresse pas en direction des critères internationaux mais les font régresser.

La LADDH appelle l’Union Européenne à garantir le respect de l’article 2 de l’accord d’association avec l’Algérie sur le plan des droits humains. L’union Européenne ne doit pas sacrifier les droits humains en les dissociant du développement économique.

Elle interprète le droit d’asile de manière de plus en plus restrictive, en adoptant des mesures répressives en contradiction avec la convention de Genève relative au réfugiés. Elle doit refuser l’extradition ou l’expulsion de réfugiés politiques en situation irrégulière, qui ont fui l’Algérie pour échapper à une répression féroce.

Les Algériens sont en effet pourchassés en Europe en raison de leur triple identité, nationale, confessionnelle et sociale.

Le président de La LADDH  : Ali Yahia Abdennour
Alger le 21 Avril 2002


(Quotidien d'Oran 28.4) L'Algérie a voté, lors de la séance de clôture de la session de la Commission des droits de l'Homme à Genève, contre une résolution, présentée par l'Union européenne, demandant l'instauration d'un moratoire sur les exécutions capitales et l'abolition de la peine de mort. La résolution a été approuvée par 25 Etats contre 20 (outre l'Algérie : la Chine, le Pakistan, l'Arabie Saoudite, le Nigeria) et huit abstentions. La résolution demande l'abolition prioritaire de la peine de mort à l'encontre de mineurs, de malades mentaux et d'auteurs de crimes autres que les crimes de sang.

(Reuters 1.5 / La Tribune, Le Matin, Liberté, El Watan 2.5) Après la mort d'au moins 19 détenus dans l'incendie de leurs cellules dans la prison de Serkadji, le 30 avril (les parents des détenus ont du attendre plus de 24 heures après l'incendie pour avoir des nouvelles de leurs proches), le ministre de la Justice, Ahmed Ouyahia, s'est une nouvelle fois engagé à améliorer les conditions de détention dans les établissements pénitenciaires vétustes et surpeuplés d'Algérie, où plus de 40'000 détenus sont incarcérés dans 145 prisons (dont une centaine ont plus d'un siècle), pour une capacité théorique de 34'000 détenus. Les moyens accordés à l'administration pénitentiaire sont en outre très insuffisants : en 2002, l'administration ne se voit par exemple allouer que 50 dinars (environ 0,7 Euros, 1 FS) par détenu pour nourrir les détenus. La prison de Serkadji détient à elle seule 300 prisonniers de trop. En février 1994, la même prison de Serkadji avait connu une mutinerie réprimée dans le sang par les forces de sécurité : un véritable massacre avait fait plus d'une centaine de morts parmi les prisonniers. Le 19 août 2001, un détenu révolté était mort dans l'incendie volontaire de sa cellule, dans la prison de Sidi-Ghilès. Le 10 septembre suivant, une mutinerie dans la prison pour mineurs de Gdyel (w. Oran) avait fait deux morts et une dizaine de blessés. Le 2 avril dernier, dans la prison constantinoise de Chelghoum-Laïd, 20 détenus avaient été tués et 22 blessés dans l'incendie d'une seule cellule surpeuplée. La Ligue algérienne de défense des droits de l'homme demande la démission du ministre de la Justice :

   Une fois de trop, des prisonniers mis sous l'autorité et
   la responsabilité de l'Etat périssent dans un incendie. 
   La LADDH a, à maintes reprises, dénoncé les
   conditions inhumaines qui prévalent dans les prisons
   algériennes où la promiscuité, la surpopulation et
   l'absence d'hygiène s'ajoutent au non-respect des droits
   et de la dignité des détenus. 
   La LADDH s'élève avec force contre la scandaleuse
   insouciance de l'autorité de tutelle devant les drames
   successifs qui frappent la communauté des détenus
   relevant de sa responsabilité. 
   La LADDH exige qu'une enquête sérieuse vienne faire
   la lumière sur ces très graves dérapages dans la gestion
   des prisons et que soient prises les sanctions
   nécessaires contre les responsables. 
   La démission du ministre de la Justice devant la faillite
   du système pénitentiaire est le minimum exigible dans
   ces circonstances. 

   Le 1er mai 2002

   Le président de la LADDH, Ali Yahia Abdenour 

(Le Matin 5.5 / El Watan 6.5) Après la succession de mutineries dans les prisons algériennes, qui ont fait des dizaines de morts et de blessés après que des détenus aient mis le feu à leurs cellules, l'ancien président de la commission de réforme de la justice, le professeur Mohand Issaâd, dénonce "le surpeuplement des prisons algériennes, des conditions alimentaires en dessous du minimum et des conditions médicales désastreuses", l'homosexualité, les suicides, "les humiliations, les atteintes choquantes à la dignité humaine", et se dit "assez pessimiste" : "je crains que ces drames (...) ne soient que le début d'une longue chaîne de problèmes". Mohand Issaâd s'interroge : "Quand des détenus sont entassés les uns sur les autres dans de petites cellules, que des mineurs côtoient de grands délinquants, que des personnes saines côtoient des malades, à quoi dont-on s'attendre ?". Mohand Issaâd constate également "la perte de confiance en la justice" et affirme qu'il y a "un nombre invraisemblable de détenus qui ne devraient pas l'être".40 % des 42'000 détenus algériens n'ont pas été jugés. De "source informée" évoquée par "El Watan", les autorités envisageraient de fermer la prison algéroise de Serkadji, l'une des plus anciennes d'Algérie (le bâtiment qui l'abrite date de l'époque ottomane) dans un délai de trois ans, et de transférer les détenus vers le pénitencier en construction de Tidjelabine, qui aura une capacité de 1500 détenus.

(El Watan, El Khabar 5.5) Les familles de "disparus" rejettent la proposition du président de la Commission nationale de promotion et de protection des droits de l'homme, Farouk Ksentini, d'indemnisation. Elles ont organisé un rassemblement le 4 mai devant la Maison de la presse Tahar Djaout, à Alger, pour exprimer ce rejet, et leur volonté d'obtenir, non de l'argent mais la vérité sur le sort de leurs proches. Farouk Ksentini s'est déclaré navré que sa proposition soit interprétée comme une manière d'acheter le silence des famille de disparus : "Je ne veux ni les offenser, ni les humilier, ni ajouter à leur malheur. Ce n'est pas autre chose qu'un geste de solidarité sociale envers des familles qui vivent dans le dénuement le plus total", a-t-il précisé. Sa proposition consistait en la possibilité pour les familles de "disparus" d'acquérir une pension.

Collectif des familles de disparu(e)s en Algérie
SOS Disparus  

COMMUNIQUE DE PRESSE

Les autorités algériennes refusent obstinément de traiter la question des disparus

Le Collectif des familles de disparu(e)s en Algérie et SOS-Disparus sont révoltés par l’attitude des autorités algériennes qui traitent avec indifférence et négligence la question des disparus sans jamais entendre les revendications de leurs proches.

Alors que les autorités algériennes ont l’obligation d’enquêter et de révéler le sort de leurs citoyens disparus, celles-ci sont toujours incapables de fournir des informations cohérentes sur le sujet, et tentent de fermer ce dossier avant même de l’avoir ouvert.

La déclaration du 10 Mars 2002 à la radio algérienne de Monsieur Ahmed Ouyahia, Ministre de la Justice, en est une preuve supplémentaire. Celui-ci indiquait en effet qu’il y aurait entre 3200 et 3300 disparus, parmi lesquels 600 terroristes :

D’une part, cette déclaration contredit les précédentes informations rendues publiques. A l’Assemblée Nationale, le 10 mai 2001, le Ministre de l’Intérieur faisait état de 4880 disparus recensés à la date du 30 mars 2001.

En tout état de cause, cette marge d’erreur (entre 3200 et 3300 disparus) indique clairement que les disparus sont considérés par les autorités algériennes d’avantage comme des chiffres, des statistiques, plutôt que comme des personnes humaines - des victimes dont on a violé les droits les plus élémentaires.

Par ailleurs, Monsieur Ksentini, Président de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l’Homme (CNCPPDH), qui d’après ses récentes déclarations, a reçu 4670 dossiers de l’Observatoire national des droits de l’Homme (ONDH) remplacée par la CNCPPDH, déclarait le 26 Avril 2002, à la télévision algérienne, qu’un projet d’indemnisation des familles de disparus était à l’étude.

Certes, des indemnisations représenteraient sans doute une réponse aux problèmes matériels urgents des familles, mais ne résoudraient en aucun cas le problème des disparitions forcées en Algérie. Car cela ne se résume pas à un problème économique.

En effet, les familles des disparus ont le droit de connaître le sort de leurs disparus et l’endroit où ils se trouvent, et les lois internationales font obligation aux autorités algériennes de leur répondre. Sans quoi les indemnisations ne représenteraient qu’une humiliation de plus à toutes celles que les autorités algériennes ont déjà infligées aux familles de leurs concitoyens disparus.

Paris, Alger, le 3 mai 2002
P/ Le Collectif des familles de disparu(e)s
Nassera Dutour


(AFP, AP 6.5 / APS 8.5 / La Tribune, L'Expression, El Watan, Liberté, Le Matin 9.5) Les mutineries, individuelles ou collectives, se succèdent depuis un mois dans les prisons algériennes, faisant une cinquantaine de morts (44 selon les bilans officiels) et une centaine de blessés depuis le 2 avril, dans des incendies volontaires allumés par les détenus. Onze prisons ont été touchées. Le 2 avril, 20 détenus ont été tués et 22 blessés dans la prison de Chelghoum Laïd (Constantine); le 30 avril, de 19 à 23 détenus ont été tués dans la prison de Serkadji (Alger); le 4 mai, 25 détenus ont été blessés dans la prison d'El Harrach (Alger); le 5 mai, de dix à cinquante détenus ont été blessés dans un pénitencier de Constantine, de construction récente; le 8 mai, un détenu a été tué et deux autres blessés dans la prison (récente elle aussi) "Gambetta" (Larbi Ben M'hidi) de Sidi Bel Abbès, où un détenu a mis le feu dans sa cellule. D'autres incidents, moins graves, ont été évoqués par le ministre de la Justice Ahmed Ouyahia dans des prisons de Tizi Ouzou, Sétif, Ras El Oued et M'sila.

Dans un entretien au quotidien "Le Matin", l'ancien président de la commission de réforme de la justice, Mohand Issaâd, a dénoncé la situation alarmante des prisons algériennes, vieilles (une centaine d'établissements pénitentiaires sur les 145 que compte le pays datent de plus d'un siècle) et surpeuplées (42'000 détenus selon certaines sources, mais 34'000 selon le ministre de la Justice). La prison, récente, de Sidi Bel Abbès est prévue pour abriter 600 détenus, et en abrite 830. Lors de la mutinerie de Constantine, le 5 mai, les détenus ont dénoncé le recours systématique à la détention préventive (12'000 personnes sont détenues à titre provisoire, sans avoir été jugées, et 3000 en attente d'un jugement en appel ou en cassation, en Algérie) , le non usage de la mise en liberté provisoire et la lenteur du traitement des dossiers. Le ministre de la Justice Ahmed Ouyahia, qui a accusé des détenus islamistes d'avoir fomenté les émeutes, et a refusé d'assumer la responsabilité des émeutes en démissionnant, a nié que la surpopulation des prisons (il a annoncé que le nombre total des détenus était passé de 46'000 pour 28'000 places en 1996 à 38'000 pour 34'000 places en 2002) soit la cause principale de la révolte des détenus, tout en admettant que des "dépassements" se produisent dans les prisons, et que 250 fonctionnaires pénitentiaires ont été sanctionnés pour de tels "dépassements", mais a refusé de sanctionner les directeurs des établissements concernés. Le Premier ministre Ali Benflis a par contre reconnu que les conditions de détention dans les prisons algériennes étaient très précaires, et pouvaient expliquer les mutineries et les suicides ou tentatives de suicide. Le ministre de la Justice a annoncé des "mesures d'urgence" pour répondre à la crise dans les prisons, mais les mesures qu'il a annoncées consistent essentiellement en le remplacement des matelas en mousse par une literie non inflammable et en l'interdiction des cigarettes.

L'avocat et défenseurs des droits de l'homme M. Khelili a déclaré au "Matin" que la crise des prisons relevait d'une "crise politique d'envergure, une crise majeure et cela dans toute la société, et donc dans les prisons", où comme ailleurs les citoyens "veulent faire entendre leurs voix (et) réclament leur droit". Me Khelili ajoute que remplacer le ministre de la Justice ne changerait rien au problème.

Des témoignages recueillis par la presse rendent compte des conditions calamiteuses faites aux détenus dans la plupart des prisons algériennes : un ancien détenu à El Harrach déclare au "Matin" que la seule loi régnant dans la prison est "celle du plus fort, de la hogra, de la tchipa", de la violence -violence des gardiens sur les détenus, violence des détenus entre eux. Dans le même quotidien, un fonctionnaire pénitentiaire ("officier de rééducation") évoque la corruption, le chantage et les "propositions indécentes" faites par des gardiens aux épouses et soeurs des détenus pour améliorer les conditions de détention de leurs proches, du paiement de gardiens par les familles pour que leur proche détenu échappe aux sévices sexuels, des violences exercées par les gardiens sur les détenus, de la discrimination entre détenus riches et pauvres, du "diktat" des directeurs de prison, etc...

(AFP 10.5 / Le Matn 12.5) Un nouveau mouvement de protestation, pacifique celui-là, a été déclenché dans une prison algérienne, celle de Belacel, à Relizane, le 9 mai. Les détenus (de droit commun) revendiquaient le rapprochement de leur lieu de détention avec leur lieu d'origine, la révision de la loi sur les prisons, une réduction des peines et une amélioration des conditions de détention, notamment du nombre de détenus par cellule. Dans une note adressée aux chefs des tribunaux, le ministre de la Justice, Ahmed Ouyahia, a rappelé que la détention provisoire devait avoir un caractère exceptionnel. Or le tiers des détenus des prisons algériennes sont en détention provisoire, alors que le Code pénal proclame (rhétoriquement) le principe de la présomption d'innocence et l'impératif de la défense des libertés. Dans sa note, le ministre de la Justice précise que tout recours à la détention provisoire "comme simple acte de procédure conservatoire serait naturellement abusif et attentatoire non seulement à la présomption d'innocence mais aussi à la liberté du prévenu".

(Algeria-Interface 9.5) Le président de la Ligue algérienne des droits de l'Homme, Boudjemaâ Ghechir, dénonce, dans une déclaration à "Algeria-Interface", les conditions de détention dans les prisons algériennes, et le recours abusif et systématique à la détention provisoire. Boudjemaâ Ghechir a également réagi négativement aux déclarations du ministre de la Justice, Ahmed Ouyahia, selon qui les mutineries qui ont touché les prisons algérienne en avril et mai, et qui ont fait des dizaines de morts et plus d'une centaine de blessés, avaient été suscitées par l'agitation de détenus islamiste. Pour l'avocat défenseur des droits de l'homme, les conditions de détention dans les prisons algériennes sont "intolérables" : "Il y a évidemment une surpopulation carcérale, mais il y a aussi la détérioration des conditions d'hygiène, l'insuffisance des rations alimentaires et l'absence d'occupation pour les détenus", ainsi que "la mauvaise administration de la justice" : lenteur de l'instruction, recours abusif aux peines privatives de liberté et à la détention provisoire, absence d'indépendance de la justice : "procureurs généraux et présidents de cour font systématiquement appel de toutes (les) décisions de libération provisoire ou de non lieu", note l'avocat, qui demande que "tous ces magistrats qui laissent la détention provisoire de certains prisonniers s'éterniser au mépris de la loi" soient sanctionnés.

(Liberté 20.5) Un militants de la Ligue algérienne de détense des droits de l'Homme et de SOS Disparus, Khelil Abderrahmane, a été arrêté le 19 mai dans un café face à l'Université de Bouzaréah, alors qu'il venait s'informer sur les arrestations massives d'étudiants opérées après les manifestations hostiles au président Bouteflika, le 18 mai.

COMMUNIQUE DE LA LIGUE ALGÉRIENNE DE DÉFENSE DES DROITS DE L'HOMME

Ligue Algérienne de Défense des Droits de l'Homme
LADDH

5, rue Mohamed LEBIB
Alger. Tel : 213 21 73 70 45  
Tel/Fax : 213 71 70 80

Aujourd'hui 19 mai 2002 entre 10 heures et 12 heures Khelil Abderrahmane, membre de la Ligue de Défense Algérienne des Droits de l'Homme (LADDH), et membre de SOS Disparus, a été interpellé, en compagnie d'un ami Sid-Ahmed Mourad, par des policiers alors qu'ils étaient dans un café qui se trouve face à l'Université de Bouzaréah. Abderrahmane Khelil était venu à Bouzaréah mandaté par la LADDH pour s'informer sur les arrestations massives d'étudiants suite aux manifestations lors de la visite hier du Président Bouteflika dans cette même université.

Actuellement les deux prévenus sont en détention préventive au niveau de la Sûreté de Daïra de Bouzaréah avant d'être déférés devant le Parquet pour : « incitation à attroupement illégal et atteinte à l'ordre public ». Cette arrestation vient s'ajouter aux nombreuses arrestations et persécutions dont sont victimes les défenseurs des Droits de l'Homme, les syndicalistes, les familles de disparu (e)s, les militants de partis politiques et les journalistes.

La Ligue Algérienne de Défense des Droits de l'Homme dénonce ces arrestations abusives qui ont comme objectif premier de museler la société algérienne durant cette période pré-électorale et interpelle le Gouvernement et le premier Magistrat du pays sur ce qui semble bien être une persécution des défenseurs des Droits de l'Homme et des militants. Cette situation laisse supposer une instrumentalisation de la Justice par les Pouvoirs publics comme outil de répression.

La Ligue Algérienne de Défense des Droits de l'Homme exige :


(Collectif des familles de disparu(e)s en Algérie, avril 2002) La secrétaire du Groupe de travail des Nations Unies sur les disparitions forcées ou involontaires a informé la Fédération internationale des ligues des droits de l'Homme (FIDH) qu'en raison du manque de moyens octroyés par l'ONU au Groupe de travail, celui-ci allait donner priorité au traitement des dossiers du Sri Lanka, sur les dossiers algériens. 2000 dossiers algériens ont été déposés depuis 1998. 140 sont mentionnés dans le rapport annuel du groupe de travail pour 1999, 46 dans le rapport 2000.

(AP 21.5 / Quotidien d'Oran) Le président Bouteflika a grâcié plus de 5100 détenus de droit commun à l'occasion de la fête du Mawlid El Nabaoui (naissance du Prophète). Ces grâces consisteront, selon les cas, en des remises de peine partielles ou totales. Les condamnés "pour faits de terrorisme ou en relation avec le terrorisme", les condamnés pour meurtre, assassinat, incendie, tentative d'incendie, rébellion, violence et voies de fait, destructions de biens, sont exclus de ces mesures -dont sont donc exclus ceux qui ont participé aux mutineries d'avril et mai dans les prisons algériennes, mutineries qui ont faitdes dizaines de morts et plus d'une centaine de blessés. Les grâces décidées par le président Bouteflika d'ailleurs avoir pour effet de remédier un peu au surpeuplement des prisons algériennes, dont la capacité est inférieure d'au moins un quart au nombre réel des détenus. Les détenus n'ayant plus que six mois (ou moins) de prison à purger ont en effet bénéficier d'une grâce les exemptant du solde de leur peine, ce qui concernerait environ 1500 détenus, dont une bonne partie l'étaient en relation avec les "évènements" de Kabylie.

Le président Bouteflika a par ailleurs reçu un rapport de la Commission nationale consultative de promotion et de défense des droits de l'homme (CNCPPDH, officielle), présidée par Mustapha Farouk Ksentini, qui dresse un tableau très sombre de la condition carcérale en Algérie, et dément la thèse défendue par le ministre de la Justice selon laquelle les mutineries d'avril et mai avaient été provoquées par les détenus islamistes.

(Quotidien d'Oran, Liberté 22.6) Selon le Comité des étudiants pour la libération des détenus (CELD), qui milite pour la libération des étudiants arrêtés après les "troubles" survenus lors de la visite du président Bouteflika à l'Université de Bouzareah, le 19 mai, les étudiants arrêtés ne l'auraient été en relation avec ces troubles, mais sur la base de listes établies par la police et la Sécurité militaire (DRS). Les étudiants arrêtés sont souvent, en effet, militants de longue date de mouvements (la Fondation Matoub, le collectif Nedjma la Coordination des comités d'Alger) ou de partis d'opposition (Parti socialiste des travailleurs), comme des personnes arrêtées en même temps qu'eux, mais n'étant ni étudiants, ni enseignants, comme Khelil Abderrahmane, militant de la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme, ou Sid Ahmed Mourad, militant du FFS. Le Premier secrétaire du FFS, Ahmed Djeddaï, a déclaré que "les éléments de la DRS ont piloté, de bout en bout, les arrestations des étufiants", et assuré disposer de "témoignages qui montrent qu'ils dirigeaient les opérations". Depuis le 19 mai, les étudiants de Bouzaréah occupent leur faculté. Ils appellent à une marche vers le Palais du gouvernement le 26 mai, jour de la comparution des détenus devant le tribunal. Le FFS, le RCD, le MDS et le PST soutiennent leur action, soutenue également par le syndicat des enseignants du supérieur, le CNES, qui dénonce les "violations répétées des franchises universitaires, la résurgence des pratiques de police politique contre les syndicalistes et les étudiants, la répression policière contre les étudiants du campus de Bouzaréah et de l'Université de Bejaïa" et exige la libération "immédiate et sans condition" des étudiants arrêtés.

COMMUNIQUE DU COLLECTIF DES FAMILLES DE DISPARUS EN ALGÉRIE, DE SOS-DISPARUS ET D'ALGERIE-DROITE DE L'HOMME POUR TOUS

Le collectif des familles de disparus en Algérie, SOS Disparus et l'Association Algérie-Droits de L'Homme pour Tous ( ADHT) expriment leur indignation face à l'arrestation, le 19 mai 2002, de Khelil Abderrahmane,. membre de la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme (LADDH), et de SOS Disparus.

Khellil Abderrahmane a été interpellé en compagnie d'un ami Sid-Ahmed Mourad, près de l'Université de Bouzaréah, alors qu'il venait s'informer des arrestations massives d'étudiants opérées après les manifestations hostiles au président Bouteflika, le 18 mai dernier.

Actuellement Khellil Abderrahmane et Sid-Ahmed Mourad sont placés sous mandat de dépôt à la prison d'El Harrach et seront traduits devant la justice le dimanche 26 mai 2002 sous le chef d'inculpation " incitation à attroupement non armé ".

Khellil Abderrahmane et Sid-Ahmed Mourad n'étaient pas présents sur les lieux le 18 mai et n'ont pu participer à ces "attroupements".

Le collectif des familles de Disparus, SOS, et l'ADHT, dénoncent l'arrestation de Khelil Abderrahmane et de Sid-Ahmed Mourad considérant qu'il s'agit en réalité d'une étape supplémentaire dans la campagne de harcèlement menée à l'encontre de Khelil Abderrahmane, qui s'est déjà traduite par des interpellations, le 14 mars dernier et le 18 mars, lesquelles ont été suivies d'interrogatoires au commissariat de police. Le 18 mars 2002, A. Khelil accompagnait une délégation de familles de "disparus" qui devait être reçue à la représentation de l'ONU par Mr Lambo, le représentant

Cette arrestation se situe dans le contexte général de harcèlement et de répression contre les militants des droits de l'Homme en Algérie, accentué par l'approche des élections législatives, comme le prouvent la condamnation à un an de prison ferme de Larbi Tahar Alabiot Sidi Cheikh ou celle d'un autre responsable de la LADDH, Mohamed Smaïn, condamné, lui aussi, à un an de prison ferme, le 24 février dernier, pour avoir diffusé la vérité sur les charniers de Relizane.

Le collectif des familles de disparus, SOS Disparus et ADHT condamnent avec fermeté ces arrestations de militants qui n'ont fait qu'exercer leur liberté d'expression et défendent le droit des familles à connaître le sort de leurs "disparus".

Le collectif des familles de disparus, SOS Disparus, ADHT exigent la libération immédiate de Khelil Abderrahmane et de Sid-Ahmed Mourad, ainsi que celle de Larbi Tahar à Labiod Sidi Cheikh et de lever toutes mesures qui pèsent sur Mohamed Smaïn, condamné à un an de prison. ainsi que la levée de toutes les charges qui pèsent sur ces militants.

Ils condamnent toutes les arrestations arbitraires et toutes les mesures d'intimidation ou de répression contre les défenseurs des droits de l'Homme, les syndicalistes, les militants des partis politiques et les familles de disparus et appellent à une justice libre et indépendante en Algérie.

Le Collectif des familles de disparu(e)s en Algérie, SOS disparus et l'ADHT exigent du premier Magistrat du pays, de faire respecter le droit des Algériens, de se réunir, de manifester, et de s'exprimer librement.

Mercredi 22 mai 2002
Paris-Alger


COMMUNIQUÉ DE LA LIGUE ALGÉRIENNE DE DÉFENSE DES DROITS DE L'HOMME

Ligue Algérienne de Défense des Droits de l'Homme - LADDH -

5, rue Mohamed LEBIB
Alger
Tel : 213 21 73 70 45 
Tel/Fax : 213 21 71 70 80

L'arrestation et la mise sous mandat de dépôt le 20 mai 2002 par le procureur de la république près le tribunal de Bir Mourad Raïs, de Khelil Abderrahmane membre de la LADDH, sous le chef d'inculpation d'" incitation à attroupement non armé " fait partie d'une entreprise de harcèlement qui vise depuis plusieurs mois les Défenseurs des droits de l'Homme. La LADDH juge que cette arrestation ainsi que celle de Sid Ahmed Mourad sont arbitraires.

Après le procès et la condamnation de Mohamed Hadj Smaïn membre de la LADDH à Relizane, puis celle de Larbi Tahar à Labiod Sidi Cheikh, c'est au tour de Khelil Abdehamane, déjà interpellé nominativement à diverses reprises dans ses missions pour la LADDH, de faire les frais de la politique répressive du pouvoir.

La LADDH tient à rappeler que les missions internationalement reconnues d'un défenseur des droits de l'Homme sont de s'informer sur tous les cas d'arrestation et de détention, d'alerter l'opinion et de prendre la défense de tous les prévenus afin de veiller au respect de leurs droits et de leur intégrité physique et morale, tel que stipulé dans la Déclaration sur les défenseurs de l'Homme, adoptée par l'Assemblée générale des Nations Unies, le 9 décembre 1998.

La LADDH, membre de la FIDH appelle, ainsi, à la solidarité internationale des défenseurs des droits de l'Homme pour faire pression sur le gouvernement algérien afin qu'il respecte la Déclaration sur les défenseurs des droits de l'homme, notamment son article 2, en libérant immédiatement et sans condition Khelil Abderrahmane et Sid Ahmed Mourad.

Par ailleurs, la LADDH condamne avec la plus grande fermeté les arrestations massives des étudiants qu'elle considère comme une énième atteinte aux droits et libertés des citoyens. La LADDH se solidarise pleinement avec les familles de toutes les personnes arrêtées et se déclare prête à constituer un collectif d'avocats pour assurer leur défense.

La LADDH dénonce également le scandaleux refus des autorités d'accorder leur droit légal de visite aux familles des détenus qui l'ont demandé, tel que garanti par le Pacte international relatif aux droits civils et politiques.



HUMAN RIGHTS WATCH

1630 Connecticut Avenue NW, #500
Washington, DC 20009
Phone: 202-612-4321
Fax: 202-612-4333


MIDDLE EAST AND NORTH AFRICA DIVISION

Algérie : Pour la libération des défenseurs des droits de l'Homme confrontés à la justice

 (New York, le 24 mai 2002): "Les autorités algériennes doivent libérer 
les défenseurs des droits de l'Homme, Abderrahmane Khelil et Sid Ahmed 
Mourad", a déclaré aujourd'hui Human Rights Watch. Les deux hommes seront 
présentés à la justice dimanche 26 mai.

Les deux hommes ont été arrêtés près du campus de l'université de Bouzaréah à Alger le 19 mai. Khelil s'y était rendu, accompagné de son ami Mourad, pour le compte de la Ligue Algérienne de Défense des Droits de l'Homme, afin de rassembler des informations sur l'arrestation d'étudiants le jour précédent, lors de la visite, sur le campus, du Président Abdelaziz Bouteflika où il avait été accueilli par des protestations.

" Les autorités s'en prennent à Abderrahmane Khelil parce qu'il représente la nouvelle génération des défenseurs des droits de l'Homme en Algérie ", a déclaré Hanny Megally, directeur exécutif de la division Moyen Orient et Afrique du Nord à Human Rights Watch. " La police l'a arête simplement parce qu'il a tenté de montrer comment elle avait mis fin à une protestation sur un campus. Khelil et Mourad doivent tous deux être libérés immédiatement et sans condition. "

Khelil, qui travaille aussi pour SOS Disparus, une organisation Représentant les familles de "disparus ", avait déjà été arrêté à deux reprises en Mars lorsqu'il avait tenté de manifester pacifiquement dans la capitale, Avec d'autres militants représentants de familles de disparus.

Khelil et Mourad sont à la prison civile d'el-Harrach. Ils doivent être présentés devant la cour le 26 mai sous le chef d'inculpation d'"incitation à attroupement non armé ", une violation de l'Article 100 du Code Pénal. Ils encourent des amendes et une peine d'emprisonnement pouvant aller jusqu'à un an s'ils sont reconnus coupables.


(Algeria-Interface 25.5 / La Tribune, Corr 26.5 / Le Matin 27.5) La récente vague d'arrestations d'étudiants et de militants des droits de l'homme a suscité de très nombreuses protestations, en Algérie et à l'étanger, de la part d'associations et d'ONG, d'autant que les dernières arrestations n'ont fait que s'ajouter à toutes celles survenues pendant des semaines, notamment (mais pas exclusivement) en Kabylie. Selon l'avocat Mustapha Bouchachi, de la Ligue algérienne de défense des droits de l'homme (LADDH), entre 700 et 800 personnes seraient détenues en Algérie, condamnées ou en attente de jugement, "pour des affaires de contestation sociale ou démocratique" -et cela alors que le président Bouteflika vient de grâcier près de 8000 détenus de droit commun. Des manifestants en Kabylie (ou ailleurs) et des militants des comités citoyens locaux ont été condamnés à des peines allant jusqu'à deux ans de prison ferme pour leur participation à des manifestations, et de nouveaux chefs d'accusation sont apparus, comme la "constitution d'organisation non reconnuee" ou la "diffusion illégale de tracts". Des militants syndicaux ou des militants d'organisations politiques légales (comme le FFS ou le MDS) sont interpellés et détenus pendant plusieurs heures par la police. La police politique (Renseignements généraux ou DRS), en voie selon un décret présidentiel d'avril 2002 d'être centralisée au niveau du ministère de l'Intérieur, sur le modèle tunisien, semble d'ailleurs jouer un rôle de plus en plus actif dans la répression du mouvement social : les étudiants arrêtés à Bouzareah après la perturbation de la visite présidentielle à l'Université, le 17 mai, l'ont été, selon de nombreux témoignages, sur la base de fiches de renseignements policiers. Deux militants des droits de l'homme, Khelil Abderrahmane et Sid Ahmed Mourad, ont également été arrêtés au prétexte des événements survenue à Bouzaréah. Un autre militant des droits de l'homme, le responsable de Relizane de la LADDH, Hadj Smaïn, est sous contrôle judiciaire. Le Premier secrétaire nationale du FFS Ahmed Djeddaï prévoit que "les militants des partis politiques et les journalistes (seront) les prochaines cibles directes de la vague d'incarcérations" -chaque semaine déjà, des journalistes et directeurs de publication de journaux sont conduits devant les tribunaux pour des délits de presse.

Les étudiants et militants des droits de l'homme après la manifestation de l'Université de Bouzareah ont été jugés le 26 mai, et condamnés à de lourdes peines, pour des délits mineurs : cinq étudiants ont été condamnés à deux ans de prison ferme, douze à huit mois de prison ferme. Un seul a été relaxé, ainsi qu'un jeune commerçant. Sid Ahmed Mourad, militant FFS, et Khelil Abderrahmane, militant de la LADDH, ont été condamnés à six mois de prison avec sursis. Le Comité pour la libération des étudiants a qualifié ce jugement de "provocation". Le verdict a également été condamné par la Ligue algérienne de défense des droits de l'homme, qui a dénoncé "la dépendance de la justice et sa mise au service du pouvoir politique", par le Mouvement démocratique et social, qui a dénoncé des "exécutions expéditives", par le Front des Forces Socialistes, dont le Premier secrétaire, Ahmed Djeddaï, présent au moment du verdict, s'est déclaré "consterné" par un verdict démontrant "la nature (d'un) régime totalitaire" qui accorde "l'impunité aux responsables" de la crise mais en condamne les victimes, et par le RCD, qui voit dans le verdict l'expression de "la panique du pouvoir". La Rassemblement actions jeunesse (RAJ) a dénoncé une "parodie de justice" et appelé à une "mobilisation nationale contre la répression et pour les libertés". Ali Yahia Abdennour, président de la LAADH, a annoncé qu'il sera fait appel du verdict.

Le Forum des étudiants de Bejaïa a proposé au Comité des édutiants pour la libération des détenus de Bouzaréah de créer une structure nationale regroupant les représentants des étudiants de toutes les universités.

A Paris, le "Centre des Cultures" a lancé un appel pour la libération des étudiants algériens. Le Centre exprime son soutien à "toutes les forces qui luttent pour une réelle démocratie en Algérie".

(AP 24.5 / L'Expression 25.5) Le président Bouteflika a accordé une grâce à 2573 nouveaux détenus de droit commun, s'ajoutant aux 5100 déjà grâciés à la même occasion (celle de la naissance du Prophète, commémorée le 24 mai, le jour de Mawlid El Nabaoui). Au total, donc, 7673 détenus bénéficieront de cette grâce. Les dernières mesures de grâce toucheront des détenus déjà condamnés, dont le solde de la peine encore à purger est égal ou inférieur à un an, et qui n'ont pas été condamnée pour des faits de "terrorisme" ou en relation avec le "terrorisme", ou pour meurtre, incendie, rébellion, violence, voies de fait, ou destructions de biens à l'intérieur d'un établissement pénitentiaire", ce qui en exclut aussi bien les manifestants kabyles que les participants aux récentes mutinerties à l'intérieur des prisons algériennes. La Commission nationale consultative pour la promotion et la protection des droits de l'Homme (commission officielle) a pris acte "avec satisfaction" de ces mesures de grâce présidentielle, et a noté que ces mesures entraîneront "une substantielle diminution de la surpopulation carcérale dont le réduction demeure l'un des objectifs à atteindre".

(AP 28.5 / Quotidien d'Oran, Jeune Indépendant, Le Matin 29.5) Les 17 étudiants de Bouzaréah condamnés le 26 mai à des peines allant de huit mois à deux ans de prison ferme pour "atteinte à corps constitué" (c'est-à-dire pour avoir "hué" le président Bouteflika lors d'une visite présidentielle à l'université le 18 mai) ont été graciés par le même président le 27 mai, et devaient être libérés le 28. La présidence assure n'avoir pas "voulu s'immiscer dans le cours de la justice" et n'avoir gracié les condamnés que pour "ne pas hypothéquer (leur) avenir". Les avocats des étudiants ont annoncé qu'ils maintenaient l'appel interjeté après leur condamnation, grâce présidentielle ou pas, puisque si la condamnation n'est pas cassée par voie judiciaire, elle restera mentionnée sur leur casier judiciaire. Le Parti des Travailleurs a appelé le président Bouteflika à élargir cette grâce (ou l'amnistie précédemment accordée à plusieurs milliers de condamnés de droit commun) à "toutes les personnes arrêtées à l'occasion de manifestations en Kabylie et dans les autres régions".

Le 27 mai, au tribunal d'El Khroub, huit adolescents ont été jugés pour leur participation à des émeutes à Aïn Abid, en avril. Cinq accusés ont été condamnés à trois mois de prison avec sursis, et trois ont été acquittés.

(Algeria-Interface 28.5) Les parents des victimes de l'incendie de la prison de Serkadji se sont constitués en collectif pour exiger que toute la lumière soit faite sur les circonstances de cette tragédie. Le 30 avril, 25 jeunes détenus de Serkadji, condamnés pour de petits délits sont morts, étouffés ou brûlés, dans l'incendue d'une salle grillagée (et non d'une cellule aux portes fermées) de la prison de Serkadji, alors que des extincteurs étaient à portée de main des gardiens, que les pompiers sont voisins de la prison et que les bouches d'incendie du quartier sont fonctionnelles. Le collectif est représenté par l'avocat algérois Noureddine Houcinate. Il annonce vouloir se porter partie civile, déposer plainte et demander des comptes aux autorités. L'avocat signale que près d'un mois après le drame, les parents des détenus n'ont reçu aucun document administratif précisant que leur proche est mort en prison.

(AFP 3.6) Dans une lettre au président Bouteflika, le chef du RCD, Saïd Sadi, affirme le 3 juin qu'un militant de son parti, Djaâfar Benmesbah, a été torturé à son propre domicile "pendant des heures", dans la nuit du 30 au 31 mai, par un "commando" de trois hommes, qui l'ont étranglé à l'aide d'un cable, ont lacéré son corps, recouvert les plaies de sel, l'ont forcé à boire de l'eau de Javel et ont menacé sa famille et des responsables du parti.

(CCFIS, L'Expression 8.6) Le leader du Front Islamique du Salut, emprisonné depuis 11 ans, Ali Benhadj, a adressé le 27 mai une lettre au procureur du Tribunal militaire de Blida. La famille d'Ali Benhadj a fait savoir que l'état de santé de celui-ci était extrêmement préoccupant, et s'est aussi adressée, le 6 juin, au procureur pour qu'il prenne les décisions qui s'impose. Le Conseil de coordination du FIS appelle à la libération du leader emprisonné, en rappelant que la plus grande partie de ses onze années d'emprisonnement se sont passées dans l'isolement. Ali Benhadj avait été condamné à douze ans de prison en juillet 2001, et était théoriquement libérable en juillet 2000, après avoir purgé les trois quarts de sa peine, soit neuf ans. Il devrait en tous cas être libéré après avoir purgé la totalité de sa peine en juillet 2003, ce qui, note "L'Expression", ferait coïncider sa libération avec l'élection présidentielle.

(AFP 12.6 / El Watan 13.6) Le tribunal criminel de Sidi Bel Abbes a condamné à mort par contumace, le 12 juin, un "émir" d'un groupe armé islamiste, Djilali Bahri, dit "Dib El-Djaâne", pour "constitution de groupe terrorisme armé" et "meurtre avec préméditation" (sur deux personnes).

(El Watan 13.6) Le responsable régional de Relizane de la Ligue algérienne de défense des droits de l'homme (LADDH), Mohammed Smaïn, a vu le contrôle judiciaire auquel il était soumis depuis un an levé, le 9 juin, par le tribunal de Relizane. Par contre, les documents de voyage de M. Smaïn ne lui ont pas été restitués.

(Le Matin 16.6 / El Watan 17.6) Les auteurs des violentes agressions contre des dizaines de femmes, l'été 2001 dans le quartier El Haïcha de Hassi Messaoud, ont été jugée le 16 juin à Ouargla. Sur 30 accusés, dix ont été acquittés et 16 autres ont écopé d'une année de prison ferme pour attroupement, mais acquittés des chefs d'accusation de violations de domicile, viols et agressions physique. Un accusé a été condamné à six mois de prison, deux autres à trois ans de prison, pour vol et attroiupement public. Ces verdicts sont étrangement cléments (à l'aune algérienne), s'agissant d'actes constitutifs d'un véritable pogrom contre des dizaines de femmes, agressées, battues, violées. Les chefs d'accusation témoignaient d'ailleurs de la violence des actes commis : atteinte avec violence à l'honneur et à la pudeur, viol, destruction de biens d'autrui, usage de violence, agression volontaire avec usage d'armes blanche, violation de domicile, vol qualifié etc... La plupart des plaignantes semblent avoir été dissuadées, avec menaces, de se présenter au procès.

(La Tribune, Le Quotidien d'Oran, El Watan 24.6) Un rassemblement de familles de "disparus" devant le siège du gouvernement à Alger a été violemment dispersé par la police, le 23 juin. Des femmes ont été matraquées et jetées à terre, deux d'entre elles ont tû être hospitalisées, des personnes âgées ont été insultées, un jeune homme de 21 ans qui protestait contre les brutalités policières a été interpellé et malmené par la police. Les familles de disparus entendaient exprimer leur refus des propositions d'indemnisation faites par la Commission nationale consultative (officielle) pour la défense et la promotion des droits de l'homme (CNCDPH), indemnisation dont elles craignent qu'elle ne serve surtout à "enterrer les dossiers" des disparus, alors que leurs familles exigent d'abord de connaître la vérité sur leur sort. "SOS Disparus" a protesté contre les violences faites aux familles des disparus, et qui se sont particulièrement abattues sur des femmes, dont deux ont été hospitalisées.

Collectif des familles de disparu(e)s

La quête de vérité prend des coups

          Le Collectif des familles de disparu(e)s et le Comité
          SOS-DISPARUS dénoncent la violence policière avec
          laquelle les autorités ont répondu aux familles de
          disparu(e)s en Algérie, rassemblées le 23 juin 2002 devant le
          Palais du Gouvernement. 

          Un dispositif « sécuritaire » démesuré avait été déployé pour
          accueillir les familles. Les forces de l’ordre ne se sont pas
          contentées d’insulter les mères pour les disperser, ils se sont
          violemment acharnés sur elles ne lésinant ni sur les coups de
          poing ni sur les coups de pied.

          Les portraits de leurs enfants disparus, arrachés des mains,
          déchirés et piétinés. 

          Pour les familles, il s’agissait encore et toujours, de réclamer
          Vérité et Justice. Pour le gouvernement, il s’agissait encore
          et toujours, de blesser des mères affligées par l’absence des
          leurs. 

          Les familles de disparus étaient venues interpeller le
          gouvernement sur la réponse apportée par la Commission
          consultative pour la promotion et la défense des droits de
          l’Homme qui prévoit une indemnisation.

          Et, dissimuler encore et toujours sa responsabilité dans les
          disparitions forcées.

          Quand les mères ne cessent de revendiquer la vérité tout
          simplement. 

          En échos à ce projet d’indemnisation, après le silence
          méprisant, le mensonge, le temps est venu des promesses.
          Une opération médiatique « monétisée les familles exigent
          que les enfants détenus au secret et vivants leur soient
          rendus :

« Nous savons qu’il y a des vivants et nous savons où ils sont. »

Collectif des Familles de Disparus en Algérie
Communiqué :

RENCONTRE AVEC LE SECRETARIAT DU GROUPE DE TRAVAIL SUR LES DISPARITIONS FORCEES DE L’ONU

Nassera Dutour, porte parole du Collectif des familles de disparu(e)s en Algérie, accompagnée d’un représentant de la Fédération internationale des droits de l’Homme (FIDH), Antoine Madelin et de Mohamed Tahri, avocat des familles, a rencontré le 27 juin 2002, le secrétariat du groupe de travail sur les disparitions forcées de l’ONU à Genève.

289 nouveaux dossiers de disparus ont été déposés venant s’ajouter aux 2000 dossiers déjà pris en charge par le groupe de travail.

Lors de cette réunion, il a été décidé de mettre en place une série de séances de travail entre le Collectif et le groupe de travail, durant lesquelles il s’agira de réétudier les dossiers au cas par cas. Ce traitement individuel permettra d’intervenir de nouveau auprès du gouvernement algérien qui n’a apporté, jusqu’à présent, que des réponses évasives et donc insatisfaisantes.

Ces réunions seront l’occasion pour le Collectif des familles de disparu(e)s en Algérie de déposer de nouveaux dossiers, qui sont actuellement en cours de traitement à Paris et à Alger.

Forte de cette nouvelle perspective de traitement de dossiers au cas par cas, le Collectif des familles de disparu(e)s, demande que la Commission consultative pour la promotion et la protection des droits de l’Homme (CNCPPDH) adopte les mêmes modalités de traitement des dossiers avec pour objectif d’aboutir à la vérité sur ce problème douloureux.

Le Collectif des familles de disparu(e)s s’inquiète des objectifs de la mission de la Commission nationale consultative pour la promotion et la protection des droits de l’Homme, qui semble occulter la recherche de la vérité sur le sort des disparus et ne propose que d’indemniser les familles.

Ce qui apparaît comme une manoeuvre pour échapper à son devoir.

Paris, 29 juin 2002

P/ Le Collectif des familles de disparu(e)s
Nassera Dutour


(Algeria-interface 28.6 / Le Matin 1.7) L'Algérie figure sur la "liste noire" des 21 pays "où l'on enlève, torture et assassine les journalistes en toute impunité", liste dressés par Reporters sans Frontières et le collectif "Damoclès". Cette liste a été dressée à la veille de l'entrée en fonction, le 1er juillet, de la Cour pénale internationale (CPI).

La président de la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme, Ali Yahia Abdennour, a rappelé que l'Algérie avait signé mais pas ratifié le traité instituant la CPI, traité ratifié par 71 Etats.

(Algeria-Interface 28.6 / Le Matin 1.7) Dans un long entretien accordé à Algeria-interface, le président de la Commission nationale consultative des droits de l'homme (organisme officiel algérien), Farouk Ksentini, reconnaît l'existence d'"obstructions des services de sécurité" dans la recherche de la vérité sur les disparus, et menace : "Si un corps de sécurité refuse de nous répondre ou si sa réponse n'est pas satisfaisante, nous considérons que la disparition lui est imputable". Pour Farouk Ksentini, en effet, "l'Etat est responsables des disparitions puisque la Constittion lui fait obligation de garantir la sécurité des personnes". "La question des disparus doit être définitivement réglée avant la fin de l'année", affirme le président de la commission, qui traite les dossiers des 4670 disparus recensée par l'organisme qu'elle remplace, le défunt Observatoire national des droits de l'homme. "Les familles exigent la vérité, et c'est leur droit", déclare Farouk Ksentini, pour qui "il faut que la vérité soit révélée, quelle qu'elle soit".

En ce qui concerne la situation dans les prisons, secouées en avril et mai de plusieurs mutineries, Farouk Ksentini constate qu'il y a "en permanence plus de 12'000 détenus préventifs" dans les prisons algériennes, et qu'une prison comme celle de Blida abrite quatre fois plus de détenus (1000) que sa capacité normale (250). Le président de la Commission consultative des droits de l'homme estime que l'Algérie a "des juges d'instruction et des chambres d'accusation imprégnés de la culture de la répression", et qui "au lieu de mener une information judiciaire avant toute chose (commencent) par jeter les gens en prison" alors que la loi prévoit que la détention provisoire doit être exceptionnelle. De même, Farouk Ksentini se dit "consterné" de la facilité avec laquelle on a jeté en prison les jeunes manifestants, de Kabylie ou d'ailleurs, "scandalisé" que l'on puisse "mourir calciné ou aspyxié" en prison et "outré" que les gendarmes accusés d'homicide en Kabylie ne soient pas encore passés en jugement; il trouve "aberrant qu'on puisse aller en prison en raison de ses écrits", comme le prévoit le nouveau code pénal et considère que la longueur de la détention provisoire (qui peut être fixée proportionnellement à la peine encourue si le détenu est finalement reconnu coupable) est une "régression incompréhensible" par rapport à la situation antérieure (maximum de 16 mois). Enfin, Farouk Ksentini se dit favorable à un amendement du Code de la famille, et à l'interdiction de la polygamie, "qui est quelque chose de monstrueux".

(Le Monde 5.7) Le Parquet de Paris a classé sans suite, le 4 juillet, une plainte déposée par neuf Algériens contre le général Nezzar pour "tortures". Le parquet a justifié sa décision par "l'absence d'éléments graves ou concordants" imcriminant le général Nezzar

(La Tribune 8.7) La Fédération internationale des ligues des droits de l'Homme (FIDH) compte envoyer une délégation en Algérie en septembre, annonce "de sources autorisées" le quotidien algérois "La Tribune". Lors de cette mission, la délégation de la FIDH devrait rencontrer des représentants de syndicats autonomes et du ministère du Travail. Le thème de la mission et des discussion serait en effet les libertés syndicales.

(La Tribune 11.7) "L'Etat est responsable des disparus, mais n'en est pas coupable", a déclaré à "La Tribune" le président de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'homme (CNCPPDH), Farouk Ksentini, pour qui la responsabilité de l'Etat découle de son devoir constitutionnel de protection des citoyens et de garantie de leur sécurité. Ce même devoir impose, selon Me Ksentini, à l'Etat celui d'indemniser les familles de "disparus", qui sont libres "d'accepter ou de refuser les indemnités" qui leur sont proposées. Le président de la CNCPPDH regrette que les organisations de familles de "disparus" (SOS Disparus, notamment) confonde sa commission avec "le pouvoir" : "Nous sommes une commission indépendante du pouvoir", affirme Me Ksentini, et la CNCPPDH a la volonté de faire "toute la lumière" sur les disparitions, et de dire "la vérité et toute la vérité, quelle que soit cette vérité, sur ce dossier".

(Jeune Indépendant 9.7) Dans une lettre ouverte au président Bouteflika, avec copie aux Premier ministre Benflis et aux généraux Larbi Belkheur et Mohamed Mediène, le président de la Ligue algérienne de défense des droits de l'homme (LADDH), Ali Yahia Abdennour, dénonce l'"ostracisme", les menaces et le harcèlement dont il fait l'objet depuis 1995, c'est-à-dire depuis la conclusion du "contrat national" de Sant Egidio. Le président de la LADDH constate que militer pour les droits de l'Homme en Algérie, c'est "être exposé au contrôle de la vie privée, du courrier, du télépgone, aux poursuites judiciaires, à la prison et parfois même au pire, la mort".Il signale que sa ligne téléphonique est "régulièrement coupée depuis la signature du contrat national", et tout dernièrement "dès l'ouverture de la campagne" des législatives, pur être rétablie sur intervention personnelle du Premier ministre Benflis, puis à nouveau coupée trois jours après. Abdennour Ali Yahia signale également qu'il est empêché d'acquérir les locaux de son cabinet d'avocat et que les impôts le taxent chaque année de plusieurs centaines de milliers de dinars alors qu'il a cessé toute activité rémunérée. Plus largement, le président de la LAADH appelle le pouvoir à "faire son mea culpa, (à) reconnaître publiquement sa responsabilité dans la torture, les disparitions forcées, les exécutions sommaires, la tragédie qui se déroule en Kabyllie". Ali Yahia Abdennour conclut sa lettre a assurant que "viendra un jour le temps de la fin de l'impunité".

(Quotidien d'Oran 14.7) La Fondation nationale américaine pour la démocratie (NED) a décerné le 9 juillet son "Prix 2002 de la démocratie" à quatre militantes de pays musulmans, dont Nadjet Bouda, de RAF et de SOS-Disparus, en signe d'hommafe à leur "courage et (leur) détermination" dans le combat contre "la tyrannie et l'injustice et pour "les valeurs de la liberté de la responsabilité civique, de la paix et de la démocratie", selon les termes de l'épouse du président américain George Bush, qui leur a remis le prix. Nadjet Bouda a affirmé que le prix qui lui était attribué "revient également à beaucoup d'autres jeunes Algériens qui militent contre toute dictature et pour la paix et la démocratie", et a remercié les militants de la société civile, les journalistes et les militants des partis politiques qui luttent "pour l'établissement d'une culture de la démocratie en Algérie". Elle a insisté sur l'enseignement de l'expérience algérienne : "combattre le terrorisme par les armes seulement ne mettra pas fin à la violence", et estimant qu'en Algérie, "la politique de la lutte armée contre le terrorisme a coûté plus de 120'000 morts, des milliers de disparus, une économie détruite et un important isolement du reste du monde", sans pour autant que "les facteurs qui ont produit le terrorisme des années 90" aient disparu : "il s'agit principalement des limites imposées à la liberté d'expression et d'association, de l'absence d'indépendance de la justice, de la corruption, mais aussi des inégalités économiques entre le Nord et le Sud de la planète".

(El Watan 4.7) Les familles de "disparus" qui manifestent chaque mercredi devanmt le siège de la Commission consultative pour la promotion des droits de l'homme (commission officielle) à Alger ont à nouveau été empêchées par la police de se réunir, le 3 juillet. Les proches de disparus, en majorité des femmes, souvent âgées, ont dénoncé les violences et les humiliations policières. Certaines manifestantes ont été frappées, jetées à terre, insultées. L'Association SOS-Disparus dénonce l'"acharnement" policier contre les familles.


SOS DISPARUS et le Collectif des familles de disparu(e)s en Algérie

Communiqué de presse

Les familles de disparus se rassemblent chaque mercredi depuis le mois d’
août 1998 devant le siège de l’Observatoire National des Droits de l’Homme
(actuelle CNCPPDH) pour revendiquer inlassablement la vérité sur le sort de
leurs proches. Les autorités, quant à elles, ont décidé de maintenir la
question des disparitions dans l’opacité notamment en interdisant le
rassemblement du 4 juillet 2002.

Au cours du rassemblement du 25 juillet dernier, les autorités ont montré la
volonté délibérée de museler la recherche de la vérité, n’hésitant pas à
réprimer sauvagement les mères de disparus.

Les familles de disparus ont toujours lutté pour que les autorités fassent
la lumière sur le dossier des disparus et se refusent à laisser sombrer dans
l’oubli leurs enfants et leurs proches..

C’est dans le cadre de cet engagement que les familles de disparus se
rassemblent tous les mercredis, et de manière symbolique, devant le siège de
la Commission nationale Consultative pour la Promotion et la Protection des
Droits de l’Homme, pour dénoncer l'indifférence avec laquelle les pouvoirs
publics accueillent la détresse des familles confrontées à un vide social et
juridique.
C’est pour rejeter l’attitude tenace et la persévérance des autorités qui
espèrent camoufler la vérité que les familles se réunissent face au siège de
la CNCPPDH.
C’est pour affronter avec détermination la vulnérabilité dans laquelle le
gouvernement les a plongées, et exiger des autorités qu’elles assument leurs
responsabilités dans la recherche de la justice pour mettre un terme à leur
cauchemar.

Les familles entendent mener ce combat jusqu’au bout et continueront à
organiser leur rassemblement devant le siège de la CNCPPDH,  des wilayates
de Constantine , Oran et Rélizane.

SOS Disparus reste convaincu que le dossier des disparus ne trouvera d’issue
que s’il est traité avec la nécessité  de servir le vérité et la justice. La
proposition, tant de fois renouvelée, de Farouk Ksentini, président de la
CNCPPDH, d’indemniser les familles de disparus apparaît comme un artifice
pour se soustraire à ses responsabilités. Les indemnisations ne trouveront
leur fondement que si elles découlent de décisions prises après que justice
soit faite.

  • Alger, le 7 juillet 2002 SOS DISPARUS Collectif des familles de Disparu(e)s


(Reuters 19.8 / Liberté 24.8) Le Roi Mohammed VI du Maroc a gracié 493 prisonniers à la veille de l'aniversaire de la "Révolution du Roi et du Peuple". 127 prisonniers ont été graciés pour le reliquat de leur peine, et 332 ont bénéficié d'une remise de peine. Cinq islamistes marocains et algériens impliqués dans un trafic d'arme ont été condamnés à mort au Maroc, mais il ne semble pas qu'ils aient bénéficié d'une grâce (commuation de peine). 27 islamistes (vraisemblablement tous marocains) sont actuellement détenus au Maroc dans le cadre d'enquêtes sur les réseaux intégristes, selon des "sources informées" marocaines, citées par le quotidien "Al Ahdat Al Maghribia"

(Le Matin 5.9) Le rapporteur spécial de la Commission des droits de l'Homme des Nations Unies sur la liberté de religion et de conviction, le Tunisien Abdelfattah Amor, se rendra en Algérie (Alger, Constantine, Oran) du 16 au 26 septembre pour rencontrer des représentants des autorités concernées par son activité, des représentants d'ONG, de communautés religions ou de conviction, d'experts et de rémoins. Cette visite est la première du genre, dans un pays dont la constitution garantit la liberté religieuse et de conviction tout en proclamant l'islam "religion de l'Etat".

(El Watan 5.9) Les comités des familles de "disparus" des wilayas de Relizane, Oran, Mostaganem, Tlemcen et le comité SOS Disparus d'Alger devraient être reçus le 5 septembre par le président de la Commission nationale consultative pour la promotion et la protection des droits de l'Homme, Farouk Ksentini.

(Jeune Indépendant 8.9) Le président de la Commission consultative de promotion et de protection des droits de l'homme (officielle), Faroiuk Ksentini, aurait reconnu devant les représentants des familles de "disparus" qu'il était tout à fait "légitime" que celles-ci s'adressent aux ONG et aux institutions internationales pourles soutenir dans leur action. Selon les associations des familles, le président de la Commission serait également d'accord que les organisations internationales se rendent en Algérie pour soutenir les familles.

(AP 11.9) A l'occasion du premier anniversaire des attentats du 11 septembre, la Fédération internationale des ligues des droits de l'Homme (FIDH) a accusé plusieurs pays, dont l'Algérie, d'avoir profité de "l'aubaine" pour légitimer de façon "inacceptable (des) violations massives des droits de l'homme" et des "restrictions injustifiées des libertés individuelles". La FIDH dénonce en outre la "surenchère de discours sécuritaires" dans plusieurs pays d'Europe, dont la France.

(Algeria-Interface 24.9 / L'Expression, El Watan, Le Quotidien d'Oran 25.9 / Le Jeune Indépendant 26.9) La Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme (LADDH), présidée par Ali Yahia Abdenour, a rendu public le 24 septembre un rapport sur la situation des droits humains en Algérie, dressant un tableau sombre de cette situation. La LADDH évalue à 200'000 le nombre des personnes tuées depuis 1990, auxquelles s'ajoutent des milliers de "disparus". La LADDH dénonce la déliquescence des structures de l'Etat et une décomposition sociale qui font de l'Algérie un "Etat de non droit" proche de la barbarie, sous le signe de l'impunité, mais également de la violation de la présomption d'innocence, qui se traduit notamment par la présentation, avant tout jugement, de présumés terroristes comme des coupables, et de la couverture politique donnée à des violences "privées" au nom de la lutte contre le terrorisme qui, "tout en favorisant l'émergence de seigneurs de guerre locaux et de maffias, a grandement participé au discrédit des institutions auprès des citoyens", selon Ali Yahia Abdennour. Pour le vice-président de la LADDH, Hocine Zahouane, une Commission d'enquête internationale sur la situation des droits de l'Homme en Algérie s'impose, ne serait-ce que pour empêcher la réédition des massacres. Cette commission pourrait comprendre des représentants des ONG de défense des droits humains, et du Commissariat de l'ONU aux droits de l'homme. Ali Yahia Abdennour a quant à lui annoncé que le Premier ministre avait indiqué à des représentants de la Chambre des Lords britannique que des rapporteurs spéciaux de l'ONU seront invités à visiter l'Algérie.

Introduction et conclusion du rapport de la LADDH : DE L'ETAT DE NON-DROIT À LA BARBARIE


(Algeria Interface 24.9 / Liberté 26.9) Pour le vice-président de la LADDH, Hocine Zahouane, le problème de la liberté religieuse ne se pose pas en Algérie "parce que le problème de la liberté tout court n'est pas posé". Pour Hocine Zahouane, la mission de l'ONU qui a séjourné en Algérie (il s'agit en fait du rapporteur spécial de la Commission des droits de l'Homme, pour la liberté de religion et de conviction, Abdelfateh Amar) ne sert qu'à "séduire les partenaires étrangers" (non-musulmans) de l'Algérie, et les "missionnaires de l'ONU (...) se font manipuler". La mission d'Abdelfateh Amar s'est effectivement rendue en Algérie à l'imnvitation du gouvernement. Le rapport rendra son rapport en novembre 2002.Le militant des droits de l'Homme rappelle que si l'Etat algérien est officiellement neutre en matière religieuse et que sa loi garantir la liberté de conscience, la Constitution stipule que l'islam est la religion de l'Etat, que le président doit être musulman, qu'il prête serment sur le Coran, et que la loi interdit à une Algérienne musulmane d'épouser un non-musulmans, le Code la famille maintenant en outre les femmes "à vie sous tutelle au nom de la chariâ".

(Observatoire 1,10) L'Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l'Homme, organisme commun de la FIDH et de l'Organisation mondiale contre la torture, dénonce les menaces de mort dont a été l'objet l'avocat Mahmoud Khelili. Selon l'Observatoire, ces menaces "semblent être liées à son activité d'avocat dans une affaire importante visant des militaires et des hauts fonctionnaires. Me Khelili est l'avocat du Directeur de l'Action sociale de la préfecture d'Oran qui dénonce l'implication de plusieurs hauts responsables militaires dans un trafic de drogue international. Poursuivi pour diffamation par le Préfet d'Oran et le ministère de la défense, le client de Me Khelili a été condamné à un an d'emprisonnement en mai 2002. Au terme de son procès, il a confirmé publiquement ses accusations. Il fait par ailleurs l'objet d'une autre plainte pour corruption, dont l'examen reste pendant". Mahmoud Khelili a déjà été menacé à de nombreuses reprises par le passé.

(L'Expression 2.10 / L'Actualité 3.10) Le président de la Commission nationale consultative pour la promotion des droits de l'Homme (CNCPDH, officielle), Farouk Ksentini, a annoncé l'octroi d'une "aide sociale" de 500'000 dinars (environ 10'000 FS, ou 7000 Euros) aux familles des "disparus" -il ne s'agit pas "d'acheter leur silence", a assuré Farouk Ksentini, dont la commission a constitué 4743 dossiers (le ministère de l'Intérieur en a pour sa part constitué 7000, et les organisations de familles de "disparus" évoquent un chiffre proche de 10'000. Pour le président de la CNCPDH, la question des "disparus" est un "drame national". L'association SOD-Disparus a de son côté remis une pétition aux partis politiques, leur demandant de placer la question des "disparus" au nombre de leurs priorités dans le cadre de la campagne électorale. L'association demande notamment de faire de la prise en charge des proches de "disparus" une priorité des assemblées locales, lesquelles devraient également aider les associations à obtenir des locaux.

Farouk Ksentini s'est également prononcé pour la libération d'Abassi Madani, "vu son âge et son état de santé", et ce "d'autant que sa peine arrive à sa fin", et pour la levée de l'état d'urgence, dont le maintien selon lui n'est plus justifié.

(El Watan 6.10 / Le Matin 7.10) Un "livre blanc sur les violences contre les femmes et les enfants" est publié à Alger par le réseau "Wassila", avec le soutien de la fondation social-déàmocrate allemande Friedrich Ebert, livre relatant les violences perpétrées tant par les groupes armés que par des forces de sécurité -lesquelles sont en outre accusées d'inaction face aux violences des groupes armés, mais aussi de violences dans le cadre familial. Le document contient de nombreux témoignages de violences, de tortures (électricité, supplice du chiffon, brûlures de cigarettes, bastonnades, pendaisons), et de viols

(Corr / Le Matin 23.10) L'Association des Juristes Berbères de France dénonce et condamne dans une déclaration les actes de violence commis par des policiers, le 13 octobre dans l'enceinte du tribunal de Tizi-Ouzou, contre des avocats. Elle assure les avocats de Tizi Ouzou "de sa totale solidarité, exige la sanction des auteurs des actes dont ils ont été victimes et la mise en liberté immédiate de tous ceux qui ont été arrêtés arbitrairement pour avoir défendu la démocratie et les libertés fondamentales".

Sur place, les avocats de Tizi-Ouzou ont observé dès le 21 octobre une grève de trois jours pour dénoncer "l'entrave à l'exercice de la profession d'avocat, (l')outrage à la robe d'avocat, (les) coups et blessures volontaires et (les) insultes envers des avocats" dont se sont rendus coupables des policiers, ainsi que la passivité du parquet.

(Jeune Indépendant 23.10 / Quotidien d'Oran, El Watan 24.10) Le constat d'un déficit accru en ce qui concerne le suivi médical des détenus dans les prisons algériennes a été dressé le 22 octobre lors d'une journée d'étude sur la médecine pénitentiaire, organisée par le ministère de la Justice. Il y a en moyenne un médecin pour 300 détenus, mais sur les 126 établissements carcéraux que compte l'Algérie (sans compter les lieux de détention extrajudiciaires évoqués par les ONG de défense des droits humains), près de la moitié (60 sur 126) ne disposent pas de médecin à temps plein, 15 ne disposent pas de psychologues, seuls 17 disposent de dentistes (mais pas de fauteuils de consultation et dopération dentaires), 89 n'ont pas de personnel paramédical, 20 n'ont ni personnel médical, ni personnel paramédical, et les psychiatres sont absents de presque tous les établissements. Au total, 92 des 126 prisons algériennes sont dépourvues de services médicaux adéquats. Le ministre délégué chargé de la Réforme pénitantiaire, Abdelkader Sallat, après avoir expliqué que le manque de médecins en milieu carcéral résultait du manque d'atrait du travail dans ce milieu ("la prison n'attire pas") a annoncé qu'il comptait introduire des "stimulants" pour y remédier. Le médecin de la prison d'El-Harrach a quant à lui dénoncé les conditions sanitaires prévalant dans les prisons, le manque d'hygiène (une douche par semaine), qui favorise la propagation des épidémies, et le manque de moyens pour un suivi médical de prisonniers souvent déjà fragilisés par leur condition sociale, avant leur incarcération. Selon lui, 78 % des détenus algériens (la population carcérale algérienne est située dans une fourchette de 32 à 36'000 personnes, soit un Algérien sur 1000) sont détenus dans les 76 prisons qui datent de la période coloniale, et l'ensemble des prisons algériennes offrent moins de 27'000 places, ce qui situe le taux d'occupation des prisons à 138 %. La prison de Serkadji (Alger), par exemple, connaît un taux de (sur)occupation de 147,5 %.

(La Tribune, El Watan 31.10) Les familles de "disparus", réagissant à la déclaration du général Touati selon qui le dossier des "disparus", "douloureux et épineux, doit être pris en charge par les instances politiques", a annoncé qu'elle demandaient audience au général, par ailleurs Conseiller aux affaires de défense auprès du président Bouteflika, pour essayer de trouver avec lui "une solution satisfaisante pour les deux parties". Les familles de "disparus" ont déclaré attendre du général Touati qu'il leur dise "la vérité" sur le sort de leurs proches.

(El Watan 4.11) Des représentants de l'ONG américaine de défense des droits humains HUman Rights Watch ont rencontré le 3 novembre des représentants des familles de "disparus". Selon un représentant de HRW, M. Goldstein, les autorités algériennes ont témoigné d'une "nette évolution" sur ce dossier.

(Le Matin 31.10) Le ministre de la Justice, Mohammed Charfi, a annoncé le 30 octobre le lancement d'une réflexion sur le "code de conduite" des magistrats et la création dans son ministère d'une direction des Droits de l'Homme.

(AP 3.11) Les avocats algériens ont décidé d'une grève le 6 novembre, en signe de solidarité avec leurs collègues de Tizi Ouzou, victimes de brutalités policières le 13 octobre au moment de l'arrestation de quatre délégués des aârchs, en plein tribunal, lors d'un sit-in tenu pour protester contre la comparution de 13 jeunes manifestants arrêtés lors des émeutes qui avaient accompagné les élections locales du 10 octobre. L'Union nationale des avocats algériens dénonce les "agressions manifestes, (les) coups et blessures, insultes et outrages" dont les avocats de Tizi ont été victimes. La grève des avocats se traduira par le boycott des audiences et de toute manifestation officielle.

(Liberté, Le Quotidien d'Oran 4.11) En dépit de la "dépénalisation de l'acte de gestion", un millier de cadres d'entreprises sont encore incarcérés pour des fautes de gestion, alors que l'abrogation en 2001 des articles 422 et 423 du Code de procédure pénale rendant les cadres des entreprises pénalement responsables des conséquences de leurs actes de gestion rend désormais responsables de ces actes, non les cadres eux-mêmes, mais les organes dirigeants des entreprises. Lors d'un séminaire organisé sur ce thème le 3 novembre, il a été confirmé que des tribunaux continuaient de poursuivre des cadres sur la base des articles abrogés, que des cadres incarcérés avant l'abrogation de ces articles étaient toujours en prison, et que des instructions se poursuivaient sur la base de ces mêmes articles abrogés. Depuis 1995, 6385 cadres auraient été incarcérés sur cette base, 85 % d'entre eux ayant ensuite été relaxés ou ayant bénéficié de non lieu.

(Le Matin 4.11) Trois membres d'un groupe armé ont été condamnés à mort, par contumace, le 3 novembre à Sidi Bel Abbès, dont le chef du groupe, l'"émir" Djilali.

(Le Jeune Indépendant, Le Quotidien d'Oran 7.11) Une marche à l'appel du Collectif des familles de disparus "SOS disparus", à Alger le 6 novembre, a été brutalement dispersée par la police. Plusieurs manifestants ont été légèrement blessés. Selon l'Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l'Homme, des manifestants ont été "bousculés et battus". La marche avait été organisée en réaction à la déclaration du président de la Commission nationale consultative des droits de l'Homme, Farouk Ksentini, au journal "Echourouk El Yaoumi", selon qui la question des "disparus" sera réglée lorsqu'ont été remis à leurs familles la somme d'un million de dinars (environ 15'000 Euros, 23'000 FS) ainsi qu'un acte de décès "pour clore le dossier". Ce à quoi SOS Disparus répond : "On ne vend pas nos enfants". Farouk Ksentini a cependant démenti avoir tenu les propos qui lui ont été prêtés, et parle d'"une interprétation des journalistes". Il a assuré aux familles que le dossier ne sera pas clos et annoncé qu'il présentera en mars 2003 un rapport au président Bouteflika, proposant des "solutions".


Communiqué du Collectif des familles de disparu(e)s en Algérie
Paris le, 7 Novembre 2002

Les familles de disparu(e)s encerclées et battues

Suite aux déclarations de Farouk Ksentini, Président de la Commission Nationale Consultative de Promotion et de Protection des droits de l'Homme (CNCPPDH), dans le journal « Echourouk El Yaoumi », du 3 novembre, préconisant l'indemnisation des familles par « 100 millions de centimes et un acte de décès pour clore le dossier des disparu(e)s », les familles des Disparu(e)s, ont décidé de se rendre à la Présidence de la République à partir du lieu de leur rassemblement hebdomadaire devant le siège de la CNCPPDH., le mercredi 6 novembre dernier.

A peine, cinq cents mètres effectués, les manifestantes en tête de cortège ont été bloquées par les forces de l'ordre déployées en nombre impressionnant qui n'ont lésiné ni sur les coups, ni sur les insultes, frappant sauvagement à coup de poing, de pieds, des femmes pour la plupart très âgées.

Un des journaliste d'« El Fadjir », qui suivait la manifestation pour les besoins de son travail, Ibrahim Fakhar, a été frappé sur les lieux avant d'être emmené au commissariat de Cavaignac et où il a, violemment, été battu. Un autre, a été menacé par un officier qui lui a affirmé : « Si tu écris un mot sur moi, je te flingue ».

SOS Disparus et le Collectif des Familles de Disparus en Algérie, à l'annonce de ce projet, avaient immédiatement réagi et réitéré leur exigence dans le traitement du dossier des Disparu(e)s en Algérie, réclamant que la Vérité et la Justice soit faites.

« La seule pensée que l'on ose croire que l'on puisse remplacer un être cher par une somme dargent et un bout de papier nous est insupportable ».

Rencontré le 5 septembre dernier, le président de la CNCPPDH, Farouk Ksentini, avait à cette époque, soutenu les revendications des familles et de leurs représentants d'Alger, de Constantine, d'Oran, de Sétif, de Rélizane et de Mostaganem. Il avait affirmé ne pas « être de ceux qui se contentent d'évoluer dans un cercle vicieux ».

Un Mémorandum lui avait été remis qui définissait les principes de base pour une démarche commune du règlement du dossier et demandait un processus de vérité sur le sort des disparus ainsi qu'une politique de réhabilitation.


(El Watan, L'Actualité 14.11) Le Réseau mondial de solidarité des parentes de personnes enlevées et disparues a adressé au ministre de l'Intérieur, Yazid Zerhouni, une lettre protestant contre "les violences commises à l'encontre de familles des personnes disparues le 5 novembre dernier à Alger, lors de la manifestation devant le siège de la Commission nationale consultative de protection et de promotion des droits de l'Homme, pour réclamer que la vérité et la justice soient rendues sur le sort de leurs proches". Le réseau proteste également contre le fait que le président de la CNCPPDH ait tenus des propos selon lesquels "il préconisait de clore les dossiers de disparition en remettant aux familles de disparus la somme de 100 millions de centimes, ainsi qu'un acte de décès" (propos que Farouk Ksentini a cependant démentis). Pour la réseau, il est inadmissible de proposer "de l'argent et un lot de papiers en échange d'être humains qui, jusqu'à preuve du contraire, sont toujours en vie". Le réseau (dont sont notamment membres les associations algériennes SOS Disparus et le Collectif des familles de disparus) demande au gouvernement algérien de tout mettre en oeuvre pour que "la vérité et la justice soient rendues sur le sort des personnes enlevées et disparues", et de mettre un terme à toute forme de "répression, de violence et de harcèlement" à l'encontre de leurs familles.

Selon le président de la CNCPPDH, Farouk Ksentini, 4743 dossier de disparitions ont été reçus par la Commission, qui a effectivement proposé une aide matérielle aux familles dans l'attente d'une solution définitive du problème, mais n'a ni fixé le montant de cette aide, ni proposé d'"échanger" l'indemnisation proposée contre l'abandon des démarches.

(Le Soir 16.11 / L'Actualité, Le Jeune Indépendant 18.11) L'avocat Mahmoud Khelili a, dans un long entretien au "Soir", accusé l'organisation de parents de disparus "SOS-Disparus" d'avoir été "récupérés de manière frauduleuse, dans un dessein pas honorable du tout", par des "gens installés essentiellement à Paris" et qui ont "décidé de brader le mouvement contre quelques avantages offerts par le pouvoir ou le système". Tout en affirmant que "rien ne (l')oppose à ces gens" et qu'il n'a "pas de contentieux personnel avec eux", et tout en revendiquant avoir lui-même "mis sur pied" SOS-Disparus, Mahmoud Khelili accuse "les consorts Yous (Nacera Yous, Nesrollah Yous) avec la FIDH" (Fédération internationale des ligues des droits de l'Homme" d'avoir "entamé le processus de bradage" et un "rapprochement avec le pouvoir pour permettre à la FIDH de pénétrer en Algérie, de se passer du concours des défenseurs des droits de l'homme (...) et venir directement puiser ici tout ce dont elle a besoin comme informations à exploiter contre le pouvoir algérien". Quant au "Collectif des familles de disparus", il s'agirait selon l'avocat d'une "association écran" et d'une "invention de certains responsables de la FIDH", comme Driss Yazami ou Patrick Baudoin. Mahmoud Khelili affirme qu'aujourd'hui, "la majorité des familles de disparus sont affiliées à SOS-Disparitions forcées", crée sous l'égide du Syndicat national des avocats, et qu'une trentaine de familles seulement sont regroupées dans le Collectif des familles de disparus.

Ni l'Association nationale des familles de disparus (ANFD), ni le collectif SOS Disparus n'ont encore été "agréés" par le ministère de l'Intérieur.

L'avocat Ahmed Simozrag, membre de la direction du FIS, installé en Suisse, a saisi son confrère Farouk Ksentini, président de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'Homme, de la situation des "disparus", et lui propose de créer une "juridiction spéciale indépendante" qui aurait à traiter les dossiers des "disparitions", et à en juger les responsables.

(El Watan 14.11) Amnesty International a lancé un appel au ministre algérien de la Justice, Mohamed Charfi, après avoir reçu des informations selon lesquelles deux commerçants de Dellys, Brahim Ladada et Abdelkrim Khider, ont été torturés par les forces de sécurité après leur arrestation le 23 mars 2002. Ladada et Khider ont été contraints de faire sous la dictée de leurs tortionnaires des déclarations reconnaissant leurs liens avec "d'une part, un groupe armé et d'autre part, un avocat algérien défenseur des droits humains vivant en exil en Suisse", Rachid Mesli, lui même accusé de complicité avec un groupe armé et condamné à trois ans de prisons (Amnesty le considère comme un prisonnier d'opinion). Khider et Ladada ont, selon Amnesty International, été "détenus à la base de Ben Aknoun une douzaine de jours et auraient été entièrement déshabillés pendant toute la durée de leur séjour à la base. Ils ont déclaré avoir été battus à plusieurs reprises". Il aura fallu plusieurs semaines à leurs parents pour apprendre où ils étaient détenus (à Serkadji, Alger). Amnesty rappelle que "depuis 1992, des milliers d'Algériens ont été condamnés au terme de procès inéquitables après avoir été déclarés coupables, en des termes généraux et vagues, d'entretenir des liens avec le 'terrorisme'".

(Le Jeune Indépendant, Le Quotidien d'Oran7.11) Un appel signé par 38 personnalités (dont de très nombreux oulémas) du "monde arabo-musulman" (Egypte, Syrie, Pakistan, Maroc, Tunisie, Algérie) demande au président Bouteflika de libérer Abassi Madani et Ali Benhadj. L'appel a été transmis au président le 30 octobre. Il est signé notamment par Youssef El-Qaradhaoui, Rached El-Guenouchi, Abdelkrim El Khatib, Ahmed KadhiTaoufik El Chaoui, l'ancien Premier ministre Abdelhamid El Ibrahimi, le président de la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme Abdennour Ali Yahia (mais, remarque "Le Quotidien d'Oran", ni Mahfoud Nahnah ni Abdallah Djaballah, les leaders des deux principaux partis islamistes légaux algériens, n'ont signé cet appel) Ils se disent "très peinés et même inquiets de l'état de santé" des deux leaders du FIS. La santé d'Abassi Madani (72 ans) "se détériore chaque jour un peu plus" et celle d'Ali Benhadj, détenu à l'isolement, est si fragile qu'il "court un danger certain" pour sa vie.

(Le Matin 11.11) La famille de Ali Benhadj a adressé une lettre au président Bouteflika, l'invitant à se rendre à la prison militaire de Blida où est détenu le dirigeant islamiste, "comme l'avait fait Liamine Zéroual en 1994", pour entamer des négociations avec le FIS. La famille d'Ali Benhadj demande également au président de "donner suite à sa démarche de réconciliation nationale" en faisant procéder la libération de l'ancien numéro 2 du FIS. Plusieurs personnalités algériennes, pas toutes islamistes, ont également demandé au président de libérer les dirigeants du FIS Abassi Madani et Ali Benhadj : Le président du MSP, Mahfoud Nahnah, a lancé un appel en ce sens, mais également le Président de la Commission nationale consultative pour la promotion des droits de l'Homme, Farouk Ksentini. Ces appels ont été dénoncés par le président de l'ANR, l'ancien Premier ministre Redha Malek, qui pose comme condition à toute libération que "ces Messieurs fassent des déclarations pour condamner le terrorisme", par Leïla Sslaoui, qui dénonce une "campagne orchestrée et planifiée" des ennemis de l'armée, "seul rempart contre l'intégrisme", et par le Secrétaire général du MDS, El Hachemi Cherif, pour qui ces démarches ont pour but de "faire prévaloir la démarche de réconciliation nationale à laquelle Bouteflika oeuvre par tous les moyens", et participent d'une "campagne de réhabilitation de l'islamisme".

De toutes manières, si les autorités algériennes s'en tiennent au droit en vigueur, Abassi Madani et Ali Benhadj devraient être libérés au terme de leur peine, en juin 2003.

(Le Matin 7.11) La grève des avocats algériens, à l'appel de leur Union nationale, pour protester contre les brutalités policières dont ont été victimes des avocats de Tizi Ouzou le 13 octobre (quatre d'entre eux ont été blessés), a été massivement suivie le 6 novembre dans tous le pays. Les barreaux de Kabylie ont dénoncé "la fascisation de la société".

(AAC 20.11 / Quotidien d'Oran 21.11) Une bataille rangée entre détenus, suivie d'un incendie et d'un début de mutinerie, ont fait 26 blessés dans la nuit du 18 au 19 novembre dans la Maison d'arrêt de Tebessa. Selon certaines sources, l'incendie aurait été allumé lors d'une bataille rangée entre détenus de Tebessa et détenus de Cheria, et selon d'autre sources il aurait été allumé par un détenu n'ayant pas reçu son panier de Ramadan, envoyé par ses proches, et la batailla rangée aurait eu lieu après l'incendie. L'incendie s'est déclaré dans une salle où s'entassent 180 détenus, dans une prison dont la capacité est de 400 détenus mais qui en contient près du double, privés de douches pendant des semaines, voire des mois, vivant au milieu des parasites, mal nourris et maltraités.

(L'Actualité 21.11) Trois ans après l'assassinat du dirigeant du FIS Abdelkader Hachani, "L'Actualité" se demande si le même sort est promis aux deux autres dirigeants, l'un emprisonné (Ali Benhadj) et l'autre en résidence surveillée (Abassi Madani), qui devraient être libérés en juin prochain, à l'expiration de leur peine. Le quotidien se demande si les deux dirigeants islamistes seront mis "sous protection particulière pour leur éviter ce qui est arrivé un 21 novembre 1999, à Hachani", si Benhadj ne devrait pas être mis en résidence surveillée comme Abassi Madani "pour circonscrire le risque", tant le risque de leur assassinat que le risque de leur retour sur la scène politique, même si l'un et l'autre sont gravement malades (les conditions de détention d'Ali Benhadj n'étant pas pour rien dans son état de santé). Abassi Madani, en résidence surveillée depuis 1997, ne peut recevoir librement que les membres de sa famille.

(Le Matin 24.11) Des délégués du Comité international de la Croix Rouge (CICR) ont effectué du 19 octobre au 11 novembre une septième série de visites aux détenus de prisons algériennes, et de lieux de détention (commissariats, gendarmerie) dépendant de la police ou de l'armée. Sept prisons et doute lieux de garde à vue ont été visitée. Plus de 2800 personnes au total y étaient incarcérées. Les délégués du CICR se sont intéressés en particulier aux conditions matérielles de détention, à l'état de santé des détenus et à leurs relations avec leur famille. Ils ont transmis leurs conclusions aux autorités judiciaires et au ministère de la Justice.

(El Watan 28.11) Huit détenus de la prison de Béchar, accusés de "destruction de biens publics et d'incendie volontaire" lors de la mutinerie du 9 mai 2002 dans la prison de Béchar, ont été condamnés à trois ans de prison ferme, douze autre à deux ans de prison, et deux ont été acquittés, le 20 novembre par le tribunal de Béchard. La mutinerie avait éclaté pour protester contre le comportement des gardiens et les mauvaises conditions de détention. 50 détenus et quatre gardiens avaient été blessés dans les troubles. Plusieurs autres prisons avaient été le théâtre d'événements comparables en avril et mai 2002 : une dizaine de mutineries avaient fait plusieurs dizaines de morts (22 à Chelghoum El Aïd, 22 à Serkadji) et des centaines de blessés (notamment à El Harrach, Constantine, Bechar). Depuis dix ans, des centaines de détenus sont morts dans les prisons algériennes lors de mutineries ou lors de leur répression ou dans des circonstances mal élucidées : 200 détenus ont été tués par balles à Berrouaghia en 1994, 27 détenus sont morts asphyxiés dans un fourgon cellulaire entre Alger et Relizane en juin 1997, au moins une centaine de détenus (et quatre gardiens) ont été tués dans une mutinerie à Serkadji en février 1995, etc...

(El Watan 2.12) Le chef d'un groupe armé de Salah Bey, Abou Ghaffar, a été condamné à mort à Sétif le 18 novembre par la Chambre criminelle. pour détention d'arme à feu, constitution de groupes armés, propagation de terreur, vols, racket, destruction de biens publics et privés et meurtre.

(Algeria-Watch 16.12 / L'Observatoire 18.12) Algeria-Watch informe le 16 décembre du harcèlement subi par Salah-Eddine Sidhoum, militant des droits humains -et collaborateur d'Algeria-Watch. Selon AW, "le dimanche 15 décembre au matin deux civils munis de talkie-walkies se sont présentés au domicile de M. Salah-Eddine Sidhoum pour lui remettre une convocation pour le 16 décembre à 14h à la 3e Brigade mobile de la police judiciaire (BMPJ) d'El Madania. Les deux hommes ne trouvèrent que la vielle tante de M. Sidhoum, âgée de 83 ans, qui leur dit que ce dernier était absent du domicile depuis 8 ans. Ils lui ordonnèrent de prévenir Mme Sidhoum de se présenter le jour indiqué à la BMPJ d'El Madania. Fait curieux, M. Sidhoum n'a pas été convoqué par le commissariat de El Mouradia, quartier où il réside mais par le PCO (Poste de commandement opérationnel) d'El Madania rattaché au centre de Châteauneuf et réputé comme centre de torture. C'est la raison pour laquelle il est à craindre que Mme Sidhoum, si elle se présentait, subisse des pressions ou des sévices". Algeria-Watch rappelle que "Cette convocation fait suite aux harcèlements que subit la famille Sidhoum depuis janvier 2002, date à laquelle Salah-Eddine Sidhoum a publié en collaboration avec Algeria-Watch des dossiers sur les violations des droits humains commis par l'Etat algérien, notamment des listes de disparus et de torturés. Depuis, l'épouse de M. Sidhoum reçoit régulièrement des appels téléphoniques nocturnes et anonymes. La dernière fois, il y a à peine un mois, il lui a été dit: "Nous arrivons, vous allez voir ce que vous allez subir"." Algeria-Watch "dénonce ces pratiques répressives à l'encontre de militants de défense des droits humains, pratiques qui violent les droits fondamentaux à la liberté d’expression et de circulation des citoyens" et "en appelle au gouvernement algérien de faire cesser les harcèlements à l’encontre de famille de M. Sidhoum et de déclarer M. Sidhoum libre de toute condamnation par des procédures appropriées et connues".

L'Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l'Homme, organisme conjoint de la Fédération internationale des ligues des droits de l'Homme et de l'Organisation mondiale contre la torture, a lancé un appel aux autorités algériennes pour leur demander d'assurer la sécurité et l'intégrité physique de Mme Sidhoum et de tous les membres de sa famille, de mettre un terme aux agressions et au harcèlement des militants des droits de l'homme, et de respecter les textes internationaux en matière de droits humains.

(El watan 23.12) "Nous espérons fermer, à moyen et à long terme, les 78 prisons vétuses que compte le pays". a déclaré le ministre de la Réforme pénitenciaire, Abdelkader Sallat, lors d'une tournée de visite de plusieurs centres de détention concernés par cette intention (Boufarik, qui date de 1896, Blida, qui date de 1836, Koléa...). La prison de Koléa accueille 104 détenus pour une capacité de 60 places, celle de Blida 800 détenus pour 300 places, celle de Boufarik 194 détenus pour 120 places. Le ministre a annoncé qu'en 2004, 12'000 places de détention dans des prisons modernes seront disponibles (2500 nouvelles places dès les premiers mois de 2003, 6000 nouvelles places par la suite).

Dans sa lettre à William Pace, Hichem Aboud s'appuie sur le troisième mode de saisine de la Cour Pénale Internationale, qui donne droit à une ONG de saisir le procureur de la Cour Pénale Internationale et à celui-ci d'ouvrir une information sur la base de renseignements obtenus d'Etats, d'organisations gouvernementales et d'ONG. Hichem Aboud se réfère aux renseignements concernant "les crimes contre l'humanité commis par la régime dictatorial algérien" et en possession d'ONG comme Amnesty International, la FIDH, Human Rights Watch ou Reporters sans Frontières; il se réfère également aux plaintes que lui-même a déposées auprès de la justice algérienne, et à la demande d'ouverture d'une information judiciaire adressée par lui-même au président Bouteflika en février 2002; considérant que "le régime dictatorial algérien dirigé par un clan maffieux de généraux est coupable de crimes antiréeurs et postérieurs à la date du 1er juillet 2002", il demande donc à la coordination des ONG pour la CPI d'user de son "influence auprès du Conseil de sécurité de l'ONU pour que soit ouverte une information judiciaire par la Cour Pénale Internationale ou autre instance juridique du type du Tribunal Pénal International" contre le président Bouteflika ("pour sa complicité, en couvrant par son silence les véritables décideurs qui l'ont porté au pouvoir", et parce qu'il est "responsable en tant que chef suprême des armées pour tous les crimes commis par les éléments de l'institution militaire"), les généraux Mohammed Lamari (chef d'état-major de l'armée algérienne depuis juillet 1993), Mohamed Mediène et Smaïn Lamari ("les deux patrons des services de sécurité dont la pratique de la torture est systématique"), Larbi Belkheir ("parrain (du) clan maffieux"), Touati, Khaled Nezzar ("bien qu'officiellement il est déclaré à la retraite, il continue néanmoins à faire partie du pouvoir occulte véritable décideur"), Gheziel, Aït Abdessalem, Fodhil Cherif Brahim, Kamel Abderrahmane, Saheb Abdelmadjid (chefs des 1ère, 5ème et 6ème régions militaires), Boustila (commandant de la gendarmerie) et le colonel Ali Tousi (chef de la police). Pour "SOS Algérie", ces hommes "détiennent le pouvoir réel en Algérie" et sont, "aux yeux du peuple algérien et de ses amis, les responsables de crimes contre l'humanité tels que décrits dans l'article 7 des statuts de la Cour Pénale Internationale" : meurtre (SOS Algérie évoque le chiffre de 200'000 personnes assassinées), disparitions forcées (10'000 disparus), torture, emprisonnement arbitraire, persécution ("contre des groupèes identifiables pour des motifs religieux", notamment), déportation ou transfert forcé de population (internement de milliers de personnes dans les camps du Sud entre 1992 et 1995, déplacement des populations rurales des zones touchées par le terrorisme, exil forcé, émigration due au "chaos économique"...

"Le Collectif SOS Algérie appelle la communauté internationale, les amis sincères de l'Algérie, les femmes et les hommes épris de paix et d'humanisme à apporter au peuple algérien son soutien afin que soit brisé le silence et que soit mis un terme à l'impunité des généraux assassins".

(AP 3.12 / El Watan 4.12) Le président Bouteflika a décidé de grâcier 5000 condamnés de droit commun à l'occasion de la fête de l'Aïd el Fitr (fin du Ramadan), le 5 novembre. Les grâciés bénéficieront soit d'une remise totale de la peine, soit d'une remise partielle. Sont exclus de cette grâce les condamnés pour terrorisme et subversion, viol, attentat à la pudeur avec violence, inceste, vol, escroquerioe, recel, détournement de deniers publics et privés, corruption, trafic d'influence, fausse monnaie, trafic de stupfiants, contrebande, actes de violence et d'atteinte aux biens commis à l'intérieur d'un établissement pénitentiaire. En une année, le président Bouteflika aura gracié plus de 12'000 prisonniers de droit commun, et commué la peine de 115 condamnés à mort.

2003

(Le Jeune Indépendant 1.1) Un décret paru dans le Journal Officiel du 4 décembre créée un "Comité d'animation et de suivi" chargé de préparer la réforme de la Justice, qui avait fait l'objet d'un rapport d'une commission présidée par le professeur Mohand Issaâd.

(Le Monde 8.1 / L'Expression, L'Actualité 9.1) Selon une source "proche de la gendarmerie" citée par "Le Monde" dans un dossier consacré aux "disparitions" en Algérie, pas moins de 7000 cas de "disparitions" ont été signalés, dont la gendarmerie n'aurait pu élucider que moins de la moitié (moins de 2500). Une "source autorisée de l'armée" évoquée par "Le Monde" assure qu'aucune personne n'est plus détenue en secret, ce qui conduirait à la conclusion que tous les "disparus" seraient morts, à l'exception de ceux qui auraient rejoint les maquis islamistes (ou d'autres groupes armés) : "Je vous réponds de manière très claire : il n'y a plus un seul détenu au secret, où que ce soit, dans un local sous contrôle de l'Etat, ni à Blida, ni ailleurs, ni dans le Sud. Je suis formel", affirme la "source autorisée de l'armée". Selon cette même source, confirmée à "L'Actualité" par le président de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'Homme (CNCPPDH), Farouk ksentini, 3030 corps ont été enterrés "sous X". Chargée depuis 1995 de coordonner le dossier, la gendarmerie admet officieusement avoir recensé 7046 dépôts de plainte pour disparitions forcées au cours de la décennie '90. Elle affirme avoir enquêté sur tous ces cas, et n'avoir pas d'explication que 4740 d'entre eux. Quant aux cas élucidés, aucun d'entre eux ne feraient apparaître une responsabilité des forces de sécurité. Abdennour Ali Yahia, président de la Ligne algérienne de défense des droits de l'Homme (LADDH), affirme quant à lui que la Sécurité Militaire détient un autre fichier de "disparus" que celui de la gendarmerie, et l'avocat Mostefa Bouchachi déclare que "personne ne pourra apporter de réponse à ce dossier tant qu'il n'y aura pas eu un changement radical dans le pays, tant que ceux qui sont responsables de la majorité de ces disparitions détiendront toujours le pouvoir".

Farouk Ksentini, pour qui "la question des disparus est un problème moral", doit remettre au président Bouteflika un rapport définitif sur la question des "disparus", le 31 mars (un pré-rapport lui a déjà été remis, le 31 octobre). A "L'Actualité", il estime à "autour de 10'000" le nombre des "disparus" enlevés par des groupes armés, et à environ 7000 le nombre de ceux dont les proches rendent les services de sécurité responsables de la disparition (et dont les 3030 personnes enterrées sous X pourraient faire partie). Farouk Ksentini évoque trois solutions possibles, non exclusives les unes des autres, au problème des "disparus" : d'abord, un "traitement moral" impliquant la "reconnaissance" par l'Etat qu'il a "commis des fautes" ("et pourquoi pas une repentance, s'il s'avère que les disparitions sont le fait délibéré des institutions étatiques ?", ajoute même Farouk Ksentini) : "il n'y aurait rien de déshonorant à cela"; ensuite, le recours à la justice, si les familles de "disparus" s'y adressent collectivement, ce qui suppose qu'on leur permette "de se regrouper dans le cadre d'associations et d'entamer des actions en justice"; enfin, le traitement social du problème, par une indemnisation matérielle du tort fait aux familles par la disparition de leurs proches : "beaucoup de familles le réclamernt car elles sont dans un besoin extrême". Enfin, le président de la CNCPPDH évoque une amnistie générale, à son avis "incontournable", car "toutes les guerres se terminent ainsi" -mais il s'agit "d'une décision politique qui sera prise en temps voulu". Pour Farouk Ksentini, les premiers bénéficiaires de cette amnistie seraient "les gens qui appartiennent aux institutions (étatiques) accusées d'avoir procédé (aux) disparitions". ce qui entraînerait "la cessation de toutes les recherches". L'amnistie profiterait évidemment "à un certain nombre de criminels, mais elle serait dans l'ordre des choses". Farouk Ksentini souhaite que cette amnistie se fasse "après l'établissement de la vérité", mais estime que si elle se faisait avant, elle pourrait encourager "certains à libérer leur conscience sans redouter les conséquences de leurs aveux", car "c'est souvent des décennies plus tard que les langues se délient" (comme en France avec la Guerre d'Algérie).

Farouk Ksentini affirme être "à la recherche de la vérité", mais reconnaît que "la recherche de cette vérité (est) particulièrement difficile" puisque "ces disparitions ont eu lieu dans une période de chaos, il y a de cela de nombreuses années", à une époque où l'Algérie était en "état de chaos", où "l'Etat avait pratiquement disparu de toutes les régions du pays" où "plus personne ne contrôlait quoi que ce soit" : "on retrouvait des têtes coupées sur le bord de la route. La vie humaine ne valait plus rien, des deux côtés. Tout cela a favorisé des dépassements de toutes sortes, des actes de banditisme, des réglements de compte, des exécutions extra-judiciaires, etc."

"Le Monde" rappelle cependant que les "disparitions" ne datent pas toutes d'"il y a de cela quelques années", en relevant le cas de Kamel Boudahri, arrêté à Mostaganem le 13 novembre 2002, en même temps que son frère Mohammed, par sept hommes armés, qui les ont emmené à la caserne militaire, les ont interrogés séparément, ont relâché Mohammed (qui témoigne avoir été "maltraité, humilié, mais pas torturé"), ont gardé Kamel, pour annoncer ensuite au milieu de la nuit à ses parents que celui-ci leur avait échappé "nous avons tiré sur lui, mais il a réussi à s'enfuir" -version qui a rappelé immédiatement à la mère du "disparu" celle que les Français donnaient pendant la Guerre d'Algérie des disparitions d'Algériens.

Pour Hocine Zehouane, vide-président de la LADDH, il n'y a pas d'autre "issue libératoire" que l'établissement de la vérité : "L'Algérie devra, tôt ou tard, faire sa catharsis" et l'Etat devra "se pencher sur ses propres dérives", quitte à prononcer, ensuite, une amnistie générale.

(L'Actualité 12.1) Ali Benhadj ne sera pas gracié, annonce "L'Actualité". Le leader islamiste (qui a d'ailleurs lui-même et par avance refusé toute mesure de grâce, et donc de la demander) devrait donc purger la totalité de sa peine de douze ans de prison, laquelle se terminera en juin prochain, à moins que, comme d'ailleurs "L'Actualité" les y invite, les "décideurs" ne choisissent de rejuger Ali Benhadj en le maintenant en prison à l'expiration de la peine à laquelle les même "décideurs" l'ont condamné en 1992.

(Le Matin, L'Actualité 18.1 / El Khabar, Liberté, El Watan 19.1 / Le Quotidien d'Oran 20.1) Le président de la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme, dans une conférence nationale tenue le 17 janvier sur le thème de "la disparition forcée, une arme de guerre", avec les associations de défense des familles de "disparus" (SOS Disparus et l'Association nationale des familles de disparus) et en présence de représentants de plusieurs partis politiques légaux (le FFS et le PT) ou non (le FIS, Wafa), a appelé le 18 janvier à un "changement de système" en Algérie, faisant de ce changement la condition du réglement du dossier des "disparus". "En Algérie, un général ne sera jamais jugé. C'est pour cela que nous demandons l'intervention de la justice internationale (et) qu'il faut changer le régime et non pas opérer des changements au sein du même régime. Sans cela, il n'y aura pas de réconciliation, il n'y aura pas de paix", a déclaré Ali Yahia Abdennour, dénonçant l'impunité qui continue de prévaloir en Algérie pour toutes les violations des droits humains, et expliquant par cette impunité le choix de la LADDH de s'adresser aux instances internationales pour qu'elles se prononcent sur les "disparitions" et les autres violations des droits de l'homme. Ali Yahia Abdennour a rappelé que la Commission des droits de l'Homme des Nations Unies a élevé la pratique des disparitions forcées au rang de crime contre l'humanité, ce qui rend possible la saisine des instances internationales. Pour le président de la LADDH, si le nombre de "disparitions" s'élève officiellement à 7000, ou 7200 selon les fiches individuelles établies par la LADDH et les associations de familles, on en compterait réellement 18'000 (le président Bouteflika avait évoqué le chiffre de 10'000). Selon Nacera Dutour, de SOD Disparus, un tiers des disparitions se seraient produites dans la wilaya d'Alger. Le ministre de l'Intérieur, Yazid Zerhouni, ayant affirmé qu'un grand nombre de "disparitions" étant dues soit à des accrochages entre groupes armés et forces de sécurité, soit au passage des "disparus" dans les maquis islamistes, Ali Yahia Abdennour répond que les disparus se comptent par milliers (alors que selon les aurorités, les groupes armés ne comptent plus que moins d'un millier de membres), et que dans un très grand nombre, voire la majorité, des cas, les familles témoignent "que les concernés ont été enlevés de leur domicile par des individus" ou ont disparu après avoir été "convoqués par les services de sécurité" et s'être rendus à ces convocations. Pour la présidente de SOS disparus, Nacera Dutour, répondant à une source officieuse algérienne qui affirmait au "Monde" que tous les "disparus" étaient morts, "nos disparus sont vivants (...) dans des prisons et des casernes, dont celle de Ben Aknoun".

La Conférence sur les disparitions, organisée par la LADDH, SOS Disparus et l'ANFD à Birkhadem, est la première du genre à être autorisée par les pouvoirs publics, ce que ses organisateurs expliquent par la visite du Premier ministre Benflis en France. Cependant, pour avoir déclaré dans un meeting en mai 2001, après que le général Nezzar ait du quitter précipéitemment la France pour éviter d'y être arrêté sur plainte de parents de victimes de la répression en Algérie, qu'il ne fallait "pas oublier l'existence du droit international qui a failli livrer à la justice les tortionnaires", Ahmed Djeddaï, Premier secrétaire du FFS, a été auditionné le 18 janvier, sur plainte du ministère de la Défense nationale (qui l'accuse d'avoir ajouté : "dorénavant, aucun général ne pourra sortir du pays").

(Algeria-watch 16.1 / HRW 14.1) L'organisation américaine de défense des droits humains Human Rights Watch a rendu public son rapport sur la situation des droits de l'Homme dans le monde. S'agissant de la situation en Algérie, HRW dresse un constat sévère, tout en reconnaissant que la violence politique y a diminué, et note que, malgré un climat général d'impunité, la communauté internationale se montre moins critique à l'égard du régime.

HRW note que, tout en diminuant, la violence politique continue à faire en moyenne 125 morts par mois, essentiellement des civils, alors que depuis des années des responsables gouvernementaux affirment que "les groupes armés algériens vivent leurs derniers jours". Les violations des droits humains diminueraient également, mais moins grâce à de meilleures garanties que grâce à la baisse de la violence politique. L'ONG dénonce le fait que le travail des défenseurs des droits humains soient "entravé par des actes ciblés de harcèlement, par des poursuites judiciaires et par la peur éprouvée à sortir de l'anonymat et à témoigner". L'impunité continue de régner, et la Sécurité militaire continue d'être "au-dessus des lois, ne rendant aucun compte au public de sa conduite, notamment lors des interrogatoires sous torture des suspects". Les coupables d'"actes abusifs" lors de la répression en Kabylie ont été très rarement traduits en justice, et la question des "disparus" n'a pas été résolue. Pourtant, malgré ce climat persistant d'impunité, de violence et de violation des droits humains, la communauté internationale s'est montrée moins critique en l'endroit de l'Algérie. L'Union Européenne (dont HRW note que la politique à l'égard de l'Algérie est toujours directement influencée par la France) et les USA, en particulier, ont été plus discrètes, discrétion favorisée par l'ambiance "antiterroriste" de l'après 11 septembre.

(AP 20.1) Un islamiste algérien emprisonné au Maroc, Mohamed Bourouis, a été "enlevé" le 18 janvier par des policiers à la prison de Kénitra, a annoncé le 20 janvier à Rabat son avocat. "Des policiers l'ont emmené. Il s'agit d'un enlèvement", a déclaré Abdallah Lamari. Mohamed Bourouis a été condamné à 1996 à 15 ans de réclusion pour trafic d'armes à destination des groupes islamistes armés algériens. Il a en outre été condamné à mort par contumace en Algérie. Son avocat craint une éventuelle extradition vers l'Algérie. Au moins six Algériens impliqués dans des affaires de "terrorisme" sont actuellement détenus au Maroc.

(La Tribune, Le Quotidien d'Oran 23.1) Le Collectif des familles de disparus demande à la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'Homme d'étudier la question du statut d'"épouse de disparu". Les épouses des "disparus" sont en effet confrontées quotidiennement à des difficultés considérables pour accomplir les actes les plus élémentaires de la vie courante, et perdnt souvent, en l'absence de preuve de la vie ou de la mort de leur conjoint, l'exercice de droits sociaux comme les primes de scolarité.

Selon un document établi par les associations des familles de "disparus" et la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme, Près de 67 % des disparitions recensées par ces associations se sont produites en 1994 et 1995, et 32,8 % se sont produites dans la seule wilaya d'Alger (12,1 % dans celle d'Oran, 9,9 % dans celle de Tipaza, 6,5 % dans celle de Blida, 4,8 % dans celle de Constantine, 4,7 % dans celle de Médéa). La moitié des disparitions se sont produites dans les wilayas du centre, sous couvre-feu de fin 1992 à 1996. 38,3 % des enlèvements ont eu lieu entre minuit et six heures du matin, 48,5 % des "disparus" ont été enlevée à leur domicile. La liste des associations attribue 21 % des disparitions à la police, 13 % aux "forces combinées" de l'armée, 3 % à la gendarmerie, 3 % à la Sécurité Militaire, 3 % aux parachutistes. 5 % des ravisseurs étaient en civil, 8 % étaient des miliciens locaux. Le lieu de détention secrète le plus souvent évoqué est Châteauneuf (32,6 % des cas), devant Bourouba (14 %), Ben Aknoun (13,2 %) et Blida (7 %). 62 % des "disparus" avaient entre 21 et 35 ans au moment de leur elèvement, 8,5 % moins de 20 ans, 4,5 % plus de 50 ans. Les "disparitions" ont presque cessé à partir de 1998, au moment, relèvent les associations, de l'arrestation du chef de milice de Relizane Mohamed Ferguène.

(L'Expression 26.1) Selon "L'Expression", qui s'appuie sur "des sources judiciaires proches du dossier", Ali Benhadj devrait "dans tous les cas de figure" être libéré à l'expiration de la peine à laquelle il a été condamné, le 30 juin, date à laquelle il aura intégralement purgé cette peine (de doute ans de réclusion criminelle). Selon la source évoquée par "L'Expression", "le camp éradicateur, toujours opposé à la libération (de Benhadj), jugé dangereux, ne peut rien faire pour y parer", pas même exiger un nouveau procès (ce que le principe de "l'autorité indiscutable de la chose jugée" rendrait impossible). Toujours selon les "sources judiciaires" citées par le quotidien, la libération de Benhadj "est inléuctable à cause des pressions internationales de plus en plus insistantes".

(L'Actualité 16.2 / El Watan 17.2) Une délégation d'Amnesty International, le première depuis 2000, est arrivée à Alger le 15 février, a annoncé la Commission consultative algérienne de protection et de promotion des droits de l'Homme (CNCPPDH, officielle). La délégation d'AI, conduite par Philip Luther, rencontrera des acteurs de la société civile et assistera à l'Assemblée générale de la section algérienne d'Amnesty. Elle a rencontré le 16 février des représentants de SOS-Disparus. Elle rencontrera notamment le président de la CNCPPDH, Farouk Ksentini et le président du Syndicat national des avocats algériens, Mahmoud Khelili.

(AP, APS 19.2 / Liberté 20.2) La délégation d'Amnesty International en visite en Algérie a présenté le 19 février à la presse les différents volets de sa mission, visant globalement à "approfondir la connaissance de la situation générale des droits humains en Algérie", et l'état de la culture des droits de l'Homme dans le secteur éducatif. La délégation d'Amnesty, conduite par Roger Clark, doit également enquêter sur les violences faites aux femmes, et sur la situation en Kabylie. La délégation d'AI a notamment insisté sur la nécessité que les responsables des forces de sécurité, particulièrement de l'armée, s'expliquent sur "les disparitions forcées qui ne sont pas toujours le fait des terroristes puisque les services de sécurité et des milices ont leur part de responsabilité".

Roger Clark a insisté sur le souci d'AI de "lutter contre l'impunité et faire prévaloir la justice et la vérité lorsque des cas de violations des droits humains sont constatés".

La délégation d'AI, qui est arrivée à Alger le 15 février, doit rester en Algérie deux semaines. Les dernières visites d'Amnesty en Algérie remontent à mai et novembre 2000, mais la délégation actuelle estime que, sur le fond, la situation des droits humains ne s'est pas améliorée depuis.

(L'Expression, Le Jeune Indépendant 24.2) La délégation d'Amnesty International en visite en Algérie en rencontré le 23 février les représentants de la Ligue algérienne pour la défense des droits de l'Homme (LADDH). Les "disparus", les détenus politiques et les violations des droits humains ont été au coeur de la rencontre, lors de laquelle la LADDH a souligné "que la situation des droits de l'Homme en Algérie est indossiciable du régime politique en place, autoritaire et totalitaire". La LADDH a "réitéré la nécessité de la libération de tous les détenus politiques et d'opinion", a dénoncé "toutes les violations des droits de l'Homme" commises en Kabylie, ainsi que "le règne de l'impunité". Pour la Ligue d'Ali Yahia Abdennour, "le respect des droits de l'Homme passe inévitablement par la démocratisation de la vie publique", dans un pays qui "reste, malgré les discours, une démocratie de façade gérée par les tenants de la répression, de la corruption, du clientélisme et de la fraude fiscale". S'agissant des "disparus", la LADDH affirme que le pouvoir "sait le sort réservé aux disparus" et exige qu'il le dise : "s'ils sont vivants, il doit les libérer ou les traduire en justice; s'ils sont morts, il doit localiser les lieux où ils ont été enterrés et informer leurs familles".

La délégation d'Amnesty doit encore rencontrer le président et les membres de la Commission nationale (officielle) consultative de protection et de promotion des droits de l'Homme.

(Le Matin 16.2) Un membre présumé d'un groupe armé a été condamné à mort (par contumace) le 15 février par la Cour de Sidi Bel Abbès, pour constitution de groupe terroriste, meurtre avec préméditation et vol de cheptel.

(Reuters, AFP, La Tribune 27.2) Après deux semaines d'enquête sur le terrain, la délégation d'Amnesty International en visite en Algérie (la première du genre depuis 2000) a accusé le 27 février les forces de sécurité de pratiquer systématiquement la torture, et a exhorté le gouvernement à faire toute la lumuère sur le sort des "disparus". Amnesty a toutefois salué l'attitude du gouvernement, qui accepte désormais d'évoquer la question des violations des drois de l'Homme : "il y a une amélioration au niveau des insitutions" et "une relative ouverture pour discuter des droits de l'Homme", a reconnu le chef de la délégation d'Amnesty, Roger Clark, qui a cependant regretté le refus de l'armée de rencontrer sa délégation.

Pour autant, "la torture est une pratique systématique" et "répandue" en Algérie, a déclaré Roger Clark. La délégation d'Amnesty considère que la situation des droits de l'Homme "n'a pas avancé" et rappelle notamment que la question des "disparus" n'est pas résolue, pas plus d'ailleurs que celle de la violence : "l'impunité de ceux qui sont responsables (des) enlèvements et (des) tueries et des autres violations (des droits humains) est aussi grave qu'avant, et le restera jusqu'à ce que justice soit faite". En ce qui concerne la Kabylie, la situation y reste "grave", et de véritables enquêtes pour faire la lumière sur les émeutes et sur la répression "n'ont toujours pas eu lieu". La délégation s'est rendue à Tizi Ouzou, où elle a rencontré les responsables de la branche régionale de la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme (LADDH), la "Maison des droits de l'Homme et du citoyen".

Dans le même temps, Human Rights Watch rendait public son rapport annuel pour 2002, dont le chapitre consacré à l'Algérie relève également la persistance du problème des "disparus"; un rapport spécifique de l'ONG américaine, consacré aux disparitions, et les évaluant à "au moins 7000 personnes" depuis dix ans, soit plus que dans n'importe quel autre pays (Bosnie exceptée), rappelle que les autorités algériennes avaient promis de mener des enquêtes et de donner des réponses aux familles -promesses non tenues, constate HRW, qui qualifie les bureaux d'accueil, les procédures judiciaires et les réponses officielles de "parodie cruelle et dilatoire". Pour HRW, les responsables des disparitions (forces de sécurité ou groupes armés "qui se proclament ilamistes") sont coupables de "crimes contre l'humanité" et ne doivent bénéficier d'aucune amnistie ni prescription. L'ONG a adressé le 21 février une lettre au président français Jacques Chirac, lui demandant d'exhorter le gouvernement algérien "à créer une commission indépendante capable de résoudre le mystère entourant le sort (des) victimes" de "disparitions". HRW regrette que "le travail diplomatique fait jusqu'à présent auprès de l'Algérie n'ait porté aucun résultat tangible", et demande à jacques Chirac de profiter de sa visite en Algérie pour inciter son homologue algérien à "prendre des mesures spécifiques (...) qui aideront les autorités algériennes à respecter la promesse faite de traiter sérieusement le problème".

(Algeria-Interface 28.2) L'ONG américaine de défense des droits de l'Homme Human Rights Watch a rendu public un rapport sur les "disparitions" en Algérie, rapport qui constate que le nombre de personnes enlevées par les forces de sécurité a diminué depuis 1999, mais qu'on est toujours sans nouvelle de quelque 7000 personnes "disparues" entre 1992 et 1998, que "presque aucun cas (...) n'a été résolu", que "des membres des services de sécurité continuent, en toute impunité et de manière routinière", à détenir illégalement des personnes au secret, et que les auteurs des "disparitions" (un "crime contre l'humanité" au sens du droit international dont l'Algérie est partie) demeurent impunis. L'Algérie, constate HRW, est, après la Bosnie, le pays qui a enregistré le plus de disparitions forcées ces dix dernières années. Aux 7000 personnes enlevées par "les forces de l'ordre algérienne et leurs alliés" (les milices) s'ajoutent "des centaines si ce n'est des milliers de personnes" enlevées par les groupes armés depuis 1992. Pour l'organisation Somoud (familles de "disparus"), 10'000 personnes ont été enlevées par les groupes armés, et la moitié n'ont jamais été retrouvées.

HRW dénonce enfin le faiblesse, ou l'absence, des pressions internationales (de l'Union européenne ou de l'ONU) sur l'Algérie pour ce qui est des "disparitions" : un membre du Groupe de travail des Nations Unies sur les disparitions, basé à Genève, admet que les dossiers algériens "ont été négligés et n'ont jamais été traités", mais attribue cette défaillance au "manque de moyen", alors que, plus franc, un fonctionnaire européen chargé du dossier évoque, pour justifier son refus de communiquer les réponses du gouvernement algérien aux questions posées par l'Union Européenne, "la volonté de ne pas détériorer le climat de confiance" euro-algérien...

(AP, Algeria-Interface 28.2 / Le Matin 3.3) Au terme de la visite de sa délégation, pendant deux semaines, en Algérie, Amnesty International estime que "même si l'ampleur du conflit et le nombre de morts ont sensiblement diminué depuis 1999, l'impunité s'est aggravée", que ce soit au bénéfice des membres de groupes armés, amnistiés par le décret présidentiel du 10 janvier 2000, ou au bénéfice des membres des forces de sécurité et des milices, qui bénéficient "dans pratiquement tous les cas" de l'"immunité des poursuites".

Amnesty estime cependant qu'un "espace de parole plus important" est en train de s'instaurer en Algérie, et a pris note "d'une série de réformes en faveur d'une plus grande transparence et de l'Etat de droit", réformes qui "peuvent être le signe d'une ouverture importante", mais dont l'"efficacité et (la) légitimité seront sapées si les responsables des violations passées et actuelles ne sont pas traduits en justice, si des milliers de familles de 'disparus' vivent une longue agonie en attendant des nouvelles de leurs proches et si les Algériens continuent de croiser dans la rue les assassins des membres de leurs familles". "La situation actuelle du dossier des droits humains, très préoccupante, n'a pas avancé", la question de l'impunité "demeure posée, aussi grave, aussi importante et urgente qu'auparavant", "les familles des disparus (...) continuent à vivre dans la douleur", "les enquêtes ne sont pas menées et quand elles le sont, elles n'aboutissent jamais", la torture "se pratique dans les lieux de détention de manière toujours aussi répandue et régulière", résume dans un entretien à "Algeria-Interface", le chef de la délégation d'Amnesty, Roger Clark, qui observe que l'autorisation donnée par l'Algérie à la visite d'Amnesty "coïncide avec la venue (...) du chef d'Etat français Jacques Chirac, qui sera un événement considérable", et se demande s'il s'agit d'un "hasard". Roger Clark témoigne que la délégation n'a "pas rencontré de problèmes jameurs" et n'a "pas subi d'entraves" lors de sa visite, n'était l'accompagnement par des forces de sécurité lors de certains déplacements hors d'Alger, accompagnement qui a poussé certaines personnes que devait rencontrer la délégation de "décliner une proposition de rencontre".

L'association "Djazaïrouna" (familles de victimes du terrorisme) a réagi au rapport d'Amnesty International, sur "la vérité et la justice occultées par l'impunité", en regrettant la "prudence à rapport les propos des victimes du terrorisme et leurs familles", l'usage des termes "groupes armés" pour désigner les "terroristes islamistes" et l'attention plus grande apportée au témoignage des familles de "disparus" qu'à ceux des familles de victimes du "terrorisme". "Djazaïrouna" accuse Amnesty de "disculper les islamistes des crimes commis pendant toute la décennie", et de ne pas s'en prendre aux "complices", aux "informateurs", à "ceux qui assuraient le guet", aux "commanditaires des crimes" et aux "financiers" des groupes armés.

(L'Actualité 6.3) La Fédération nationale des femmes travailleuses appelle pour le 8 mars, à l'occasion de la Journée de le Femme, à une journée de protestation contre la politique économique du gouvernement et ses effets négatifs sur la situation des femmes algériennes. La FNFT dénonce notamment les menaces de privatisation du secteur des hydrocarbures. Plus largement, elle revendique le droit à l'éducation et le droit au travail, et une plus grande représentation au sein des institutions.

Les associations "Vérité et Justice pour l'Algérie", "Algérie droits de l'Homme pour tous" et le "collectif des familles de disparu(e)s en Algérie appellent également à la mobilisation pour le 8 mars, pour faire entendre la voix des femmes algériennes, et pour continuer à mettre en lumière le dossier des "disparitions" en Algérie.

(L'Actualité 10.3) En marge d'un colloque sur l'éducation et les droits de l'Homme organisé par la Commission nationale consultative pour la promotion et la protection des droits de l'Homme (CNCPDH), son président, Farouk Ksentini, s'est déclaré favorable à l'installation d'une commission d'enquête indépendante sur les "disparus", et disposé lui-même à y siéger. Farouk Ksentini a rappelé que de telles commissions avaient été créées dans "beauoup de pays dans le monde", et estimé que, même si "beaucoup de choses restent à faire", la question des "disparus" n'est plus un tabou en Algérie. Pour le président de la CNCPDH, le nombre des "disparus" est de 7032 (et il réfute le chiffre de 18'000 avancé par le président de la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme, Ali Yahia Abdennour). Farouk Ksentini remettra avant le 31 mars au président Bouteflika un rapport sur la situation des droits de l'Homme, rapport qui devrait faire large place à la nécessité de régler la question des "disparus".


(AFP 6.3) L'avocat et défenseur des droits de l'Homme Mahmoud Khelili est décédé le 6 mars d'une crise cardiaque à l'aéroport parisien de Roissy, alors qu'il venait d'Alger.

A la mémoire de Mahmoud Khelili

9 mars 2003

 Mahmoud Khelili est décédé le 6 mars 2002. Un symbole de
 la lutte contre l’injustice, le mépris et la hogra nous a quitté,
 un doyen des défenseurs des droits humains s’est éteint.

 Tous ceux qui ont connu ou côtoyé Mahmoud savent de
 quelle trempe il était. Devant toute injustice, tout abus de
 pouvoir, il se levait et agissait. Il a défendu toutes les causes
 justes, sur tout le territoire, à tout moment.

 Au plus fort des années de sang, il a bravé les forces de
 l’ordre et agents de la Sécurité militaire pour dénoncer les
 détentions arbitraires, la torture, les disparitions forcées, les
 massacres, les procès inéquitables, la corruption.

 Infatigable travailleur, il a assisté les victimes et leurs
 familles, couru les administrations et les tribunaux, interpellé
 les autorités algériennes et alerté l’opinion publique
 internationale. Si la tragédie algérienne a été révélée au-delà
 des frontières de l’Algérie, c’est aussi grâce aux appels et à
 l’action incessants de Mahmoud Khelili.

 Il a connu intimidations, menaces, filatures, harcèlements
 administratifs, descentes au cabinet, arrestation et torture de
 ses fils, etc. Chaque coup porté contre lui a renforcé sa
 détermination à combattre l’injustice. Sa force et sa
 constance ont été d’un soutien existentiel pour les familles
 souvent désespérées et impuissantes face à une machine de
 guerre semblant omnipotente et omnipuissante.

 Ces dernières années, ses problèmes de santé se sont accrus.
 Malgré les recommandations de ses amis et médecins, il ne
 s’est pas ménagé et n’a cessé de travailler et de défendre les
 victimes de l’arbitraire. Son cœur fragile, n’a pas tenu.
 Mahmoud a été rappelé. Qu’il repose en paix.

 En rendant l’âme dès son arrivée à l’aéroport de Paris, Me
 Mahmoud Khélili accomplissait son dernier acte de
 résistance à la tyrannie des généraux algériens qu’il n’a cessé
 de dénoncer et de combattre toute une vie de militant des
 droits de l’Homme durant. Le président Jaques Chirac n’a
 pas dit un seul mot à toutes ces victimes du régime, à tous
 ces militants des droits de l’Homme, emprisonnés, harcelés,
 menacés de mort, à toutes ces mères de disparus qui
 couraient le long de son cortège à Alger ou à Oran pour
 l’interpeller. L’Algérie lui envoie une de ses figures de lutte
 pour les droits de l’Homme les plus imposantes pour expirer
 sur la terre des droits de l’Homme, sur le tarmac du même
 aéroport français qui l’a accueilli à son retour.

 Le peuple algérien saura se souvenir de lui et veillera sur sa
 mémoire.
 Le noble combat de Maître Mahmoud Khelili sera continué
 par d'autres femmes et hommes d'Algérie et mené jusqu'à la
 libération.

Lahouari ADDI, Farid AISSANI, Hocine AIT-AHMED, Abdennour ALI YAHIA, Yahia ASSAM, Omar BENDERRA, Nacera DUTOUR, François GÈZE, Ghazi HIDOUCI, Anouar KOUTCHOUKALI, Salima MELLAH, Mehdi MOSBAH, Marguerite ROLLINDE, Abderrahmane Amine SIDHOUM, Salah-Eddine SIDHOUM, Habib SOUAIDIA, Fatiha TALAHITE, Brahim TAOUTI

(AFP 10.3) Une Française a déposé plainte contre X à Bobigny (Seine Saint-Denis) pour "séquestration" après la fisparition de son fils, en 1994, dans la région d'Oran. Selon la plaignante, son fils Samir, étudiant à Oran, a été arrêté en 1994 par la Süreté nationale algérienne pour un interrogatoire dit "de routine", après lequel il a disparu. Elle soupçonne les autorités de le détenir dans une prison, et fait état d'un témoin l'ayant aperçu dans une prison.

(El Watan 13.3) 697 dossiers d'indemnisation ont été déposés dans la wilaya de Tizi Ouzou, et 201 dans celle de Bejaïa, par les blessés et les familles des victimes du "Printemps Noir" de Kabylie. Seuls quelques dizaines de demandeurs ont reçu leur indemnisation, dont une vingtaine (sur 38 demandes) dont les parents ont été tués par les gendarmes. Les coordination des aârchs ont cependant rejeté les propositions gouvernementales d'indemnisation, compte tenu du fait que le décret sur les indemnisation stipule que celles-ci "excluent toute autre réparation". Les aârchs revendiquent un statut de "martyr", comparable à celui des victimes de la guerre de libération, pour toutes les victimes de la répression du "Printemps Noir".

(Quotidien d'Oran 15.3) La création d'une Association algérienne pour la protection et la résinsertion sociale des prisonniers (AAPRSP) a été annoncée le 13 mars à Dar El Beida. L'association, fondée par une soixantaine de personnes et présidée par Amar Hamdini, se donne pour tâche de venir en aide aux prisonniers (il y en a 28'000 en Algérie) et d'aider à leur réinsertion. Elle se veut un appui aux pouvoirs publics et une "force de proposition", nouant des liens avec l'administration pénitentiaire. Elle projette de structurer au niveau de toutes les wilayas et assure s'autofinancer.

(El Watan 24.3) Le tribunal criminel de Bejaïa a condamné à 20 ans de réclusion criminelle un policier qui avait abattu, le 26 juin 2001, dans un café de Sidi Aïch, un jeune homme, lors du "printemps noir" de Kabylie.

(Le Quotidien d'Oran 26.3 / Le Matin 27.3) Le Collectif des Familles de Disparus et SOS-Disparus ont organisé le 26 mars devant le siège de la Commission nationale consultative des droits de l'Homme, un rassemblement pour exiger des autorités la vérité sur le sort des "disparus". Plusieurs centaines de personnes, essentiellement des femmes, se sont rassemblées, portant les portraits de leurs proches. Le rassemblement a été brutalement dispersé par la police.

Selon les familles de "disparus", la Commission devrait remettre dans les tous prochains jours au président de la République son rapport d'activité, dans lequel le président de la Commission, Farouk Ksentini, formulerait plusieurs propositions, dont celle de créer une Commission nationale d'enquête.


SOS Disparus

Collectif des familles de disparu(e)s en Algérie

Communiqué de presse, Alger le, 26 mars 2003

Les familles de disparu(e)s battues par les forces de l'ordre.

Les familles de disparus ont été violemment prises à partie par la police, aujourd'hui, mercredi 26 mars 2003, alors qu'elles avaient appelé à un rassemblement national devant le siège de la Commission nationale pour la promotion et le protection des droits de l'Homme à Alger à l'occasion de la remise du rapport final sur le dossier des disparu(e)s par le Président de la Commission, Farouk Ksentini.

Aux alentours de 10 heures, ce matin, les quelques quatre cents personnes, venant de dix wilayas, qui participaient à ce rassemblement hebdomadaire ont été brutalement contenues devant le siège de la CNCCPPDH et empêchées de se rendre à la Présidence de la République.

Parmi les manifestants, de nombreuses personnalités avaient répondu à l'appel lancé, hier, dont : Ali Yahia Abdenour, président de la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme ( LADDH) , des représentants de partis politiques, du FFS ,des députés du parti El Islah ainsi que l'association RAJ.

Vers 13 h 30, des CRS, qui étaient sur les lieux prêts à intervenir, ont assailli les familles de disparu(e)s pour les disperser alors même qu'elles décidaient de rejoindre le siège de leur association en empruntant l'avenue Franklin Roosevelt. Ces dernières ont alors été forcées de prendre des ruelles avoisinantes.

Une reporter photographe indépendante de nationalité hollandaise, Rachel Corner, a été malmenée et ses films confisqués. Face à l'acharnement des familles, la police n'a pas été en mesure de lui supprimer son appareil photo.

Les familles de disparu(e)s ont précisé qu'elle avait notamment eu à en découdre avec le commissaire du IX ème arrondissement d'Alger qui aurait été particulièrement virulent à leur égard.

Cinq personnes ont été arrêtées, et gardés dans les fourgons de police avant d'être relâchées peu après. La police n'a toujours pas hésité, comme par le passé, à réprimer durement des mères de disparu(e)s, des femmes parfois très âgées dont certaines se sont évanouies.

Les familles de disparus ont réitéré leur exigence de voir les autorités faire la vérité et la justice sur ce dossier et se refusent à laisser sombrer dans l'oubli leurs enfants et leurs proches..

Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l'Homme

Entrave à la liberté de manifestation
ALGERIE
27 mars 2003

L'Observatoire a été informé par la Ligue algérienne de défense des 
droits de l'Homme (LADDH) et le Collectif des familles de disparu(e)s 
en Algérie, que près de 400 personnes qui s'étaient rassemblées le 26 
mars 2003 à Alger en soutien aux familles de disparu(e)s, ont été 
violemment dispersées par les forces de l'ordre et que plusieurs 
d'entre elles ont été arrêtées.

Selon les informations reçues, vers 10h00, le rassemblement a été 
bloqué devant le siège de la Commission nationale consultative de 
promotion et de protection des droits de l'Homme (CNCPPDH), et les 
participants empêchés de se rendre devant la Présidence de la 
République.

Vers 13h30, les CRS ont assailli les familles de disparu(e)s alors 
même qu'elles s'apprêtaient à rejoindre le siège de leur association. 

Cinq personnes ont été arrêtées et gardées dans les fourgons de la 
police avant d'être relâchées peu après. Des mères de disparu(e)s, 
parmi lesquelles des femmes âgées ont été maltraitées par la police. 
Certaines d'entre elles se sont évanouies.

Une reporter de nationalité hollandaise a été malmenée et ses films 
confisqués.

L'Observatoire exprime sa préoccupation au regard de ces faits, 
récurrents en Algérie, qui constituent une entrave aux activités des 
personnes engagées dans la défense et la promotion des droits de 
l'Homme et en particulier de celles qui luttent contre l'impunité. 
Ils constituent de graves atteintes aux libertés d'expression et de 
rassemblement pacifique, garanties tant par la constitution 
algérienne que par les instruments internationaux de protection des 
droits de l'Homme auxquels l'Algérie est partie.

Rappel des faits

Le 6 novembre 2002, une trentaine de membres de familles de disparus 
s'étaient réunis devant la CNCPPH et s'étaient ensuite dirigés vers 
la Présidence de la République. D'après des témoins, les familles 
avaient été bloquées dans leur marche par les forces de l'ordre puis 
certaines personnes avaient été bousculées et battues. Tout le 
quartier avait ensuite été quadrillé par les services de sécurité.

Ce rassemblement faisait suite aux déclarations de M. Ksentini, 
Président de la Commission nationale consultative de promotion et de 
protection des droits de l'Homme, au journal "Echourouk El Yaoumi" du 
3 novembre dernier sur la manière de régler le problème des disparus. 
M. Ksentini avait préconisé de remettre aux familles de disparus, la 
somme de 100 millions de centimes ainsi qu'un acte de décès et de 
clore ainsi les dossiers. Le 5 septembre dernier, les familles de 
disparus et leurs représentants d'Alger, de Constantine, d'Oran, de 
Sétif, de Relizane et de Mostaganem avaient rencontré M. Ksentini et 
lui avaient remis le mémorandum qui contenait les principes de base 
pour une démarche commune du règlement du dossier et demandant un 
processus de vérité sur le sort des disparus et une politique de 
réhabilitation. A la suite de ces déclarations, SOS disparus et le 
Collectif des familles de disparus avaient appelé à un rassemblement 
aujourd'hui pour réclamer " Vérité et Justice ".

Actions demandées :

Merci d'écrire aux autorités algériennes, afin de leur demander de :

i.      Mettre un terme à toute forme de répression et de violence à 
l'encontre des membres des familles de disparus et de leurs 
représentants;
ii.     Se conformer aux dispositions de la Déclaration sur les 
défenseurs des droits de l'Homme, adoptée par l'Assemblée générale 
des Nations unies le 9 décembre 1998, notamment à son article 1 selon 
lequel " chacun a le droit, individuellement ou en association avec 
d'autres, de promouvoir la protection et la réalisation des droits de 
l'Homme et des libertés fondamentales aux niveaux national et 
international " et son article 12.1 selon lequel " chacun a le droit, 
individuellement ou en association avec d'autres, de participer à des 
activités pacifiques pour lutter contre les violations des droits de 
l'Homme et les libertés fondamentales " ;
iii.    Se conformer aux dispositions de la Déclaration universelle 
des droits de l'Homme et des principaux instruments régionaux et 
internationaux relatifs aux droits de l'Homme liant l'Algérie.


(Liberté, Le Matin, Le Quotidien d'Oran, L'Actualité 30.3) L'Armée en tant qu'institution n'est pas responsable des cas de disparition, ont affirmé en choeur le 29 mars les présidents de la Commission nationale de promotion et de protection des droits de l'Homme (CNCPPDH), Farouk Ksentini, et de la Commission d'en quête sur les "événements" de Kabylie, Mohand Issaad. Pour les deux hommes, "les disparitions ne sont pas le fait de l'ANP mais d'initiatives individuelles", notamment selon Farouk Ksentini de "cadres de l'ANP, qui ont pris la décision eux-mêmes de procéder illégalement à l'enlèvement de telle ou telle personne", tout particulièrement entre 1992 et1999, dans uns situation d'absence de l'Etat. Mohand Issaad a quant à lui affirmé la nécessité pour l'Etrat de "trouver les responsables et de les sanctionner".

Le rapport de Farouk Ksentini sur la situation des droits de l'Homme en Algérie sera remis au président Bouteflika fin mars. Le président de la CNCPPDH suggère la mise en place d'une commission d'enquête pour faire la lumière sur les disparitions, "séparer les vrais des faux disparus" et "réhabiliter les vrais disparus". Il estime que 3500 personnes disparues sont mortes et enterrées "sous X", et la CNCPPDH a recensé plus de 4700 cas de "disparitions".

(Le Matin 27.3) Un "émir" d'un groupe armé, Ferfar Mohamed, arrêté en décembre 1998 à Annabam a été condamné à mort le 25 mars par le Tribunal criminel d'Annaba.

(Jeune Indépendant 27.4) Le président de la Commission consultative de promotion des droits de l'Homme, Farouk Ksentini, a annoncé dans un entretien accordé au journal "Erraï" la création dans moins de deux mois d'une commission d'enquête sur les "disparitions", dotée de larges prérogatives et composées de "personnalités nationales intègres" et de représentants des familles de "disparus". Farouk Ksentini estime que l'armée n'est pas "responsable en tant qu'institution" des disparitions, mais que l'Etat, lui, est responsable en tant qu'Etat, et pourrait demander pardon aux familles des "disparus".

(Jeune Indépendant 27.4) Selon le président de la Commission consultative de promotion des droits de l'Homme, Farouk Ksentini, les deux dirigeants du FIS Abassi Madani et Ali Benhadj ne seront pas rejugés, et l'état d'urgence sera "bientôt" levé.

(AFP 7.5 / le Quotidien d'Oran 8.5) Un charnier qui pourrait contenir une quarantaine de cadavres a été découvert le 5 mai à Boufarik. Les corps étaient en état de décomposition avancée. 16 corps ont été exhumés entre le 5 et le 7 mai. La première hypothèse évoquée quant à l'identité des corps était celle de citoyens assassinés par des groupes armés, mais il pourrait également s'agir, soit d'un ancien cimetière chrétien, soit de fosses communes creusées par l'armée française pendant la Guerre d'Algérie (le site du charnier correspondant à un un camp militaire français, le camp d'Erlan, du 18ème Régiment d'infanterie).

(Reuters 8.5 / Reuters 11.5 / La Tribune 12.5) Le président Bouteflika a accordé une amnistie à environ 5000 détenus à l'occasion de la fête de la naissance du Prophète, le 14 mai. Certains des amnistiés purgeaient une peine d'emprisonnement à perpétuité. Sont exclus de l'amnistie les condamnés pour terrorisme, homicide volontaire, destruction, association de malfaiteurs, corruption, trafic de drogue, viol, attentats à la pudeur, vols qualifiés, détournement de deniers public, évasion et fausse monnaie. 78 prisonniers condamnée à la prison à vie ont vu leur peine commuée en 20 ans de prison ferme.

Une mutinerie dans la prison de Tazoult (Lambèze, w. Batna) a fait une dizaine de blessés parmi les prisonniers et quatre parmi les forces de répression, le 10 et le 11 mai. Les mutins se sont révoltés en apprenant qu'ils n'étaient pas concernés par les mesures de grâce accordées par le président Bouteflika à l'occasion du Mouloud, à environ 5000 prisonniers, mais dont étaient exclus les condamnées pour terrorisme, corruption, trafic de drogue ou viol. En 1994, un millier de détenus s'étaient évadés de la même prison de Tazoult, officiellement à la suite d'une attaque par un groupe armé.

La grâce présidentielle a, entre autres, pour but de désengorger les prisons algériennes, surpeuplées (l'Algérie compterait au moins 40'000 détenus, en ne tenant compte que des lieux de détention légaux et répertoriés) et vétustes (la prison de Tazoult, où s'entassent 1700 prisonniers, date de 1852...). Au printemps 2002, une série de mutineries dans ces prisons avaient fait plusieurs dizaines de morts, des centaines de blessés et de gros dégâts matériels.

Une réforme pénitenciaire est en projet depuis des années, et le ministre chargé de cette réforme, Abdelkader Sellal, a été reconduit dans cette responsabilité au sein du nouveau gouvernement

(FIS 21.5) Dans une lettre adressée au président Bouteflika, la famille d'Ali Benhadj, qui doit être libéré le 3 juillet de sa prison militaire de Blida, rappelle que le leader du FIS est un prisonnier politique et accuse les autorités algériennes de l'avoir toujours, et de continuer, privé de ses droits élémentaires, comme l'accès aux journaux ou la visite de ses proches. La famille d'Ali benhadj rappelle au président algérien qu'il avait assuré, avant qu'il soit élu à la présidence, qu'il ferait en sorte que le prisonnier jouisse de ses droits fondamentaux, et même qu'il soit mis en résidence surveillée plutôt qu'en prison. Enfin, la famille d'Ali Benhadj s'étonne que des officiers qui avaient mené des négociations avec le leader du FIS en novembre 2002 aient été limogés.

(L'Actualité 21.5) Un projet de texte sur la profession d'avocat serait en préparation, annonce "L'Actualité". Ce projet mettrait les avocats sous tutelle du ministère de la Justice et du parquet.

(Le Quotidien d'Oran 29.5, AI 27.5) Le rapport annuel pour 2002 d'Amnesty International réitère l'appréciation portée par l'organisation sur la situation algérienne, critiquant au surplus l'utilisation par les autorités algériennes de la sensibilité internationale à la "lutte contre le terrorisme" pour justifier des "violations massives des droits humains". Amnesty constate la poursuite de la violence, avec la mort de centaines de civils dans des attaques perpétrées par des groupes armés, et de centaines de membres des forces de sécurité, des milices ou des groupes armés. Amnesty dénonce également les exécutions illégales de civils "imputables aux forces de sécurité, lors de manifestations antigouvernementales", le recours "très répandu, notamment pendant la détention secrète et non reconnue", à la torture, les intimidations à l'égard des militants des droits de l'homme et les entraves à la recherche de la vérité dans les affaires de torture et de disparitions forcées. L'ONG note que l'état d'urgence proclamé en 1992 continue d'être en vigueur.

(AFP 14.6 / Le Matin 16.6) Quatre islamistes armés présumés ont été condamnés à mort par contumace par le tribunal de Laghouat, le 14 juin. Les chefs d'inculpations étaient la constitution de groupe armé, la participation à homicide volontaire, la détention d'armes de guerre sans autorisation, le soutien et l'encouragement à des activités terroristes". Les accusés ont été reconnus coupables d'appartenance à deux groupes armés actifs de 1994 à 2002, les "Djounoud Allah" (soldats de Dieu) et la "Djamaat El Medina" (Groupe de la cité), le premier opérant dans les maquis et le second l'approvisionnant. Le 14 juin, 22 membres présumés de groupes armés (des GIA) ont été condamnés à mort par le tribunal d'Annaba.

La peine de mort est toujours en vigueur en Algérie, mais n'a officiellement pas été appliquée depuis août 1993 (sous réserve des exécutions extrajudiciaires). Les derniers condamnés à mort à avoir été exécutés avaient été reconnus complices d'un attentat meurtrier commis à l'aéroport d'Alger en août 1992.

(El Watan 22.6) "SOS Disparus" et le Collectif des familles de disparus en Algérie dénoncent dans un communiqué les "pressions" exercées par les autorités sur des familles de "disparus" dans la wilaya d'Oran. Les deux associations font état de concovation, depuis le 13 mai, de proches de "disparus" par les services du DRS (Sécurité Militaire), qui les ont interrogés sur les circonstances de la disparition de leurs proches et auraient, selon les associations, tenté de faire passer les "disparus" pour des "victimes du terrorisme", alors que les familles soutiennent qu'ils ont été enlevés par les services de sécurité.

(El Watan 21.7) Des familles de "disparus" ont été empêchées le 20 juillet de tenir un rassemblement devant la Présidence de la République, à l'appel du collectif SOS Disparus, qui demandait à être "enfin reçu par le Président de la République".


APPEL URGENT - L'OBSERVATOIRE

Paris - Genève, 10 juillet 2003

L'Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l'Homme

L'Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de
l'Homme, programme conjoint de la FIDH et de l'OMCT, vous prie
d'intervenir de toute urgence à propos de la situation suivante en
Algérie.

Nouvelles informations :

L'Observatoire a été informé par SOS disparus de l'arrestation de
plusieurs mères de disparus le 9 juillet à Oran lors du rassemblement
hebdomadaire des familles de disparus devant le palais de justice,
auquel participaient autour de 70 personnes.

Selon les informations reçues, vers 10h45, Mme Boutaiba Setti,
représentante du Comité SOS disparus de la wilaya d'Oran était
interviewée par un journaliste du quotidien algérien El Rai. Après le
départ du journaliste, un officier en civil appartenant aux services
de sécurité l'a malmenée et embarquée de force dans une voiture. Mme
Bouguetaya Yakout épouse Acem et sa fille, Mme Boussekak Yamina,
épouse Rached et 3 autres mères de disparus ont également été
arrêtées. Elles ont été emmenées au commissariat du 2ème
arrondissement d'Oran puis transférées au commissariat central. Elles
ont finalement été relâchées aux alentours de 19 heures. Elles sont
convoquées le 12 juillet au commissariat central et devront être
présentées au parquet pour " trouble à l'ordre public ".

L'Observatoire note avec inquiétude que les personnes arrêtées
étaient mentionnées dans une lettre ouverte du Collectif des familles
de disparus au Président de la Commission nationale consultative pour
la promotion et la protection des droits de l'Homme. Cette lettre
faisait état des pressions subies par les familles de disparus, qui
avaient été convoquées le 13 juin par les services des renseignements
et de la sécurité de la wilaya d'Oran.

L'Observatoire exprime sa préoccupation au regard de ces faits qui
constituent une entrave aux activités des personnes engagées dans la
défense et la promotion des droits de l'Homme et en particulier de
celles qui luttent contre l'impunité. Ils constituent de graves
atteintes aux libertés d'expression et de rassemblement pacifique,
garanties tant par la constitution algérienne que par les instruments
internationaux de protection des droits de l'Homme auxquels l'Algérie
est partie.

Le 5 novembre dernier, une trentaine de familles de disparus réunies
devant le CNCPPH à Alger pour dénoncer les déclarations de son
président sur la manière de régler la question des disparues avaient
été violemment dispersées (Cf. appel urgent DZA 004 / 1102 / OBS 064).

Actions demandées :

Merci d'écrire aux autorités algériennes, afin de leur demander de :

i.     Abandonner les charges qui pèsent contre les membres de
famille de disparus arrêtés le 9 juillet 2003.
ii      Mettre un terme à toute forme de répression et de violence à
l'encontre des membres des familles de disparus et de leurs
représentants;
iii.     Se conformer aux dispositions de la Déclaration sur les
défenseurs des droits de l'Homme, adoptée par l'Assemblée générale
des Nations unies le 9 décembre 1998, notamment à son article 1 selon
lequel " chacun a le droit, individuellement ou en association avec
d'autres, de promouvoir la protection et la réalisation des droits de
l'Homme et des libertés fondamentales aux niveaux national et
international " et son article 12.1 selon lequel " chacun a le droit,
individuellement ou en association avec d'autres, de participer à des
activités pacifiques pour lutter contre les violations des droits de
l'Homme et les libertés fondamentales " ;
iv.    Se conformer aux dispositions de la Déclaration universelle
des droits de l'Homme et des principaux instruments régionaux et
internationaux relatifs aux droits de l'Homme liant l'Algérie.

Adresses :

M.Bouteflika, Président de la République
Fax 00 216 71 744 721
E-mail President@el-mouradia.dz

M. Yazid Zerhouli, Ministre de l'Intérieur, Ministère de l'Intérieur,
18 rue Docteur Saâdane, Alger / Algérie
Fax 00 213 2 73 61 06

M. Mohammed Charfi, Ministre de la Justice, Ministère de la Justice,
8 Place Bir-Hakem El-Biar, Alger / Algérie
Fax 00 213 21 92 21 95

M. Ksentini, Président de la Commission Nationale Consultative de
Promotion et de Protection des Droits de l'Homme : 
Tel/Fax (+213 2) 1939 005/ +213 2 239 037


(APS 6.8 / El Watan 7.8) Le président Bouteflika a décidé la mise en place d'un "mécanisme ad hoc" de prise en charge de la question des "disparus", et a chargé le gouvernement d'élaborer un "plan national" pour la promotion des droits de l'Homme, a annoncé la présidence le 6 août. Ce "plan national" devrait s'inspirer de celui proposé par la Commission nationale (officielle) consultative de promotion et de protection des droits de l'Homme (officielle). Le "mécanisme" proposé par la président devrait se référer à la CNCPPDH, et consister en une mission "temporaire", qui ne serait ni une commission d'enquête, ni un "substitut aux autorités administratives et judiciaires compétences", mais un "centre de gestion et une interface" entre les pouvoirs publics et les familles des "disparus".

Pour "El Watan", la décision présidentielle s'explique par "des pressions internationales". Des représentants officiels algériens devraient "s'expliquer" en août devant le groupe de travail de la Commission des droits de l'Homme de l'ONU sur les disparitions forcées ou involontaires, sur "les nombreux cas irrésolus dans ce pays". Le gouvernement algérien n'a pas accepté la venue du rapporteur spécial de l'ONU sur les disparitions, et pour le président de la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme (LADDH), Ali Yahia Abdennour, "les conditions politiques et juridiques ne sont pas réunies en Algérie pour juger les commanditaires des crimes contre l'humanité, (car ils) sont au sommet de l'Etat (et) bénéficient de l'impunité du fait de leur prééminence au sein du pouvoir".

(Liberté, El Watan 11.8) La décision du président Bouteflika de mettre en place un "mécanisme ad hoc" pour la prise en charge de la question des "disparus" a auscité une réaction négative de plusieurs organisations de familles de "disparus" (comme SOS Disparus olu l'Association nationale des familles de disparus, ANFD) et de familles de victimes du terrorisme (comme Somoud).

SOS Disparus doute de l'efficacité, voire de l'opportunité du "mécanisme ad hoc", mais considère comme positive la "reconnaissance implicite de l'incapacité de l'Observatoire national des droits de l'Homme, puis de la Commission nationale consultative de protextion des droits de l'Homme, de répondre sérfieusement aux revendications de vérité et de justice exprimées depuis des années par les familles des disparus". SOS disparus revendique toujours la possibilité pour l'ensemble des familles des victimes de "soumettre leur cas en présence de témoins et d'un avocat de leur choix", et avec l'implication des ONG de défense des droits humains. Pour l'ANFD, la décision présidentielle est une avancée.

De son côté, Somoud constate que ses attentes sont restées vaines, et dénonce une "exploitation de la douleur des familles à des fins politiques", après "une application de la loi sur la concorde civile "qui a fait de criminels des braves". Somoud demande la mise en place d'une commission spéciale qui définisse les catégories de disparus et effectue leur recensement.

(El Ribat 10.8) "La mise sur pied d'un mécanisme ad hoc temporaire chargé du dossier des disparus est perçue comme un subterfuge politicien destiné à rallier les familles (de disparus) auour du Président dans sa quête pour un second mandat présidentiel", écrit le bulletin islamiste "El Ribat", qui soupçonne en outre Bouteflika de voulir provoquer "la division ou la neutralisation des rangs des familles de disparus afin que ce dossier potentiellement mobilisateur et politiquement sensible ne puisse influer sur le cours des événements se rapportant à l'élection présidentielle de 2004". L'annonce par le président de la création de ce "mécanisme ad hoc temporaire" a été saluée avec beaucoup de prudence par l'association de familles de disparus "SOS diusparus", et dénoncée avec beaucoup de vigueur par l'association de victimes du terrorisme "Somoud".

(Reuters 15.8) Le Front Polisario a annoncé le 15 août, dans un communiqué publié par l'agence officielle algérienne APS, qu'il allait libérer 243 prisonniers marocains détenus depuis, pour certains, plus de vingt ans, dans le sud-ouest de l'Algérie, par les Sahraouis. Le Polisario déclare que sa décision de libérer ces prisonniers fait suite à l'adoption par l'ONU d'un nouveau plan de paix pour le Sahara ex-espagnol, annexé par le Maroc et dont l'indépendance a été proclamée par le Polisario. Les libérations annoncées doivent se faire sous l'égide du CICR. Au total, 458 prisonniers marocains détenus par le Polisario auront ainsi été libérés en deux ans.


SOS Disparus
5, Rue Mohamed Labib
Alger

Tel/Fax : 213 21 73 70 45 / 021 73 61 60
E-mail : sos_disparus@yahoo.fr

Communiqué

Alger, le 10 août 2003

Le Mercredi 6 août 2003, le Président de la République Abdelaziz Bouteflika a annoncé par communiqué de presse la mise en place d’un mécanisme ad hoc, avec la mission temporaire de prendre en charge la question des disparitions forcées en Algérie, tout en précisant qu’il ne s’agit pas d’une commission d’enquête.

SOS Disparus prend acte avec satisfaction de cette annonce, qui constitue à ses yeux une reconnaissance implicite de l’incapacité de l’ONDH, puis la CNCPPDH de répondre sérieusement aux revendications de vérité et de justice exprimées depuis des années par les familles de disparus.

Alors que les pouvoirs, les modalités de fonctionnement et les prérogatives de ce mécanisme n’ont pas encore été rendus publics, SOS Disparus rappelle qu’elle avait transmis au Président de la République, Monsieur Abdelaziz Bouteflika, en date du 17 novembre 2002, un mémorandum qui contenait les principales revendications des familles de disparus.

Ce mémorandum, établi lors d’une réunion qui avait regroupé l’ensemble des comités des familles de disparus du pays, demandait notamment la mise en place d’un processus contradictoire et individualisé d’établissement de la vérité sur les disparitions forcées en Algérie. Il demandait en outre que des représentants des familles de disparus et des organisations de défense des droits de l’homme, et notamment la Ligue algérienne pour la défense des droits de l’homme (LADDH) soient associés à ce processus, avec la possibilité pour toutes les familles de soumettre leurs cas en présence de leurs témoins et d’un avocat de leur choix.

A défaut de respect de ces critères, le mécanisme annoncé la semaine dernière revient à une simple répétition de l’action de l’ONDH et de la CNCPPDH.

La Présidente,                                                                                             Fatima Yous


(AP 2.9) Le Comité international de la Croix Rouge (CICR) a procédé le 2 septembre au rapatriement à Agadir (Maroc) de 243 soldats martocains prisonniers du Front Polisario et détenus en territoire algérien. Selon le CICR, il reste encore 914 soldats marocains prisonniers du Polisario, certains depuis 1976 (c'est-à-dire depuis le déclenchement du conflit au Sahara occidental), ce qui en fait vraisemblablement "les plus vieux prisonniers de guerre du monde". De 1976 à 1991, le Polisario a fait 2000 prisonniers de guerre marocains; 946 d'entre eux ont été libérés depuis janvier 2000. La fondation française "France-Liberté", présidée par Danielle Mitterrand, vient de publier un rapport d'enquête alarmant sur les conditions de détention des prisonniers marocains en territoire algérien, dans la région de Tindouf. France-Libertés dénonce "des meurtres, tortures, mutilations et travail forcé" infligés aux prisonniers, et signale de "très nombreuses pathologies neuro-psychiatriques" chez des prisonniers qui souffrent "d'un sentiment d'abandon". La fondation française dénonce en outre "les graves infractions commises par l'Algérie" en tant que puissance responsable du sort de prisonniers détenus sur son territoire.

(ONU 2.9, 3.9) Le Secrétaire général de l'ONU Kofi Annan s'est félicité le 1er septembre de la libération par le Front Polisario de 243 prisonniers de guerre marocains, qui ont été remis au Comité international de la Croiy Rouge et rapatriée par lui au Maroc. Kofi Annan a exprimé l'espoir que le Polisario libérera tous les prisonniers qu'il détient encore, conformément aux résolutions du Conseil de sécurité et au droit international humanitaire, et a lancé un appel aux parties au conflit (le Maroc, la Mauritanie, le Polisario et l'Algérie) pour qu'elles contribuent à la recherche d'une solution à la question des personnes portées disparues depuis le début du conflit, en 1976.

Le 3 septembre, le Conseil de Sécurité de l'ONU s'est également félicité de la libération par le Polisario des 243 priusonniers marocains, et a lui aussi demandé au Front de libérer tous les prisonniers de guerre qu'il détient encore. cette demande avait déjà été exprimée dans la résolution 1495 du Conseil.

( El Watan 15.9 / Corr) L'épouse du président de la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme (LADDH), Ali Yahia Abdennour, est décédée le 13 septembre à Alger, et a été inhumée le lendemain à Ben Aknoun, en présence de nombreuses personnalités (Abdelaziz Belkhadem, ministre des Affaires étrangères, l'ancien Premier ministre Mouloud Hamrouche, Ahmed Djeddaï pour le FFS, et jusqu'à Ali Benhadj. Louiza Ali Yahia est décédée à l'âge de 80 ans.

(AP 16.9) Dans son dernier rapport sur l'Algérie, Amnesty International dresse un bilan négatif de la "concorde civile", et estime que l'amnistie accordée à des milliers de membres des groupes armés et "l'application extrajudiciaire de mesures de clémence par la suite ont empêché de connaître la vérité sur les atteintes graves aux droits humains et ont garanti l'impunité aux responsables" de ces crimes. En outre, selon AI, pendant les quatre ans qui ont suivi la promulgation de la "concorde civile", les atteintes aux droits fondamentaux de la part des autorités se sont poursuivies.



(Jeune Indépendant 18.9) Le vice-président du FIS, Ali Benhadj, a rencontré le président de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'Homme, Farouk Ksentini, pour évoquer avec lui la question des "disparus". Pour Ali Benhadj, une solution "juste et globale" peut être trouvée à cette question.

(AP 20.9 / Liberté, Le Matin 21.9 / Le Quotidien d'Oran, La Tribune 22.9) Le président Bouteflika a "installé" le 20 septembre la commission chargée d'étudier et de régler le problème des "disparus" ("mécanisme ad hoc de prise en charge de la question des disparus"). La Commission est composée de sept membres, dont le président du Croissant-rouge algérien, mais également une journaliste du quotidien "Liberté" (qui s'est désolidarisé de sa collaboratrice), issus de la Commission nationale consultative de promotion et de protextion des droits de l'Homme -dont le président, Farouk Ksentini, présidera également la commission. Elle a 18 mois pour permettre un réglement de la question des "disparus", notamment en identifiant les cas, en servant d'"interface" entre les familles de disparus et les autorités et en précisant les actions à mener par les autorités compétentes, en particulier pour ce qui concerne les mesures d'assistance et d'indemnisation. Farouk Ksentini, pour qui si tout le monde le veut, le dossier des "disparus" peut être réglé "dans un délai compris entre quatre et cinq mois", a annoncé que sa commission allait commencer son travail par des consultations générales avec les associations et les partis politiques. Le président Bouteflika a inscrit sa démarche "en droite ligne du vaste processus de réconciliation nationale", ouvert par la loi de concorde civile dont il a dressé un bilan positif en affirmant qu'elle avait "contribué de manière substantielle à l'amélioration de la situation sécuritaire et au rétablissement de la paix civile".

Le président a précisé que la commission qu'il avait installé ne pouvait être "conçue comme une commission d'enquête qui se substituerait aux autorités administratives et judiciaires compétentes". Il ne s'agit en fait, selon les termes du président, que d'un "centre de gestion et une interface entre les pouvoirs publics et les familles concernées". Autrement dit, l'aspect politique, et la question de l'impunité, ne seront pas traités par la commission ad hoc.

Le ministère de l'Intérieur évalue à 4950 le nombre des "disparus", la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'Homme affirme détenir 4300 dossiers de "disparitions", la gendarmerie fournirait le chiffre de 7200 personnes (plus 10'000 enlevées par les "terroristes"), alors que les associations de familles de disparus et les ONG avancent des chiffres allant jusqu'à 20'000 "disparitions", la majorité d'entre elles étant imputables aux services de sécurité. Farouk Ksentini a contesté les chiffres avancés par Amnesty International en accusant l'ONG d'"exagérer ses chiffres dans chacun de ses rapports sur l'Algérie".

Nous reproduisons ci-dessous le très intéressant commentaire que "Le Quotidien d'Oran" a donné, sous la plume de Noureddine Azzouz, de l'"installation" de la commission ad-hoc :

DISPARUS : Entre les pertes et les profits de la concorde civile (Quotidien d'Oran daté du 22 septembre)

Le chef de l’Etat a choisi d’inscrire le dossier des disparus dans le cadre de la concorde civile. Il se soumet à la raison d’Etat.

«Le chef de l’Etat, a déclaré Maître Ksentini hier au Quotidien d’Oran, est déterminé à fermer ce dossier en proposant aux familles qui l’acceptent des propositions d’indemnisation. Il n’y a pas d’autres choix à ses yeux et il espère y arriver avant l’expiration du délai de dix-huit mois fixé au comité ad hoc qu’il vient d’installer». Son propos a ceci d’important qu’il informe que M. Bouteflika éprouve des difficultés extraordinaires à gérer le dossier des disparus, mais qu’il n’est pas disposé non plus à l’exhumer par l’entremise d’une commission d’enquête. Ce projet que certains lui ont un peu trop vite imputé - dans la logique qui consiste notamment à le présenter comme le président civil qui cherche à déstabiliser les généraux en ouvrant les dossiers de la «sale guerre» -, il n’entend pas lui donner jour ou de l’aborder sous des angles politiques qui risquent de fragiliser le système politique dont il est actuellement le garant.

En attendant une hypothétique décantation, qui n’aura lieu ni durant le mandat actuel ni dans le prochain au cas où il serait réélu, M. Bouteflika préfère apporter au dossier une solution «technique». Elle consistera alors à réhabiliter la mémoire des disparus par l’indemnisation et une aide que l’Etat apportera à leurs familles. En termes politiques, l’usage le moins dangereux de cette affaire en admettant symboliquement la responsabilité de l’Etat mais en évitant à quelques-uns de ses responsables, les militaires notamment, de témoigner devant une commission d’enquête alors que tout l’effort de guerre qui a été consenti depuis 1992 a été fait au nom de la lutte antiterroriste et pour la sauvegarde de la République.

Pour bien comprendre la démarche du chef de l’Etat, il faut écouter le président de la commission nationale des droits de l’Homme. Ce dernier déclare «qu’il faut être réaliste et admettre qu’en l’état actuel des choses, il n’y a pas d’autres moyens à utiliser pour trouver une solution à la tragédie des disparus». Il faut ajouter après lui que M. Bouteflika, qui sait que l’ère est aux soupçons les plus meurtriers et aux menaces d’une crise politique plus grave au sein du sérail, veut à tout prix éviter d’être perçu comme un manoeuvrier cherchant à bafouer l’honneur de l’Armée et de ses services de lutte antiterroriste.

Les perdants sont bien sûr les familles des disparus plus que jamais seules, qui se voient là déniées dans leur droit de savoir la vérité. Mais imaginons un seul instant quelle aurait été l’attitude des adversaires qui accusent le chef de l’Etat de faire du tort au pays et à l’unique institution qui tient encore debout et la violence de leur réaction, si ce dernier avait préconisé par hasard une autre démarche que celle de la réhabilitation-indemnisation au moment où un ancien officier de l’ANP publie à Paris sa chronique de la «décennie rouge» dans laquelle il accuse ses anciens chefs d’avoir créé ou noyauté les anciens maquis du GIA.

La logique de M. Bouteflika est celle du juge. Sa philosophie politique et juridique est celle de la «concorde civile», une loi qu’il a fait voter pour pardonner aux islamistes, rappelons-le, et qu’il veut maintenant à nouveau réactualiser en l’appliquant sur le dossier des disparus, enfin aux personnels de sécurité qui auraient commis des bavures ou des dépassements dans leur campagne antiterroriste. Elle ne satisfait pas les familles des victimes qui refusent que leur dossier soit enterré, elle radicalisera sans doute les ONG de défense des droits humains, dans les faits elle restera comme une opération dont l’initiateur a bien observé le contexte algérien et ses fractures dangereuses. Ainsi que ses faiblesses aussi.

Egoïste, politicienne ou injuste soit-elle, la décision de M. Bouteflika de fermer le dossier des disparus en indemnisant les familles ne se nourrit pas uniquement d’une volonté supposée de sa part d’apaiser ses relations avec la haute hiérarchie militaire ou de signer la paix nécessaire pour lui afin d’entamer sans risques une seconde campagne pour les présidentielles. Elle découle d’un constat qu’une telle solution est possible dans un champ politique national où ses acteurs les plus importants cumulent pourtant une trop grande inertie et des tonnes d’incohérences dans l’action pour pouvoir réagir dans le sens d’un traitement démocratique et éthique de ce dossier. Cela fera sans doute hurler certains, le refus du chef de l’Etat de soumettre les disparus à une commission d’enquête est une traduction du consensus jamais déclaré entre les partis importants d’abandonner ou de laisser ce dossier tomber en déshérence. Même si certains d’entre eux continuent de l’évoquer, c’est soit avec l’angoisse de réveiller les démons, soit avec la fatigue manifeste de ceux qui ne savent plus appréhender le réel algérien ni réfléchir aux luttes qu’il convient de mener. Pour s’en convaincre, il suffit d’une question: où sont passés tous ces rassemblements que les familles des disparus et leurs soutiens multipliaient d’antan dans les sièges de certains états-majors politiques ? Où sont passées toutes ces associations et personnalités qui défendent les droits et revendications des familles ? Systématiquement entravés, ces groupes sont déchirés et fatigués. Le réseau de résistance qu’ils ont improvisé avant de tenter de le créer est aujourd’hui méconnaissable, il se perd dans les impasses du pays et dans l’autisme incroyable des autorités. Il reste les familles et les proches. Ceux-là tant qu’ils ont leur mémoire continueront de lutter contre l’indifférence et l’injustice des gestions politiques.

(El Ribat 21.9 / Le Jeune Indépendant, El Watan 25.9 / Corr) L'association de familles de "disparus" SOS-Disparus critique la composition et le mandat de la commission "ad hoc" installée par le président Bouteflika pour prendre en charge la question des "disparus". Selon l'association, "cette commission bis n'offre aucune garantie relative à son indépendance et à son impartialité" et "s'inscrit dans un cadre électoraliste". SOS Disparus a tenu un rassemblement le 23 septembre devant le siège de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'Homme, d'où est issue la commission "ad hoc" instituée par le président Bouteflika (les deux commissions étant d'ailleurs présidées par le même Farouk Ksentini, accusé par SOS Disparus d'avoir "trahi les familles des disparus". SOS Disparus a déclarer rejeter "catégoriquement" toute offre d'indemnisation.

Pour Amnesty International, si le mécanisme institué par le président constitue une évolution positive, des mesures immédiates doivent être prises pour qu'il débouche sur des enquêtes indépendantes, impartiales et approfondies.

Comme "SOS Disparus", le bulletin islamiste "El Ribat" suggère que l'installation par le président Bouteflika de la commission relèverait d'une stratégie électorale : "le Président semble vouloir induire ceux qui s'intéressent à cette question à soutenir sa candidature pour un second mandat", et "toute cette histoire de prise en charge de la question des disparus par ce mécanisme ad hoc (pourrait n'être) qu'une simple manoeuvre préélectorale en vue des élections (présidentielles) de 2004".


Communiqué de SOS-Disparus :

Un instrument ad hoc à la veille des élections présidentielles

Le Samedi 20 septembre 2003, le Président de la République Abdelaziz Bouteflika a officiellement installé le « mécanisme ad hoc de prise en charge de la question des disparus », rappelant que ce mécanisme « ne peut pas être conçu comme une commission d’enquête qui se substituerait aux autorités administratives et judiciaires compétentes ». Cet instrument viole l’article 13, §§§ 1, 2, 3, 4, 5 et 6 de la Déclaration sur la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies en 1992, qui dispose notamment que « tout Etat assure à toute personne qui allègue qu'une personne a été victime d'une disparition forcée […] le droit de dénoncer les faits devant une autorité de l’Etat compétente et indépendante, laquelle procède immédiatement et impartialement à une enquête approfondie […] l'Etat défére sans délai à ladite autorité pour qu'elle ouvre une enquête [...] veille à ce que l'autorité compétente dispose des pouvoirs necessaires pour mener l'enquête à bien».

Le mécanisme en question, dont le président et certains membres sont issus de la CNCPPDH organe relevant de la présidence, a commencé à travailler dès samedi au sein même de la Présidence de la République. Pourtant, les membres n’ont toujours pas connaissance des prérogatives que leur confère leur mandat dont le texte, d’après Farouk Ksentini, sera publié prochainement au Journal Officiel.

Quelle crédibilité accorder à un tel instrument, alors que Farouk Ksentini lui-même a déjà rendu son verdict en déclarant à la fin de l’année 2002 qu’il ne pouvait concevoir l’armée algérienne comme responsable de tels actes, du fait qu’elle est l’héritière de l’Armée de libération nationale. De même, le Président de la République ne fait aucune allusion à la responsabilité directe des services de sécurité algériens dans les disparitions forcées. Une telle position ne permet pas d’accorder le moindre crédit à l’action à venir du « mécanisme ad hoc de prise en charge de la question des disparus».

La CNCPPDH par la voix de son président avait déjà voulu en 2002 clore le dossier en indemnisant les familles en échange de l’octroi d’un certificat de décès. Une nouvelle fois, les familles de disparu(e)s sont trompées et humiliées par une mesure machiavélique qui ne vise qu’à prolonger cette tentative scandaleuse de règlement rapide du problème des disparitions.

SOS Disparus dénonce cette « commission nationale bis » qui n’offre aucune garantie relative à son indépendance et à son impartialité, et déplore que les revendications exprimées par les familles de disparu(e)s dans le mémorandum transmis au Président de la République le 17 novembre 2002, sont comme d’habitude restées lettre morte. Les familles de disparu(e)s restent déterminées à faire la lumière sur le sort de leurs chèr(e)s disparu(e)s par la vérité et la justice, dans la transparence la plus totale.

Alger, le 22 septembre 2003

La Présidente,
Fatima Yous


Communiqué de la Ligue Algérienne de défense des droits de l'homme (LADDH)

Le comité ad hoc sur les disparus, sans pouvoir réel, destiné à servir de caution au pouvoir, ne laisse aucun doute sur l'inefficacité de son action, car il n'est qu'une mascarade à usage externe, pour couvrir les auteurs, les complices et surtout les commanditaires de crime contre l'humanité. Le président de ce comité ad hoc, comme un chef de train, rencontrera de nombreux serre freins, qui le feront dérailler.

Le pouvoir veut garder en vase clos le problème des disparus, pour éviter la condamnation internationale, et ne pas payer le prix politique de ses méfaits. Une fois de plus le droit n'a pas remporté une victoire sur la politique, ni la morale sur la raison d'Etat.

Le pouvoir a créé à plusieurs reprises des commissions au niveau du ministère de l'intérieur, pour soustraire le dossier des disparus à leurs familles, aux ONG internes et aux partis politiques. Contrairement aux conclusions de ces commissions, les disparus n'ont rejoint ni les maquis, ni l'étranger, ni tués dans des accrochages, mais bel et bien enlevés par les services de sécurité.

Les disparus sont actuellement vivants ou morts ?. Telle est la lancinante question. Le pouvoir connaît le sort réservé aux disparus. S'ils sont vivants il doit les libérer, ou les présenter à la justice. S'ils sont morts, il doit localiser les lieux où ils ont été enterrés, faire appel aux spécialistes de l'ADN, qui ont fait leurs preuves au Liban et en Ex Yougoslavie, pour identifier les corps, et les remettre à leurs familles, qui vivent un véritable calvaire.

Sur le plan interne une enquête auprès de l'armée surtout du DRS , de la police et de la justice, peut reconstituer la vérité sur les disparus, et permettre de retrouver leurs corps.

La création d'une commission d'enquête internationale pour faire la lumière sur les disparus est nécessaire. Il faut examiner les faits qui méritent une investigation contradictoire, impartiale, pour é liminer tout doute sur les résultats qui en découleront, et faire avancer la vérité qui conditionne la justice.

L'impunité résulte d'une loi d'amnistie, de mesures de clémence, ou de la dépendance de la justice. Il faudrait bien qu'un jour la vérité sur cette zone noire de notre histoire soit faite, et que la responsabilité du pouvoir soit reconnue.

Défendre la cause des disparus, c'est défendre le droit, la vérité et la justice.

Alger le 22/0903 Abdennour Ali Yahia Président de la LADDH


Salah Eddine Sidhoum

(AFP, Reuters 30.9) Le militant des droits humains Salah Eddine Sidhoum, qui était revenu le 22 septembre en Algérie (où il avait été condamné à 20 ans de prison par contumace en 1997, pour "tentative de renversement du régime" et "création de cellules illégales") après des années de clandestinité, et s'était constitué prisonnier, a entamé une grève de la faim totale (ni nourriture, ni boissons) dans sa prison de Serkadji.

Communiqué de l'Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l'Homme (programme conjoint de la FIDH et de l'OMCT)

Un défenseur des droits de l'Homme sort de la clandestinité : L'Observatoire s'inquiète pour sa sécurité

Paris, Genève- Le 30 septembre 2003 - L'Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l'Homme, programme conjoint de la Fédération internationale des ligues des droits de l'Homme (FIDH) et de l'Organisation mondiale contre la torture (OMCT) s'inquiète de la situation de Monsieur Salah-Eddine SIDHOUM qui s'est rendu aux autorités algériennes le 29 septembre 2003, après neuf années passées dans la clandestinité.

Le Dr. Sidhoum, chirurgien et défenseur des droits de l'Homme algérien, avait été arrêté une première fois par la police dans les années 80 à la suite de ses prises de position pour la libération des personnes arrêtées lors des manifestations du printemps berbère. Il avait ensuite alerté la communauté internationale sur la pratique de la torture, des exécutions extra-judiciaires et des disparitions forcées, notamment en recueillant et diffusant des témoignages de victimes qu'il a été amené à soigner dans son service de chirurgie orthopédique à l'Hôpital Selim Zmirli d'El Harrach.

En 1994, une campagne de harcèlement et d'intimidation a été engagée contre le Dr. Sidhoum. En décembre 1994, après une tentative d'assassinat, il a décidé de vivre dans la clandestinité, par peur des représailles dues à ses activités de défenseur des droits de l'Homme.

En 1997, il a été condamné à 20 ans de prison par contumace sur la base de l'article 87 bis du Code pénal qui comprend notamment l'appartenance à un groupe armé et actes terroristes.

Hier, lundi 29 septembre 2003, le Dr Sidhoum a décidé de sortir de la clandestinité et de se livrer à la justice de son pays. Après que le procureur lui a signifié qu'il serait de nouveau entendu dans quelques semaines, M. Sidhoum a choisi d'être enfermé à la prison de Serkadji, près d'Alger, où il estime que sa vie est moins menacée que s'il restait libre de ses mouvements, en attendant d'être à nouveau jugé.

L'Observatoire condamne le harcèlement dont le Dr. Sidhoum fait l'objet en ce qu'il ne vise qu'à sanctionner son engagement en faveur du respect des droits de l'Homme en Algérie et demande expressément aux autorités algériennes de:


(Le Matin, Le Quotidien d'Oran 12.10 / Corr) L'état de santé du docteur Salah-Eddine Sidhoum, en grève de la faim et de la soif à la prison de Serkadji où il est incarcéré depuis le 29 septembre après son retour volontaire d'exil, ne cesse se se détériorer et nécessite une hospitalisation d'urgence, selon ses proches. Le directeur de la prison a attendu le 8 octobre pour autoriser le détenu à être examiné par un médecin, mais a refusé l'hospitalisation et a placé le détenu dans une cellule d'isolement de l'infirmerie. Les proches du docteur Sidhoum dénoncent également le fait que ses entretiens avec ses avocats se fassent en présence de gardiens, sans confidentialité. Le Comité de soutien a adressé le 9 octobre une lettre au directeur de Serkadji, exigeant de lui le respect des règles minima pour le traitement des détenus, adoptées par l'ONU. Plusieurs organisations de défense des droits humains, dont Justitia Universalis, expriment la même exigence, et les avocats du docteur Sidhoum ont déposé plainte contre le directeur de la prison pour non-assistance à personne en danger.

Le jugement prononcé en 1997 à l'encontre du docteur Sidhoum, condamné alors à 20 ans de prison par contumace, pourrait être révisé le 16 octobre. Le 14, la justice statuera sur la demande de mise en liberté provisoire du docteur Sidhoum.


Résolution du Comité Méditerranée de l'Internationale Socialiste

Split, le 11 octobre 2003

Le Comité Méditerranée de l'Internationale Socialiste réuni à Split (Croatie) les 10 et 11 ocobre 2003 est inquiet de l'état de santé du Dr Salah Eddine Sidhoum, incarcéré dans des conditiond deplorables et en grève de la faim totale pour recouvrir ses droits et obtenir un procés rapide, équitable et public.

Le Comité Méditerranée de l'Internationale Socialiste rend hommage à ce militant infatiguable des Droits de l'Homme et demande instamment aux autorités algériennes de lui accorder sans délai, la liberté provisoire dans la perspective d'un procés conforme aux règles du Droit international en présence des ONG internationales chargées des Droits de l'Homme.


(FIDH 14.10 / Quotidien d'Oran 16.10 / Corr. ) Le tout nouveau Prix Nobel de la Paix, l'Iranienne Chrin Ebadi, a adressé le 14 octobre un message de "profonde solidarité" à Salah Eddine Sidhoum, incarcéré à la prison de Serkadji depuis son retour d'exil, et en grève de la faim depuis le 20 septembre. Chrin Ebadi rappelle dans son message que les autorités algériennes "ont la responsabilité de la mise en oeuvre" des instruments de protection des défenseurs des droits humains, et "les appelle à tout entreprendre" afin de garantir la sécurité et la liberté de Salah Eddine Sidhoum, "ainsi que sa "liberté de défendre les droits et libertés universellement garantis".

Le 14 octobre, la Cour d'Alger a refusé la mise en liberté provisoire de Salah Eddine Sidhoum, dont le procès devait s'ouvrir le 16 octobre pour "appartenance à un groupe terroriste et apologie des actes terroristes, etc." (le "etc." étant à lui seul un vice de forme dans la qualification de chefs d'inculpation).

Salah Eddine Sidhoum a également reçu le soutien de l'ancien secrétaire général du FLN Abdelhamid Mehri, du président du FFS Hocine Aït Ahmed, du Comité méditerranée de l'Internationale Socialiste. A Paris, un rassemblement de soutien à Salah Eddine Sidhoum devait se tenir le 15 octobre devant l'Ambassade d'Algérie, à l'appel notamment d'Amnesty International, des ligues française et algérienne des droits de l'Homme et de Médecins du Monde, avec le soutien des Verts et du PS.

(AP 16.10 / L'Expression 18.10) Après l'acquittement et la libération, le 16 janvier, de Salah-Eddine Sidhoum, en grève de la faim depuis son incarcération à la suite de son retour volontaire en Algérie le 29 septembre septembre, la presse s'interroge sur la contradiction entre cette décision, à laquelle appelaient nombre d'ONG algériennes et internationales, et l'ancienne condamnation de Salah Eddine Sidhoum à 20 ans de prison, le traitement avilissant auquel il était soumis dans sa prison de Serkadji et les accusations d'"appartenance à un groupe terroriste et apologie d'actes terroristes" portées contre lui. "L'Expression" suggère que la relaxe du militant des droits humains pourrait aussi "politique" que sa condamnation précédente en 1997 à vingt ans de prison.. La presse algérienne relève également que la libération de Salah-Eddine Sidhoum conclut une large mobilisation en sa faveur, en particulier à l'étranger, et s'interroge sur le caractère exceptionnel ou non du jugement dont il a bénéficié, alors que de nombreuses personnes, condamnées pour les mêmes motifs que ceux invoqués contre lui en 1997, restent incarcérées.


SALAH EDDINE SIDHOUM ACQUITTÉ ET LIBÉRÉ


COMITÉ DE SOUTIEN AU DR SALAH EDDINE SIDHOUM
Communiqué n°5, Paris, 16 octobre 2003

        Dr. Sidhoum a comparu aujourd’hui devant le tribunal
        criminel d’Alger après avoir fait opposition au jugement
        prononcé en 1997 qui l’avait condamné à 20 ans de
        prison par contumace pour « appartenance à groupe
        terroriste ». Il a été acquitté et libéré.

        Le procès était public, trois observateurs étrangers y ont
        assisté, Me Mohammed Abbou pour le Comité de soutien et
        la Commission arabe des droits de l’homme, Me. Samir Ben
        Amor pour Human Rights Watch et Amnesty International et
        M. Tabib Chawki par l’Observatoire des défenseurs des droits
        de l’homme. De nombreux journalistes et défenseurs des
        droits de l’Homme étaient également présents. A l’audience,
        le procureur avait requis sept ans de prison. Onze avocats ont
        plaidé notamment pour prouver que les accusations portées
        contre lui étaient totalement infondées.

        Nous rappelons que Salah-Eddine Sidhoum, chirurgien, avait,
        en raison de ses dénonciations des graves violation des droits
        de l’homme depuis 1992, fait l’objet en 1994 d’une campagne
        de calomnie, d’une tentative d’assassinat par les escadrons de
        la mort et en 1997 d’une condamnation à vingt ans de prison
        par contumace. Il avait décidé de se rendre à la justice le 29
        septembre 2003 pour faire opposition au jugement. En droit
        algérien interne, il n'existe aucune autre possibilité de purge de
        la contumace que l’arrestation ou le fait de se constituer
        prisonnier.

        Après l’audition chez le procureur il a été placé en détention à
        la prison de Serkadji. Il a aussitôt entamé une grève de la faim
        pour revendiquer la garantie d’un procès rapide, équitable et
        public, ainsi que certains droits, comme celui aux livres,
        journaux, parloir rapproché, à la radio,etc. 

        Par mesure disciplinaire la direction de la prison l’a placé dans
        un cachot situé au sous sol de la prison Serkadji. Salah-Eddine
        Sidhoum a entamé aussitôt une grève de la faim totale,
        refusant toute alimentation et boisson pour protester contre
        ces sanctions et obtenir un régime et des conditions dans
        lesquelles sont assurés ses contacts avec le monde extérieur
        (famille, avocat, services sociaux et médicaux, organisations
        non gouvernementales).

        Jeudi 9 octobre, Salah-Eddine Sidhoum s’est effondré,
        terrassé par une angine pneumonique. Il a été emmené à
        l’infirmerie où il a été mis sous perfusion. Il a arrêté sa grève
        totale pour absorber de l’eau et du sucre. Il a appris deux
        jours après que la date du procès avait été fixée pour le 16
        octobre 2003.

        Le comité de soutien remercie toutes celles et tous ceux
        qui ont œuvré en Algérie et de par le monde dans le cadre
        de la campagne internationale pour la libération du Dr.
        Sidhoum. C’est une victoire énorme pour le Dr. Sidhoum
        et pour tous ceux épris de Vérité et de Justice.


Communiqué de l'Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l'Homme

          Paris-Genève, le 16 octobre 2003

          L'Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de
          l'Homme, un programme conjoint de La Fédération
          internationale des Ligues des Droits de l'Homme (FIDH) et de
          l'Organisation Mondiale contre la Torture (OMCT), se félicite
          de la décision de la Cour
          criminelle d'Alger d'acquitter et de libérer le Dr. Salah-Eddine
          Sidhoum, chirurgien et défenseur des droits de l'Homme.

          Le Docteur Sidhoum était incarcéré à la prison de Serkadji,
          près d'Alger depuis le 29 septembre 2003, date à laquelle il
          s'était rendu aux autorités algériennes après neuf ans passés
          dans la clandestinité. Il était poursuivi pour " appartenance à
          un groupe terroriste " après avoir été condamné à 20 ans de
          prison par contumace en 1997 sur la base de l'article 87 du
          Code pénal, qui comprend l'appartenance à un groupe armé et
          actes terroristes.

          Le Procureur a requis sept années de prison à l'audience
          d'aujourd'hui. L'Observatoire a mandaté M. Tabib Chawki,
          avocat membre de la Ligue tunisienne des droits de l'Homme
          et Président de l'Association arabe des jeunes avocats, en tant
          qu'observateur.

          Le Docteur Sidhoum, avait été arrêté une première fois par la
          police en 1980 à la suite de ses prises de position pour la
          libération des personnes arrêtées lors des manifestations du
          printemps berbère. Il n'avait ensuite cessé d'alerter la
          communauté internationale sur la
          pratique de la torture, des exécutions extrajudiciaires et des
          disparitions forcées, notamment en recueillant et diffusant des
          témoignages de victimes qu'il avait été amené à soigner dans
          son service de chirurgie orthopédique à l'Hôpital Selim Zmirli
          d'El Harrach. En 1994, il était entré en clandestinité par peur
          de représailles après que trois individus armés eurent fait
          irruption chez lui.

          Peu après son incarcération le 29 septembre 2003, il avait
          entamé une grève de la faim pour protester contre les terribles
          conditions de détention dans lesquelles il se trouvait. Son état
          de santé n'avait cessé de se détériorer depuis lors.
          L'Observatoire, ainsi que d'autres organisations, avait, depuis
          cette date, demandé sa libération.


(AP 8.11) La Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme (LADDH) dénonce dans un communiqué les sévices subis en prison par le président de sa section d'El Bayadh, Larbi Tahar : "Ayant entamé une grève de la faim pour protester contre le mauvais traitement et comportements vexatoires, abusifs et mesquins, tel que la confiscation du sel et du sucre de son panier, dénudation durant trois nuits, Larbi Tahar a été violemment pris à partie par le directeur de la prison qui, après avoir donné l'ordre à ses sbires de le ligoter et l'immobiliser à l'aide de menottes aux poignets et aux chevilles, l'a roué de coups sur toutes les parties de son corps, lui occasionnant plusieurs blessures et la perte de trois dents", révèle le communiqué de la LADDH qui ajoute, en citant des avocats, que l'état de santé de la victime s'est gravement détérioré. La LADDH dénonce l'arrestation deson responsable, et sa mise en détention pour "attroupement armé et désobéissance", et le président de la Ligue, Ali Yahia Abdennour, lance un appel aux partis politiques algériens, aux ONG internationales et au président algérien "pour qu'il assume ses responsabilités en tant que garant du respect de la constitution et des conventions internationales ratifiées par l'Algérie".

(Reuters 8.11) 300 prisonniers marocains libérés par le Front Polisario ont été rapatriée le 8 novembre au Maroc par le Comité international de la Croiy-Rouge (CICR), qui annonce que 614 Marocains sont encore détenus par les Sahraouis dans la région de Tindouf, en Algérie. Certains des prisonniers libérés étaient captifs depuis plus de 20 ans. Leur libération a été négociée par la Fondation Kadhafi. En septembre 2003, 243 prisonniers marocains avaient déjà été libérés par le Polisario, après la libération d'une centaine en février et d'une centaine les années précédentes.

(El Watan, Le Matin 16.11 / El Watan, Le Matin 17.11) Plusieurs ONG internationales et personnalités africaines, à l'appel de la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme (LADDH) ont exigé, en marge de la quatrième session de la Commission africaine des droits de l'Homme et des peuples qui se tient à Banjul (Gambie), la libération du président de la section de Labiod Sidi Cheikh (w. El Bayadh) de la LADDH, Larbi Tahar, emprisonné pour "attroupement armé et désobéissance civile" après avoir exprimé sa solidarité avec les syndicalistes du SNAPAP (syndicat autonome de l'administration), eux-mêmes en grève de la faim. En prison depuis le 5 octobre, Larbi Tahar aurait été victime de mauvais traitements, voire de sévices corporels. Les ONG* demandent la "libération immédiate" du militant des droits humains, et l'abandon "de toutes les charges qui pèsent sur lui". Elles demandent également aux autorités algériennes de "respecter en toute circonstance les dispositions de la déclaration sur la protection des défenseurs des droits de l'Homme adoptée par l'Assemblée générale des Nations Unies le 9 décembre 1998". Pour sa part, la LADDH a déposé plainte contre le directeur de la prison de Labiodh Sidi Cheikh "suite aux sévices corporels subis" par Larbi Tahar. Selon la LADDH, "le directeur de la porison, après avoir ordonné à ses sbires de ligoter et d'immobiliser (Larbi Tahar) à l'aide de menottes aux poignets et aux chevilles, l'a roué des coups sur toutes les parties du corps".

*dont la Fédération internationale des droits de l'Homme, le Centre international pour la paix et la démocratie, l'Organisation mondiale contre la torture.

LIGUE ALGÉRIENNE POUR LA DÉFENSE DES DROITS DE L'HOMME (LADDH)

Pétition nationale pour la levée de l'état d'urgence :

LIBÉREZ LA SOCIÉTÉ, LEVEZ L'ETAT D'URGENCE

          Depuis douze ans, le pouvoir qui n’a pas tenu compte des
          opinions exprimées par la grande majorité des Algériens par le
          biais des partis politiques, des associations indépendantes, des
          personnalités nationales et de la presse, expliquait sur un ton
          incantatoire que l’état d’urgence allait sortir le pays des
          ténèbres.

          Il faut voir la réalité de l’état d’urgence, avec le regard de
          ceux qui la vivent quotidiennement et subissent ses méfaits
          sur le plan politique social, culturel et humain. L’Algérie est
          en régression en matière des libertés . la situation sociale se
          détériorise, le pays est en crise avec des séismes politiques
          répétés. La haine et la peur, l’exclusion et l’arbitraire sont
          présents et divisent la société jusqu’au cœur des familles.

          Les droits du peuple, les droits de l’Homme , les droits du
          citoyen, la liberté de se réunir et de manifester de manière
          pacifique, sont le plus grand dénominateur commun des
          Algériens.

          La levée de l’état d’urgence, conditionne la libération du
          champ politique et médiatique, ainsi que l’exercice des libertés
          individuelles et collectives.

          La contradiction du pouvoir réside dans le fait que le
          terrorisme est déclaré « résiduel », « réduit à quelques poches », 
          alors que l’état d’urgence est maintenu pour les impératifs
          de la lutte anti terroriste.

          Le combat pour la levée de l’état d’urgence, est non
          seulement légitime et prioritaire, mais se situe au dessus de
          toutes les idéologies et de tous les clivages politiques. Apres le
          début de cette campagne ; le constat est là : l’Algérie
          commence à se mobiliser pour la levée de l’état d’urgence.

          La première liste de la pétition pour la levée de l’état
          d’urgence que nous publions aujourd’hui n’est qu’un début ;
          un début de mobilisation citoyenne pour libérer la société ;
          toute la société.
          Nous tenons à cette occasion à saluer la mobilisation des
          acteurs politiques ; des syndicalistes ; des associations ; des
          avocats : des journalistes et de toute une société affaiblie
          certes par une guerre qui perdure ; mais mobilisée plus que
          jamais pour se libérer d’un état d’urgence permanent ; une
          société qui redeviendra actrice de son propre destin. 
          Nous appelons les citoyens et les citoyennes à redoubler la
          mobilisation en adhérant au texte de la pétition et en envoyant
          leurs signatures au numéro de fax suivant : 021/64/35/21 


          Alger le 18/11/2003
          Maître Ali yahia Abdenour 
          Président de la LADDH 

LE TEXTE DE LA PÉTITION

          La levée de l’état d’urgence conditionne la libération du
          champ politique et médiatique, ainsi que l’exercice des libertés
          individuelles et collectives.

          Il faut agir ensemble, pour mettre fin à la décision du pouvoir
          qui a imposé au peuple, un permanent état d’urgence.

          Ce combat est non seulement légitime et prioritaire, mais se
          situe aussi au dessus de toutes les idéologies et de tous les
          clivages politiques .


(El Watan 20.11) Le président de la section locale de la Ligue algérienne pour la défense des droits de l'Homme (LADDH), Larbi TGahar, sera jugé le 24 novembre à Labio Sidi Cheikh (w. El Bayadh) pour "attroupement armé et désobéissance", pour avoir soutenu de sa présence des syndicalistes du SNAPAP (syndicat autonome de l'administration publique) en grève de la faim devant l'hôpital d'El Bayadh. Un collectif d'avocats a été formé pour sa défense, et celle du journaliste (et militant de la LADDH) Hassan Bouras, condamné à deux ans de prison ferme et cinq ans d'interdiction professionnelle pour "diffamation".

Communiqué de la Ligue Algérienne pour la Défense des Droits de l’Homme

          La LADDH informe l’opinion publique nationale et
          internationale qu’elle vient de déposer plainte auprès du
          procureur général de la cour de Saida contre le directeur de la
          prison de labiodh sidi cheikh ; suite aux sévices corporels
          subies par Larbi Tahar le militant de la laddh àlabiadh sidi
          cheikh au sein de cet établissement pénitencier

          Cette plainte a été déposée par Maitre Beramdanne Hamid le
          09/11/2003. 

          La LADDH exige toute la lumière sur la violence dont a été
          victime son militant et demande l’application des lois de la
          république en évitant l’impunité qui est devenue une
          constante nationale dans les annales de l’appareil judiciaire
          algérien. 

          La LADDH réitère à cet effet sa demande de libération
          immédiate de larbi tahar ainsi que de Mr Bourass Hacene
          journaliste et membre de LADDH condamné injustement à
          deux de prison ferme pour diffamation. 

          Alger le 15/11/2003
          Maître Ali yahia Abdenour 
          Président de la LADDH 


(AP 22.11 / Quotidien d'Oran 23.11 / El Watan 24.11) Le président Bouteflika a grâcé le 22 novembre 3080 détenus, purgeant une peine de condamnation définitive, à l'occasion de l'Aïd el Fitr. La grâce présidentielle exclut les condamnés pour terrorisme, subversion, viol, attentat à la pudeur avec violence, inceste, vol, escroquerie, recel, détournement de deniers publics et privés, corruption, trafic d'influence, fausse monnaie, trafic de stupéfiants, contrebande, actes de violence et d'atteinte aux biens commis à l'intérieur d'un établissement pénitenciaire. Le président a inscrit sa mesure de grâce dans le cadre de la promotion de "la culture de la tolérance" et de "l'esprit de la concorde nationale". "Le Quotidien d'Oran" note que "souvent ces grâces sont presque des nécessités au regard de l'explosion de la population carcérale" et que "réduire la pression démographique en élargissant (...) ceux qui ont les charges les moins graves suffit" à justifier les mesures de grâce. EDn revanche, "El Watan" craint que "réinjecter d'un coup 3000 détenus dans la société, même s'il ne s'agit que d'auteurs de petits larcins, a de quoi susciter des inquiétudes légitimes auprès des citoyens qui sont déjà suffisamment alarmés par la montée de la délinquance".

(Quotidien d'Oran 24.11) Des incidents ont éclaté le 23 novembre dans le pénitencier de Remchi (w. Tlemcen), où une septantaine de détenus ont mis à sac leurs cellules pour protester contre le fait qu'ils ne bénéficiaient pas de la grâce présidentielle accordée à 3080 condamnés à l'occasion de la fin du Ramadan. Tous les mutins purgent des peines pour délits ou crimes de droit commun.

Human Rights Watch, 9 décembre 2003

Algérie : la commission sur les " disparitions " devrait avoir des pouvoirs plus étendus

(Bruxelles, 9 décembre 2003) La commission algérienne sur les " disparitions " devrait disposer de pouvoirs d'investigation et d'un mandat plus étendus pour être crédible et efficace, a estimé Human Rights Watch dans un rapport rendu public aujourd'hui.

Intitulé Vérité et justice en suspens : la nouvelle commission étatique sur les "disparitions" , ce rapport de 32 pages analyse cette commission sur les " disparitions ", dont la création a été annoncée en septembre par le Président Abdelaziz Bouteflika. Après des années d'obstructionnisme, le gouvernement algérien a établi une commission dont le but est d'élucider le sort de plus de 7 000 personnes qui ont " disparu ", alors que la plupart était aux mains des forces de l'ordre pendant le conflit civil des années 90.

" Nous saluons l'initiative du Président Bouteflika mais elle ne répond pas suffisamment au besoin de voir justice faite ", a déclaré Joe Stork, Directeur par intérim de Human Rights Watch pour le Moyen-Orient et l'Afrique du Nord. " Ces enquêtes, ces indemnisations et cette assistance aux familles se sont faites attendre longtemps. Mais tout cela ne peut remplacer ni des investigations minutieuses menées sur ces crimes contre l'humanité ni l'obligation pour leurs auteurs d'en rendre compte devant la justice. "

Depuis les années 90, des milliers de familles vivent dans une incertitude insoutenable car leurs proches ont " disparu " après avoir été emmenés par les forces de l'ordre aux moments les plus noirs de la violence politique qui a ravagé l'Algérie. Cette violence était devenue endémique en 1992, après le coup d'état militaire organisé pour empêcher le déroulement des élections dans lesquelles le Front Islamique du Salut (FIS) était donné gagnant. En outre, on est toujours sans nouvelles de centaines - voire de milliers - de personnes enlevées par les groupes armés islamistes combattant le gouvernement et qui sont toujours portées disparues.

D'après le décret présidentiel rendu public en novembre et définissant son mandat, la nouvelle commission s'attellera à confirmer les cas de " disparitions ", à orienter les familles pour obtenir une aide juridique, et à faire des propositions sur la manière dont l'État pourrait indemniser et aider les proches des victimes. Il semble, selon Human Rights Watch, que la commission devra aller au-delà de son mandat si elle va élucider comment chaque " disparition " a été opérée et en identifier les auteurs.

L'existence de nouveaux cas de " disparitions ", bien que rares, prouve que les autorités n'ont pas mis en place les garanties juridiques qui permettraient d'empêcher définitivement l'usage d'une telle pratique, a déclaré Human Rights Watch. En outre, les autorités algériennes ont périodiquement dissipé des rassemblements publics organisés par les proches des " disparus ". Elles n'ont d'autre part toujours pas répondu de façon positive à la demande, déposée en 2000, du Groupe de travail de l'ONU sur les disparitions forcées et involontaires de se rendre sur le territoire algérien.

" Si l'Algérie entend sérieusement mettre fin aux violations des droits humains telles que les "disparitions", elle doit mettre fin à l'impunité ", a déclaré M. Stork. " La commission doit disposer de pouvoirs plus étendus pour pouvoir mener des enquêtes sur ces crimes, en trouver les responsables, assurer la libération de toute personne détenue au secret retrouvée vivante, et donner aux Algériennes et aux Algériens une idée exacte de la façon dont des milliers de leurs compatriotes ont pu "disparaître" sans laisser aucune trace. "

Human Rights Watch a vivement conseillé à l'Union européenne et aux États-Unis d'encourager l'Algérie dans ses efforts pour résoudre la question des " disparus " et d'insister pour que des enquêtes sérieuses soient menées. L'objectif fixé est que les Algériennes et les Algériens connaissent toute la vérité sur ces " disparitions " et sur la responsabilité de leurs auteurs.


(Corr 16.12) Vêtus de masques blancs, des militants d'Amnesty International ont remis le 16 décembre à l'Ambassade d'Algérie à Paris une pétition rassemblant près de 45'000 signatures, réclamant "vérité et justice au sujet des disparus" en Algérie. Les porteurs de la pétition ont été reçus par l'Ambassade, mais Amnesty, qui se voit refuser depuis plus de six ans une entrevue avec l'ambassadeur, a du une nouvelle fois renouveler une demande d'entrevue.

(El Watan 25.12) Le Comité de la liberté syndicale du Bureau international du Travail (BIT) a saisi le gouvernement algérien pour qu'il réponde aux accusations de violation des libertés syndicales formulées, contre le gouvernement, par les syndicats autonomes algériens. Plusieurs plaintes ont été déposées par plusieurs de ces syndicats (le CNAPEST, le CLA, le SNAPAP, le SNATA et le CNES), et par leur coordination (la Confédération algérienne des syndicats autonomes).

(Le Quotidien d'Oran 30.12) Le Procureur général de Relizane annonce l'ouverture d'une enquête sur les charniers découverts dans la région de Sidi M'hamed Benaouda (w. Relizane) par le responsable local de la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme (LADDH), Hadj Smaïn, selon qui ses charniers contiennent les restes de "personnes enlevéles et assassinées par les milices de l'ex-DEC (Maire) de Relizane, Mohamed Fergane". La famille d'un "disparu" affirme avoir pu identifier dans les corps retrouvés celui de son proche, Hadj Abed Saïdane.

(Le Matin 1.1) Le Tribunal de Skikda a condamné à mort par contumace, le 30 décembre, sept membres en fuite d'un groupe "terroriste" actif depuis 1996 dans les wilayas de Constantine, Jijel, Guelma et Skikda. Lors du même procès, deux autres membres du groupe ont été condamnés respectivement à trois et cinq ans de prison, et sept accusés ont été relaxés.

2004

(Algeria-watch 31.12)Les détenus politiques de la prison de Chlef ont décidé d'entamer une grève de la faim le 27 décembre pour protester contre les conditions de détention des prisonniers en général, et des détenus politiques en particulier, conditions qui se sont brutalement détériorées après la nimination d'un nouveau directeur et de nouveaux gardiens. Les tenues vestimentaires ont été très strictement réglementées, au point que les détenus ne peuvent plus s'habiller suffisemment pour faire face aux températures rigoureuses de l'hiver dans la région; des prisonniers ont été tabassés par les gardiens; le poids des colis de nourriture reçus par les prisonniers a été plafonné, afin, selon des témoignages de parents de détenus, d'obliger ceux-ci à "cantiner" auprès du magasin de l'établissement, alors que de nombreux détenus n'ont aucun moyen financier leur permettant de le faire.

(Corr 7.1) Les familles des prisonniers politiques de la prison de Chlef ont informé le 7 janvier les ONG et le CICR que leurs proches ont mis fin le 4 décembre à leur grève de la faim, qui durait depuis huit jours, après que leurs revendications aient été acceptées par les autorités. Les mesures prises par la nouvelle direction de la prison (restrictions vestimentaires, saisie des vêtements chauds, limitation des couffins hendomadaires, obligation d'achat à la cantine) ont été levées sur ordre du gouvernement.

(Le Quotidien d'Oran 11.1 / El Watan 12.1) La gendarmerie de Sidi M'hamed Benaouda devait procéder le 11 janvier à l'exhumation d'un charnier découvert par les familles de "disparus" de Relizane et la section locale de la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme, mais cette exhumation semble avoir été annulée. Le procureur général de Relizane avait pourtant ouvert une information judiciaire après la découverte de plusieurs charniers, dont l'un contenait le corps d'un homme identifié par ses proches, qui accusent la milice locale de Relizane, dirigée par l'ancien maire Mohamed Fergane, de l'avoir enlevé et assassiné. Entre 1994 et 1997, 212 personnes ont été enlevées et ont disparu dans la wilaya de Relizane, après avoir été arrêtées, le plus souvent de nmuit et à leur domicile, par la milice de Fergane. Le président de la Commission ad hoc sur les "disparus", et par ailleurs président de la Commission nationale consultative des droits de l'Homme, Farouk Ksentini, a demandé que "la justice fasse son travail" sur cette affaire.

(Jeune Indépendant 15.1) Les ossements d'un "disparu", Saïdane Hadj Abed, enlevé en novembre 1996 par la milice de l'ancien maire de Relizane Hadj Fergane, et dont les restes avaient été identifiés dans un charnier découvert par le bureau de Relizane de la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme (LADDH), ont mystérieusement disparus à leur tour, après que le procureur général ait ordonné une enquête sur l'affaire, et avant que le gendarmerie se soit rendu sur les lieux de l'affaire (la gendarmerie faisant d'ailleurs défaut le jour où elle devait se rendre sur l'emplacement du charnier). La LADDH dénonce une tentative de maquillage pour "faire disparaître toute trace du charnier" et empêcher que soit révélée la vérité et que soit fait justice aux demandes des familles de "disparus". Elle demande l'ouverture d'une enquête judiciaire sur cette nouvelle forme d'enlèvement : celui des restes de personnes "disparues" après avoir été enlevées.


LIGUE ALGERIENNE POUR LA DEFENSE DES DROITS DE L’HOMME
BUREAU DE LA WILAYA DE  RELIZANE 
Relizane, le 11/01/04
C O M M U N I Q U E

        A la suite des derniers rebondissements dans
        l’affaire des disparitions forcées de la wilaya
        de Relizane et de la mise à jour récente au
        sein d’une fosse commune d’effets
        vestimentaires appartenant à une personne
        portée disparue. 

        Etant à l’origine de cette découverte les
        services de Darak-El-Watani m’ont invité à
        leur remettre tout élément matériel en ma
        possession qui leur permettrait de pousser les
        investigations dans la recherche de la vérité.

        Conscient de la nécessité d’apporter une
        contribution au traitement de ce drame
        humain au delà de ses aspects judiciaires et
        politiques, j’ai manifesté ma disponibilité et
        j’ai remis à l’institution de la Gendarmerie
        Nationale les éléments dont je dispose à
        savoir : Un pantalon de type Kawi de couleur
        verte, un habit local de type « Abaïa) », un
        briquet, identifiés par les proches de la
        victime comme étant portés par elle le jour
        de son enlèvement, des prises de vues ainsi
        qu’un film d’ossements humains 

        J’ai été sollicité pour se rendre sur les lieux
        avec les éléments de Darak-el-Watani pour la
        récupération des ossements déjà filmés pour
        la poursuite de l’enquête. Nous avons pris
        rendez-vous pour la journée du 11 courant à
        11 heures. Au dernier moment cette mission
        n’était plus apparemment à l’ordre du jour
        pour des raisons que j’ignore. S’agit-il d’un
        contre ordre émanant de qui ? Et dans quel
        but ? 

        Le jour même à 14 heures, j’ai été informé
        par un habitant de la région, de la présence
        des services de la gendarmerie qui
        procédaient à des fouilles dans la région de
        Sidi M’hamed Benaouda au lieu dit Khloug.
        Je me suis rendu sur les lieux où il m’a été
        donné de constater la présence de 4 ou 5
        éléments de la gendarmerie, le Colonel
        BELAALA Cdt du groupement et le
        Capitaine Réda, chargé de l’enquête.

        S’agit-il d’un nouveau déplacement des
        ossements pour une destination inconnue
        comme c’était le cas des charniers localisés
        au mois de mai 2000 ? 

        La LADDH mue par ses obligations morales
        à l’égard de toutes les victimes de la tragédie
        et soucieuse de contribuer à l’éclairage d’un
        douloureux aspect d’un drame qu’il convient
        non seulement de guérir mais aussi de
        prévenir, j’espère que la Justice prendrait
        toutes les mesures nécessaires pour procéder
        à la récupération des ossements humains et
        les restituer à la famille des défunts après
        analyse pour un enterrement conforme à nos
        traditions.

        Le Responsable du bureau pour la Wilaya de Relizane
        M. SMAÏN


Ligue Algérienne de Défense des Droits de l'Homme
Communiqué

        Le 13 novembre 2003, Mohamed Smain responsable du
        bureau de la LADDH de la Wilaya de Relizane a filmé un
        charnier contenant les vêtements et les ossements de Saidane
        Hadj Abed, enlevé le 9 septembre 1996 par Hadj Fergane ex
        maire de Relizane et ses miliciens.

        La famille du disparu a déposé plainte, et la LADDH s’est
        constituée partie civile auprès du tribunal de Oued Rhiou, le
        Procureur général de la cour de Relizane, a ordonné une
        enquête diligentée par la gendarmerie.

        Le 11 janvier 2004, les gendarmes chargés de l’enquête qui
        ont demandé à Mohamed Smain de les accompagner sur le
        lieu du charnier pour récupérer les ossements du disparu,
        n’étaient pas présents au rendez-vous.

        La LADDH, a accueilli avec consternation la nouvelle que le
        12 janvier 2004 les ossements de Saidane Hadj Abed, ont été
        récupéré d’une manière clandestine, le lieu maquillé pour faire
        disparaître toute trace du charnier.

        La LADDH, dénonce et condamne avec rigueur ce procédé
        contraire avec l’exigence de vérité et de justice, et demande
        aux autorités concernées de respecter les principes de
        transparence dans ce douloureux problème, et d’ouvrir une
        enquête judiciaire. 

        Alger le 14/01/04

        Le président Ali Yahia Abdenour 


(AI 12.1) Les travaux sur une convention de l'ONU contre les disparitions ont repris à Genève, et devraient se poursuivre jusqu'au 23 janvier. Pour Amnesty International, une telle convention reprrésenterait un espoir pour les familles de plus de 41'600 "disparus" recensés dans le monde. L'ONU avait entamé ses travaux après l'adoption d'une résolution de la Commission des droits de l'Homme,. en 2001. La Convention devrait inclure des mesures pour prévenir les disparitions forcées, juger les responsables, accorder des dédommagements aux victimes. La création d'une procédure urgente pour localiser les "disparus" est aussi en discussion.

(Quotidien d'Oran, El Watan 19.1) Le ministre de la Justice Tayeb Belaïz a réuni (à huis-clos) le 18 janvier les directeurs des prisons algériennes pour leur exposer les grandes lignes du pprojet de réforme du secteur pénitentiaire, et prendre connaissance de leurs préoccupations et de la situation dans leurs établissements. Le ministre a déclaré que "la promotion des droits de l'Homme", le "respect et (la) protection de la persoinne du détenu" et "l'amélioration des conditions de leur traitement et de leur incarcération" sont au coeur de la réforme proposée par le ministère. Cette réforme (encore à l'état de projet) devrait élargir les compétences des juges d'application des peines afin de permettre l'exécution des peines hors des prisons et de faciliter les libérations conditionnelles. Elle devrait également donner plus d'autonomie aux directeurs des prisons "dans la gestion de leurs établissements". Le ministre a encore réitéré sa volonté d'améliorer les conditions de travail des personnels pétentiaires, et annoncé de nouveaux moyens et équipements "pour assurer la sécurité" dans les prisons, "affronter la surpopulation carcérale et pour réaliser, selon des normes modernes, un ensemble d'établissements". Il a exhorté les directeurs des prisons à "s'assurer de l'observation de la discipline par les personnels", à "respecter les droits des détenus", à "rester à l'écoute de leurs doléances" et à "s'interdire tout comportement contraire à l'exigence de (leur) fonction, en particulier la corruption".

(L'Expression, Liberté26.1) Les représentants des familles de "disparus" de quinze wilayas ont "installé" le 24 janvier un "Comité national de coordination des familles de disparus" (CNCFD), dont il veulent faire l'unique porte-parole et représentants des familles de disparus, et l'unique intermédiaire entre elles et les organismes nationaux ou internationaux concernés par le problème. Le CNCFD a décidé à l'unanimité de rejeter le "mécanisme ad hoc" installé par le président Bouteflika "sans consultation préalable avec les familles des victimes ou leurs représentants", et présidé par le président de la Commission nationale consultative des droits de l'Homme, Farouk Ksentini, mécanisme qualifié par la présidence du comité, Nacera Yous, d'"organe créé dans le but de faire perdurer le problème des disparus et canaliser la colère des familles". Le CNCFD constate en outre que le "mécanisme" officiel n'a aucun pouvoir d'investigation

Le CNCFD annonce son intention d'organiser dans les jours à venir un séminaire à Alger sur la question des "disparus", en y invitant tous les candidats annoncés à l'élection présidentielle de 2004.

(Le Quotidien d'Oran 29.1) Le groupe parlementaire du RND (le parti du Premier ministre Ouyahia) s'apprête à déposer un projet de loi relkatif aux victimes du terrorisme, annonce "Le Quotidien d'Oran". A l'initiative de Mme Flici, députée RND et présidente d'une association de victimes du terrorisme, ce projet de loi s'inspirerait des lois relatives aux anciens combattants, martyrs et enfants de martyrs de la guerre de libération. Il devrait protéger les victimes du terrorisme et leurs ayants droits en leur accordant la qualité de "chahid" (martyrs), soit un statut officiel donnant droit à une pension et à des facilités d'obtention de logement, de retraites, de crédit et de gratuité des soins.

(Le Monde 14.2) Le Front Polisario a annoncé le 13 février la libération de 100 prisonniers de guerre marocains qu'il détenait, pour certains depuis plus de vingt ans, dans ses camps du sud-ouest de l'Algérie. Le Polisario explique que ce "geste humanitaire" a été décidé sur requête de l'Emirat du Qatar. Après cette libération, qui n'a pas encore été effective, il restera 514 prisonniers marocains détenus dans la région de Tindouf, selon les chiffres de la Croix Rouge internationale. 300 prisonniers marocains avaient déjà été libérés en novembre, et au total 1743 ont été libérés depuis le cessez-le-feu de 1991.

(El Khabar 15.2) Le Parlement européen a adopté, le 10 février, une liste de neuf pays pour lesquels il a exprimé sa "préoccupation" à propos de la situation des droits de l'Homme, et la non publication d'un rapport sur cette situation. L'Algérie figure dans cette liste aux côtés de la Chine, de la Tunisie, de la Lybie, de l'Arabie Saoudite, de l'Indonésie, de la Côte d'Ivoire et du Népal.

(El Watan 11.2) Amnesty International demande, dans un communiqué publié le 9 février, aux futurs candidats à l'élection présidentielle algérienne de s'engager pour que des enquêtes soient menées sur les fosses communes découvertes en Algérie, et "contenant les restes de victimes présumées des violations massives des droits humains perpétrées au cours des dix dernières années". Des mesures urgentes doivent être prises pour protéger les sites de ces fosses, et les autorités doivent veiller "à ce que les preuves ne disparaissent pas", déclare AI, qui met en garde contre "le déplacement" par les autorités de restes humains "dans le but apparent de dissimuler les preuves" de violations des droits humains, voire de "ce que l'on peut qualifier de crimes contre l'humanité commis en Algérie au cours des dix dernières années".

Amnesty signale que "bon nombre" des fosses communes découvertes sont situées dans des régions qui ont été particulièrement touchées par la violence dans le milieu des années 1990, et rappelle qu'elle a demandé la constitution d'une commission d'enquête "exhaustive, impartiale et indépendante sur les violations massives des droits humains commises en Algérie depuis 1992", et dénonce le fait qu'"à ce jour, pratiquement aucun effort n'a été fait pour tenter d'établir la vérité sur ces exactions et traduire leurs auteurs présumés en justice".

(El Khabar, Le Quotidien d'Oran 19.2) Le président du syndicat national des magistrats (SNM), Mohamed Ras El Aïn, a été révoqué le 15 février de la magistrature par le Conseil supérieur de celle-ci (CSM), devant lequel il comparaissait en session disciplinaire. Le syndicat dénonce l'ignorance du droit à la défense de l'"accusé" et la non-ntransmission du dossier disciplinaire à celui-ci ou à son défenseur, Miloud Brahimi. Mohamed Ras El Aïn a déclarer que sa révocation visait à légitimer tous les arbitraires et dépassements dont son syndicat a été la victime, mais sanctionnait également son refus de cautionner l'invalidation par la Chambre administrative d'Alger du 8ème congrès du FLN. Un appel de la décision du CSM a été interjeté.

(L'Expression 23.2) Le président de la Commission consultative de promotion et de protection des droits de l'Homme (CNCPPDH), Farouk Ksentini, a, selon "L'Expression", été invité par la président Bouteflika à lui remettre le rapport préliminaire de la commission ad hoc créée par le président Bouteflika sur la question des "disparus". Cette instruction présidentielle fait suite au rejet par les familles de disparus du mécanisme institué par le président pour régler la question, notamment en octroyant des indemnités aux familles et en facilitant le constat juridique de la disparition difinitive de leurs proches. Les familles de disparus soupçonenent notamment le président et son "mécanisme" de vouloir etouffer le problème et évacuer la question des responsabilités dans les disparitions. Elles constatent, et les ONG internationales de défense des droits humains le constatent également, le faiblesse des moyens et des pouvoirs d'investigation de la commission ad hoc.


Collectif des familles de disparu(e)s en Algérie

DISPARITIONS FORCÈES EN ALGÈRIE : COMMENT ÈTABLIR UNE COMMISSION NATIONALE POUR LA VÈRITÈ ET LA JUSTICE ?

Paris, le 28 février 2004

A l’invitation du Collectif des familles de disparu(e)s en Algérie (CFDA), un séminaire s’est tenu à Paris le samedi 28 février 2004 sur le thème : Disparitions forcées en Algérie : comment établir une commission nationale pour la vérité et la justice ?

Les participant(e)s ont réaffirmé leur solidarité avec les familles de disparu(e)s et les défenseurs algériens des droits de l’Homme dans leur lutte pour la vérité et la justice.

Ils dénoncent le mépris dans lequel sont en permanence tenues leurs revendications de liberté, de justice et de dignité.

Ils insistent sur l’obligation de l’État algérien de respecter, de faire respecter et de faire appliquer le droit international humanitaire et des droits de l’Homme.

Cette obligation comprend notamment :

L’assemblée a décidé la création d’un comité de travail et de réflexion avec le Collectif des familles de disparu(e)s en Algérie en vue :


Le scandaleux harcèlement des services secrets algériens contre Mme Tigha


Algeria-Watch

  • Communiqué de presse

Mme Fouzia Mendil, épouse Tigha, mère de deux enfants, est la femme de M.
Abdelkader Tigha, ancien membre des services secrets de l'armée algérienne,
la « Sécurité militaire », devenue en septembre 1990 Département du
renseignement et de la sécurité (DRS). De 1993 à 1997, M. Tigha a été
adjudant au service Enquêtes du Centre territorial de recherche 
et d'investigation (CTRI) de Blida, ville située à une quarantaine de kilomètres
au sud-ouest d'Alger.

Le CTRI de Blida
Le CTRI de Blida est l'antenne dans la 1re région militaire (Algérois) de la
principale direction du DRS, la Direction du contre-espionnage (DCE),
dirigée depuis septembre 1990 par le général Smaïl Lamari, dit « Smaïn ».
Les enquêtes menées auprès de victimes par les organisations internationales
de défense des droits de l'homme, ainsi que plusieurs témoignages d'officiers dissidents de l'armée et du DRS ont établi que le CTRI de Blida a
été, jusqu'à ce jour, un des principaux centres répressifs utilisé par l'armée 
algérienne dans la « sale guerre » déclenchée en janvier 1992. Dirigé
de juillet 1990 à octobre 2003 par le colonel M'Henna Djebbar, cet important
centre de torture a été le théâtre de milliers d'exécutions sommaires de
civils accusés d'islamisme (dont une partie compte parmi les « disparus ») ;
et il a été aussi l'un des principaux centres de contrôle des groupes armés
islamistes créés ou manipulés par le DRS dès 1992, responsables notamment de
massacres de masse dans l'Algérois à l'automne 1997.
Un rapport très détaillé reprenant l'ensemble des informations disponibles
sur le CTRI de Blida (et sur d'autres centres de torture et d'exécution du
DRS) a été publié en octobre 2003 par Algeria-Watch, sous le titre 
«Algérie, la machine de mort » (1).

Le long périple d'Abdelkader Tigha
Fin 1999, en raison de différends graves avec ses supérieurs, lui faisant
craindre pour sa vie, M. Tigha a décidé de déserter et de quitter l'Algérie.
Suite à diverses péripéties, il est arrivé en janvier 2000 à Bangkok, en
Thaïlande. Il y restera, détenu, jusqu'en septembre 2003. Au cours de sa
détention, M. Tigha a fait connaître sa volonté de témoigner des très graves
violations des droits de l'homme dont il avait été témoin de la part les
services secrets de son pays. Plusieurs articles de la presse internationale
ont fait état de ses révélations (2), dont le plus important, publié par le
quotidien français Libération, concerne l'implication directe des chefs du
DRS dans l'enlèvement et la mort, au printemps 1996, des sept moines
français du monastère de Tibéhirine (3).
Malgré plusieurs demandes, M. Tigha n'a pas obtenu la protection du Haut
Comité aux réfugiés des Nations unies et, à l'été 2003, il est apparu que sa
vie était directement menacée par les services algériens. Avec le soutien de
plusieurs organisations internationales de défense des droits de l'homme,
soucieuses d'assurer la sécurité d'un témoin essentiel des violations des
droits de l'homme en Algérie, M. Tigha a pu quitter la Thaïlande en
septembre 2003, et gagner la Jordanie. Dans ce pays, les mêmes menaces se
sont répétées et, le 3 décembre 2003, M. Tigha a dû quitter le pays pour les
Pays-Bas. Il y est depuis lors en détention, dans l'attente d'une réponse à
sa demande d'asile politique.

Le dépôt d'une plainte contre X à Paris pour l'assassinat des moines de
Tibéhirine et ses conséquences pour Mme Tigha
Le 9 décembre 2003, une plainte contre X avec constitution de partie civile
a été déposée devant le Procureur de la République de Paris, par les membres
d'une famille de l'un des moines français de Tibéhirine assassinés en mai
1996, Christophe Lebreton, et par le père Armand Veilleux, ancien Procureur
général de l'Ordre cistercien, pour faire toute la lumière sur ce drame. Me
Patrick Baudouin, ancien président de la Fédération internationale des
ligues des droits de l'homme, et par ailleurs l'un des conseils de
Abdelkader Tigha dans ses démarches pour obtenir la protection de l'asile
politique, a été constitué par la famille Lebreton et par M. Veilleux pour
défendre leurs intérêts.
Dans le texte de la plainte, disponible sur le site d'Algeria-Watch (4), Me
Baudouin s'appuie largement sur le témoignage de M. Tigha.
Selon des informations parvenues à Algeria-Watch, à Justitia Universalis
(organisation particulièrement engagée dans la lutte contre l'impunité en
Algérie) et au Réseau euro-méditerranéen des droits de l'homme (REMDH), à
partir de janvier 2004, l'épouse de M. Tigha, qui vit toujours à Blida avec
ses deux enfants, dans la cité Frantz-Fanon, à proximité immédiate du CTRI,
a été l'objet de démarches curieuses qui l'ont beaucoup inquiétée, et plus
récemment, de menaces directes qui lui font craindre pour sa vie.
Début janvier, un journaliste français se réclamant du Figaro-Magazine, M.
Didier Contant, s'est présenté à elle, accompagné d'un journaliste algérien,
M. Achouri. Ils lui ont dit enquêter sur l'affaire des moines assassinés en
1996, mais ils l'ont surtout interrogée sur une prétendue implication de son
mari dans un trafic de drogues et de voitures (à l'époque où il était au
CTRI) et sur le prétendu enrichissement illicite de la famille. Mme Tigha a
très vivement démenti ces allégations (Mme Tigha et les frères son mari
vivent dans des conditions très modestes), mais elle en est restée très
déstabilisée. Les mêmes questions ont été posées par les deux journalistes à
d'autres membres de la famille de M. Tigha.
Le 16 février 2004, on apprenait que Didier Contant a trouvé la mort à
Paris, en sautant du septième étage d'un immeuble. Selon France-Soir du 17
février, dans un article intitulé « L'ex-rédacteur en chef de Gamma victime
d'une chute : il enquêtait sur le GIA », il aurait déclaré récemment à ses
amis : « J'ai l'impression d'avoir mis les pieds dans une histoire que je ne
maîtrise pas. »
Le 10 février 2004, Mme Tigha a trouvé dans son appartement vingt-six
photos, montrant des maisons détruites ou incendiées, et des cierges
allumés, ce qui lui est apparu comme une menace. De plus, elle a été
informée par des relations liées au CTRI qu'elle est désormais suivie, que
son téléphone est sous écoute et que le DRS aurait investi beaucoup d'argent
pour éliminer son mari ou pour le faire « exfiltrer » des Pays-Bas et le
ramener en Algérie.
Dans l'immeuble où habite Mme Tigha, occupé uniquement par des familles 
d'agents du CTRI, ses voisins l'ont mise en quarantaine, ainsi que ses
enfants.
Depuis le 18 février 2004, et jusqu'à ce jour, Mme Tigha est harcelée jour
et nuit par des coups de téléphone, où des interlocuteurs anonymes lui
tiennent des propos obscènes, la menacent de la violer, ainsi que ses
enfants.
Enfin, le 20 février 2004, le quotidien algérien El-Watan publiait un
article signé « Salima Tlemçani » et intitulé « Le journaliste français
Didier Contant poussé au suicide/Victime du qui tue qui ». Cet article,
truffé de mensonges et de calomnies, mettait très gravement en cause Me
Baudouin, le journaliste de Canal Plus Jean-Baptiste Rivoire et la direction
du Figaro-Magazine, et laissait entendre clairement que le témoignage de
Tigha sur l'assassinat des moines n'était pas crédible. Allégations reprises
sous une autre forme le lendemain par un autre quotidien algérien, 
L'Expression, et, ce 23 février, par le quotidien Le Matin.

* Algeria-Watch tient à dénoncer très vivement les menaces exercées à 
l'encontre de Mme Tigha, dont l'objectif évident est de faire pression sur son
mari pour qu'il ne dépose pas dans le cadre de l'instruction ouverte par la
justice française le 10 février 2004, suite à la plainte déposée par Me
Baudouin pour faire la vérité sur l'assassinat des moines de Tibéhirine.

* Algeria-Watch demande aux gouvernements français et hollandais de prendre
toutes les dispositions nécessaires :
- d'une part, pour obtenir du gouvernement algérien que cessent
immédiatement les agissements de ses services secrets contre Mme Tigha,
- et, d'autre part, pour garantir la sécurité de M. Tigha en Hollande et
celle de toute sa famille en Algérie, afin de lui permettre d'apporter son
témoignage décisif au juge Jean-Louis Bruguière, chargé de l'instruction de
la plainte de la famille Lebreton.

* Algeria-Watch dénonce enfin la campagne de presse calomniatrice engagée,
dans la grande tradition du DRS, contre ceux qui s'efforcent aujourd'hui de
faire la vérité sur les violations des droits de l'homme en Algérie et en
particulier sur l'assassinat des moines.


(Reuters 5.3) Le Conseil norvégien pour les réfugiés a rendu public un rapport accusant les autorités algériennes et les Nations Unies de se désintéresser du sort de plus d'un million de "réfugiés intérieurs" et de déplacés algériens, chassés de leurs domiciles en raison de la violence, et dont la plupart se sont massés aux abords des grandes villes, dans des bidonvilles : "Les déplacés de l'intérieur de l'Algérie n'ont reçu aucune assistance internationale parce que les autorités algériennes ont refusé l'accès aux populations concernées et que ni l'ONU ni d'autres acteurs internationaux n'ont tenté de régler leur situation.

(AFP 6.3) Une dizaine de familles sahraouies, venues du Sahara occidental, ont retrouvé le 6 mars dans les camps de réfugiés de Tindouf (sud-ouest algérien), pour la première fois depuis trente ans, des proches qu'elles n'avaient plus vus depuis trente ans. Ces rencontres sont organisées par le haut commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) et devraient permettre chaque semaine à deux groupes d'une vingtaine de personnes, l'un venant de Tindouf et l'autre d'El Ayoun, au Sahara occidental, de retrouver leurs proches. Ces rencontres entrent dans le cadre d'un programme global en cinq points élaboré par l'ONU en faveur des réfugiés sahraouis. Le téléphone fonctionne entre les camps de réfugiés en AQlgérie et le Sahara occidental depuis le 1er janvier 2004. Le courrier n'a pu être rétabli, les autorités marocaines exigeant qu'il soit distribué dans les zones sous leur contrôle, par les postes marocaines.

Environ 165'000 Sahraouis, soit plus du tiers de la population sahraouie totale, vivent dans les camps de la région algérienne de Tindouf.

(L'Expression 4.3) Un appel a été lancé depuis Paris par plusieurs personnalités algériennes* et ONG de défense des droits humains pour rappeler à l'Algérie son obligation "de respecter, de faire respecter et de faire appliquer le dropit international humanitaire", s'agissant notamment de la question des "disparus". L'appel demande "d'établir la vérité sur les violations flagrantes des droits de l'Homme et en particulier sur les disparitions forcées, d'enquêter sur (ces) violations et, le cas échéant, de prendre des mesures contre (leurs) auteurs, d'assurer l'accès effectif des victimes à une justice indépendante, (aux) voies de recours appropriées (et à des) réparations".

* Ali Yahia Abdennour, Hocine Aït Ahmed, Abdelhamid Brahimi, Mohamed Harbi, Mouloud Hamrouche, Abdelhamid Mehri, Ahmed Taleb Ibrahimi, notamment

Les Pays Bas s’ inquiètent de la trouvaille des fosses collectives en Algérie

Amnestie Internationale Pays Bas
Keizersgracht 177
Boîte Postale 1968
1000 BZ Amsterdam
Pays Bas

Amsterdam, le 20 mars 2004

La découverte en Algérie d’une fosse commune, laquelle a été mentionnée récemment dans la presse Algérienne, a suscité une vive inquiétude au sein de membres d’Amnesty International aux Pays Bas.

L’ inquiétude s’est encore agrandie en apprenant que le Gouvernement Algérien n’a pas encore pris de mesures nécessaires pour procéder à l’exhumation des restes humains conformes aux normes internationales reconnues. En réponse à ces informations préoccupantes, un groupe de cinquante membres Amnesty International s’est réuni à Amsterdam et a organisé une action publique.

Les membres d’Amnesty International, section Pays Bas demandent au Gouvernement Algérien de fournir les moyens appropriés pour l’exhumation des corps et pour l’identification des victimes par méthodes médico-légales ainsi que de ne pas évacuer les restes humains avant que ceux-ci ont été identifiés.

Les membres d’Amnesty International, section néerlandaise, expriment également leur compassion et tiennent à apporter leur soutien moral aux familles des victimes qui sont ‘disparues’.

Amnesty International aux Pays Bas demande aux Candidats à la Présidence de répondre à cet appel au cas où ils seront élu.


(AFP 8.3) Le président Bouteflika a grâcié le 8 mars, à l'occasion de la journée internationale de la femme, 242 détenues, dont 139 immédiatement libérables. Les femmes condamnées pour "actes de terrorisme et de subversion" sont exclues de cette grâce, précise la présidence algérienne, qui inscrit cette mesure dans la "concorde nationale".

(Jeune Indépendant 20.3) Une rencontre nationale regroupant une dizaine d'associations féminines s'est tenue le 18 mars à Alger, à l'initiative du réseau Wassila, pour dénoncer le viol de femmes enlevées par les groupes armés, mais également l'absence de dispositions juridiques claires dans les lois algériennes, permettant la poursuite et la sanction de ce crime contre l'humanité. Les intervenantes ont relevé que le code pénal algérien ne donne aucune définition juridique claire du viol et ne fait aucune allusion au viol lors de conflits armés. Le Code pénal prévoit certes des peines de cinq à dix ans pour les auteurs de viols (20 ans si la victime est mineure), mais ne reconnaît aucune circonstance aggravante. Aucune indemnisation des femmes victimes de viol par des groupes armés n'a été prévue. Les participantes à la rencontre du 18 mars revendiquent un statut spécifique pour les femmes violées par des membres de groupes armés, et pour les enfants nés de ces viols. Elle dénoncent le non respect de la fatwa du Haut Conseil islamique algérien (HCI), qui reconnaît aux femmes violées par des "terroristes" le droit d'avorter, et réclament une prise en charge sociale, médicale et psychologique des victimes de ces viols. Elles dénoncent enfin le silence de la société algérienne, silence dans lequel elles voient "un moyen d'éviter un débat politique".

(La Tribune 25.3) Dans une déclaration faite dans le cadre d'une tournée électorale à Bechar, le 24 mars, le président Bouteflika a reconnu que "des dépassements ont été commis par certains membres des forces de sécurité" dans le cadre de la lutte antiterroriste, mais qu'il fallait être "reconnaissants d'avoir sauvé la République" aux membres de l'armée. Pour le président, les "dépassements (...) commis par des éléments de la sécurité (l'ont été) pour (la population), pour (sa) sécurité, pour celle de (ses) enfants)", et lui-même n'était "pas là pour demander des comptes". S'agissant de la concorde nationale et de la réconciliation nationale, le président a récusé l'accusation d'avoir tendu "la main aux terroristes" et juré "par Dieu" que ceux qui refuseront de se repentir seront "exterminés".

(El Khabar 4.4) 300 Algériens sont détenus dans les prisons libyennes, selon un appel lancé par plusieurs d'entre eux aux autorités algériennes pour qu'elles agissent en leur faveur. Selon "El Khabar", un certain nombre de ces prisonniers ont été arrêtés lors de rafles effectuées par les forces de sécuerité libyennes. Ils sont détenus sans jugement, leurs

(El Watan 12.4) Deux militants de la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme (LADDH), dont son représentant loval, Hadj Smaïn, ont été interpellés à Relizane le 10 avril alors qu'ils accompagnaient un journaliste de la chaîne française Canal Plus suir les lieux d'un charnier.


Communiqué de la Ligue algérienne de défense des droits de l'homme

Arrestation de deux militants de la LADDH à Relizane

Deux militants de la ligue, Hadj Smain et Medjahed Kouider, ont été arrêtés le 10 Avril 04 par la gendarmerie à Relizane.

Ils accompagnaient un journaliste de canal + accrédité en Algérie.

Nos deux militants risquent d’être présentés devant le Procureur pour une cause inconnue.

Il faut rappeler que Hadj Smain est continuellement harcelé voir emprisonné pour avoir dénoncé les charniers de Relizane.

La LADDH, préoccupée par le devenir de ses deux militants, attire l’attention de l’opinion publique nationale et internationale sur les éventuels développements après cette incarcération.

Alger, 11.04.2004
LADDH, le bureau national


(El Watan 10.4) Un membre du groupe armé de l'"émir" Megata, Mohamed Rouabhia dit "le Manchot", a été condamné à mort le 7 avril par la cour criminelle d'Annaba. Il s'était rendu aux autorités en novembre 2001.

(El Watan 15.4) Neuf membres du groupe armé de Mokhtar Belmokhtar, dont celui-ci et son lieutenant BelAbbes, reconnus coupables de l'assassinat de sept douaniers qui poursuivaient des contrebandiers dans la région de Hassi Lagreb, dans le sud saharien, ont été condamnés à mort par contumace par la Cour de Ouargla.

(Le Matin, Le Quotidien d'Oran 18.4) Dans un entretien accordé au "Matin", le président de la Commission nationale de promotion des droits de l'Homme, Farouk Ksentini, reconnaît que "beaucoup reste à faire pour les droits de l'Homme en Algérie". Farouk Ksentini annonce un rapport au président de la République, attirant notamment son attention sur l'"état perpétuel de dysfonctionnement" de la Justice, les "très mauvais rapports" de l'Administration avec les citoyens, et la non satisfaction des droits sociaux (logement, eau potable, travail). Le rapport portera également sur "la réconciliation nationale". La Commission, déclare son président, refuse l'impunité, mais entend encourager la réconciliation nationale, dont "fait partie" la résolution du problème des "disparus". Pour Farouk Ksentini, cette "réconciliation nationale" consiste en "le pardon accordé par l'Etat à ceux qui ont commis une faute pénale et se sont amendés", mais également à "pardonner à l'Etat" lorsqu'il a commis une faute ou manqué à ses engagements. Sur la levée de l'état d'urgence, Farouk Ksentini estime, tout en le regrettant, que la situation sécuritaire ne permet "pas encore" d'accepter cette revendication.

A Genève, où il présentait sa commission à la Commission des droits de l'Homme de l'ONU, le 14 avril, Farouk Ksentini l'a présentée comme un "organe de surveillance et d'alerte, d'évaluation et de proposition", comme un "espace d'écoute des citoyens, un centre d'investigation, un cadre de réflexion et une force d'impulsion", disposant d'un mandat suffisamment vaste pour lui permettre "d'examiner toute situation d'atteinte aux droits de l'homme (...) et d'entreprendre toute action appropriée". "Le Quotidien d'Oran" juge cette présentation de la CNCPPDH "étonnante" et contradictoire des textes qui régissent la commission, lesquels ne lui donnent pas "vocation d'enquêter sur les dossiers" dont elle est saisie (ou dontelle se saisit), et donc de fonctionner comme le "centre d'investigation" en quoi Farouk Ksentini l'a présentée à Genève.

(El Watan, Liberté 26.4) Une mutinerie a éclaté le 25 avril dans la prison de Bejaïa. Des dizaines de détenus, pour la plupart de jeunes délinquants de droit commun, ont réussi à gagner les toits de la prison, et ont désigné des représentants pour mener des pourparlers avec les autorités judiciaires et policières. La raison de la mutinerie semble résider dans le fait que de nombreux détenus qui auraient pu bénéficier des mesures de grâce décidées par le président Bouteflika après sa rééection en ont été exclus, non du fait des délits commis, mais parce que les lenteurs de la justice ne leur pas permis d'être jugée avant l'amnistie présidentielle.

Le 19 avril, jour de son investiture pour son second mandat présidentiel, Abdelaziz Bouteflika à accordé la grâce à des condamnés, détenus ou non, en excluant du champ de cette grâce les personnes condamnées pour les crimes et délits liés aux actes de terrorisme et de subversion, crimes contre la sûreté de l'Etat, meurtre, empoisonnement, viol, attentat à la pudeur avec violence, inceste, vol qualifié, détournement de deniers publics et privés, corruption, trafic d'influence, fausse monnait, trafic illicite de stupéfiant, contrebande, actes de violence et d'atteinte aux biens commis à l'intérieur d'un établissement pénitentiaire. La grâce est en outre réservée aux personnes condamnées définitivement. 5676 personnes sont concernées par cette grâce, qui a sans doute pour but de "désengorger" les prisons algériennes, chroniquement surpeuplées.

(AP 27.4) Prisonnier de guerre du Polisario pendant 25 ans dans la région de Tindouf, et libéré le 1er septembre 2003, le capitaine de l'armée de l'air marocaine Alki Najab a témoigné auprès de l'agence AP des conditions calamiteuses de sa détention, mais également sur les très dures conditions de son retour au Maroc, et sur "le mépris et l'accueil glacial" réservées par les autorités marocaines à leurs soldats prisonniers du Polisario, symboles d'une guerre d'annexion que le Maroc nie en tant que telle.

Ali Nadjab a été fait prisonnier par les combattants Sahraouis après que son avion ait été abattu dans la région de Smara. "J'ai été roué de coup puis transféré et interrogé par quatre officiers algériens" au quartier général du Polisario (qu'il appelle "Algerisario") à Tindouf, témoigne Ali Najab, qui décrit ensuite ses 25 ans de captivité comme "une longue nuit d'esclavage, de tortures et de mensonges", et qui affirme avoir vu 48 tombes de prisonniers marocains, la plupart exécutés sommairement après une tentative d'évasion. Une centaine de prisonniers marocains du Polosario sont morts en détention. Najab confirme en outre l'état de "délabrement physique et de détresse psychologique" dans laquelle se trouvent, selon le Haut Commissariat de l'ONU pour les réfugiés, les prisonniers marocains du Polisario-

Au total, environ 2500 officiers, sous-officiers et soldats marocains ont été capturés par le Front Polisario entre 1975 et 1991, et gardés en captivité dans des camps installés dans la région de Tindouf, et protégés par l'armée algérienne. De ces prisonniers de guerre, considérés par le CICR comme "les plus anciens prisonniers de guerre du monde", il reste officiellement 513 dans les camps du Polisario. L'ONU et le CICR demandent leur "libération totale et onconditionnelle".

(El Watan 29.4) 80 détenus de la prison de Bejaïa ont été transférés le 27 avril vers d'autres prisons du pays, après la mutinerie du 25 avril. Aucune information précise n'ayant été délivrée par les autorités sur les raisons de ce transfert, la presse ne peut que supposer que les détenus qui en font l'objet sont sanctionnés pour leur participation à la mutinerie.

(Jeune Indépendant 29.4 / El Watan 2.5) Le président de la Commission nationale consultative pour la promotion et la protection des droits de l'Homme (CNCPPDH), Farouk Ksentini, a déposé le 28 avril à la présidence de la République un "pré-rapport" sur la question des "disparus", afin d'informer le président Bouteflika sur le travail effectué par la commission ad hoc chargée de ce dossier. Le rapport final devrait être remis au président Bouteflika au plus tard début mars 2005. Farouk Ksentini a indiqué au "Jeune Indépendant" que la commission avait travaillé en suivant trois axes : investigation (afin notamment d'évaluer le nombre des "disparus" et de tenter de déterminer leur sort), consultation (auprès de pays d'Amérique du Sud ayant connu le même problème des "disparus", mais également auprès de personnalités politiques algériennes, des représentants des familles de "disparus", de la société civile et des institutions) et réflexion (sur les solutions possibles au problème).

Selon le quotidien londonien (en arabe) "Echarq El Awsat", Farouk Ksentini aurait reconnu (mais oralement, et sans forcément le confirmer dans son rapport) "la responsabilité des forces de sécurité dans la disparition de milliers de personnes", et mis en cause "des éléments de la police, de la gendarmerie et de l'armée". Le président de la CNCPPDH considérerait que ces membres des forces de sécurité impliqués dans des "disparitions" doivent être considérée, eux et non l'institution dans laquelle ils servent, comme "responsables de leurs actes". Le pré-rapport remis au président Bouteflika ferait état de 7250 cas de "disparitions".


Sur le site du charnier de Sidi Mohammed Benaouda, Mohammed Smaïn (LADDH) montre un pantalon identifié comme celui que portait un (L'Observatoire 19.5) Mohamed Smaïn, responsable de la Ligue algérienne pour la défense des droits de l'Homme (LADDH) à Relizane, a été convoqué le 16 mai 2004 par la police judiciaire pour être entendu dans le cadre d’une plainte pour “diffamation et dénonciation de crime imaginaire” déposée par l'ancien maire de Relizane, M. Mohamed Abed. Cette plainte est actuellement instruite par le Procureur général près la Cour de Relizane. Cette convocation est directement liée à la plainte pour torture, actes de barbarie et crimes contre l'humanité déposée en janvier 2004 par la FIDH et la Ligue française des droits de l'Homme et du citoyen (LDH), devant le Procureur de la République près le Tribunal de Grande Instance de Nîmes, contre MM. Abdelkader et Houcine Mohamed, deux anciens membres de la milice de Relizane résidant aujourd’hui en France. Ces derniers ont été mis en examen et ont aussitôt été remis en liberté sous contrôle judiciaire. Or il se trouve que MM. Abdelkader et Houcine Mohamed sont les fils de M. Mohamed Abed, instigateur de la plainte contre M. Smaïn. L’Observatoire rappelle qu’en mars 2004, M. Smaïn est venu témoigner devant le juge d’instruction de Nîmes et qu’il s’est récemment constitué partie civile en sa qualité de représentant de la LADDH dans cette même affaire. Depuis son retour en Algérie, M. Smaïn a été soumis à diverses pressions et harcèlements par les autorités de son pays.

L’Observatoire* s’étonne de la diligence dont ont fait preuve les autorités judiciaires dans le traitement de cette plainte. A titre indicatif, l’Observatoire rappelle que M. Smaïn a déposé plus d’une centaine de plaintes au nom des familles de victimes, notamment pour crimes de disparitions forcées et torture, et qu’aucune suite n’a jamais été donnée à ces plaintes par les autorités judiciaires.

L'Observatoire demande d'écrire aux autorités algériennes et de leur demander de "mettre fin au harcèlement dont est victime M. Mohamed Smaïn, et veiller à ce que les charges pesant contre lui soient abandonnées, celles-ci constituant un acte de représailles à son activité en faveur des familles de victimes en Algérie", de se conformer aux dispositions de la Déclaration sur les défenseurs des droits de l'Homme adoptée le 9 décembre 1998 par l'Assemblée générale des Nations unies, ainsi qu'à la Déclaration universelle des droits de l'Homme et des instruments internationaux relatifs aux droits de l'Homme liant l'Algérie.

* programme de la Fédération internationale des ligues des droits de l'Homme (FIDH) et de l'organisation mondiale contre la torture (OMCT).

(Jeune Indépendant 12.5) Le Président de la Commission nationale consultative des droits de l'Homme (CNCPPDH), Farouk Ksentini, qui est également président du "mécanisme ad hoc" créé par le président Bouteflika pour tenter de régler la question des "disparus", a remis son "rapport d'étape" au président. Dans une déclaration au "Jeune Indépendant", Farouk Ksentini appelle l'Etat à "dire officiellement et définitivement" quel a été le sort des "disparus", et qui en est responsable. "Les parents des disparus ont droit à la vérité", affirme le président de la Commission, qui ajoute cependant que "les institutions ne sont pas coupables", qu'elles n'ont pas "combattu le terrorisme par le terrorisme", qu'il ny a "pas eu de contre-terrorisme en Algérie" et que les agents de l'Etat responsables des "disparitions" ont "désobéi à leurs supérieurs" et agi "illégalement". "Il faut identifier ces agents et leur faire des procès", sans oublier que "le premier disparu de 1992 à 1998 était l'Etat", qui a failli à sa mission d'assurer la sécurité des citoyens. L'Etat doit donc indemniser les familles des "disparus". Le rapport final de la commission devrait être rendu vers la fin de l'année.

(ONU 14.5) Le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés a mis en place une série de navettes aériennes entre l'Algérie et le Sahara occidental pour permettre aux Sahraouis réfugiés en Algérie, dans la région de Tindouf, de rencontrer leurs familles restées au Sahara occidentalk. Le 14 mai, un vol du HCR a emmené de Smarra (Sahara occidental) à Tindouf 26 personnes, qui ont rendu visite à des membres de leur famille vivant dans les camps de la région de Tindouf, et, en sens inverse, un vol a transporté 27 réfugiés sahraouis de Tindouf à Smarra pour leur permettre à eux aussi de rencontrer leur famille. Plus de 420 sahraouis, restée au Sahara occidental ou réfugiés en Algérie, ont pris part à cette opération, qui concerne en Sahara les villes de Smarra, Laayoun et Dakhla, et devrait également concerner la ville de Bouldjour.

(El Watan 26.5, 27.5) Le représentant de la Ligue algérienne des droits de l'Homme (LAADH) dans la wilaya de Djelfa, le journaliste Hafnaoui El Ghoul, qui avait, dans des articles parus dans "Le Soir d'Algérie" et "El Djezaïr News", mis en cause les autorités dans le scandale de la mort de 13 nouveaux-nés, révélé des malversations et dénoncé la situation des droits de l'Homme dans la wilaya, a été placé en détention provisoire après le dépôt de trois plaintes par le wali (préfet) de Djelfa, pour "outrage", "diffamation", "injures" et "outrage envers corps constitué". Le 26 mai, Hafnaoui El Ghoul a été condamné à une peine de six mois de prison ferme et 50'000 DA d'amende (environ 100 euros, 1500 FS) pour diffamation. Les autorités ont assuré que les poursuites, et la condamnation, du journaliste et militant des droits de l'Homme n'avaient rien à voir avec le scandale de la mort des bébés.

(Le Matin, Liberté, El Watan 2.6) Des avocats de manifestants arrêtés après les émeutes de Tkout, en mai, ont dénoncé dans une conférence de presse le 1er juin des actes de violence et de "torture" perpétrés par les forces de police et de gendarmerie sur 26 personnes arrêtées et mises en détention. Un jeune homme avait en outre été assassiné parla garde communale (qui l'avait présenté comme un "terroriste"), ce qui avait déclenché les émeutes.

Le président de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'Homnme (CNCPPDH), Farouk Ksentini, a réagi aux accusations de torture portées contre des éléments des forces de police et de gendarmerie après les émeutes de Tkout, dans les Aurès, et leur répression, en estimant qu'il n'y a pas de cas avérés de torture, mais des cas confirmés de violence. Farouk Ksentini propteste contre l'utilisation de la violence par les services de sécurité à l'encontre de citoyens, "et encore plus lorsque cette violence est accentuée jusqu'à arriver à la torture". Cependant, la CNCPPDH ne s'est pas, ou pas encore, saisie de ces cas, précisément parce qu'ils ne sont pas encore "avérés" : "nous voulons éviter d'intervenir de manière intempestive dans les enquêtes préliminaires de la police et de la gendarmerie", explique Farouk Ksentini, qui invite les personnes victimes de violence, voire de tortures, à s'adresser à sa commission.

(Corr 2.6) Le médecin et militant des droits de l'Homme Salah Eddine Sidhoum s'est vu refuser la délivrance d'un passeport, sur avis de la police judiciaire, mais sans que le motif de ce refus ne lui soit communiqué. Pour Salah Eddine Sidhoum, "Il est clair que ce refus arbitraire (...) est en rapport avec (ses) activcités politiques et militantes de défense des droits de la personne humaine".

(El Watan 2.6) Un membre d'un GIA, Mohamed Rouabhia, dit "Le Manchot", a été condamné à mort le 1er juin par le tribunal criminel de Guelma pour "constitution de groupe terroriste armé, adhésion à groupe terroriste, détention d'arme prohibée et de munitions de guerre et meurtre avec préméditation". "Le Manchot" admettait avoir rejoint les rangs des GIA en 1994, mais niait les crimes dont il était accusé.

(Le Quotidien d'Oran 6.6) "Je considère qu'en matière de droits de l'Homme, l'Algérie est devenue un pays émergent", déclare dans un long entretien au "Quotidien d'Oran" le président de la Commission nationale consultative pour la promotion et la protection des droits de l'Homme (CNCPPDH), Farouk Ksentini, qui en veut pour "preuves concrètes" la "liberté avec laquelle les uns et les autres s'expriment" et le déroulement des dernières élections présidentielles, qui ont eu lieu "de la manière la plus libre et la plus transparente qui soit et qu'on ait jamais vu dans ce pays".

Le président de la CNCPPDH reconnait cependant qu'il y a encore "des insuffisances", que le citoyen et l'administration "se tiennent dans un mépris mutuel intolérable", que les forces de sécurité utilisent des méthodes violentes "révolues", "immorales et illégales". Il conclut néanmoins qu"il existe, dans ce pays, une volonté politique réelle de promouvoir l'Etat de droit" et appelle à "saisir cette chance".

(El Watan 6.6) L'association de familles de "disparus" SIS-Disparus dénonce dans un communiqué "l'absence de volonté politique" du président de la Commission nationale consultative pour la promotion et la protection des droits de l'Homme (CNCPPDH), Farouk Ksentini, à qui elle reproche de se borner "à vouloir consulter quelques leaders politiques nationaux" pour trouver une solution à ce dossier, à quoi Farouk Ksntini répond en reprochant à SIS-Disparus d'être "traversée par une orientation politique qui déteint sur sa mission première qui est de défendre la cause des disparus", et de tenter "par tous les moyens de politiser le probléme". SOS-Disparus estime en outre que le "mécanisme ad hoc" mis en place par le président Bouteflika pour traiter le problème "demeure une coquille vide sans aucune capacité effective à faire valoir les droits des familles des disparus".

Surf le fond, Farouk Ksentini estime qu'il "n'est pas raisonnable" d'imputer aux institutions de l'Etat (l'armée, la police, etc.), "en dehors de toute preuve", la responsabilité des disparitions, et que les responsables hiérarchiques des différnts services de sécurité "pouvaient ne pas" être au courant des "disparitions", dans un contexte "où il y avait absence de l'Etat".

(Quotidien d'Oran 13.6) Le projet de réforme pénitentiaire a été remis au Secrétariat Géànéral du Gouvernement, annonce Le Quotidien d'Oran", qui ajoute que le ministre de la Justice Tayeb Belaiz doit en présenter les grandes lignes "prochainement" au gouvernement, et qu'elle devrait être soumise à l'Assemblée populaire nationale avant la fin de l'année. La réforme vise à passer d'une politique du "tout sécuritaire à une mission de réinsertion sociale", à renforcer les droits des détenus, à améliorer leurs conditions de détention et les conditions de travail du personnel, et à favoriser la réinsertion des détenus, le tout en amenant la législation et la réglementation algérienne au niveau des normes internationales. La réforme prévoit notamment la revalorisation du rôle des juges d'application des peines, avec l'élargissement des possibilités de remise en liberté conditionnelle, de congés, d'ajournement d'application des peines ou d'application des peines à l'extérieur, sous contrôle judiciaire.

La population carcérale algérienne avoisine, officiellement, 37'000 détenus dans 127 établissements. Le secteur pénitentiaire emploie, tous corps confondus, 15'000 personnes. La direction générale de l'administration pénitentiaire a l'intention d'entamer une campagne de recrutement, notamment de personnel médical et social (le programme du gouvernement prévoit le recrutement de 300 psychologues et 500 médecins en 5 ans, l'administration pénitentiaire compte recruter 130 psychologues et 350 médecins la première année). Le ministère doit en outre présenter un programme de construction de nouveaux établissements pénitentiaires, afin de répondre à la surpopulation des actuelles prisons et à la vétusté de la plupart d'entre elles (75 établissements datent de l'époque française, et 59 datent même du XIXe siècle).

(Le Quotidien d'Oran 17.6) Le projet du ministère de la Justice de modifier le Code pénal pour y intégrer une définition et une incrimination des actes de torture a suscité des réactions sceptiques des deux ligues algériennes des droits de l'Homme, la LADH de Boudjemaâ Bechir et la LADDH d'Ali Yahia Abdennour. Le projet a été déposé après que la commission de l'ONU chargée du suivi et de l'application de la convention internationale contre la torture, à laquelle l'Algérie a adhéré en 1989, ait recommandé aux Etats parties d'intégrer dans leurs législations nationales des dispositions de lutte et de sanction de la pratique de la torture.

La LADH note que "les pratiques de la torture sont encore répandues" et estime "crucial d'établir des mécanismes crédibles à caractère préventif", mais considère que l'introduction dans le code pénal algérien du principe d'incrimination des actes de torture est encore "floue, très générale et incomplète", et qu'au surplus la définition de la torture donnée dans le projet ne correspond pas à celle donnée par la convention internationale.

Pour la LADDH, le vide jurudique sur la définition de la torture, et la difficulté des preuves, encouragent le recours à la torture. La LADDH note qu'à Tkout, des cas de tortures ont été signalés "sans que le juge veuille entendre les témoins" et les victimes.

(El Watan 17.6) Un étudiant, enlevé en novembre 1999 par les forces de sécurité, retrouvé ensuite par sa famille dans la prison de Blida comme inculpé d'appartenance à un réseau terroriste, et actuellement détenu dans la prison algéroise d'El Harrach, est en danger de mort, selon sa famille et le Collectif des familles de disparus en Algérie (CFDA). Boualem Bourdissa, qui devait être jugé le 14 février, est détenu depuis cinq ans dans des conditions très difficile. Il a entamé début juin une grève de la faim.

(AFP 21.6) Le Front Polisario a annoncé qu'il allait libérer cent prisonniers de guerre marocains, dont des officiers, à la demande de l'Irlande (qui préside actuellement l'Union Européenne). Le Polisario explique cette décision comme un "geste humanitaire". Cette libération portera, selon le Polisario, à 1843 le nombre des prisonniers de guerre "unilatéralement libérés". Le Polisario dénonce cependant le maintien en détention par le pouvoir marocain et "dans le secret total" de 150 combattants sahraouis et de plus de 500 civils, et exige leur libération. Le mouvement sahraoui appelle la communauté international "à tout faire pour que les prisonniers de guerre sahraoluis aux mains du Maroc soient libérés et pour que la lumière soit faite sur le sort des disparus sahraouis". Il réclame l'application du plan de paix de l'ONU pour l'autodétermination du peuple sahraoui. Le Maroc dénonce quant à lui les libérations "au compte-gouttes" de ses militaires par le Polisario. Certains prisonniers marocains sont détenus depuis plus de 25 ans dans les camps sahraouis du sud algérien, dans la région de Tindouf. Il en resterait à ce jour environ 400, et l'ONU demande également leur libération.

(AP, AFP 27.6) Le ministre de la Justice Tayeb Belaïz a annoncé la prochaine abolition de la peine de mort en Algérie, sauf en cas de condamnation pour terrorisme, atteinte à la sécurité de l'Etat, trahison, infanticide et parricide. Le projet de code pénal soumis à l'Assemblée nationale n'abolit donc pas la peine de mort, mais en restreint le champ. Le ministre a expliqué que l'une des raisons de cette réduction de la possibilité de prononcer la peine de mort est que certains pays refusent d'extrader des criminels algériens vers l'Algérie en raison de la peine de mort.

Celle-.ci a par ailleurs été prononcée le 25 juin par le tribunal d'Es-Seddikia, à Oran, contre un assassin.

Depuis 1993, aucun condamné n'a été exécuté (du moins légalement) en Algérie. Par contre, les organisations de défense des droits humains dénoncent la pratique des exécutions extrajudiciaires.

(AFP 30.6) Deux hommes, deux frères de 22 et 31 ans, ont été condamnés à mort le 29 juinmpar le tribunal criminel d'Oran pour le meurtre crapuleux de leur oncle, de sa femme et de leurs deux enfants.


Ligue Algérienne de défense des droits de l'homme

8, rue des Frères Berrazouane -Alger.
Tel/Fax : + (213) 21 643521

Appel Urgent

Huit délégués du mouvement citoyen du Sud du pays, parmi eux deux militants de la Ligue Algérienne pour la Défense des Droits de l’Homme (LADDH), sont incarcérés depuis le 5 juin 2004, dont six observent une grève de la faim depuis le 26 juin 2004, pour protester contre leur mise en détention provisoire et le traitement humiliant dont ils ont fait l’objet durant leur incarcération à la prison de Ouargla.

Leur état de santé est critique. Il nécessite une réaction urgente de la part des défenseurs des droits de l’homme et des autorités responsables de l’arrestation de ces délégués de citoyens et militants des droits de l’homme dont le seul tort est d’avoir lancé des actions citoyennes qui n’ont rien à voir avec des crimes ou des délits.

En effet, les autorités judiciaires de Ouargla reprochent aux six membres du mouvement citoyen d’avoir procédé à la récolte de signatures dans le cadre de comités de quartiers pour demander aux habitants de ne pas payer leurs factures d’électricité, et aux deux militants du bureau de la LADDH de Labiod Sid Cheikh (wilaya d’El Bayadh), d’avoir assisté aux réunions des membres du mouvement citoyen du Sud.

Par ailleurs, trois autres citoyens ont été arrêtés, dimanche dernier, lors d’un sit-in devant le palais de justice de Ouargla pour protester contre l’arrestation abusive des 8 détenus et demander leur libération.

Maître Ahmine Noureddine, avocat (Laghouat) et membre de la LADDH, a constaté sur les lieux que les conditions de détention de ces citoyens sont pour le moins déplorables. Les détenus ont été placés en isolement dans des cellules à peine aérées en période de chaleur caniculaire en particulier dans le Sud du pays. Une situation d’autant plus pénible et dangereuse pour leur santé qu’ils sont en grève de la faim depuis 12 jours.

La LADDH lance un appel urgent pour la libération des 11 détenus et s’élève contre leur détention abusive.

Alger le 07-07-2004

Me Ali Yahia Abdennour
Président de la LADDH


(AP 9.7 / Quotidien d'Oran 13.7) Le Premier ministre Ouyahia s'est déclaré le 9 juillet, une semaine après que son ministre de la Justice Tayeb Belaiz ait exprimé le même avis, favorable à l'abolition de la peine de mort , en rappelant que les exécutions des condamnés à mort sont suspendues depuis 1993 (ce à quoi les organisations de défense des droits de l'Homme ajoutent que les exécutions extra-judiciaires, et les "disparitions", se comptent depuis cette date par milliers). Ahmed Ouyahia a évoqué l'abolition de la peine de mort comme un "engagement" et une "position de principe", mais a cependant réduit la portée de cet engagement et de ce principe en posant la question "à quoi bon rendre des sentances qui ne seront pas exécutées" et en estimant qu'il valait mieux que l'Algérie prenne elle-même la décision de l'abolition, "avant qu'elle ne nous soit imposée de l'extérieur" (sans cependant préciser par qui).

A Boumerdès, un policier reconnu coupable du meurtre de sa femme, de son beau-père et de sa belle-mère a été condamné à mort.

(El Watan 15.7) Deux hommes ont été condamnés à mort par la Cour criminelle d'Oran pour un quadruple crime crapuleux commis en juillet 2002 à Petit Lac, dans la périphérie d'Oran.

(Liberté 25.7) Dans un communique, le bureau d'El Bayadh de la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme (LADDH) dénonce un cas de torture impliquant des éléments de la gendarmerie de Naâma. Un habitant d'Aïn Beni Khelil, Hadj Abdelkader, aurait été mis en détention sans motifs, déshabillé, battu et torturé, ce que confirmeraient des certificats médicaux délivrés sur demande du Procureur général d'El Bayadh, la justice ayant été saisie de l'affaire.,

(El Watan, El Watan 25.7) L'Association nationale des familles de disparus (ANFD) a réagi dans un communiqué à l'annonce par le Directeur général de la Sûreté, Ali Tounsi, de la création d'un laboratoire d'analyses ADN pour contribuer à répondre aux interrogations sur le sort des "disparus", en estimant que "le recours à des analyses ADN n'est qu'une réponse technique à une question essentiellement politique", et que l'Etat ne devrait pas avoir besoin de recourir à des analyses ADN pour répondre du sort de personnes que les services de sécurité ont eux-mêmes enlevées. Le président de la Commission nationale (officielle) consultative de protection et de promotion des droits de l'Homme, Farouk Ksentini, répond en estimant que l'ANFD confond deux sortes de "disparus" : ceux qui ont été victimes de groupes armés, et dont les corps pourront être identifiés grâce à leur empreinte génétique, et ceux qui "à en croire les dires de leur famille", ont été enlevées par les forces de sécurité (soit 7250 cas), pour qui les techniques ADN ne sont d'aucune utilité puisque leurs corps n'ont pas été retrouvés.

(El Watan, La Tribune 29.7) Invité le 28 juillet au forum du quotidien "El Moudjahid", le présidnt de la Commission nationale consultative de protection et de promotion des droits de l'Homme (CNCPPDH, officielle) a brossé un tableau contrasté de la situation des droits humains en Algérie, qualifiant son pays de "pays émergent" sur le plan des droits de l'homme" en relevant d'un côté une "nette amélioration" (mais à partir d'une situation particulièrement calamiteuse), mais en constatant d'un autre côté que des "freins puissants" empêchent cette amélioration de se poursuivre. D'entre ces freins, Farouk Ksentini a cité l'instrumentalisation du pouvoir judiciaire, mais également la persistance de pratiques tortionnaires de la part d'agents de l'Etat, la corruption, l'irrespect du principe de présomption d'innocence, les irrégularités dans les procédures judiciaires (par exemple celle qui a conduit le directeur du "Matin", Mohamed Benchicou, en prison), le recours systématique à la détention provisoire. Se prononçant pour le maintien de l'état d'urgence tant que "le terrorisme n'est pas complètement éradiqué", mais pour que l'Algérie soit "le premier pays arabe à abolir la peine de mort", Farouk Ksentini a également réitéré sa conviction que, s'agissant des "disparitions", l'Etat était "responsable mais pas coupable", et qu'il fallait dire la vérité aux familles de "disparus", qu'il s'agisse de "disparitions" du fait du terrorisme (10'000 cas recensés, dont les victimes pourraient être identifiées grâce aux analyses ADN) ou de "disparitions" du fait des services de sécurité (5200 dossiers officiellement ouverts), à qui, outre la vérité, une réparation matérielle est due. Farouk Ksentini s'est en outre félicité que cette question ne soit plus "un tabou", et que la volonté s'exprime de "faire toute la lumière sur la question des disparus", mais dans un cadre "algéro-algérien", et en tenant compte du fait que l'Algérie a eu à faire face au terrorisme.


ASSOCIATION DES FAMILLES DES DISPARUS
Alger, le 24 juillet 2004

COMMUNIQUE

Le Bureau de l'ANFD s'est réuni pour faire le point sur la situation relative au dossier des personnes disparues enlevées par les corps constitués de l'Etat.

Il constate l'absence d'évolution significative à même d'atténuer la douleur et les souffrances de milliers de familles algériennes.

Pire encore. Depuis quelques semaines, une campagne de presse, à travers plusieurs titres, tend à semer la confusion sur un dossier qui, pourtant, ne souffre d'aucune ambiguïté : les plus hautes autorités reconnaissent la responsabilité de l'Etat dans ce drame.

En effet, l'acquisition d'un laboratoire d'analyses ADN par la DGSN a donné lieu à toute sorte d'agitation allant même jusqu'à annoncer « la fin de cet épineux problème ».

En quoi cette acquisition technique peut-elle se substituer à la volonté politique d'une prise en charge effective de ce dossier ?

Car si les analyses ADN contribuent à identifier des corps de disparus dans les catastrophes naturelles telles que les inondations de Bab El Oued ou le séisme du 21 mai 2003, est-il besoin de recourir à cette technique pour que l'Etat réponde sur le sort des personnes interpellées officiellement par ses institutions ?

Assurément, et venant juste après les déclarations du chef du gouvernement dans ses réponses aux interpellations des députés et sénateurs sur cette question, il y a une volonté de « liquider cet encombrant dossier ».

L'ANFD s'élève contre cette opération tendancieuse et réaffirme que seule une décision politique pour faire la lumière sur ce dossier peut amorcer son règlement.

Fidèle à son combat pour la vérité sur le sort des personnes disparues après interpellation par les corps constitués de l'Etat, l'ANFD a fait le point lors de sa réunion sur la finalisation d'une base de données informatique comprenant notamment:

- les photos des personnes disparues

- l'affiliation

- le corps constitué à l'origine de l'enlèvement ou de l'interpellation

- les démarches effectuées par les familles.

L'Association s'apprête à rendre public ce travail par l'ouverture d'un site Internet qui regroupera aussi différents témoignages sur la question.

Le Bureau de l'ANFD


(l'Expression 31.7) Dans un communiqué commun, SOS Disparus et le Collectif des familles de disparus critiquent la démarche de la commission ad hoc créée par les autorités pour le traitement de ce problème. Les deux associations reprochent à la commission de faire remplir aux familles de "disparus" un questionnaire portant essentiellement sur le mode de dédommagement financier, et suggérant une indemnité financière ayant pour effet de clore le dossier en interrompant les recherches sur la personne "disparue" (l'alternative étant une aide sociale avec poursuite des recherches, à supposer qu'elles aient réellement été entreprises). Pour les deux associations, le classement des dossiers est "contraire à la législation internationale et aux multiples conventions ratifiées par l'Algérie", et la proposition d'indemnité en échange de cette cl^ture contraire aux articles 17 et 18 de la déclaration sur la protection des personnes contre les disparitions forcées, adoptée par l'ONU le 18 décembre 1992. Les deux associations rappellent que selon cette déclaration, chaque cas de "disparition" doit être considéré comme un crime aussi longtemps que les faits ne sont pas élucidés, et les auteurs de ces crimes ne peuvent bénéficier d'aucune amnistie, grâce ou exemption de poursuite.

(AFP 29.7 / AFP 30.7) Un charnier contenant les corps d'au moins une quinzaine de personnes vraisemblablement assassinées en 1996 par des GIA a été découvert le 29 juillet dans la zone d'Oued Boulbane, dans la région de Blida. Les ossements d'au moins trois corps, certains pieds et poings liés et baillonnés, ont été retiré le 29 juillet par les forces de sécurité. Le charnier a été découvert à la suite d'indications fournies par un "repenti" des GIA. Le "repenti" a indiqué que le charnier contiendrait une quinzaine de corps, dont ceux de militaires. Deux des corps déterrés le 29 juillet portaient des habits militaires. Deux de ceux déterrés ensuite portaient des tenues "afghanes". Le 30 juillet, six autres corps ont été exhumés, et encore sept autres le 1er août. Toutes les victimes auraient été égorgées.

Amnesty International a appelé le 30 juillet les autorités algériennes à mener une enquête "exhaustive" sur les fosses communes, celle découverte la veille comme celles précédemment mises à jour. "Des mesures d'urgence doivent être prises pour préserver les preuves sur le site, identifier les victimes et établir la vérité sur ces tueries", estime AI, qui rappelle qu'"au moins une douzaine de fosses communes ont été découvertes en Algérie depuis 1998".

(Le Soir, Liberté 1.8) Le procès de la mutinerie de Serkadji a, une fois de plus, été reporté le 30 juillet, à une prochaine session juduciaire. La défense de l'accusé, le gardien Merbaki, exigeait la présence lors du procès du directeur de la prison, de son adjoint et des détenus condamnés à mort, et menaçaient de se retirer si cette demande n'était pas acceptée.

Ouvert en janvier 1998, rouvert en 2001, le dossier de la mutinerie de Serkadji, qui avait 100 morts, dont 96 détenus, a déjà fait l'objet d'un procès lors duquel le gardien Merbaki avait été condamné à la perpétuité après avoir avoué avoir introduit, sous la menace, des armes et des clefs remises à des détenus. Le procès renvoyé fin juillet est celui suscité par l'appel introduit par les avocats de Merbaki.

(AP, Liberté 2.8) L'un des auteurs présumés du massacre de Bentalha, en septembre 1997, Fouad Boulémia, déjà condamné à mort pour l'assassinat du dirigeant du Front islamique du Salut (FIS) Abdelkader Hachani, a été une nouvelle fois condamné à mort le 1er août par le tribunal d'Alger, qui a condamné un autre accusé à dix ans de prison, deux autres à trois ans et demi, et en a acquitté quatre. Fouad Boulémia, qui reconnaît avoir été l'un des responsable des GIA, nie avoir participé au massacre. Celui a fait entre 100 et 400 morts, selon que l'on tient compte du bilan officiel ou de bilans officieux.

(El Watan 1.8) La ligue algérienne des droits de l'Homme (celle de Boudjemaâ Gechir) dénonce la justice expéditive rendue par des audiences spéciales programmées pour traiter les dossiers en souffrance depuis 2001, et donc certains sont finalement jugée en correctionnelle en une minute et demie : "La justice est faite pour rendre justice et non pour rendre un jugement", déclare Boudjemaâ Ghechir, qui ajoute que cette justice expéditive lèse d'autant plus facilement les droits de la défense que la plupart des avicats impliqués sont "démissionnaires, alors qu'ils devraient être les premiers à se plaindre".

(El Khabar 4.8) Le président de la Ligue algérienne pour la défense des droits de l'Homme, Ali Yahia Abdennour, a appelé le 3 août à la création d'une commission d'enquête indépendante pour "dévoiler la vérité sur les glnocides" de la deuxième moitié des années '90. La LADDH affirme détenir les preuves de l'existence de 12 fosses communes contenant des restes de "disparus". Ali Yahia Abdennour a en outre accusé le président de la Commission nationale consultative pour la promotion et la protection des droits de l'homme (CNCPPDH, officielle), Farouk Ksentini, de n'être que le "porte-parole du pouvoir" et de tenter de clore le dossier des "disparus" en proposant des indemnités à leurs familles. La LADDH a recensé 7200 cas de "disparitions".


Ligue Algérienne de Défense des Droits de l'Homme (LADDH)

Déclaration

A l’instar de tous les pays sous régime autoritaire qui ont connu des conflits et des violations graves des droits fondamentaux de la personne humaine lesquelles ont laissé des stigmates et provoqué des commotions sociales, l’Algérie doit forcement, aujourd’hui ou demain, assumer son passé en tant que produit de l’action de ses ressortissants.

Tôt ou tard, elle devra reconnaître, élucider, expliquer, et assumer les divisions, les déchirures, les errements et les abus commis par les siens sur les siens, pour qu’elle puisse, enfin, dans la sérénité, élaborer un futur partagé par tous ses enfants.

L’étude des expériences dites de réconciliation nationale qui ont été mises en œuvre de par le monde, dans des pays aussi différents que l’Afrique du Sud, l’Argentine, le Chili etc.…, nous enseigne que si la façon de procéder varie en fonction des dynamiques propres à chaque société, il existe néanmoins des soubassements communs qui, sans exception, ont assuré le passage des régimes dictatoriaux aux régimes démocratiques respectueux des Droits de l’Homme.

En effet et dans tous les cas :

Ces préalables, hélas ! Ne sont pas réunis en Algérie.

Et pourtant, quoi de plus légitime que d’insister sur l’exigence d’autonomie, et de neutralité avérées de tout organisme d’investigation.

Dans un pays où les gouvernants ont détruit la cohésion sociale et anéanti les règles morales, et où les services occultes ont étendu leurs réseaux à toutes les franges de la société, une telle exigence est fondamentale.

Dans tout pays où l’Etat n’a pas combattu le terrorisme selon les lois républicaines mais par un contre terrorisme, s’installant ainsi dans une situation de hors la loi, une coopération avec un organisme d’Etat est frappée de suspicion légitime.

Partout où l’essentiel du jeu politique se passe en dehors du parlement et du gouvernement, la collaboration avec un organisme officiel doit passer par des conditions préalables que voici:

L’impératif de justice étant ce qui dérange le plus les dignitaires du régime, comment ne pas voir dans l’initiative récente visant à résoudre le problème des disparus un manœuvre téléguidée ?

S’agissant de la commission ad hoc sur les disparus, ses objectifs publiquement déclarés se résument à « recenser les disparus, localiser leurs cadavres et indemniser leurs ayants droits ». Elle n’a donc pas les prérogatives lui permettant de satisfaire au standard universel, présumant par là même que tous les disparus sont morts.

Concrètement les démarches qu’elle a entreprises jusqu'à maintenant s’apparentent plus à des manœuvres dilatoires tendant à protéger les hauts dignitaires du régime qu’à répondre au besoin de vérité et de justice du citoyen.

Les propos tenus récemment au Forum d’El Moudjahid par M. Ksentini sont contraires à l’éthique de juriste et en contradiction avec la philosophie des Droits de l’Homme.

Toutes les victimes doivent être traitées sur un pied d’égalité et on ne comprend pas pourquoi des disparus devraient être exclus de l’identification par ADN.

La recherche de la vérité ne peut se satisfaire des seuls témoignages de repentis, surtout lorsqu’il s’agit de massacres.

La loi sur la concorde civile qui n’est en réalité qu’une mesure policière par ailleurs non conforme au droit international auquel l’Algérie a adhéré ne saurait être assimilée à un acte de générosité du peuple algérien.

Offrir l’impunité à un bourreau et lui permettre de narguer sa victime dénote le gouffre qui sépare gouvernants et gouvernés.

Mais derrière ces arguties et cette manière de poser les problèmes il y a une réelle détermination à ne pas aller de l’avant.

Face à toute cette agitation fébrile pour revoir à la baisse les exigences de la conjoncture, la LADDH refuse de cautionner une démarche qui a en réalité pour but d’escamoter, malmener et bafouer une question aussi cruciale.

Devant de telles visées la LADDH réaffirme :

Il va sans dire que cette tâche considérable et ardue ne peut être menée à bien que par une commission indépendante composée de personnalités de haute valeur morale, reconnues pour leur impartialité, leur intégrité, leur compétence et ayant fait preuve d’un engagement pour la cause des Droits de l’Homme.

La LADDH observe avec tristesse les comportements de ceux qui, toute honte bue, s’attellent sans talent à instrumentaliser les Droits de l’Homme, à les vider de leur substance. Elle dénonce énergiquement toute formule qui relève d’un bas calcul politique et qui dénierait aux Algériens le droit à la vérité et à la justice.

La LADDH dénonce une démarche politique qui consiste à « effacer » les violations massives des Droits de l’Homme.

Enfin la LADDH se déclare disposée à apporter une contribution forte et constructive à toute initiative interne ou externe qui se fixera pour but un traitement loyal, global et définitif de ce douloureux problème.

Alger le 03-08-04

Le Bureau National


(Le Quotidien d'Oran, El Watan 25.8 / El Watan, El Khabar, Quotidien d'Oran 26.8) Les associations de familles de "disparus", regroupées dans un collectif, ainsi que la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme (LADDH) ont une nuvelle fois, le 24 août, exprimé leur opposition aux propositions du président de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'Homme (CNCPPDH, officielle), Farouk Ksentini, d'indemnisation des familles de personnes "disparues". "Nos enfants ne sont pas à vendre", a proclamé le collectif, qui accuse l'Etat de persister à "fuir ses responsabilités", alors que la LAADH accuse le pouvoir de vouloir régler le problème "par un appel à l'oubli" en l'échange d'indemnités, ce que la Ligue considère comme une "nouvelle agression contre (les) familles et une perversion immorale". A Relizane, plusieurs proches de "disparus" ont entamé le 25 août un jeûne pour protester contre les affirmations de Farouk Ksentini, selon qui la plupart des familles de "disparus" ont accepté de recevoir une indemnisation matérielle.

La LADDH accuse en outre le pouvoir de tenter de "décrédibiliser les témoignages des familles" en suggérant que les milliers de "disparus" sont soit des "terroristes", soit des personnes enlevées par les groupes armés, alors que la Ligue et les familles de "disparus" estiment qu'une grande partie des "disparitions" sont le fait des forces de sécurité. Un avocat des familles de la région de Medea accuse le gouvernement d'avoir "sollicité" un ex-émir de groupe armé (Ali Benhadjar, de la LIDH) pour conforter la thèse de la responsabilité principale de ces groupes dans les "disparitions". Selon les associations de parents de "disparus", nombre de ceux-ci sont en fait détenus dans des camps secrets ou des prisons clandestines, notamment à Blida, Reggane et Oued Namous (Bechar).

Pour sa part, Farouk Ksentini a accusé "certaines organisations" d'ser d'un "procédé déloyal" et de se livrer à des "gesticulations médiatisées" pour "dénigrer l'Etat et ses institutions". Le président de la CNCPPDH se défend de toute intention de vouloir occulter la vérité sur le sort des "disparus".

(LADDH 20.9, Algeria-Watch 21.9) Une manifestation pacifique de familles de "disparus" a été brutalement dispersée par le police le 20 septembre à Constantine. Selon des témoignages, plusieeurs manifestantes ont été tabassées, et au moins un manifestant et une manifestante (la Secrétaire générale de l'Association des familles de disparus de Constantine, Louisa Saker) ont été arrêtés et détenus plusieurs heures.



Ligue Algérienne de Défense des droits de l'Homme

Communiqué
Alger le 20/09/04

La LADDH dénonce avec la plus grande fermeté la répression dont ont été victimes aujourd’hui, lundi 20 septembre 2004, les familles des disparus de la Wilaya de Constantine.

En effet la police a chargé violemment les parents des disparus, venus se rassembler devant la maison de la culture de Constantine, ce qui a causé des blessés parmi les manifestants, essentiellement des femmes, et l’arrestation d’au moins deux personnes.

Ce rassemblement était organisé à l’occasion du déplacement d’une délégation de la commission Ksentini conduite par le secrétaire général de la C.N.C.P.P.D.H M, Bousseta à Constantine, pour « recenser » les disparus au niveau de cette Wilaya, il est l’expression de la colère et du désaveu des familles des disparus contre la démarche des autorités, qui par la voix de M, Ksentini proposent l’indemnisation des familles comme seule solution a ce douloureux dossier.

La LADDH exige la libération immédiate des personnes interpellées.

Elle réitère son engagement aux cotés des familles des disparus pour exiger une solution juste à ce dossier, solution qui passera par la vérité et la justice.


(El Watan 23.9) Selon les statistiques de la direction générale pénitentiaire, le nombre de personnes détenues dans les diverses prisons algériennes* aurait dépassé les 50'000 en 2002 (50'760, contre 49'482 en 2001), dont 35'151 dans les établissements pénitentiaires. Entre 2001 et 2002, 2178 cas de détenus "dans un état psychique critique" ont été enregistrés, dans 35 centres spéciaux. Durant la même période, 3322 jeunes (moins de 18 ans) ont été placés dans des centres de rééducation. Les diverses grâces présidentielles auraient permis de désengorger quelque peu les prisons : en trois ans (de juillet 2000 à décembre 2002), six grtâces présidentielles ont permi à 39'395 prisonniers de recouvrer la liberté.

*en outre, selon plusieurs ONG, des centres de détention inofficiels et extra-judiciaires continueraient d'exister en Algérie, et un nombre indéterminé de personnes y seraient détenues sans jugement ni annonce de leur détention.

(El Watan 27.9) Le journaliste et militant des droits de l'Homme Hafnaoui Ghoul s'est une fois de plus retrouvé devant le tribunal le 26 septembre, pour quatre affaires de diffamation jugées en appel. La Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme (LADDH), dont Hafnaoui Ghoul est membre, a dénoncé "les menaces de mort et les pressions subies" par son militant, alors que l'avocat de la partie civile (les autorités locales de Djelfa), faisant passer le procès d'une affaire de diffamation à un procès explicitement politique, a chargé Hafnaoui Ghoul de la culpabilité d'être membre du mouvement citoyen du Sud, et de tenter de "diviser l'Algérie". Le militant devrait être jugé à la mi-octobre à Ouargla pour ses activités au sein du mouvement citoyen du Sud, pour "activité au sein d'une association non agréée" et propagande illégale.

(AP 3.10) La Commission européenne va débloquer un crédit de 15 millions d'euros pour soutenir un programme de réforme de la justice en Algérie, a annoncé le 2 octobre le ministère algérien de la Justice. Le crédit européen devrait notamment assurer le financement d'un programme de codification des textes, de diffusion du droit, d'appui à l'organisation interne des juridictions et du Conseil supérieur de la magistrature, et de mise en réseau des juridictions.

(L'Expression, Le Monde 6.10 / Corr.) La marche que l'organisation de familles de "disparus" SOS-Disparus entendait organiser à Alger le 5 octobre, et interdite en vertu de l'état d'urgence, a été brutalement réprimmée par la police, qui a empêché les manifestants de se rassembler devant la présidence de la République. Des parents de "disparus" et des responsables de leurs associations ont été malmenés, et des femmes âgées maltraitées par les policiers, l'une d'entre elle même passée à tabac. Trois manifestantes ont été blessées par la police. Une trentaine de manifestants et de manifestantes ont été interpellés, dont, une fois de plus, le représentant de la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme à Relizane, Mohammed Smaïn, ainsi que le vioce-présidente de SOS-Disparus, Mme Cherguït.

SOS Disparus entendait protester contre "la mauvaise foi et la mauvaise volonté des autorités dans le dossier des disparus".

Communiqué de SOS Disparus

Alger, 5 octobre 2004

Au moment où nous rédigeons ce communiqué, une répression féroce s’abat sur les familles de disparus. Plusieurs femmes ont été battues et empêchées de rejoindre la marche des familles de disparus prévue ce matin à Alger. Mme Belmokhtar, mère d’un disparu, a été d’après les témoins violement frappée par 8 policiers et près d’une trentaine de femmes ont été arrêtées après avoir été malmenées.

C’est ainsi qu’une délégation d’une quinzaine de personnes venues de la région de Relizane a été arrêtée par les forces de sécurité à l’entrée d’Alger et emmenée au commissariat de police du 15éme arrondissement.

A signaler aussi que deux (02) vice-présidentes de l’association SOS disparus, Mme Cherguit Djedjigha et Mme Boucherf Fatma Zohra ont été arrêtées par les forces de sécurité et emmenées dans un lieu inconnu .

  • Pour rappel :

Les associations des familles de disparus en Algérie, ont appelé à une marche aujourd’hui, le 05 octobre 2004 à 10h à Alger pour la « Vérité et la Justice » sur les disparitions forcées en Algérie. Cette marche qui devait regrouper les familles de disparus de toutes les régions d’Algérie, a été interdite par les autorités Algérienne.

Effectivement, suite aux dernières déclarations des autorités sur la question des disparus, les associations de familles de disparus avaient appelées à une marche allant de la présidence au siège de l’Onu à Alger.

Dès ce matin un dispositif policier a été mis en place aux alentours d’Alger et sur l’itinéraire de la marche (Présidence -Siège de l’Onu) pour interdire toute tentative de regroupement des familles de disparus.

Des barrages de policiers et de gendarmes ont été mis en place à l’entrée d’Alger où plusieurs délégations de familles de disparus venues des différentes régions d’Algérie pour y participer, ont été arrêtées et interdites d’entrée dans la capitale.



Collectif des Familles de Disparu(e)s en Algérie

21, ter rue Voltaire - 75011 Paris - France
Tél/fax : 01 43 44 87 82

LE COLLECTIF DES FAMILLES DE DISPARUS EN ALGÉRIE DÉPOSE DEUX NOUVELLES PLAINTES AU COMITÉ DES DROITS DE L’HOMME DES NATIONS UNIES A GENÈVE

Du 4 au 8 octobre 2004, le Collectif des familles de disparu(e)s (CFDA) a poursuivi à Genève sa participation aux travaux du Groupe de travail intersessions chargée d’élaborer sous l’égide de la Commission des droits de l’Homme des Nations Unies un projet d’instrument normatif juridiquement contraignant pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées. Cette nouvelle session informelle a été close par le Président, M. l’ambassadeur Kessedjian, qui a renvoyé les débats au mois de janvier prochain avec l’espoir formulé d’achever les travaux sur l’adoption d’un projet de convention définitif. Le Collectif reste cependant réservé sur le réalisme de cet objectif en l’état des travaux.

A l’occasion de ce séjour à Genève, le CFDA a fait la connaissance des nouveaux membres du Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires des Nations Unies et a pu s’entretenir avec la nouvelle Secrétaire du Groupe de travail, mais aussi avec la personne chargée au sein du Groupe de travail de traiter des cas de disparitions en Algérie. Le CFDA a ainsi pu lui remettre 100 nouveaux dossiers de disparitions qui s’ajoutent ainsi aux 4000 dossiers déjà déposés par le Collectif depuis 1998. Le CFDA a également pu constater avec enthousiasme qu’une nouvelle dynamique s’instaurait au sein du Groupe de travail et qu’une volonté réelle existait pour optimiser les moyens et accélérer le traitement des nombreux dossiers toujours en instance. Afin de participer à ce nouvel élan, le CFDA envisage d’intervenir devant les experts à la prochaine session du Groupe de travail qui se tiendra à Genève du 8 au 15 novembre 2004.

Enfin, le Collectif des familles de disparu(e)s a engagé une nouvelle procédure à l’encontre de l’Etat algérien en déposant au Comité des droits de l’Homme des Nations Unies 2 nouvelles communications individuelles concernant des cas de disparitions forcées survenus à Alger. Ce travail de réalisation de communications a été engagé depuis 2002 par le CFDA et s’est concrétisé par le dépôt d’une première plainte en 2003 au Comité des droits de l’Homme ; Une nouvelle plainte relative à un cas de détention arbitraire ajouté à une disparition forcée et à de multiples actes de torture sera prochainement remise. Ces communications aux Nations Unies sont ainsi le reflet de l’impuissance des familles de disparu(e)s à obtenir Justice devant leurs propres autorités et de l’espoir placé dans les instances internationales afin que l’Etat algérien soit mis devant ses réelles responsabilités pour qu’un jour enfin la Vérité soit dite.

Fait à paris, le 12 octobre 2004
Nassera Dutour, Porte-parole


(Infosoir 18.10) Selon la présidente du Mouvement féminin algérien de solidarité avec la femme rurale, Mme Benhabiles, plus de 7000 femmes ont été violées par des membres des groupes armés, et les pouvoirs publics sont coupables d'avoir oublié ces femmes, et de ne pas leur avoir reconnu un statut permettant leur prise en charge psychologique, physique, sociale et matérielle, et d'éviter que, victimes de viol, elles soient de plus victime d'exclusion sociale et de rejet par leurs propres familles, pour avoir été violées.

(AP 28.10) Le Président Bouteflika a gracié 3800 détenus à l'occasion de la commémoration du déclenchement de la guerre de libération, le 1er novembre 1954. 10 % de la population carcérale algérienne serait ainsi bénéficiaire de mesures de libération, par remise totale ou partielle des peines. La grâce présidentielle ne concerne pas les personnes condamnées dans des affaires de grande criminalité (terrorisme, subversion, atteinte à la sûreté de l'Etat, meurtre, empoisonnement, violence sur ascendant, viol, attentat à la pudeur avec violence, inceste, détournement de deniers publics ou privés, corruption, trafic d'influence, fausse monnaie, vol, incendie volontaire, trafic de stupéfiants, contrebande, actes de violence à l'intérieur d'un établissement pénitentiaire). Depuis 2000, le président Bouteflika a grâcé près de 40'000 détenus.

(Liberté 19.10, 27.10 / Quotidien d'Oran 28.10) Des mandats d'arrêts ont été lancés contre les membres du bureau local de la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme (LADDH) et de la fédération régionale du Front des forces socialistes de Ghardaïa, après les violentes émeutes, et leur violente répression, survenues à El Goléa, Metliti, Ghardaïa (le 13 octobre) et Guerrara.

Les émeutes sont survenues au terme d'une manifestation de protestation de commerçants, le 12 octobre, qui dénonçaient les "dépassements" des commissions de contrôle des prix. La manifestation s'était déroulée dans le calme, mais le wali (préfet) avait refusé de recevoir une délégation des manifestants. Le 13 octobre, la police était intervenue contre les commerçants, et avait fait usage de grenades lacrymogènes, y compris à l'intérieur de maisons et d'une école, détruit des motos et dénudé un manifestant. En réponse, de jeunes manifestants ont incendié le bureau de poste. Selon le premier secrétaire du FFS, une cinquantaine de manifestants et de militants de la LAADH et/ou du FFS ont été arrêtés. Ont manifestants ont été condamnés à quatre mois de prison ferme, et ont fait appel. 14 autres ont été placés sous mandat de dépôt. Cinq membres du bureau local et quatre militants de la Ligue des droits de l'Homme figurent au nombre des personnes arrêtées.

Le Front des Forces Socialistes dénonce dans un communiqué le choix par les autorités de "l'option du pourrissement et de la violence programmée". La Ligue des droits de l'Homme demande pour sa part le départ du wali, "coupable d'avoir contribué aux émeutes violentes".

Communiqué de la Ligue Algérienne de Défense des Droits de l'Homme

Des faits d'une extrême gravité parviennent à la LADDH après la protestation pacifique des commerçants de la ville de Ghardaïa, qui a vu l'intervention, d'une rare violence des brigades antiémeutes contre les grévistes, avec l' utilisation des matraqs et desbombes lacrymogènes, ce qui a causé une centaine de blessés parmi les grévistes mais aussi parmi la population (l' asphyxie d'un bébé).

En effet l'ensemble des membres du Bureau de Wilaya de la LADDH font l' objet d'un mandat d'arrêts lancé par les autorités judiciaires de Ghardaïa, et devrant comparaître devant le juge le mardi 19 octobre, pour l'accusation d'attroupement, atteinte à l'ordre public et obstruction à n.

La LADDH dénonce avec la plus grande énergie cette répression féroce contre une manifestation pacifique. Elle s'indigne contre les poursuites judiciaires dont sont victimes ses militants, qui n'ont fait que rendre compte de la tournure des événements, et appelé a l'apaisement et au dialogue, ce qui est le devoir de tout défenseur des droit de l'Homme.

Elle s'interroge sur les visées d'un tel acharnement sur ses militants, qui sont quotidiennement sur le terrain pour dénoncer les multiples violations des droits de l'Homme.

Elle fait appel a la solidarité nationale et internationale, pour faire échec a la volonté du pouvoir de la mettre aux pas et lance un appel urgent a l'Observatoire International pour la protection des défenseurs des droits de l'Homme pour assurer une protection pour ses militants.

Alger le 18-10-04
Le Bureau National


(El Watan 4.11 / Quotidien d'Oran 11.11) L'association nationale des familles de disparus (ANFD) a exprimé de sérieuses réserves sur la proposition du président Bouteflika de procéder, par référendum, à une amnistie générale. Dans une déclaration datée du 9 novembre, l'ANFD s'est insurgée contre l'unanimisme des partis gouvernementaux à l'égard de la proposition présidentielle, "avant même que les citoyens ne prennent connaissance" du contenu réel de cette proposition. craint la confusion entre amnistie et impunité, cette dernière visant à "absoudre l'Etat de a responsabilité de répondre sur le sort de milliers de disparus". L'association rappelle en outre "qu'au regard du droit international, tous les crimes ne sont pas amnistiables", et qu'une amnistie générale qui se rédoudrait en une impunité générale ne serait évidemment "pas de nature à renforcer le respect des droits de l'homme, ni l'Etat de droit". L'ANFD demande donc, pour le moins, que les crimes les plus graves soient exclus de la liste de deux amnistiables, et que les droits des victimes soient garantis. Elle demande également que soit institué un dispoditif judiciaire capable de "faire la lumière sur chaque cas" de disparition.

Le 2 novembre, le Front des forces socialistes a déclaré qu'"aucun prétexte ne peut justifier l'amnistie sans passer par la justice". Le porte-parole du FFS, Karim Tabbou, a ajouté que "si on doit traiter la question de la violence, aucune amnistie ne peut apaiser la situation politique, sociale et économique sans un véritable dialogue avec toutes les forces de la société".

(Le Monde, El Watan 10.11) Le Tribunal permanent des peuples, héritier des tribunaux Russel des années '60, et qui a tenu du 5 au 8 novembre à Paris une session consacrée aux violations des droits de l'homme en Algérie, a condamné à la fois les "groupes terroristes qui se réclament de l'islam", les forces de sécurité et leurs responsables politiques et militaires.

Le TPP avait été saisi du cas algérien par le comité Justice pour l'Algérie. Après trois jours d'auditions publiques, et après avoir entendu notamment comme témoins le président de la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme Ali Yahia Abdennour, la journaliste Salima Ghezali, ainsi que François Gèze, Habib Souaïdia, Lahouari Addi et Salima Mellah, le tribunal recommande trois mesures pour "favoriser un véritable processus de démocratisation" : D'abord, une "opération vérité" pour faire la lumière sur les crimes commis, notamment les massacres de civils du milieu des années '90 et les "disparitions"; ensuite, l'application "rigoureuse" du principe de la séparation des pouvoirs, afin d'éviter "toute hypothèque sur les institutions algériennes par le pouvoir militaire": enfin une amélioration du système législatif et l'abrogation du Code de la famille.

Tribunal permanent des peuples: Les violations des droits de l'homme en Algérie

Comité Justice pour l’Algérie
Communiqué de presse
Paris, 4 novembre 2004

Ouverture à Paris d’une session du Tribunal permanent des peuples sur les violations des droits de l’homme en Algérie (1992-2004)

Paris, 5-8 novembre 2004

Du 5 au 8 novembre 2004, se tient à Paris (salle de la Mairie du XIIe arrondissement) la 32e session du Tribunal permanent des peuples (TPP) sur les violations des droits de l’homme en Algérie de 1992 à 2004.

Le Tribunal permanent des peuples est un tribunal international d’opinion, indépendant des États, qui examine, publiquement et contradictoirement, les cas de violations des droits de l’homme et des peuples dont le saisissent les victimes (ou ceux qui les soutiennent). Il a été fondé en juin 1979 à Bologne sous l’égide de la Fondation internationale Lelio Basso pour le droit et la libération des peuples, créée en 1976. Ce tribunal a succédé aux tribunaux Russel, qui avaient mis à nu dans les années 1960 et 1970 les crimes de guerre commis au Viêt-Nam et qui ont été présidés par Bertrand Russel, puis par Jean-Paul Sartre et Lelio Basso. Depuis sa création, le TPP a tenu trente et une sessions.

Le TPP a été saisi par le Comité Justice pour l’Algérie, avec le soutien de plusieurs ONG (algériennes, françaises et internationales) de défense des droits humains, pour se prononcer sur les violations graves des droits de l’homme et du peuple algérien perpétrées par les services de sécurité de l’État, par leurs auxiliaires ainsi que par toute force ou tout groupe armé se réclamant de l’Islam.

Le recours au TPP est justifié par le fait que, face au drame algérien, la communauté internationale a failli. Malgré l’ampleur et l’atrocité de la guerre qui a ensanglanté l’Algérie depuis 1992, faisant entre 150 000 et 200 000 morts, plus de 15 000 « disparus » et des centaines de milliers de déplacés, la communauté internationale n’a pas été en mesure de diligenter une commission d’enquête internationale indépendante pour faire la lumière sur les responsables de ces crimes, ni d’obtenir du gouvernement algérien que les rapporteurs spéciaux des Nations unies sur la torture et les disparitions forcées puissent aller en Algérie. À l’heure où l’on vient de célébrer le cinquantième anniversaire du début de la guerre de libération de l’Algérie, l’horreur de la « seconde guerre d’Algérie » ne doit pas être occultée par la célébration de la première. Une célébration conduite par ceux-là mêmes qui, en Algérie et à certains égards en France, ont fait que le peuple algérien est plongé depuis 1992 dans la terreur et la misère.

L’objet de la session est :

Les neuf membres du tribunal, de six nationalités différentes, désignés par la Fondation internationale Lelio Basso pour le droit et la libération des peuples pour cette trente-deuxième session du Tribunal permanent des peuples sont : Salvatore Senese (Italie, magistrat, président de session à la Cour suprême de cassation, président du Tribunal permanent des peuples ) ; Sihem Bensedrine (Tunisie, journaliste, porte-parole du Conseil national des libertés en Tunisie) ; Luigi Ferrajoli (Italie, professeur de théorie générale du droit à la Faculté de droit de l’Université de Rome-III) ; Burhan Ghalioun (Syrie, professeur de sociologie politique à la Sorbonne nouvelle-Paris-III et directeur du Centre d’études sur l’Orient contemporain) ; Franco Ippolito (Italie, magistrat, juge à la Cour suprême de cassation) ; Luis Moita (Portugal, professeur de sociologie des relations internationales à l’Université autonome de Lisbonne) ; Ignazio Juan Patrone (Italie, magistrat, juge assistant à la Cour constitutionnelle italienne, président de l’Association des magistrats européens pour la démocratie et les libertés) ; Werner Ruf (Allemagne, professeur de relations internationales de l’Université de Kassel) ; Philippe Texier (France, magistrat à la Cour de Cassation).

La session du tribunal se déroule durant trois demi-journées, vendredi après-midi 5 no-vembre (14 h - 19 h) et samedi 6 novembre (9 h 30 - 18 h 30). Le tribunal entendra une trentaine de témoins, victimes et experts, dont plusieurs venus d’Algérie. Les audiences sont ouvertes aux journalistes et aux personnes invitées par les ONG et associations soutenant l’initiative.

Au total, trente et une personnes seront entendues par le Tribunal, à titre de témoin ou d’expert :

  • Lahouari Addi : Sociologue, professeur à l'IEP de Lyon.

  • Me Abdennour Ali Yahia : Avocat, Président de la Ligue algérienne de défense des droits de l’homme (LADDH).

  • Yahia Assam : Membre fondateur de RAJ (Rassemblement action jeunesse) en Algérie, militant des droits de l’homme, journaliste, membre du CJA..

  • Madjid Benchikh : Professeur de droit à l’université de Cergy Pontoise, ancien président d’Amnesty International en Algérie, ancien doyen de la faculté de droit d’Alger. Membre du CJA..

  • Omar Benderra : Expert financier international, ancien président de banque en Algérie. Membre du CJA..

  • Hamida Ben Sadia : Militante associative.

  • Adnane Bouchaïb : Avocat, fils de disparu enlevé par un groupe armé.

  • Lhachemia Bouteïba : Mère de disparu, responsable du comité SOS disparus à Oran.

  • Ahmed Cherbi : originaire de Tizi-Ouzou, arrêté en 2002 et placé en garde-à-vue pendant 45 jours, torturé à Tizi-Ouzou et Blida. Emprisonné pendant un an.

  • Nicole Chevillard : Journaliste, Rédactrice en chef de la revue Risques Internationaux.

  • Me Sofiane Chouiter: Avocat des familles de disparus à Constantine.

  • Nasséra Dutour: Porte du Collectif des familles de disparu(e)s en Algérie, membre du CJA..

  • Hassan Ferhati : Frère de disparu, membre fondateur de SOS disparus en Algérie.

  • Vincent Genestet : Consultant, a travaillé pendant 12 ans en Algérie, membre du Cedetim et du CJA..

  • François Gèze : Directeur des Editions La Découverte, membre du Cedetim et du CJA.

  • Salima Ghezali : journaliste, directrice du journal La Nation, interdit fin 1996, Prix Sakharov 1997.

  • Mohammed Harbi : Historien. Auteur notamment de : Le FLN , mirage et réalité. Des origines à la prise de pouvoir (1945-1962), Ed ; Jeune Afrique, 1980.

  • Jeanne Kervyn : Sociologue, membre d’Algeria-Watch et du CJA..

  • Salima Mellah : Journaliste, animatrice du site www.algeria-watch.org et membre du CJA..

  • Farida Ouaghlissi : Epouse de disparu, membre du bureau de l’association des familles de disparus de Constantine.

  • Jean-Baptiste Rivoire : Journaliste, auteur avec Lounis Aggoun de : Francalgérie, crimes et mensonges d’États, La Découverte, Paris, 2004.

  • Aber Sid-Ahmed : victime de la torture. Arrêté à Oran en 1992, incarcéré dans plusieurs camps jusqu’à la fin 1994, arrêté en 1997

  • Salah-Eddine Sidhoum : Chirurgien, militant des droits de l’homme en Algérie.

  • Mohamed Smaïn : membre de la LADDH section ouest, auteur d’un livre sur les milices : Relizane, silence on tue !, Editions Bouchène, 2004.

  • Habib Souaïdia : ancien sous officier des forces spéciales en Algérie. Auteur du livre La sale guerre, La Découverte, 2001.

  • Nesroulah Yous : président de l’association Vérité Justice pour l’Algérie, rescapé d’un massacre et auteur de Qui a tué à Bentalha ?, La Découverte, 2000.

Lundi 8 novembre, à 11 heures, les membres du Tribunal donneront une conférence de presse (également à la Mairie du XIIe arrondissement, 130, avenue Daumesnil) pour faire connaître leur sentence. La Ligue internationale pour les droits et la libération des peuples, ONG accréditée auprès du Conseil économique et social de l’ONU et représentée à la Commission des droits de l’homme à Genève, diffusera ultérieurement cette sentence dans le système des Nations Unies.

Cette sentence sera également publiée sur le site www.algerie-tpp.org, en même temps que les dix-neuf dossiers thématiques détaillés et extrêmement circonstanciés, rédigés par les membres du CJA ou par des spécialistes qu’il a sollicités, faisant la synthèse précise de toutes les informations disponibles à ce jour sur les violations des droits de l’homme en Algérie (dossiers remis à l’avance aux membres du Tribunal).

Pour le Comité Justice pour l’Algérie : Yahia Assam, Jean-Yves Barrère, Mad-jid Benchikh, Omar Benderra, Nasséra Dutour, Vincent Genestet, François Gèze, Ghazi Hidouci, Jeanne Kervyn, Salima Mellah.

Avec le soutien de :

  • Algérie : Ligue algérienne de défense des droits de l’homme (LADDH), SOS Disparus.

  • France : Action des chrétiens pour l’abolition de la torture (ACAT), Association droits de l’homme pour tous (ADHT), Cedetim, Collectif des familles de disparu(e)s en Algérie, Ligue française des droits de l’homme, Survie.

  • Allemagne : Pro Asyl.

  • ONG internationales : Algeria-Watch, Amnesty International, Comité international pour la paix, les droits de l’homme et la démocratie en Algérie (CIPA), Fédération internationale des ligues des droits de l’homme (FIDH), Human Rights Watch (HRW), Organisation mondiale contre la torture (OMCT), Reporters sans frontières (RSF), Réseau euroméditerranéen des droits de l’homme (REMDH).

Le Tribunal permanent des peuples qualifie les violations massives des droits de l'homme commis en Algérie depuis 1992 de crimes contre l'humanité

Communiqué de presse
Paris, 11 novembre 2004

Le Tribunal permanent des peuples, saisi par le Comité Justice en Algérie
(CJA) sur la question des violations des droits de l'homme en Algérie
(1992-2004), a rendu le 8 novembre 2004 une sentence détaillée (dont la
version définitive sera très prochainement rendue publique).

Le Tribunal précise en préalable que :

- les conventions internationales et les règles coutumières s'adressent
principalement aux États. Il en résulte que l'État a la responsabilité du
maintien de l'ordre et de la sécurité pour tous sur l'ensemble du
territoire. L'État peut donc être déclaré responsable des violations des
conventions internationales constatées sur son territoire ;

- le fait que les organisations politiques et/ou militaires, telles que les
groupes armés se réclamant de l'islam , ne soient pas des sujets du droit
international, n'exclut pas qu'ils puissent être dénoncés et condamnés comme
responsables de violations des droits de l'Homme.

Les faits et témoignages présentés lors des travaux constituent, d'après le
Tribunal, des violations flagrantes, de la part des autorités algériennes et
de différents groupes armés qui se réclament de l'Islam, de plusieurs
conventions internationales. Ces faits et témoignages constituent en même
temps une violation des règles générales coutumières du droit international
pour ce qui concerne la définition des crimes contre l'humanité et des
crimes de guerre . Les dispositions de la Charte d'Alger, concernant les
droits des peuples, adoptée en 1976 par de nombreuses personnalités et des
organisations non gouvernementales, ont également été violées.

Le Tribunal estime que la raison principale de la spirale de violence qui a
touché l'Algérie après 1988 est l'absence de l'État de droit, due
essentiellement à l'ingérence du pouvoir militaire dans la vie politique,
économique et juridique, c'est-à-dire d'un système juridique qui ne tolère
aucun pouvoir clandestin ou non assujetti à la loi, qui soumette la force au
droit et les pouvoirs publics à la garantie des droits fondamentaux,
notamment le droit à la vie. Dans cette perspective, le Tribunal a notamment
établi les constats suivants.

- Le Tribunal considère que les massacres rapportés sont des attaques
systématiques ou généralisées sur des populations civiles et que leurs
auteurs et leurs complices sont responsables de crimes contre l'humanité au
terme de la définition donné par le statut de Rome de la Cour pénale
internationale (art. 7-1) ; le Tribunal relève que la responsabilité directe
ou la complicité des forces militaires dans ces massacres est clairement
engagée et que la manipulation par les forces de sécurité des groupes armés
se réclamant de l'islam ne disculpe pas ces groupes de leur responsabilité
dans la commission de ces crimes contre l'humanité.

- Le Tribunal considère que, compte tenu de leur nature, de leur ampleur et
des conditions qui les entourent, les milliers de disparitions forcées
constituent des violations flagrantes du droit international général et des
conventions internationales ratifiées par l'Algérie ; ces violations
répétées ou systématiques constituent des crimes contre l'humanité suivant
l'article 7-1-i du statut de Rome de la Cour pénale internationale ; le
Tribunal relève que la proposition faite aux familles de « disparus » d'une
indemnisation financière, équivaut pour l'État algérien a l'admission
implicite de sa responsabilité dans les disparitions qui ont eu lieu.

- Le Tribunal décide que les crimes de torture qui ont été pratiqués par les
forces de sécurité de l'État et par leurs auxiliaires en Algérie en octobre
1988 et à partir de 1992 jusqu'à ce jour de façon systématique ou
généralisée contre la population civile sont des crimes contre l'humanité.

- Le Tribunal a pris en considération les enlèvements de jeunes femmes
suivis de viols , commis par des membres de groupes armés se réclamant de
l'islam. Il a aussi étudié les viols et abus commis par des membres des
forces de sécurité et leurs auxiliaires. Le Tribunal décide qu'il s'agit,
dans les deux cas, de crimes contre l'humanité.

- Le Tribunal souligne que la violence continue aujourd'hui à faire des
victimes en Algérie et qu'aucune solution politique ne semble être engagée
pour mettre fin aux souffrances du peuple algérien et pour lui permettre
d'exercer pleinement son droit à l'autodétermination.

Le Tribunal ne se contente pas de condamner sévèrement les responsables des
crimes contre l'humanité, il préconise une série de mesures :

- une sérieuse « opération-vérité » , menée, si la société algérienne ne
pouvait le faire elle-même, par une commission pour la vérité des Nations
unies, pour vérifier et ne pas oublier les crimes qui ont été accomplis,
encore plus que pour les punir ; le Tribunal rappelle que le droit
international établit le droit des citoyens à la justice et que l'État de
droit n'existe pas si la violation des droits fondamentaux de l'Homme n'est
pas jugée et si les responsables des crimes ne sont pas punis en accord avec
les règles d'un procès équitable. Dans le même sens, le Tribunal invite
l'État algérien à autoriser les rapporteurs spéciaux prévus par toutes les
Conventions de l'ONU à accomplir leur mission sur le territoire algérien et
rappelle que toute mesure qui aurait comme résultat l'oubli et l'effacement
des horreurs, est inacceptable pour la conscience éthique et juridique. On
ne peut tourner la page qu'après l'avoir entièrement éclairée et non
effacée.

- le respect de la Constitution algérienne et la valorisation des principes
démocratiques établis par celle-ci, notamment en appliquant une effective et
réelle séparation des pouvoirs pour éviter toute hypothèque sur les
institutions algériennes par le pouvoir militaire ; d ans ce sens, le
Tribunal demande que, pour assainir la vie politique, soit mis un terme aux
activités de la police politique : l'autonomie des partis politiques, des
syndicats et des associations est une exigence fondamentale pour construire
un État démocratique.

- l'amélioration du système législatif algérien en mettant un terme à l'état
d'urgence, en abrogeant les différentes lois d'exception en contradiction
avec les droits et les libertés fondamentaux établis par la Constitution
algérienne, y compris le Code de la famille de 1984.

- l'obligation pour l'Union européenne - dont le tribunal souligne
l'existence d'une responsabilité spécifique, notamment en raison de la
déclaration de partenariat euroméditerranéen de Barcelone de 1995, ainsi que
de la « nouvelle politique de voisinage » signée en 2004 - d'imposer à
l'Algérie le respect des droits fondamentaux comme condition de la
subsistance des rapports de partenariat.

Pour rappel :

C'est par lettre du 6 juin 2003 que le Comité pour la Justice en Algérie a
adressé une requête au président du Tribunal permanent des peuples aux fins
de saisine de cette juridiction internationale sur les violations des droits
de l'Homme en Algérie, particulièrement depuis 1992. Cette initiative a reçu
le soutien d'ONG algériennes et internationales *, de deux Prix Nobel de la
paix, Shirin Ebadi (Iran, 2004) et Adolfo Perez Esquivel (Argentine, 1980)
et de nombreux particuliers et personnalités.

Conformément aux statuts du Tribunal, les lieux, dates et contenus de la
session ont été communiqués, le 28 septembre 2004, au gouvernement algérien,
à travers ses ambassades en Italie et en France, en l'invitant à exercer son
droit à la défense. Aucune réponse n'a finalement été obtenue par le
Tribunal, et aucun représentant des autorités algériennes n'était présent
durant la session.

Après les auditions de témoins et d'experts, qui se sont déroulées
publiquement les 5 et 6 novembre, en présence de plus de 250 personnes, le
tribunal a délibéré le 7 novembre et rendu publique, le 8 novembre, sa
sentence.

L'intégralité des documents relatifs à la 32 e session du TPP (en
particulier les dix-neuf dossiers détaillés établis par le CJA à l'attention
du Tribunal et le texte complet de sa sentence) sera très prochainement
publiée sur le site 





(Liberté 18.11) Les corps de sept personnes ont été exhumés d'un charnier, le 17 novembre, à Vivier, près de Ras El Hamra (w. Annaba). Selon "Liberté", il s'agirait des corps de victimes du groupe armé de l'"émir" Mezhoud Mohamed Tahar, alias Khoubib Aboumoad.

(Quotidien d'Oran 18.11) Les parents de 37 personnes détenues, interpellées lors d'émeutes survenues dans la ville en octobre, ont lancé un appel à la mobilisation et à la solidarité pour la libération de tous les détenus (dont 25 devraient passer en jugement en cassation le 22 novembre).

(AP 24.11) Après avoir ratifié en 2001 la Convention d'Ottawa, qui prohibe la fabrication, le stockage et l'utilisation des mines antipersonnel, l'Algérie a commencé le 24 novembre à détruire ses stocks de mines antipersonnel à Hassi Bahbah (sud saharien), en présence du président Bouteflika et de nombreux ambassadeurs (dont ceux de France et de Suisse), attachés militaires et représentants d'ONG (dont le CICR). 165'080 mines antipersonnel doivent être détruites d'ici 2006. 3030 mines, datant de l'époque coloniale (et posées par les Français) ont été détruites le 24 novembre.

(El Watan 28.11 / Liberté 29.11) Dans un long texte paru dans "Liberté", le président de la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme (LADDH), Ali Yahia Abdennour, se prononce de manière nuancée sur la proposition d'amnistie générale faite par le président Bouteflika. Sans s'opposer formellement à cette proposition, le président de la LADDH souligne que l'amnistie "n'est pas une mesure de commisération ou d'humanité faite dans l'intérêt des personnes, mais une mesure fondée sur des critères politiques".

Quant à l'éventualité de faire ratifier cette "décision politique" par référendum populaire, Ali Yahia Abdennour reconnaît que "le référendum est un moyen démocratique de consultation populaire", mais "à condition qu'il soit utilisé par des démocrates et avec des objectifs démocratiques". A cette condition, "renforce alors la paix civile et la cohésion nationale". Mais s'il n'est qu'un "plébiscite", comme tous les référendums organisés en Algérie depuis l'indépendance, "il suscite ou accentue les déchirements et les ruptures, ravive les blessures au lieu de les cicatriser, nourrit le sentiment d'injustice chez les victimes et les rancoeurs des milieux politiques et médiatiques.

Pour le président de la LADDH, "avant d'aborder la question de l'amnistie, il faut d'abord procéder à l'assainissement global de la situation de la société", et notamment lever l'état d'urgence pour ouvrir le champ politique et médiatique, garantir l'exercice des libertés individuelles et collectives, assurer l'existence d'une "presse libre et d'une justice indépendante". "Il faut réhabiliter le politique" dans un pays où "l'opposition vient de la rue car elle ne trouve pas son expression dans les formes normales de (la) vie politique". S'agissant de la violence, Ali Yahia Abdennour demande "combien d'années de souffrance faudra-t-il encore attendre avant que l'on ne se rende compte qu'il n'y a pas de solution sécuritaire à la crise ?". Et s'agissant de l'amnistie proprement dite, il affirme que "l'amnistie avant la vérité et la justice n'est que de l'impunité", et que "connaître la vérité sur toutes les violations des droits de l'Homme exercées par les groupes armés islamiques, l'armée et les forces de sécurité facilitera la paix". A ce propos, le président de la LADDH rappelle que cet objectif de vérité était précisément celui de la 32ème session du Tribunal permanent des peuples, du 5 au 8 novembre à Paris, tribunal qui a rappelé que les crimes (tortures, exécusions sommaires, massacres, disparitions forcées, viols) commis depuis dix ans en Algérie tant par les groupes armés que par les forces de sécurité, étaient au sens du droit international des crimes contre l'humanité, et qu'à ce titre ils étaient imprescriptibles et inamnistiables. Le tribunal a demandé la constitution d'une commission d'enquête internationale pour la vérité, sous l'égide de l'ONU, à moins que les autorités algérienne soient elles-mêmes capables de la constituer.

(AP 1.12) 4000 policiers ont été radiés en cinq ans, et 150 sont poursuivis en justice (la moitié ayant déjà comparu devant des juges instructeurs), annonce "Le Quotidien d'Oran", en marge d'une information selon laquelle la Direction générale de la Sûreté nationale algérienne allait recruter 35'000 nouveaux policiers, en assurant qu'ils seront "triés sur le volet" et bénéficieront, après une sélection "sévère", d'une formation de qualité, et qu'en outre un barème de sanctions sévères attendait ceux qui failliraient à leur mission.

(AP, El Watan 9.12 / El Watan 11.12 / Quotidien d'Oran 14.12) Le président Bouteflika a déclaré, le 9 décembre, dans un message à l'occasion du 56ème anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l'Homme, que "tout sera fait pour élucider le sort" des "disparus", et que les familles seront "informées et peuvent compter sur la solidarité de l'ensemble de la nation pour alléger leurs souffrances". Le président algérien a déclaré attendre du "mécanisme ad hoc" qu'il a mis en place au sein de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'Homme (CNCPPDH), pour gérer la question des "disparitions", qu'il "établisse un état du dossier, globalement et dans le détail", d'ici mars 2005.

Pour sa part, le président de la Ligue algérienne des droits de l'Homme (LADH) a demandé la levée de l'état d'urgence, en considérant qu'il n'était maintenu que pour permettre à "certains clans (...) de continuer de profiter de leurs privilèges".

Quant au président de la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme, Ali Yahia Abdennour, il s'est vu interdire de tenir à Tizi Ouzou, le 8 décembre, une conférence sur la Journée internationale des droits de l'Homme (alors que Boudjemaâ Guechir pouvait, lui, tenir une conférence à Bejaïa). Le Bureau national de la LADDH a lancé un appel à la soplidarité pour soutenir sa campagne pour la reconnaissance et l'élargissement des droits de l'Homme en Algérie, et rappelle que "née sous l'empire de l'ostracisme officiel il y a une vingtaine d'années, la LADDH subit encore la politique du harcèlement et du boycott" par le pouvoir. Ali Yahia Abdennour constate que "les droits de l'homme sont une question subsidiaire pour le pouvoir", et dénonce la tentative de généralisation de l'impunité qui transparait tant dans la gestion de la question des "disparus" que dans la proposition d'amnistie générale faite par le président Bouteflika et à laquelle la Coordination nationale des enfants de Chouhada (enfants de martyrs de la guerre de libération) a annoncé, le 12 décembre, qu'elle apportait son soutien.

(AFP 13.12) Le tribunal criminel d'Annaba a condamné à mort le 13 décembre, pour homicide volontaire, un homme qui avait poignardé et égorgé sa victime, en avril, après une rixe, et alors qu'il était en état d'ivresse. Cette condamnation à mort a été prononcée au lendemain d'une déclaration du Directeur général des droits de l'Homme au ministère algérien de la Justice, Amara Mohammed, selon qui la peine de mort est en voie d'être purement et simplement abolie en Algérie (officiellement, et sans tenir compte des exécutions extra-judiciaires, aucune condamnation à mort n'a été exécutée en Algérie depuis août 1993 -sept islamistes armés condamnés pour "terrorisme" avaient alors été fusillés). Un avant-projet de loi sur l'abolition de la peine de mort a été remis au Premier ministre Ouyahia.

Amara Mohammed a également souligné qu'une vingtaine de lois avaient déjà été, ou étaient en passe d'être, révisées pour les mettre en conformité avec les textes internationaux ratifiés par l'Alkgérie. La dernière révision du Code pénal a ainsi introduit le crime de torture, et celui de harcèlement sexuel.

(L'Expression 12.12) Une vingtaine de personnes sont tuées chaque année en Algérie en sautant sur des mines antipersonnel datant de l'époque coloniale, selon les bulletins quotidiens diffusés par la Gendarmerie. La plupart de ces morts se produisent le long des anciennes lignes Challe et Morice, aux frontières est et ouest de l'Algérie, en particulier dans les régions de Tebessa et Mecheria. Les mines antipersonnel datant de la Guerre d'Algérie tuent surtout des nomades, des bergers et des paysans. Elles tuent aussi du bétail. Selon le chef d'état-major de l'armée algérienne, le général Gaïd Salah, 11 millions de mines ont été enfouies par la France en Algérie jusqu'en 1962, et il en resterait trois millions potentiellement actives. Certaines zones sont infestées de mines avec une densité de 0.8 à 3,5 mines par mètre linéaire. Les mines les plus actives sont les modèles APID 51 (dites "mines encriers") et APMB 51/5 (dites "mines bondissantes").

(Reuters 16.12) Des membres des forces de sécurité sont peut-être responsables, mais "à titre individuel", de la mort de 5200 civils portés disparus depuis le début des années '90. après avoir été arrêtés par les forces de sécurité, et n'ayant jamais réapparu depuis, a déclaré le président de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'Homme (CNCPPDH), Farouk Ksentini, nommé par le président Bouteflika pour enquêter sur ces "disparitions". "Individuellement, des agents de l'Etat ont agi illégalement", a reconnu Farouk Ksentini dans un entretien à l'agence Reuters, mais il a aussitît ajouté que s'il y a eu des "dépassements", l'Etat lui-même, en tant que tel, "n'a pas commis de crime". Farouk Ksentini a estimé en 2003 à 7200 le nombre des "disparitions" pendant les années '90, et attribue donc à des "agents de l'Etat" la responsabilité possible de 5200 de ces "disparitions". Le président de la CNCPPDH demande que "les personnes responsables de ces meurtres" soient jugées mais il se prononce également pour une "amnistie générale", qu'il estime "nécessaire", et dont pourraient bénéficier à la fois les membres des groupes armés et les "agents de l'Etat qui ont commis des actes illicites à l'origine des disparitions". Farouk Ksentini estime également que les familles des disparus ont le droit de connaître "la vérité et les circonstances" de la disparition de leurs proches. Les corps doivent être retrouvés et, si nécessaire, identifiés par des tests ADN, ajoute Farouk Ksentini.

(Tousensemble 22.12) Le procès en appel des auteurs et des participants du pogrom de Hassi Messaoud, où une trentaine de femmes avaient été agressées, violées, lychées, lacérées de coups de couteau et enterrées vivantes par une foule de voisins du quartier d'El Haïcha, qui les accusaient d'être des prostituées et affirmaient vouloir "purifier le quartier", a débuté le 25 décembre pour être suspendu. Il reprendra le 3 janvier à Biskra. L'appel avait été interjeté par le procureur, après qu'un jugement etraordinairement clément compte tenu de la gravité des faits ait été rendu, à Hassi Messaoud même. Le procès en appel a été déplacé dans une autre ville, pour le soustraire aux pressions locales. Le pogrom de Hassi Messaoud n'était pas le premier du genre (d'autres avaient eu lieu à Ouargla, Remchi, Bordj ou Tebessa, et sont restée impunis), mais il fut le plus grave, et surtout le premier à être largement médiatisé. Une dizaine d'organisations de femmes (dont la commission des femmes de l'UGTA) ont lancé un appel, dénonçant notamment les pressions et menaces exercées sur les victimes du pogrom, ainsi que la minimisation des faits par les autorités. Ces organisations appellent à un procès qui soit "un modèle de justice" afin de rendre aux victimes leur dignité.

(AFP 21.12) Dix-neuf membre d'un groupe de soutien à un groupe armé islamiste, tous en fuite, ont été condamnés à mort par contumace par le tribunal criminel de Bouira. Le 6 décembre, 21 autres membres de groupes armés avaient été condamnés à mort par contumace par le tribunal criminel de Jijel.



Communiqué de la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme

Le docteur Fekhar Kamel Eddine militant de la LADDH, arrêté le 31 octobre 2004 à la suite des émeutes de Ghardaïa, dernier recours lorsque les possibilités de se faire entendre sont épuisées, observe depuis le 18 décembre dernier une grève de la faim illimitée, pour exiger sa libération.

Militer pour les droits de l'Homme en Algérie, tenter de les promouvoir et de les défendre, préserver la dignité humaine des excès conjugués du pouvoir et de la bureaucratie qui a investie le champ politique, malgré son incompétence, sa médiocrité et sa corruption, c'est prendre le risque d'être jeté en prison et condamné.

Le pouvoir tentaculaire, vorace et arbitraire, qui ne ce soumet pas aux normes juridiques nationales et internationales qui fondent un état de droit, exige du peuple qui ne sert qu'a le légitimer plus de soumission, et des citoyens plus d'obéissance par la peur .

Il a besoin pour durer de bafouer les règles les plus élémentaires de la démocratie, et d'exercer une politique qui a tendance non pas à résoudre les problèmes mais à éliminer ceux qui les posent, et à supprimer les contradictions en éliminant les contradicteurs.

Chaque fois que les algériens veulent user de leur droit légal et légitime de se rassembler et de manifester pacifiquement, le pouvoir répond par la répression qui s'ajoute à la longue liste des atteintes aux droits de l'Homme qui ne peuvent être passées sous silence.

La LADDH exprime sa solidarité agissante au docteur Fekhar. Elle élève une protestation solennelle contre son maintien en détention et adresse une mise en garde au pouvoir responsable de la détérioration de sa santé.

Elle appelle à la solidarité internationale des défenseurs des droits de l'Homme, pour faire pression sur le pouvoir algérien, afin qu'il respecte la déclaration sur les défenseurs des droits de l'Homme, et notamment son article 2, en libérant le docteur Fekhar Kamel Eddine.

Alger le 25-12-04
Le président Ali Yahia Abdennour.


2005

(Liberté 3.1) Pour la deuxième fois, une conférence publique du président de la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme (LADDH), Ali Yahia Abdennour, a été interdite à Tizi Ouzou par la wilaya. La LADDH accuse "les puissants de l'heure" d'avoir faut "jouer à l'administration le rôle d'un parti politique à leur dévotion". Ali Yahia Abdennour devait s'exprimer sur la situation des droits de l'Homme en Algérie.

(AFP 5.1) Cinq membres d'un groupe armé ont été condamnés à mort le 4 janvier par la Cour criminelle d'Alger, par contumace, pour le meurtre le 28 janvier 1997 du Secrétaire général de l'UGTA, Abdelhak Benhamouda. Un sixième assassin présumé, et présumé chef du groupe, qui avait été arrêté et présenté à la télévision, avait été tué dans sa cellule d'une prison d'Alger, dans des circonstances non élucidées.

Officiellement, la peine de mort, toujours en vigueur en Algérie, n'y a pas été appliquée depuis 1993. Officieusement, des centaines d'exécutions extrajudiciaires commises depuis lors sur de présumés islamistes armés par des membres des forces de sécurité ont été dénoncées par les organisations de défense des droits humains.

(AP 18.1) Le président Bouteflika a gracié le 18 janvier plus de 5000 détenus, à l'occasion de la célébration de l'Aït El Kebir, les 20 et 21 janvier. Ces graces prennent la formes de remises totales ou partielles de peines. En sont cependant exclus les condamnés pour actes de terrorisme et de subversion, atteinte à la sûreté de l'Etat, meurtre, assassinat, parricide, infanticide, détournement de fonds, corruption, trafic d'influence, évasion, fausse monnaie, viol, attentat à la pudeur avec violence, contrebande ou trafic de stupéfiants.

(AP 26.1) Le président de l'Organisation marocaine des droits de l'Homme (OMDH, officielle), Abdallah Oualladi, a dénoncé dans un entretien publié par "Aujourd'hui le Maroc" l'"indifférence criminelle" de l'Algérie à l'égard des prisonniers marocains détenus par le Front Polisario (indépendantistes sahraouis) dans ses bases du sud de l'Algérie. A. Oualladi a accusé le Polisario de laisser "mourir à petit feu" ses prisonniers marocains.

Le 24 janvier, un prisonnier marocain libéré le 22 par le Polisario en raison de son état de santé est décédé à Marrakech. Il avait passé 17 ans dans un camp de la région algérienne de Tindouf.

Le Comité international de la Croix Rouge, qui considère les prisonniers marocains du Polisario comme "les plus vieux prisonniers de guerre du monde", appelle à leur libération (mais également à celle des prisonniers sahraouis du Maroc). Certains soldats marocains sont prisonniers des Sahraouis depuis plus de 25 ans. Depuis 1984, le Polisario procède régulièrement à des libérations partielles, dénoncées par le Maroc comme relevant d'un "marchandage médiatique".

(AP 12.2) Un officier et un soldat marocains prisonniers du front Polisario de libération du Sahara occidental depuis respectivement 14 et 18 ans se sont évadés de leur camp de détention dans la région de Tindouf, en Algérie, pour rejoindre le Maroc, a annoncé le 12 février l'agence officielle marocaine MAP, qui ajoute que le soldat avait été torturé et mutilé après une précédente tentative d'évasion, et son arrestation par des militaires algériens, en 1993. Cette annonce de l'évasion des deux prisonniers marocains, non confirmée de source indépendante, est à replacer dans le contexte de l'incessante polémique engagée par le Maroc contre l'Algérie, accusée de parrainer voire de manipuler le Front Polisario.

Cependant, le Comité international de la Croix Rouge CICR confirme les mauvais traitements dont ont été, et seraient encore, victimes les prisonniers de guerre marocains détenus par le Polisario, certains depuis plus de 25 ans, dans la région de Tindouf. Le Polisario a toutefois libéré environ 2000 de ces prisonniers, et n'en retient plus que 408, que le CICR décrit comme étant dans un état "avancé de délabrement physique et psychologique", et dont il demande la libération. De son côté, le Maroc détient également un nombre indéterminé de Sahraouis, combattants ou non.

(Quotidien d'Oran 2.2) Le ministre de la Justice, Tayedb Belaïz, a relevé le 1er février trente-trois magistrats du pouvoir judiciaire de leurs fonctions : 19 magitrats près la Cour Suprême, deux près le Conseil d'Etat (ces vingt-et-un ont été immédiatement remplacés par de nouveaux magistrats) et douze près les cours et tribunaux.

Selon "Le Quotidien d'Oran", cette purge serait motivée par les retards de traitement des dossiers (80'000 dossiers seraient pendants, toutes affaires et juridictions confondues).


9 FEVRIER 1992 - 9 FEVRIER 2005 : TRISTE ANNIVERSAIRE

Déclaration de presse de la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme (LADDH)

Alger le 08.02.2005.
Le bureau national

Voici treize ans que les algériens vivent sous état d’urgence : sont-ils résignés ? Acceptent-ils la fatalité de vivre sous régime autoritaire ?

Des journalistes, des étudiants, des militants des droits de l’Homme et des citoyens défendant leurs droits croupissent dans les prisons sous des motifs fallacieux. L’ensemble de l’appareil judiciaire est sous contrôle permanent de l’Administration. Des décisions de justice bloquent le fonctionnement de partis politiques, de syndicats, d’associations.

L’Etat de droit laisse place aux faits du prince, aux oukases de l’administration et à l’arbitraire des appareils de sécurité.

La surmédiatisation d’une pseudo amnistie ignorant les revendications de vérité et de justice des familles de disparus camouffle des décisions économiques stratégiques qui vont prendre davantage en otage les droits sociaux et économiques des algériens.

Les récentes émeutes du gaz traduisent le désarroi des populations en situation précaire ; le pouvoir leur répond par la répression.

La Ligue Algérienne pour la Défense des Droits de l’Homme reste persuadée que le maintien de l’état d’urgence autorise toutes les violations des droits de l’Homme sous divers prétextes.

A aucun moment l’état d’urgence n’a été soumis à l’approbation des institutions élues comme le stipule la Constitution.

Il constitue ainsi une situation hors la loi imposée à la société.

La LADDH poursuit la campagne nationale pour la levée de l’état d’urgence ; soutenue par les organisations internationales gouvernementales et non gouvernementales, elle a recueilli plusieurs milliers de signatures.

La LADDH reste persuadée que la levée de l’état d’urgence constituera la première pierre de l’édification d’un véritable Etat de droit.

AUJOURD’HUI L’URGENCE RESTE LA LEVEE DE L’ETAT D’URGENCE


(L'Expression 19.2 / Le Quotidien d'Oran, El Khabar 20.2) "Le dossier des disparus a été finalisé (...) et sera remis au président de la République avant la fin du mois", a annoncé à "L'Expression" une "source proche du président de la Commission nationale pour la promotion et la défense des droits de l'homme", Farouk Ksentini, chargé par le président Bouteflika de "faire la lumière" sur la question. Pour le président de la CNCPPDH, il s'agit de solutionner "quelque 7500 cas concrets", mais pour les familles de disparus, les grandes ONG et une partie de l'opposition, il s'agit d'au moins 13'000 cas.

La remise du rapport par le groupe de travail Ksentini va donc se faire alors que le débat sur l'amnistie générale a été lancé par le président Bouteflika. L'Association nationale des familles de disparus (ANFD) constate dans une déclaration que le projet d'amnistie générale "suscite bien des opportunismes, voire des vocations" alors qu'on en ignore encore le contenu. L'ANFD, qui déclare ne rien attendre du projet d'amnistie générale sinon une occultation de la vérité sur les disparitions et l'impunité pour les coupables, dénonce par ailleurs les "pressions exercées sur les familles" de disparus par des promesses d'indemnisation équivalant à un "renoncement à la vérité" sur les disparitions elles-mêmes. L'association estime enfin qu'"aucune loi d'amnistie ne peut être opposable aux victimes des disparitions" et qu'il n'est "ni possible ni viable de tirer un trait sur la tragédie nationale sans que des milliers d'Algériennes et d'Algériens soient instruits du sort des leurs".

(Le Temps 26.2) La Commission des droits de l'Homme de l'ONU devrait être prochainement saisie d'une proposition d'instrument jurudiquement contraignant pour la protection des personnes contre les disparitions forcées. En 1992, l'Assemblée générale de l'ONU avait adopté une déclaration, non contraignante, fixant un cadre et un code de conduite dans ce domaine, et s'agit maintenant "d'aller plus en avant, de passer de la simple recommandation à la contrainte pour les Etats qui ratifieront le texte", explique l'Ambassadeur de France auprès de l'ONU à Genève, Bernard Kessedjian. Une session réunissant à Genève 80 représentants d'Etat, experts et représentants d'ONG a abouti à une proposition comportant notamment une définition claire de la "disparition", l'énoncé de mesures préventives et la proposition de créer un organe international de suivi.

Sur la définition de la "disparition", le projet dit qu'on "entend par disparition forcée, l'arrestation, la détention, l'elèvement commis par des agents de l'Etat suivis d'un déni de reconnaissance de la privation de liberté ou de la dissimulation du sort réservé au disparu, le soustrayant à la protection de la loi". *

*Nacera Yous-Dutour, présidente de l'association algérienne SOS-Disparus, résume : "Un disparu se fabrique ainsi : la police embarque quelqu'un pour l'interroger, revient chez lui le lendemain pour un complément d'enquête. La famille dit : mais il est chez vous, vous l'avez pris hier ! La police répond alors qu'il a été libéré dans la soirée et que, s'il n'a pas rejoint son domicile, c'est qu'il se cache et qu'il a donc bel en bien quelque chose à se reprocher".

S'agissant des mesures préventives, devant éviter qu'une arrestation aboutisse à une disparition, il est proposé un texte bannissant les détentions au secret, le rétention d'information aux familles, le contrôle de la tenue des registres des prisons et leur ouverture aux observateurs, notamment ceux du CICR.

S'agissant du suivi, un organe international est proposé, en charge de la supervision du futur traité et de son respect dans les faits, mais également d'une fonction d'"alerte précoce", les premières heures d'une "disparition" étant cruciales.

Le texte sipulerait que la pratique généralisée ou systématique de la disparition forcée constitue un crime contre l'humanité, ce qui ouvrirait la voie à la saisine d'instances judiciaires nationales et internationales (la Cour pénale internationale, notamment), et à l'utilisation du principe de "compétence universelle" pour poursuivre dans un pays les responsables de "disparitions" survenues dans un autre pays.

Les ONG de défense des droits humains se félicitent de cette avancée, mais regrettent que le texte ne proscrive pas clairement toute amnistie et reconnaisse le "privilège des Etats et de leur parlement" d'accorder ou non une amnistie. Pour les ONG, l'amnistie de responsable de "disparitions" équivaut à leur accorder l'impunité.


LETTRE OUVERTE DE SALAH EDDINE SIDHOUM à l’opinion publique et aux ONG des Droits Humains

Mes chers ami(e)s,

Les putschistes d’Alger tentent encore une fois de me faire taire en me harcelant de convocations.

En effet aujourd’hui, samedi 26 février 2005, aux environs de 11h 30, deux civils armés venus à bord d’un véhicule banalisé de type R19 de couleur bleue nuit, se sont présentés en tant que policiers à mon domicile à El Mouradia, alors que j’étais sur mon lieu de travail et auprès de mes patients à opérer. Ils remirent une convocation à ma vieille tante âgée de 86 ans (celle-là même qui a eu à affronter les escadrons de la mort venus m’assassiner en décembre 1994 et les hommes du sinistre PCO d’El Madania en décembre 2002 venus intimider ma famille durant ma clandestinité forcée) en lui intimant l’ordre de décliner son identité, ce qu’elle refusa avec courage et dignité, en les invitant à aller exercer leur « hogra » ailleurs. Cette situation a provoqué l’émoi des habitants du quartier qui se sont rassemblés devant mon domicile pour réconforter la vieille tante et qui sont venus m’informer des faits dès mon arrivée à 16h à mon domicile, scandalisés par ce harcèlement mesquin d’un homme qu’ils connaissent depuis cinquante ans dans ce quartier, pour sa disponibilité au service des humbles et des « mahgourines ».

Cette convocation émane de la 14e BMPJ (brigade mobile de la police judiciaire) de Birkhadem et me demande de me presenter à la dite brigade dès réception du document, muni du livret de famille (sic) pour une « étude générale » (dirassa aâma) (resic) selon la dite convocation (ci-joint une copie).

Il est clair que ma dénonciation des atteintes quotidiennes aux droits de l’homme dans mon pays à travers l’Observatoire des Droits Humains en Algérie (ODHA) avec mes ami(e)s d’Algeria-Watch et mes efforts avec de nombreux compatriotes de tous les horizons sans exclusion, à rassembler les volontés intellectuelles et politiques en vue d’une alternative pour un changement radical et pacifique de régime, dérangent ceux qui ont mis le pays à feu et à sang pour préserver leurs privilèges mal acquis et qui essaient aujourd’hui d’éviter le Tribunal Penal par une pseudo-reconciliation et une pseudo-amnistie garantissant en réalité leur impunité contre leurs crimes contre l’Humanité.

Je pense encore une fois que ceux qui veulent me faire taire se trompent d’adresse et que leurs méthodes staliniennes archaïques et révolues n’ébranleront pas d’un iota mes profondes convictions dans ma lutte pour le respect de la Dignité Humaine, pour un changement radical et pacifique de régime et pour une Algérie de toutes et de tous, sans exclusion ni exclusive, profondément ancrée dans ses valeurs civilisationnelles et grandement ouverte sur l’Universel. Et je suis prêt à retourner au sinistre bagne de Serkadji pour mes idées et mon combat pour la dignité et la liberté. C’est un grand honneur pour moi et une honte pour les putschistes tapis dans l’ombre, après leurs méfaits sanglants.

A ces derniers je rappelerais seulement les sages paroles d’un intellectuel tchèque : « Un régime ne se caractérise pas par son comportement envers des millions de citoyens obéissants, mais par la façon dont il traite une personne désobéissante »

J’en appelle à l’opinion publique nationale et internationale et aux ONG pour dénoncer cette campagne d’intimidation et m’apporter leur soutien comme ils l’ont toujours fait, dans ma lutte pour la dignité et la liberté contre ce régime corrompu et criminel.

Alger le 26 février 2005
Dr Salah-Eddine SIDHOUM
Chirurgien
Militant des droits Humains


(Le Monde 24.2) Le militant tunisien des droits humains Khemmais Chammari, mandaté par la Fédération internationale des droits de l'homme (FIDH), s'est vu interdire le 22 février d'entrer en Algérie, où il se rendait en compagnie du président de la Ligue tunisienne des droits de l'Homme (LTDH), Mokhtar Trifi, autorisé lui à entrer en Algérie mais qui a refusé d'y entrer en signe de solidarité avec Chammari. Les deux hommes se rendaient à Alger pour préparer les interventions des organisations de défense des droits humains lors du sommet des Etats arabes, les 22 et 23 mars à Alger. Les deux hommes ont passé la nuit dans un poste de police de l'aéroport d'Algere, puis sont repartis pour Paris. Ils accusent le régime tunisien d'avoir fourni à Alger une liste d'"indésirables" mêlant terroristes présumés et militants des droits de l'Homme, et la LTDH a dénoncé "l'amalgame délibéré entre terrorisme et défense des droits humains".

(L'Expression 24.2) Dix ans après la mutinerie de la prison de Serkadji (au moins 100 morts, presque tous des prisonniers, ainsi que quatre gardiens) en 1995, le procès du principal accusé, l'ex-gardien Hamid Mebarki, devrait reprendre le 9 mars. L'avocat de Mebarki annonce "de nouveaux rebondissements", sans en préciser la nature, mais en évoquant des "révélations graves". Mebarki a été jugé une première fois, avec 37 autres accusés, le 14 janvier 1998. En mars 2001, quinze des condamnés de 1998 avaient été innocentés, et Mebarki condamné à la perpétuité.

(Cimade 2.3 / ODHA 4.3, 7.3) Un ressortissant algérien né en France, Ali Drif, détenu à Lyon, a été expulsé vers l'Algérie le 36 février par bateau. Il a disparu à son arrivée à Alger le 27, où l'attendait son avocat. Il a semble-t-il été emmené au commissariat central d'Alger, des témoins l'y ayant vu et parlé. Quatre jours plus tard, le commissaire nié à l'avocat de Drif que celui-ci ait été gardé à vue dans son commissariat. Ses proches craignent qu'il ait été enlevé par les services de renseignement algériens (le DRS), et gardé à vue (la durée légale de la garde à vue en Algérie va jusqu'à douze jours) dans un lieu inconnu. Pendant cette garde à vue secrète, ses proches craignent qu'il soit torturé, et qu'il disparaisse.

L'Observatoire des droits humains en Algérie et la Cimade dénoncent une expulsion effectuée sans les garanties légales, demandent la levée de l'interdiction du territoire français et le retour d'Ali Drif en France. La CIMADE appelle à l'envoi de messages au ministère français de l'Intérieur (fax 01 40 07 28 24) pour demander des informations sur le sort d'Ali Drif.

Ali Drif, 44 ans, ingénieur en informatique, marié et père de quatre enfants français, avait été arrêté une première fois en 1995 sur le soupçon d'"association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste". Après vingt mois de préventive, il avait été libéré en octobre 1997, puis relaxé en juin 1998, puis condamné à trois ans de prison et interdiction définitive d'entrer en France en octobre 1999, mais sa peine étant largement couverte par la préventive, il n'avait pas été réincarcéré. Après un accident d'automobile (provoqué par un gendarme à la retraite) en septembre 2004, il était à nouveau arrêté et réincarcéré pour effectuer son reliquat de peine (cinq mois). C'est au terme de celle-ci qu'il a été expulsé en Algérie.

(ODHA 10.3) Onze jours après avoir été arrêté le 27 février à son arrivée à Alger, au terme de son expulsion de France le 26 février, Ali Drif a été remis en liberté le 10 mars à Alger. Il a été gardé à vue pendant tout cette période, le délai de garde à vue étant en Algérie, pour les affaires de "subversion" et de "terrorisme", de douze jours. Après son arrestation, le commissaire du commissariat central d'Alger, où il avait été vu et entendu par des témoins, avait nié le garder à vue, ce qui avait fait craindre à ses défenseurs et à sa famille qu'il ait été victime d'une "disparition forcée", d'une détention secrète, voire de tortures.

L'Observatoire des droits humains en Algérie dénonce l'expulsion d'Ali Drif de France, où vit sa famille et où il a un travail, et demande que la mesure d'interdiction du territoire le frappant soit levée.

(Tribune de Genève 4.3) La dernière session de travail établie par la Commission des droits de l'Homme de l'ONU, à Genève, n'a pu aboutir à un accord sur une convention des Nations Unies contre les disparitions forcées, les gouvernements n'étant pas parvenus à s'accorder sur le contenu de cette convention. Il faudra donc attendre 2006 pour qu'éventuellement une telle convention soit proposée. Il n'existe en effet aucun traité de l'ONU visant à prévenir et réprimer les "disparitions forcées", et la Cour pénale internationale n'a compétence que pour les juger en tant que pratiques "massives et systématiques". Or la disparition forcée est "pratiquée (...) sur tous les continents", et dans 74 pays rappelle le porte-parole de la Commission internationale des juristes, Federico Andreu Guzman, qui se dit cependant relativement confiant : "la majorité des pays sont acquis à l'idée d'une Convention", mais note que la Russie, la Chine et les USA y sont opposés.

(La Nouvelle République 7.3) Plusieurs organisation de défense des droits humains* ont adressé au président Bouteflika un rapport sur les disparitions forcées et les enlèvements suivis de séquestration. Le rapport formule 25 recommandations au président de la République, et s'il ne rejette pas le principe de l'amnistie générale, il y pose cinq conditions : la reconnaissance du "caractère imprescriptible des crimes contre l'Humanité et leur exclusion de l'amnistie quels qu'en soient les auteurs", "la garantie de la vérité" sur le sort des victimes et la garantie de la poursuite des auteurs de disparitions forcées, enlèvements, séquestrations et assassinats, quels qu'ils soient; la renoncement aux "procès de masse", afin que les organes de l'Etat puissent pleinement pleinement "assumer les principes de vérité et de justice exigés". Justicia Universalis et les autres organisations s'opposent à toute amnistie "en faveur des responsables qui ont planifié et ordonné les crimes contre l'Humanité", se félicitent de "la reconnaissance officielle de la responsabilité de l'Etat quant aux conséquences des crimes commis" mais exigent "la prise en charge totale, sans exclusive, des réparations morales et matérielles et la réinsertion sociale des victimes et de leurs ayants droits", ainsi que la "garantie législative" que ces crimes "ne puissent plus être commis à l'avenir". Cette garantie devrait être fournie par l'intégration de ces crimes dans la loi pénale, par l'actualisation des lois et procédures, l'unification et la transparence des décisions de justice, le non-recours à des juridictions militaires pour juger de crimes commis contre des civils.

* Justicia Universalis, Somoud, ANFD, associations de familles de fisparus de Constantine, Oran, Relizane et Sétif

POSITION DES ASSOCIATIONS DE FAMILLES DE VICTIMES DE CRIMES DE DISPARITION FORCÉE ET D'ENLÈVEMENTS AU SUJET DE L'AMNISTIE GÉNÉRALE, ET PLATE-FORME DE REVENDICATIONS

Alger, Constantine, Oran, Relizane, le 12 mars 2005

- Association des Familles de Disparus de Constantine (M. Rabah Benlatrèche, président)

- Association des Familles de Disparus d’Oran (Mme Hachmia Boutaïba, membre)

- Association Nationale des Familles de Disparus, section d’Alger (Mme Safia Fahassi, membre)

- Association Nationale des Familles de Disparus, section de Relizane (M. Sid Ahmed Djezzar, président)

1. INTRODUCTION

Les chiffres des disparitions forcées du fait des forces de sécurité tous corps confondus et des enlèvements par les groupes terroristes ou groupes d’opposition armés en Algérie sont énormes, nonobstant toute polémique. Les victimes directes n'ont pas disparu volontairement ou par hasard.

En ce qui concerne les disparitions forcées, et bien qu’aucune liste nominative n'ait été publiée ni communiquée à une association de victimes, aux parents de victimes eux-mêmes, à leurs avocats ou à un organisme international quelconque, le président de la Commission Nationale Consultative de Protection et de Promotion des Droits de l’Homme (CNCPPDH) reconnaissait, dans l’une de ses déclarations publiques, que « des agents de l’Etat ont assassiné 5200 disparus forcés »1.

En novembre 2002, le président de la CNCPPDH révisait ce chiffre à la hausse en déclarant à l’organisation Human Rights Watch : «Je pense que le chiffre total se situe entre 7000 et 10000, peut-être même 12000 (...) . Selon l’organisation Human Rights Watch, il aurait précisé qu’il parlait « des cas dont étaient responsables les forces de l’ordre et leurs alliés »2. Il ajoutait aussi : «Ma conviction est que la majorité des “disparus” n’a rien à voir avec les groupes armés».

En ce qui concerne les enlèvements par des groupes d’opposition armés, et bien qu’il n’existe aucune statistique fiable sur le nombre des victimes, pas même dans les rapports périodiques fournis aux instruments des droits de l’homme des Nations Unies par le gouvernement, personne ne nie ces crimes. L’organisation internationale Human Rights Watch3, qui avait demandé des statistiques sur ce sujet au gouvernement dans une lettre datée du 16 mai 2002, est restée sans réponse. L’organisation Somoud «estime que le nombre d’Algériens et d’Algériennes enlevés par les groupes armés depuis 1992 se situe aux alentours de 10 000, dont plus de la moitié reste manquante ». Rabha Tounsi, Secrétaire de l’Organisation Nationale des Victimes du terrorisme et Ayants-Droit (ONVTAD), avait affirmé « à une délégation de Human Rights Watch le 22 mai 2000 qu’il existait environ 4 200 cas de personnes enlevées par les groupes armés dont les corps n’ont pas été retrouvés »4. Le gouvernement a promulgué un Décret-exécutif en 1997, puis en 19995, dans le but de leur accorder un dédommagement financier inégal, introduisant des ségrégations selon que la victime directe est ou non membre des services de sécurité, et que ce service relève de l’armée ou de la police.

En ce qui concerne les fosses communes et charniers, les autorités sont tout aussi silencieuses. On ignore tout des restes de victimes trouvés dans des fosses communes. La seule certitude est l’existence de nombreuses familles de victimes désemparées, et des spéculations sur la complicité des autorités dans ces assassinats collectifs dont on veut faire disparaître les traces. En ce qui concerne les victimes de la violence enterrés sous « X », nous réclamons une coopération sincère, transparente et égalitaire entre les autorités et nos associations, afin de procéder dans les meilleurs délais :

Pour toutes les victimes, les conséquences de ces crimes sont incalculables. Affectives bien sûr - avec des répercussions sur la santé mentale et physique des proches (mères, épouses, enfants, pères, frères et soeurs, parents et amis) mais aussi matérielles - la plupart des disparus forcés ou enlevés étaient les seuls soutiens des familles. A quoi, s’ajoutent les tracasseries administratives sur la vie des épouses et des enfants pour tous les actes courants de leur survie.

Pour la nation dans son ensemble, la possibilité que de tels crimes aient pu se produire résulte, avant tout, des carences de l’Etat, seul responsable de la sécurité des personnes et des biens. Parmi les carences, l’absence de lois, et l’usage sélectif des lois existantes. L’une des garanties que de tels crimes ne puissent plus jamais se reproduire est de légiférer pour punir les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité.

2. SUR L’AMNISTIE GENERALE

Nous, familles algériennes de disparus forcés et d’enlevés, aspirons non seulement à la paix mais également à l’arrêt de toute négation des droits de l'homme, à la réforme des lois qui permettent le crime et son impunité, et qui font obstacle à la protection efficace et effective de la vie dans la dignité.

Nous exigeons aussi cette réforme pour que les crimes que nous et nos proches ont subis ne puissent jamais se répéter à l’avenir. Il est indispensable de ne jamais plus permettre qu'il y ait des crimes d’Etat et le crime d’impunité.

Nous refusons de faire disparaître une seconde fois les victimes de crimes de disparition forcée et d’enlèvement de la mémoire familiale et collective. Notre mémoire restera inviolable.

Pour garantir cette paix dans la dignité et avec la mémoire, la vérité et la justice sont indispensables : la vérité nous est vitale comme le sont l’eau et l’air pour les plantes. Elle garantit de perpétuer notre mémoire en conscience. La justice et la liberté seront une victoire sur la violence et le déni de droit. Sur elles repose notre dignité d’êtres humains avant notre identité d’algériens. Pour nos familles, la vérité et la justice sont soeurs jumelles, elles seules nous permettront d’envisager l’avenir.

Les mesures d’amnistie annoncées ne doivent pas occulter les devoirs de vérité et de justice que l’Etat doit à la population en général et aux victimes de cette dernière décennie en particulier. Le président de la CNCPPDH avait déclaré, d’abord, que l’Etat est ‘responsable mais non coupable’6 et, ensuite, que : « des agents de l'Etat ont agi illégalement". Ajoutant : "La position de ma commission est claire: les personnes responsables de ces meurtres doivent être jugées (...) Les familles (de disparus) ont le droit de savoir la vérité et les circonstances de leur disparition. Ces familles sont prêtes à pardonner à condition de savoir la vérité"7.

Nous ne voulons pas de procès de masse.

Nous appuyons par conséquent une amnistie générale de laquelle seront exclus, expressément, les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité dont nous sommes victimes.

3. PLATE-FORME DE REVENDICATIONS

Nous familles des disparus forcés et celles des victimes d’enlèvement attribués aux groupes d’opposition armés réclamons, outre la reconnaissance de nos associations, des mesures d’ordre juridique, administratif et financier.

1. La libération immédiate de toutes les personnes, quelle que soit la date de leur arrestation ou enlèvement par les services de sécurité, qui n’ont pas été présentées à un juge dans le délai légal maximum de 12 jours en cas d’enquête en matière de terrorisme et, d’une part, informer les familles des détenus en vertu d’une autorisation d’un magistrat et, d’autre part, permettre dorénavant au(x) avocat(s) choisi par ces familles de rendre visite sans délai à la personne en état d’arrestation, avec droit de regard sur le registre dit ‘main courante’ tenu dans tous les locaux de la police judiciaire en vertu du Code de procédure pénale;

2. Réserver à la victime directe de disparition forcée libérée l’ensemble de ses droits, qu’il exercera le cas échéant par son tuteur en cas d’incapacité ou de démence, ainsi que sa prise en charge totale aux frais de l’Etat pour ses soins physiques et psychologiques ou psychiatriques, avec garantie en cas de capacité de sa réinsertion dans la vie active, sans préjudice de la réparation matérielle et morale de l’intégralité des préjudices qu’il aura subit sur le plan physique, psychique, matériel, social et professionnel ;

3. La comptabilisation des fosses et endroits contenant les restes de victimes retrouvées, quelle que soit la victime ou l’auteur présumé de l’assassinat;

4. Le déclenchement des procédures d’identification de ces restes avec l’accord et la collaboration des associations de familles de disparus forcés et celles des enlevés par des groupes d’opposition armés ;

5. L’obtention de l’accord préalable écrit des membres de chaque famille de disparu forcé ou d’enlevé pour la définition des protocoles d’analyse ADN ;

6. L’identification des personnes enterrées sous ‘X’ à partir du dossier du Parquet territorialement compétent ayant autorisé l’inhumation, des registres médicaux-légaux, des archives de la police, de la gendarmerie et des services du Département Renseignement et Sécurité. A noter qu’il y a au moins 3030 individus enterrés sous cette appellation anonyme.

7. La reconnaissance par agrément des associations de familles de disparus et des associations des familles d’enlevés par les groupes d’opposition armés sur la base du droit d’association consacré par la Constitution, les conventions internationales des droits de l’homme ratifiées par l’Algérie et la loi nationale. Ces agrément devra être donné par le Ministre de l’Intérieur pour les association d’envergure nationale et par le Wali compétent pour les associations locales ;

8. La consécration de leur droit de réunion et de manifestation pacifiques ;

9. La reconnaissance de manière officielle et publique des crimes de disparitions forcées commis par des agents rémunérés par l’Etat, ainsi que celle des crimes d’enlèvement par les groupes d’opposition armés sans que l’Etat n’ait pu assurer la protection des victimes. Demande solennelle de pardon aux familles de victimes, tant par l’Etat que par les responsables des groupes ayant bénéficié de grâce et d’amnistie;

10. La divulgation aux familles victimes des informations disponibles sur le sort des victimes directes de disparition forcée ou d’enlèvement ainsi que sur les responsables de leur enlèvement/arrestation, sauf si les membres de ces familles font individuellement le choix clair et non équivoque de ne pas savoir ;

11. La réhabilitation de tous les membres des associations de victimes et les défenseurs des droits de l’homme ayant subi une condamnation pénale dans le cadre de la recherche de la vérité et de la justice, et restauration publique de leur dignité et de leur réputation ;

12. L’élargissement des membres de la CNCPPDH aux représentants des associations de disparus forcés et des familles d’enlevés pour la poursuite des investigations ; à défaut de cet élargissement, la création d’une commission « Vérité » chargée de faire la lumière sur le sort des disparus et des enlevés. Cette commission sera présidée par une personnalité morale incontestable et sera composée d’une part des représentants des familles de disparus et d’enlevés et, d’autre part, de juristes, médecins et autres professionnels, tous désignés par les familles de disparus et d’enlevés.

13. L’institution par voie légale du statut de « victimes de la violence d’Etat » (violence reconnue par le président de la CNCPPDH) au même titre qu’un statut des « familles victimes du terrorisme » auquel tous les membres des familles victimes auront droit, avec des mesures d’ordre administratif et financier destinées à leur réinsertion :

a) mesures administratives :

- solution des problèmes de logement, particulièrement lorsque leur logement a été détruit lors d’opérations de maintien de l’ordre ;

- solution des problèmes de travail, particulièrement pour les personnes licenciées ainsi que pour les épouses de victimes capables de travailler;

- solution des problèmes sociaux dus aux tracasseries administratives et policières8.

b) mesures financières :

- attribution d’une somme forfaitaire égale à toutes les familles de disparus forcés et d’enlevés;

- attribution d’une rente viagère aux époux de disparus dont la valeur dépendra de la capitalisation des cotisations des disparus forcés (salariés, entrepreneurs, commerçants, etc.). Cette rente viagère sera calculée sur la base du Salaire national garanti pour les victimes directes de disparition forcée et d’enlèvement sans emplois;

- attribution de bourses à tout enfant de disparu forcé ou enlevé scolarisé ou étudiant ;

- règlement des arriérés des allocations familiales à ces familles sans discrimination;

- ordonner les restitutions qui incluent:

. la restitution de sources de revenus et de biens perdus, volés ou détruits,

. le paiement rétroactif de tous les avantages légaux. Par exemple la prime de 2000 dinars par enfant scolarisé, accordée depuis la rentrée scolaire 2000-2001 par le gouvernement aux familles démunies9.

Considérer particulièrement qu’aucune prescription ne peut courir à l’égard de ces familles.

14. La levée de l’état d’urgence ;

15. La pénalisation par le Code pénal du crime de disparition forcée, y compris la tentative de ce crime avec une peine correspondant à sa gravité. La définition du crime de disparition forcée en tant que crime sui generis comportera les éléments suivants :

a) la privation de liberté sous quelque forme que ce soit;

b) la négation par les autorités de cette privation de liberté;

c) la soustraction à la protection de la loi de la personne disparue;

d) la qualité d’agents de l’Etat et/ou assimilés des auteurs de la disparition forcée entraîne une circonstance aggravante si ce crime est étendu aux personnes indépendantes de l’Etat;

e) la classification de ce crime parmi les crimes contre l’humanité si sa commission revêt un caractère systématique, généralisé ou à grande échelle impliquant une planification, avec les régimes spécifiques en la matière, comme l’imprescriptibilité, l’absence d'exonération de responsabilité et l'extradition. Ce crime sera punissable quelle que soit sa modalité, directe (tentative, entente, complicité, et incitation) ou indirecte (inaction coupable et responsabilité du supérieur hiérarchique qui sait ou aurait du savoir) ;

16. La pénalisation par le Code pénal de toutes les formes du crime contre l’humanité, y compris le génocide, et des crimes de guerre et les tentatives de leur commission ;

17. La ratification du Statut de la Cour Pénale internationale ainsi que la Convention sur l'imprescriptibilité des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité adoptée par l'Assemblée générale des Nations Unies dans sa résolution 2391 (XXIII) du 26 novembre 1968 et entrée en vigueur depuis le 11 novembre 1970;

18. La modification de l’article 51 du Code de procédure pénale, qui doit être complété et concerner tout officier de ‘police judiciaire’ au sens où la loi l’entend. Le complément à apporter à cet article doit permettre aux personnes qui sont arrêtées de pouvoir immédiatement avoir accès à un moyen pour communiquer avec leur famille, de recevoir des visites, d’avoir le droit à un avocat lors de l’arrestation et être examinées, obligatoirement, par un médecin choisi par la personne gardée à vue ou par sa famille à la fin de la garde à vue. La mention sur le procès-verbal d’audition selon laquelle la personne arrêtée refuse ou juge inutile un examen médical n’aura aucun effet sur le caractère obligatoire de l’examen médical.

L’absence de cet examen médical entraîne la sanction pénale de l’officier de police judiciaire chargé de la garde à vue, ainsi que tous les officiers qui se succèdent durant la période de la garde ;

19. La mise à la disposition des familles, des avocats et des autres personnes y ayant un intérêt légitime des informations portant sur l’enregistrement obligatoire de la détention de tout individu en indiquant, entre autres, son identité complète, la date, l’heure et le lieu de la détention, le motif de sa détention et le nom de l’autorité responsable de la détention;

20. L’abrogation de l’article 25 du Code de justice militaire ouvrant la possibilité de faire juger des civils par des juridictions militaires lors de circonstances anormales, déjà tacitement abrogé après l’ouverture démocratique de 1989 et après la suppression de la Cour de sûreté de l’Etat.

La compétence de juges militaires pour juger de civils hors de toute infraction de nature militaire est inacceptable, d’autant plus que les victimes sont irrecevables dans leur droit de se constituer partie civile au procès;

21. L’abrogation des dispositions du Code de justice militaire et du Code de procédure pénale qui donnent aux officiers de ‘police judiciaire’ compétence sur toute l’étendue du territoire national, prérogative étendue aux agents des services de sécurité militaire. Les règles du décret portant sur les Cours spéciales abrogé et dont l’intégralité des dispositions sont intégrées aux Codes pénal et de procédure pénale depuis 1995 leur ont donné cette compétence, alors que ni l’identité, ni les qualités de ces officiers ni le service de rattachement ne sont vérifiables. Le crime de disparition forcée a été rendu possible par ce texte, donnant pouvoir à des agents de procéder aux enlèvements de citoyens de leurs domiciles, en plein couvre-feu, de leurs lieux de travail et même des commissariats de police et des brigades de gendarmerie où des citoyens sont officiellement convoqués. Ces agents quasi-anonymes peuvent faire toute perquisition et saisie, de jour comme de nuit et en tout lieu, si le juge d’instruction l’ordonne ou si ces agents ont une autorisation administrative, dont le texte n’en précise ni la nature ni l’auteur donnant ainsi compétence à un responsable administratif non identifié le même pouvoir qu’un juge d’instruction ;

22. L’organisation par la loi de l’usage des tests ADN avec, notamment :

a) la garantie de l’accord préalable, libre et éclairé des membres de la famille dont un membre accepte un prélèvement d’échantillon ;

b) la garantie du secret professionnel par des sanctions pénales dissuasives empêchant la divulgation de résultats d’analyses ;

c) la garantie de la destruction aussi bien des échantillons que des résultats d’analyses dans le délai de dix années ; et

d) la définition légale des protocoles d’analyses ADN et des professions qui en auront accès durant la période de validité ;

23. L’ouverture d’enquête pour poursuites judiciaires transparentes avec la participation des associations de familles de disparus forcés et celles des enlevés par un groupe d’opposition armé pour tout nouveau cas signalé de disparition forcée ou d’enlèvement, et la poursuite de ces enquêtes aussi longtemps que le sort de la victime directe reste inconnu;

24. La révision de toutes les décisions judiciaires civiles et pénales ayant procédé soit au classement sans suite des plaintes concernant les disparitions forcées et les enlèvements soit à la déclaration de la mort civile des victimes directes sans l’accord de tous les membres de leur familles. Cette révision peut se faire par l’exercice du recours dans l’intérêt de la loi que le Code de procédure civile ouvre au bénéfice du Parquet ;

25. La reprise des poursuites judiciaires pénales contre les auteurs et complices de crimes de disparitions forcées et d’enlèvement par des groupes armés déjà engagées et classées ou oubliées, et notamment l’audition sur procès-verbal des auteurs et témoins cités dans les plaintes.

NOTES

1 Dépêche diffusée le jeudi 16 décembre 2004, à 18h25, par l’Agence de presse Reuters.


2 Voir sur le web à l’adresse de HRW suivante :
3 Human Rights Watch, February 2003, Vol. 15, No. 2(E), ALGERIA , TIME FOR ECKONING: ENFORCED DISAPPEARANCES IN ALGERIA
4 Voir sur le web à l’adresse suivante

5 Décret-exécutif No 99-47 du 13 février 1999, Journal officiel, 17 février 1999, No 9, pp. 4-14, abrogeant le Décret-exécutif No 97-49 du 12 février 1997 et.

6 La formule « l’Etat est ‘responsable mais non coupable’ » vise à assimiler toutes les victimes de la tragédie. Mais cette hypothèse est constamment contredite par le comportement des autorités.

7 Dépêche de l’Agence de presse Reuters du jeudi 16 décembre 2004.

8 La signature du père étant juridiquement nécessaire pour la quasi totalité des démarches administratives concernant le patrimoine de la famille et la vie quotidienne des enfants (inscription à l’école, la délivrance d’un passeport, la participation des enfants aux activités récréatives, voyage à l’étranger, etc.) en raison de sa tutelle légale sur ses enfants, même après divorce. La mère ne devient la tutrice de l’enfant qu’en cas de décès du père.

9 Deuxième rapport périodique de l’Algérie sur la CEDAW, document ONU EDAW/C/DZA/2, 5 février 2003,p. 36.


LAADH : DÉCLARATION DE PRINCIPE SUR LES DISPARITIONS FORCEES

Ligue Algérienne pour la Défense des Droits de l'Homme

Alger le 26-03-05
Le bureau national.

La LADDH observe que la question des disparitions forcées fait l'objet d'opérations multiformes de manœuvres, d'exploitation et de manipulation à des fins politiciennes. Cette question se trouve désormais au centre des enjeux que génère le projet d'amnistie générale que tentent d'imposer les autorités.

Le danger de voir la confusion s'installer dans les esprits des citoyens y compris les militants des droits de l'Homme oblige la LADDH à réaffirmer sa position de principe conformément à sa mission d'organisation de défense des droits de l'Homme :

La LADDH constate avec tristesse l'irruption sur la place publique de querelles entre les différentes associations de famille de disparus de nature à entacher la noblesse du combat pour la vérité et porte atteinte à la légitimité des revendications des ayant droits.

Elle appelle chaque partie concernée à faire preuve de sagesse et d'esprit de responsabilité.


(LADDH, ODHA 12.3 / El Watan 13.3) Le procès du Dr Kamel Eddine Fekhar, responsable du FFS et militant des droits humains, et de seize de ses compagnons, a eu lieu le 12 mars devant la Cour criminelle de Ghardaïa, en présence d'une assistance nombreuse. Kamel-Eddine Fekhar et Khoudir Babaz ont été condamnée à cinq mois de prison ferme, quatre autres accusés à quatre mois de prison ferme, cinq à un an (par contumace) et cinq relaxés. Les défenseurs des condamnés ont annoncé qu'ils allaient se pourvoir en cassation. Kamel-Eddine Fekhar, secrétaire national du FFS chargé du mouvement associatif, reste en prison pour vingt jours, les autres condamnés ont été libérés.

L'affaire jugée à Ghardaïa remonte à octobre 2004, lorsque de violentes émeutes ont secoué la ville, après dix jours de grève.


Communiqué de la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme (LADDH)

Le tribunal criminel de Ghardaïa a rendu son verdict tard dans la journée du samedi 12 mars, concernant le procès des 17 détenus de Ghardaïa dont le Dr Fekhar et les cinq autres militants de la LADDH.

En effet après une délibération de plus de 3 heurs, le président du tribunal a prononcé le verdict suivant :

- cinq mois de prison ferme contre le Dr Kamel Eddine Fekhar et un autre détenu.

- Quatre mois de prison ferme contre quatre autres détenus.

- Un an de prison avec sursit contre les cinq militants de la LADDH qui étaient considérés en état de fuite.

- Le reste des détenus (cinq) ont été acquittés.

Tous les détenus à part Dr Fekhar qui lui reste encore en prison jusqu'au 03 avril, ont été libérés de la prison de Ghardaïa la nuit même.

Maître Ali Yahia Abdennour qui a assisté au procès, a lors d’un point de presse exprimé son mécontentement concernant ce verdict, considéré comme un refus des autorités de se déjuger et d’admettre leurs abus. Car la défense a démontré avec la force de la loi que le dossier de l’accusation était complètement vide et infondé pour la totalité des accusés.

Le collectif d’avocat fera appel suite à ce verdict.



Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme - LADDH
Déclaration de la LADDH :

Le Ministère de l’intérieur interdit toute manifestation publique pour la LADDH

La situation que vit l’Algérie sur le plan des droits de l’Homme, qui subissent une agression tous azimuts et sont en état de légitime défense, reste toujours alarmante.

Les atteintes aux droits et aux libertés se sont brutalement aggravées.

C’est un véritable crépuscule des libertés que l’on semble à bien des égards assister. Comment faire respecter les droits humains qui sont l’un des rares lieux privilégiés de rencontre des Algériens de tous bords, l’ultime valeur à défendre, dans un pays où ils sont bafoués avec une régularité et un machiavélisme peu ordinaire par un pouvoir qui a réalisé l’encadrement policier de la population, la délation généralisée, les répressions des contestataires ? Chaque jour, nous assistons à de nouvelles arrestations, à de nouveaux procès, à de nouvelles condamnations injustifiées, à l’encontre des militants politiques et des droits de l’Homme, des syndicalistes, des journalistes, des jeunes manifestants.

Les droits de l’Homme constituent un dossier d’accusation que peuvent dresser contre le pouvoir, tous ceux qui dans notre pays créent, produisent, étudient.

La LADDH exprime sa profonde émotion, sa consternation, son indignation, élève une protestation solennelle et adresse une mise en garde au pouvoir, devant la discrimination opérée à son encontre par le ministre de l’intérieur qui lui a interdit sans le lui signifier par écrit toute manifestation publique, sous prétexte de non-conformité à la loi.

Elle fait face à la répression en cours par la parole libre qui témoigne, pour empêcher le pouvoir de tout contrôler et de tout régenter. Les militants savent qu’il y aura comme par le passé bien des tempêtes à traverser, bien des tumultes à affronter, bien des chausses trappes à éviter, pour défendre les droits humains dans un pays de non droit.

Jamais la volonté de la LADDH n’a été plus claire, plus déterminée que maintenant pour faire face aux diverses formes d’oppression Etatiques qui s’exercent au détriment du droit et présentent un sérieux danger pour la liberté. L’asservissement de la vie associative est devenue la règle.

L’administration a tenté d’étouffer ou de réduire à l’inefficacité le mouvement associatif autonome, pour le remplacer par des interlocuteurs dociles, des Baudruches flasques et sans contenu.

Une ligue des droits de Homme ne mérite ce nom que si elle est libre, indépendante, souveraine dans ses orientations et ses décisions, car la dépendance exclut la liberté d’action et prône la langue de bois. L’actualité politique nous rappelle que les droits de l’Homme ne se donnent pas, mais se gagnent et se méritent, qu’il faut toujours se battre pour les promouvoir, les consolider, les élargir.

La seule alternative qui nous est laissée est de mobiliser l’opinion nationale et internationale. La répression qui est un cauchemar au quotidien fait naître par réflexe naturel la solidarité.

La LADDH demande aux partis politiques, au mouvement associatif, aux syndicats, à la presse , à la jeunesse, de rompre le silence, pour condamner un pouvoir qui exclut qu’on lui oppose quelque droit que se soit, même son propre droit.

Elle fera connaître au monde entier et particulièrement aux ONG internationales des droits de l’Homme, à la presse internationale, la réalité qui découle de la surdité et de la cécité d’un pouvoir qui accule l’Algérie à redevenir celle de la pensée unique.

Alger le 02-03-05
Maître Ali Yahia Abdennour
Président de la LADDH


LETTRE OUVERTE DE LA LIGUE DES DROITS DE L'HOMME À KOFI ANNAN

Alger 19-03-05

Monsieur le secrétaire général, bienvenue en Algérie, pays de 32 millions de sujets, sans compter les sujets de mécontentement. Le droit du peuple algérien à disposer de lui-même, pour lequel il a combattu avec acharnement sept ans et demi durant, est devenu le droit de l'Etat à disposer de son peuple. Le problème fondamental consiste à rétablir la souveraineté du peuple algérien, en lui permettant de choisir par des élections libres, ses représentants au niveau de toutes les institutions élues de l'Etat, et à doter l'algérien du statut de citoyen à part entière. La fraude électorale, bien intégrée dans les mœurs politiques du pays, est au rendez-vous de toutes les élections. Le plus grave n'est pas d'avoir des sujets, mais de les appeler citoyens. Un peuple de sujets est prêt à devenir un peuple de citoyens :

Le pouvoir au peuple, le peuple au pouvoir.

Le peuple algérien ne vivra dans la dignité que quand il aura conquis ses droits humains.

L'Algérie est devenue, comme durant la guerre de libération nationale, le lieu privilégié d'une tragédie humaine d'une grande ampleur, qui a engendré des crimes contre l'humanité.

Les deux faits marquants de la fin du deuxième millénaire sont l'indivisibilité et surtout l'universalité des droits de l'Homme qui est la condition sine qua non du dépassement des particularismes nationaux et de la spécificité culturelle et historique que le pouvoir politique évoque, pour justifier son refus de toute ingérence. On ne peut a la fois souscrire aux principes des nations Unies et même ratifier des conventions et pactes internationaux, et invoquer ensuite la non ingérence quand il y'a manquement à ces principes en Algérie. L'échec de la communauté internationale à obtenir de l'Algérie de se conformer à ses obligations en matière de droit international, est total. L'Etat Algérien a refusé tout accès à l'Algérie aux rapporteurs spéciaux de l'ONU chargés d'enquêter sur la torture et sur les exécutions extrajudiciaires. Il a ratifié de nombreux pactes et conventions internationaux qui ont une autorité supérieure à la loi, pour faire bonne figure démocratique, sans la volonté de leur attacher beaucoup d'importance quand à leur application, du fait que la pratique les méconnaît ou les bafoue. Bien plus, les dispositions imposées par ces traités, n'ont pas été régulièrement intégrées à l'ordre juridique interne.

La LADDH se demande s'il est permis de croire au progrès par le droit international, que les Etats ne respectent pas ou larguent au gré des circonstances ?

Lors des massacres collectifs, des enlèvements suivis de disparitions, de tortures, des assassinats, et des exécutions extra judiciaires, des arrestations arbitraires, dont a souffert le peuple algérien durant la décennie écoulée, vous avez demandé à la Communauté internationale : " de garder les yeux rivés sur les horreurs qui se commettent en Algérie ".

Le terrorisme est odieux, mais les moyens de riposte n'impliquent aucun renoncement aux règles d'un Etat de droit. Il ne faut pas confondre la résistance légitime contre l'occupation étrangère avec le terrorisme.

Que sont devenus les disparus ? Des morts sans sépulture, des vivants sans existence? leurs familles qui se battent depuis des années pour savoir la vérité sur le sort qui leur est réservé, n'ont obtenu pour réponse que le silence d'abord, puis des déclarations ambiguës, et enfin des mensonges officiels. L'impunité est de règle. Est il concevable qu'après des milliers de disparus qui relèvent de la responsabilité de l'Etat, personne ne soit traduit en justice ? Il faut envisager des poursuites judiciaires dans le cadre de la compétence universelle, qui permet au juge de n'importe quel Etat, de connaître des crimes contre l'humanité qui sont imprescriptibles, sans considération ni du lieu de l'infraction, ni de la nationalité de l'auteur ou de la victime.

Il y'a dérive autoritaire du pouvoir politique sur la question des droits de l'Homme, depuis l'état d'urgence du 09-02-1992, chaque jour apporte une sinistre moisson d'outrages à la dignité humaine. Le contrôle de la population se fait par la police politique, les services de sécurité, les appareils idéologiques de l'Etat, notamment sa presse, la télévision unique, la radio unique. Toute personne qui s'exprime à contre courant de la ligne politique définit par le pouvoir est mise en accusation et diabolisée. Le harcèlement judiciaire concerne en premier lieu les militants des droits de l'Homme et des partis politiques, les journalistes, les syndicalistes. Les tribunaux et cours de justice ne sont pas des lieux où la justice est rendue, mais des instances politiques où le pouvoir juge ses adversaires.

La LADDH, s'est élevée avec rigueur et vigueur contre les conditions scandaleuses des procès politiques qui aboutissent à une parodie de justice. Il y a violation de la loi, atteinte à l'autonomie de la justice et à l'indépendance des magistrats. Quand la prison devient un honneur, c'est que l'Etat se pervertit. Il n'y a pas de libertés sans justice, ni de justice sans liberté qui est indivisible, et là où elle fait défaut surgit la tyrannie. La liberté d'expression est un droit élémentaire de la vie sociale et culturelle, de la création scientifique et artistique. C'est d'elle que découlent les autres libertés. C'est l'oppression qui a enfanté la liberté, et la répression qui a enfanté les droits de l'Homme.

Il y a dans la société trop d'inégalités et d'injustices sociales. La distribution des revenus et des richesses est si inégale, qu'elle viole les normes minimales de justice. Trop riche pour une petite minorité, trop pauvre pour la grande majorité, l'Algérie est l'exemple d'une profonde injustice sociale.

Les droits de l'Homme se conjuguent avec la démocratie qui est création et contrôle du pouvoir, le régime politique de l'autorité librement consentie et non imposée, qui se réalise par l'alternance, les contres pouvoirs et la régulation par le droit et l'Etat de droit. Le pouvoir politique ne veut pas entrer dans la démocratie, mais cherche à s'en donner l'apparence.

La définition juridique de la femme mariée est celle de l'éternelle mineure. La femme peut exercer une haute fonction dans tous les domaines d'activité, mais pour se marier il lui faut l'autorisation d'un tuteur. La polygamie et la répudiation sont maintenues dans la révision du code de la famille.

Monsieur le secrétaire général des Nations Unies, le Ministre de l'intérieur a interdit à la LADDH d'organiser toute réunion ou manifestation publique, sans le lui signifier par écrit. Cette opération de déstabilisation de la ligue, c'est un sérieux danger pour les libertés. Ne pas laisser le silence se refermer sur les violations des droits de l'Homme, crier la vérité, est la mission de la LADDH. Contre les abus dont elle a été victime depuis sa création il y a 20 ans, les arrestations, les procès, les condamnations, les menaces, les intimidations de ses militants, elle n'a cessé de se battre. L'attitude du pouvoir reste rigide, décevante, négative. La ligne de démarcation est celle qui sépare les associations secrétées par le pouvoir ou encouragées par lui, et les associations indépendantes. Les premières sont réduites à des appareils, vivent en vase clos, et se contentent de servir de courroies de transmission au pouvoir. Elles vivent de subventions que le gouvernement leur accorde. Toute velléité d'indépendance d'une association est réprimée. Faire barrage à toute tentative visant à la réduire au silence, est le combat de la LADDH, qui garde un rôle d'alerte et de critique.

En votre qualité de premier défenseur international des droits de l'Homme, nous vous demandons de faire pression sur le gouvernement Algérien, afin qu'il respecte la déclaration universelle des défenseurs des droits de l'Homme.

Droits de l'Homme et paix sont les deux aspects indissociables de la vie humaine. Toute tentative de sauver l'un au dépens de l'autre, assurer la paix au dépens de la justice, conduit à l'échec des deux.

Monsieur le secrétaire général des Nations Unies, les droits de l'Homme n'ont pas seulement à être proclamés ou garanties, il faut les vivre. L'exil pour ceux qui sont contraints de fuir leur pays pour sauvegarder leur liberté et souvent leur vie, est une nécessité. L'asile politique relève de la protection des droits de l'Homme. Le moment est venu de vider la prison de Guantanamo de tous les détenus. Le droit à l'humanité consiste à traiter toute personne humaine dans le respect de sa dignité. Le renvoi en Algérie des prisonniers algériens détenus à Guantanamo, serait un acte de justice.

Veuillez agréer Monsieur le secrétaire général des Nations Unies l'expression de notre haute considération.

Alger 19-03-05                                                                  
Maître Ali Yahia Abdennour.
Président de la LADDH


(Reuters 31.3 / Figaro 1.4 / El Watan 2.4 / Le Monde 3.4 / corr.) La Commission consultative de promotion et de protection des droits de l'Homme (CNCPPDH) a remis le 31 mars au président Bouteflika le rapport sur les "disparitions" que le président avait en septembre 2003 chargé une commission ad hoc (dite "mécanisme ad hoc de prise en charge de la question des disparus") de lui présenter.

Le rapport fait état de 6146 cas de "disparitions" survenues de 1992 à 1998 imputables à des "agents des institutions de l'Etat, des membres des forces de l'ordre", agissant "à titre individuel". "On ne peut pas dire (si les 6146 "disparus" du fait d'actes d'"agents de l'Etat") sont morts ou s'ils sont vivants", a déclaré le président de la CNCPPDH et de la commission ad hoc, Farouk Ksentini, qui a admis la responsabilité de l'Etat dans les "disparitions", mais a réfuté la culpabilité de l'Etat, qui "est responsable mais pas coupable", dès lors que les agents de l'Etat impliqués ont agi de leur propre initiative, et non sur les ordres de l'Etat. "Le premier disparu (de la "décennie noire") était bel et bien l'Etat", a déclaré Farouk Ksentini, à qui le président de la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme (LADDH), Ali Yahia Abdennour, a répondu vertement en l'accusant de n'être qu'un "chargé de mission" du pouvoir qui "pollue les droits de l'homme".

Le chiffre donné par le rapport Ksentini, de 6146 "disparitions" imputables à des "agents de l'Etat" se base sur les renseignements donnés par la Gendarmerie, qui centralise toutes les déclarations de "disparitions". Pour les associations de familles de "disparus", ce chiffre ne correspond qu'à une partie du total des "disparitions". La LADDH estime à 18'000 le nombre des "disparitions", et SOS-Disparus a constitué 7200 dossiers.

Quant aux "personnes enlevées par les terroristes", elles ont "toutes été assassinées", a affirmé Farouk Ksentini.

"Il faut réhabiliter la mémoire des disparus parce qu'il ne faut pas que, dans l'opinion publique, les disparus soient assimlés à des terroristes, comme cela a tendance à l'être", a ajouté Farouk Ksentini.

Les auteurs du rapport préconisent une indemnisation sous forme d'aide sociale, selon des modalités à définir par un texte de loi, à verser aux familles qui en ont accepté le principe. Selon Farouk Ksentini, 75 % des familles de "disparus" sont d'accord pour être indemnisées sous cete forme, les autres pouvant saisir les juridictions civiles pour obtenir des dommages et intérêts.

L'enquête de la commission ad hoc a été menée pendant une année. Sa conclusion est donc que des milliers de "disparitions" sont imputables à des "agents de l'Etat", mais pas à l'Etat lui-même, ni à ses institutions, Farouk Ksentini les innocentant l'un et les autres en considérant (dans un entretien au "Monde") qu'il est inconcevable "qu'un Etat qui a refusé de procéder à des exécutions légales se soit livré à des exécutions extra-judiciaires", et en affirmant que "l'Etat algérien n'a pas combattu le crime par le crime mais de façon loyale".

Farouk Ksentini s'est en outre déclaré favorable au projet d'amnistie générale que le président Bouteflika entend soumettre à référendum populaire, et a précisé qu'une telle amnistie devrait "évidemment" profiter également "aux agents de l'Etat qui ont commis des dépassements". Mais Farouk Ksentini a souligné "la difficulté d'identifier aujourd'hui les auteurs (des) disparitions", et recommandé "aux autorités de le faire". L'onclusion des responsables de "disparitions" dans une amnistie générale a suscité la colère de la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme (LADDH) et des associations de familles de "disparus", qui accusent le pouvoir de vouloir consacrer l'impunité des auteurs de violations des droits de l'Homme, et de vouloir "acheter le silence des familles" de "disparus" (il s'agit dans la plupart des cas de familles de condition modeste).

(Quotidien d'Oran 6.4 / El Watan 10.4 / Liberté 10.4) L'Association des familles de disparus s'est déclarée, dans une rencontre organisée par le Rassemblement Action Jeunesse, le 5 avril, acquise au principe de la réconciliation et d'une amnistie générale, mais à la condition que ces principes ne soient pas faussement concrétisés en occulant "les devoirs de vérité et de justice que l'Etat doit à sa population en général et aux victimes de cette dernière décennie". La plate-forme de revendications rendue publique par l'ANFD appuye une amnistie générale "de laquelle seront exclus les crimes de guerre et les crimes contre l'humanité dont nous sommes victimes". Les familles de disparus exigent la libération des "disparus" encore détenus secrètement, et la garantie du recouvrement de leurs droits sociaux, moraux et matériels. L'ANFD exige également le recensement de toutes les fosses et lieux contenant les restes des victimes retrouvées, quelles que soient ces victimes et quels que soient les auteurs de leur "disparition" et de leur assassinat.

Pour leur part, le Collectif des familles de disparus (CFDA) et SOS Disparus ont dénoncé "l'exonération de l'Etat et de sa culpabilité" auquel elles estiment que se livre le rapport de Farouk Ksentini sur les "disparitions", qui attribue les disparitions à des agents de l'Etat à titre individuel, sans culpabilité des institutions. Les deux associations estiment que la commission présidée par Farouk Ksentini tente d'acheter le silence des familles de disparus par un chantage aux indemnisations, alors que l'indemnisation est un droit de toutes les familles, et qu'il ne saurait être question de "troquer la justice et la vérité contre de l'argent". Les associations de familles de "disparus" se demandent comment "6146 agents de l'Etat ont pu échapper aux ordres de leurs supérieurs" (6146 étant le nombre de vas de "disparitions" recensés par la commission Ksentini, et attribués à des "agents de l'Etat", et exigent de savoir ce que sont devenues les 6146 personnes disparues. Enfin, le CFDA et SOD Disparus répondent par une fin de non-recevoir au projet présidentiel d'amnistie générale, qu'elles accusent de vouloir "effacer les crimes et ne laisser plus de place à la justice".

Le président de la Ligue algérienne pour la défense des droits de l'Homme, Ali Yahia Abdennour, estime, comme les associations de familles de disparus, que "l'Etat est coupable" des "disparitions", et que "des ordres ont été donnés d'en haut" dans le cadre d'un affrontement où "l'Etat a agi comme les terroristes", en infiltrant les organisations terroristes avec des hommes qui en ont été ensuite promus "au rang de responsables". Ali Yahia Abdennour réfute le chiffre de 6146 cas de "disparitions" énoncé par le rapport Ksentini : la LADDH a recensé, en 2000 déjà, 7204 cas de "disparitions", et estime à 18'000 le nombre des "disparus", la plupart des "disparus" recensés n'ayant pas été enlevés seuls mais en compagnie de plusieurs autres personnes.

S'agissant de l'amnistie générale, le président de la LADDH appelle le pouvoir à renoncer aux solutions "sécuritaires" se limitant à des appels à "déposer les armes", et à ouvrir le champ médiatique et à lever l'état d'urgence.

Un congrès national de la LADDH (le deuxième) devrait se tenir les 15 et 16 septembre. Une charte sur les droits de l'Homme devrait être proposée par la Ligue aux citoyens, pour "impulser une démarche de refondation des droits de l'Homme".


"DISPARITIONS" : Les chefs de l’armée et du DRS sont responsables et coupables

Communiqué d'Algeria-Watch sur les allégations de M. Farouk Ksentini relatives aux responsabilités de l’État algérien dans les disparitions forcées

Algeria-Watch

Paris, Berlin, 4  avril 2005

À l’occasion de la remise de son rapport sur la question des disparus, le 31 mars 2005, au président de la République algérienne, M. Abdelaziz Bouteflika, M. Farouk Ksentini, président de la Commission nationale consultative pour la protection et la promotion des droits de l’homme (CNCPPDH), a donné plusieurs interviews à la presse algérienne et étrangère, où il affirme que « ces disparitions ont bel et bien eu lieu et qu’elles sont le fait d’agents des institutions de l’État », mais que, pour autant, l’État est « responsable mais pas coupable ».

Dans une interview au quotidien français Le Monde (3-4 avril 2005), M. Ksentini formule en particulier des allégations parfaitement mensongères. Sans se prononcer sur le contenu du rapport lui-même, qui n’a pas été rendu public à ce jour, Algeria-Watch tient à rétablir la vérité des faits quant à deux de ces allégations inexactes, particulièrement lourdes de conséquences.

Sur la « panique » de l’État et la « rupture dans la chaîne du commandement »

En premier lieu, interrogé sur le rôle de l’État algérien dans les milliers de disparitions forcées survenues depuis 1992, M. Ksentini affirme : « La guerre menée par les terroristes a été si sauvage que le premier des disparus a été l’État lui-même. Personne ne commandait plus à personne. Cette rupture dans la chaîne du commandement et la panique expliquent en grande partie ce qui est advenu. »

Cette affirmation est totalement erronée. Non seulement il n’y a eu aucune « rupture dans la chaîne de commandement » dans la mise en œuvre de la « répression antiterroriste » par les « forces de sécurité », mais ce sont les responsables de ces dernières qui ont froidement planifié la politique des disparitions forcées. Même si bien des détails ne sont pas encore connus, les informations disponibles, émanant des enquêtes des organisations de défense des droits humains et des témoignages tant de nombreux policiers et militaires dissidents que de personnes ayant échappé à la disparition forcée1, permettent d’attester la réalité de cette politique de « terreur d’État clandestine », fondée tout particulièrement sur la pratique généralisée de la torture et des disparitions forcées.

Dès octobre 2003, une synthèse des informations alors disponibles a été établie par Algeria-Watch et le Dr Salah-Eddine Sidhoum, dans un rapport très précisément documenté, intitulé Algérie, la machine de mort2. S’agissant de la « chaîne de commandement » dans l’organisation des disparitions forcées, il ressort clairement de cette étude que :

Il ressort donc de ce rapport, et des études qui l’ont complété depuis3, que, contrairement à ce qu’affirme M. Ksentini, ce n’est aucunement la « panique » au sein de l’État face au « terrorisme » qui explique la pratique - qu’il reconnaît - des disparitions forcées par les forces de sécurité. Bien au contraire, même si leur mode de fonctionnement est resté secret tout au long de ces années (comme dans toutes les armées ayant recours aux méthodes illégales de la « guerre contre-insurrectionnelle »), les chaînes de commandements structurant la « machine de mort » ont été - et restent à ce jour - strictement contrôlées par les chefs de l’armée, et principalement par ceux du DRS, les généraux Mohamed Médiène et Smaïl Lamari, toujours en poste aujourd’hui.

Bon nombre d’officiers et de policiers relevant de ces chaînes de commandement et responsables de disparitions forcées sont connus et nommément cités, témoignages à l’appui, dans le rapport précité. Même si les plus « voyants » ont été récemment « démissionnés » (comme les généraux-major Mohamed Lamari et Brahim Fodhil Chérif, en août 2004) ou mis sur des voies de garage (comme le colonel - promu général - Bachir Tartag ou le colonel Mehenna Djebbar), la plupart sont toujours en activité à ce jour ; et tous pourraient très facilement être mis en cause si une authentique justice indépendante - qui n’existe pas en Algérie - décidait de donner suite aux plaintes des familles de victimes des disparitions forcées.

« 500 000 Algériens déférés devant les tribunaux pour terrorisme »

En second lieu, M. Ksentini entend minimiser l’ampleur des disparitions forcées en affirmant au Monde : « Au total, plus de 500 000 Algériens ont été déférés devant les tribunaux pour terrorisme. En rapprochant ce chiffre énorme de celui des disparus [6 146 cas, selon M. Ksentini], nous concluons que les choses ont été correctement menées dans l’ensemble. »

Cette seconde allégation - qui, dans la bouche d’un juriste, relève d’un cynisme criminel - est tout aussi aberrante que la première, pour plusieurs raisons :

Un scandaleux déni de la réalité

En affirmant, dans son interview au Monde, que « contrairement à ce que certaines ONG prétendent, l’État algérien n’a pas combattu le crime par le crime mais de façon loyale », M. Ksentini pratique donc un scandaleux déni de la réalité. Bien d’autres de ses allégations publiques, depuis des mois, relèvent de la même logique. Elles attestent que le projet d’« amnistie générale » que le président Bouteflika entend soumettre prochainement par référendum au peuple algérien, en s’appuyant principalement sur le rapport de la « commission Ksentini », n’est rien d’autre qu’une entreprise de blanchiment des crimes contre l’humanité organisés et perpétrés par les responsables des forces de sécurité (ainsi que par les groupes armés se réclamant de l’islam, dont il est désormais avéré que nombre d’entre eux - mais pas tous, du moins jusqu’en 1995 - étaient manipulés ou contrôlés par le DRS, pour discréditer l’opposition islamiste et masquer les crimes commandités par les chefs de l’armée5).

Algeria-Watch s’élève avec vigueur contre cette entreprise de falsification de la réalité et en appelle à tous ceux qui, en Algérie comme au niveau international, entendent que l’impératif de vérité et de justice soit enfin reconnu dans le drame algérien, afin que cet impératif ne soit pas étouffé par les manœuvres actuelles de ses principaux responsables et de leurs complices.

1. Voir, par exemple, le témoignage de M. Mohammed Sebbar recueilli en novembre 2003 par l’Observatoire des droits humains en Algérie (ODHA). Arrêté en décembre 2002, il a été détenu clandestinement pendant six mois au Centre du DRS de Ben-Aknoun, où il a été sauvagement torturé. Il rapporte notamment : « Une fois, au cours d’un interrogatoire, le colonel Hassan sortit son pistolet et me dit : “Si tu ne dis pas la vérité, je t’abats et tu rejoindras la liste des “disparus” et Dieu sait que nous avons porté beaucoup de gens sur cette liste” »


2. Texte complet sur le site d'Algeria-Watch
3. Voir en particulier les dix-neuf dossiers constitués par le Comité Justice pour l’Algérie pour la 38e session du Tribunal permanent des peuples sur les violations des droits humains en Algérie (Paris, novembre 2004), dont :


4. ONDH (Observatoire national des droits de l’homme), Rapport annuel 1994-1995, Alger, 1996, p. 59.

5. Voir en particulier le rapport rédigé pour le Comité Justice pour l’Algérie : Salima Mellah, Le mouvement islamiste algérien entre autonomie et manipulation, mai 2004

Communiqué du Collectif des familles de disparu(e)s en Algérie

Le Collectif des familles de disparu(e)s en Algérie prend acte avec regret des premières conclusions du rapport de la commission ad hoc remis par M. Ksentini au président Bouteflika le 31 mars 2005.

En effet, bien que le contenu exact de ce rapport n'ait pas pour encore été rendu public, il s'avère déjà que les premières déclarations de Farouk Ksentini sur celui-ci reflète ce que nos associations pressentaient depuis longtemps : la commission ad hoc exonère l'Etat de sa culpabilité en attribuant les disparitions à des agents " isolés " et préconise, une nouvelle fois, de clore ce dossier par l'attribution d'indemnisations qui dédouaneront l'Etat de toutes ses obligations. L'amnistie générale pourra ensuite être votée et le gouvernement algérien dormira sur ses deux oreilles.

Dans ses dernières déclarations, M. Ksentini clame à qui veut l'entendre que les proches des disparus auront le droit et doivent introduire des recours en justice si elles le souhaitent, alors que, dans le même temps, il se déclare favorable à une amnistie étendue aux agents de l'Etat. Faut-il rappeler à M. Ksentini que les familles de disparus n'ont jamais cessé de déposer des plaintes devant les tribunaux algériens, plaintes qui identifiaient souvent les personnes responsables de ces disparitions ? Encore aujourd'hui, beaucoup d'entre elles n'ont pas désespéré d'obtenir justice en renouvelant leurs plaintes. Toutefois, ces familles se heurtent toutes à l'impuissance de la Justice qui, dans le meilleur des cas, rend des ordonnances de non lieu, et dans le pire, classe les affaires. Nous comprenons maintenant pourquoi M. Ksentini invite sans crainte les victimes à déposer plainte, puisque d'ici quelques mois, les auteurs des disparitions forcées seront amnistiés !

Il est vrai que le président de la commission ad hoc n'en est pas à sa première contradiction et certaines d'entre elles sont édifiantes. L'amnistie générale, par définition, efface les crimes et ne laisse donc plus de place à la justice. Si le crime n'existe plus, il n'y a plus ni criminel, ni victime.

Autre fait d'importance, la commission ad hoc, au terme de ces 18 mois de labeur, indique avoir comptabilisé 6 146 cas de disparitions du fait d'agents de l'Etat. Nos associations, vivement intéressées par cette reconnaissance officielle, souhaiteraient savoir sur quelle base la commission ad hoc a retenu ces cas. En effet, eu égard au nombre total de dossiers disparitions forcées que nous avons en notre possession, il apparaît qu'au moins 2000 dossiers ont été, soit exclus, soit simplement négligés par la commission ad hoc.

De même, nous demandons à M. Ksentini d'expliquer aux familles des disparus comment 6146 agents de l'Etat ont pu échapper aux ordres de leurs supérieurs ? Si nous considérons le fait que chaque disparition signalée par les familles impliquait de 3 à 10 agents, et que, la plupart du temps, les témoins relate de vastes opérations de ratissage impliquant la participation de plusieurs services de l'Etat, cela impliquerait que des pans entiers de l'institution militaire, de la gendarmerie, de la police, de la garde communale ont pu agir en dehors de tout cadre hiérarchique. Or, Comment peut-on raisonnablement croire que les actes criminels de 20 000 à 60 000 agents ont pu échapper à l'Etat, en particulier quand il apparaît que dans de nombreux cas de disparition, une coordination entre différents services impliquait, sans le moindre doute possible, qu'une planification avait bien eu lieu ?

Enfin, s'agissant de la réparation des victimes, le rapport de la commission ad hoc revient sur la sempiternelle solution consistant à clore le dossier des disparitions par des indemnisations. A ce sujet, nos associations ont maintes fois rappelé que les indemnisations ne pouvaient opérer un règlement total et juste du dossier des disparitions. Il ne peut être question pour les familles de troquer la justice et la vérité contre de l'argent. L'indemnisation de toutes les victimes pour les souffrances endurées depuis 12 ans est un droit aussi légitime que le sont le droit à la justice et le droit à la vérité. C'est pourquoi nous nous interrogeons encore aujourd'hui sur la méthode employée par la commission ad hoc qui consistait à demander à chaque famille leur accord sur le principe d'une indemnisation. L'indemnisation doit être subordonnée à la reconnaissance par l'Etat d'un statut de victime aux familles de disparus, et , certainement pas être réservé à celles qu l'auraient acceptée.

La réhabilitation des victimes, également évoquée par M. Ksentini, est aussi un point important mais elle ne pourra être pleinement réalisée qu'avec les jugements rendus par une Justice indépendante et impartiale et non par un seul décret d'Etat.

Si la reconnaissance des disparitions du fait d'agents de l'Etat par la commission ad hoc est, pour nos associations, une première victoire, il n'en demeure pas moins que le rapport de la commission ad hoc ne fait que reprendre ce que les familles de disparus se sont évertués à faire entendre ces dernières années. C'est une autre vérité que les victimes attendent, une vérité qui nécessite un véritable courage politique afin que l'Etat reconnaisse enfin sa responsabilité et sa culpabilité

La commission ad hoc n'aura été qu'un mécanisme institutionnalisé pour mettre un couvercle sur le dossier des disparitions.


Communiqué commun de SOS Disparu(e)s et du Collectif des familles de disparu(e)s en Algérie

Ni indemnisations, ni amnistie, Toute la Vérité, Rien que la Vérité

Paris, Alger, le 6 avril 2005

Le Collectif des familles de disparu(e)s en Algérie et SOS disparu(e)s prennent acte avec regret des premières conclusions du rapport de la commission ad hoc remis par M. Ksentini au président Bouteflika le 31 mars 2005.

En effet, bien que le contenu exact de ce rapport n'ait pas pour encore été rendu public, il s'avère déjà que les premières déclarations de Farouk Ksentini sur celui-ci reflète ce que nos associations pressentaient depuis longtemps : la commission ad hoc exonère l'Etat de sa culpabilité en attribuant les disparitions à des agents « isolés » et préconise, une nouvelle fois, de clore ce dossier par l'attribution d'indemnisations qui dédouaneront l'Etat de toutes ses obligations. L'amnistie générale pourra ensuite être votée et le gouvernement algérien dormira sur ses deux oreilles.

Dans ses dernières déclarations, M. Ksentini clame à qui veut l'entendre que les proches des disparus auront le droit et doivent introduire des recours en justice si elles le souhaitent, alors que, dans le même temps, il se déclare favorable à une amnistie étendue aux agents de l'Etat. Faut-il rappeler à M. Ksentini que les familles de disparus n'ont jamais cessé de déposer des plaintes devant les tribunaux algériens, plaintes qui identifiaient souvent les personnes responsables de ces disparitions ? Encore aujourd'hui, beaucoup d'entre elles n'ont pas désespéré d'obtenir justice en renouvelant leurs plaintes. Toutefois, ces familles se heurtent toutes à l'impuissance de la Justice qui, dans le meilleur des cas, rend des ordonnances de non lieu, et dans le pire, classe les affaires. Nous comprenons maintenant pourquoi M. Ksentini invite sans crainte les victimes à déposer plainte, puisque d'ici quelques mois, les auteurs des disparitions forcées seront amnistiés !

Il est vrai que le président de la commission ad hoc n'en est pas à sa première contradiction et certaines dentre elles sont édifiantes. L'amnistie générale, par définition, efface les crimes et ne laisse donc plus de place à la justice. Si le crime n'existe plus, il n'y a plus ni criminel, ni victime.

Autre fait d'importance, la commission ad hoc, au terme de son mandat, indique avoir comptabilisé 6 146 cas de disparitions du fait d'agents de l'Etat. Pourtant, nous continuons à soutenir que nous avons constitué plus de 8 000 dossiers et que le nombre total est encore inconnu.

De même, nous demandons à M. Ksentini dexpliquer aux familles des disparus comment 6146 agents de l'Etat ont pu échapper aux ordres de leurs supérieurs ? En considérant que les disparitions étaient la plupart du temps le résultat d'opérations de ratissage opérées par la complicité des 3 corps constitués de l'Etat - gendarmerie, police, armée - comment peut-on raisonnablement croire que les actes criminels de tous ces agents ont pu échapper à l'Etat ? De plus, M. Ksentini a-t-il demandé aux agents impliqués où étaient les 6 146 personnes disparues, car c'est avant tout cette vérité qui intéresse les familles.

Enfin, s'agissant de la réparation pour les victimes, le rapport de la commission ad hoc revient sur la sempiternelle solution consistant à clore le dossier des disparitions par des indemnisations. Nos associations ont maintes fois rappelé que les indemnisations ne pouvaient opérer un règlement total et juste du dossier des disparitions, il ne peut être question pour les familles de troquer la justice et la vérité contre de l'argent. L'indemnisation de toutes les familles pour les souffrances endurées est un droit aussi naturel que le sont le droit à la justice et le droit à la vérité. Pourquoi alors avancer cette question interminablement puisque qu'il s'agit là d'un droit légitime pour toutes les familles ?

Si la reconnaissance des disparitions du fait dagents de l'Etat par la commission ad hoc est, pour nos associations, une première victoire, il n'en demeure pas moins que le rapport de la commission ad hoc ne fait que reprendre ce que les familles de disparus se sont évertuées à faire entendre toutes ces dernières années. C'est une autre vérité que les victimes attendent, une vérité qui nécessite un véritable courage politique pour que l'Etat reconnaisse enfin sa responsabilité et sa culpabilité.

Ni les indemnisations, ni l'amnistie générale, ni aucune tentative visant à étouffer le dossier des disparus n'arrêterons les familles dans leur quête de vérité et de justice.


ALGÉRIE : LA LOI D'AMNISTIE RISQUE DE LÉGALISER L'IMPUNITÉ POUR LES AUTEURS DE CRIMES CONTRE L'HUMANITÉ

DÉCLARATION CONJOINTE d'AMNESTY INTERNATIONAL, HUMAN RIGHTS WATCH, du CENTRE INTERNATIONAL POUR LA JUSTICE TRANSITIONNELLE, de la COMMISSION INTERNATIONALE DE JURISTES et de la FÉDÉRATION INTERNATIONALE DES LIGUES DES DROITS DE L'HOMME

Jeudi 14 avril 2005

La proposition, par le président algérien Abdelaziz Bouteflika, d’une amnistie générale pour les auteurs d’atteintes aux droits humains commises lors du conflit interne qui a ravagé le pays, pourrait priver définitivement les victimes et leurs familles de leur droit à la vérité, à la justice et à des réparations, ont averti plusieurs organisations internationales de défense des droits humains ce jeudi 14 avril.

Parmi elles figurent Amnesty International, Human Rights Watch, le Centre International pour la Justice Transitionnelle, la Commission internationale de juristes et la Fédération internationale des Ligues des droits de l’homme

Le président Abdelaziz Bouteflika propose une loi d’amnistie allant dans le sens d’une «réconciliation nationale». Il a récemment déclaré qu’il envisageait un référendum sur la loi «dès que les conditions nécessaires seront satisfaites».

Jusqu’à présent, on sait peu de choses sur les termes de l’amnistie proposée. Aucun projet de loi n’a été rendu public, mais certaines déclarations officielles indiquent que la loi exemptera de poursuites les membres des groupes armés, des milices armées par l'État et des forces de sécurité pour les délits commis durant le conflit, y compris les atteintes graves aux droits humains.

Cette proposition intervient après des années d’un manque de détermination certain des autorités algériennes pour enquêter sur les graves atteintes aux droits humains perpétrées durant le conflit interne qui a débuté en 1992. Au vu de la gravité et de l’ampleur des exactions commises, dont certaines constituent de graves violations des droits humains, l’échec est d’autant plus grave.

Au cours de récentes déclarations publiques, le président Abdelaziz Bouteflika a admis que 200000 personnes avaient été tuées durant le conflit. Des dizaines de milliers d’entre elles étaient des civils, hommes, femmes et enfants, qui sont morts au cours d’attaques violentes. Des milliers de personnes ont été torturées en détention. Des milliers d’autres ont «disparu» après leur arrestation par les forces de sécurité ou ont été enlevées par des groupes armés et exécutés sommairement par eux.

Dans la grande majorité des cas, les autorités n’ont rien fait pour éclaircir les circonstances des crimes et traduire leurs auteurs présumés en justice, en dépit des efforts incessants des victimes et de leurs familles pour chercher à établir la vérité et pour fournir des informations aux autorités judiciaires lorsqu’un dossier de plainte avait été constitué.

Dans ce contexte, une amnistie générale signifierait que l’héritage du passé resterait à tout jamais enfoui, ce qui pourrait affaiblir durablement toute perspective d’un avenir pleinement respectueux des droits humains. En empêchant la vérité sur les crimes du passé d’éclater devant des tribunaux algériens, la loi d’amnistie stopperait toute chance de voir les notions de justice et de responsabilisation devenir des éléments de la transition vers la paix.

L’amnistie entérinerait également l’absence d’enquêtes sur des milliers de «disparitions». À la fin du mois de mars, une commission en charge des «disparitions», nommée par le gouvernement et communément désignée comme mécanisme ad hoc, a soumis un rapport et des recommandations au président Abdelaziz Bouteflika. Ce rapport n’a pas été rendu public. Selon les médias, il établirait que 6146 personnes ont «disparu» aux mains des forces de sécurité entre 1992 et 1998, chiffre établi à partir des plaintes déposées par les familles ; la principale recommandation du rapport concernerait le paiement d’indemnités aux familles. Jusqu’à présent, aucun détail n’a été donné sur la façon dont ces indemnités pourraient être allouées dans la pratique, ni quelles ressources financières et autres l'État pourrait mettre à disposition.

La reconnaissance officielle de milliers de «disparitions» perpétrées par des agents de l'État est un progrès significatif. Toutefois, la commission n’avait pas pour mandat de chercher à savoir ce qu’il était advenu des «disparus», ou d’identifier les responsables. Sans fournir aucune preuve qui soit basée sur des faits, le chef de la commission, Farouk Ksentini, a déclaré lors d’interviews accordées aux médias, que les «disparitions» avaient été des actes isolés commis par des agents de l'État à titre individuel, tentant ainsi d’exonérer de toute responsabilité pénale les supérieurs des agents et de décharger l'État de son devoir d’enquête et de poursuites en justice des responsables présumés. Farouk Ksentini a également souligné que les agents de l'État devraient bénéficier de la mesure d’amnistie à venir.

Des organisations de familles de «disparus» ont vu dans ces annonces un déni définitif de vérité et de justice. Les familles n’ont ménagé aucun effort pour retrouver la trace de leurs proches, parfois plus de dix années durant, dans une inquiétude constante, sans savoir si ceux qu’elles recherchaient étaient vivants ou morts. Leurs plaintes devant les tribunaux algériens sont restées dans les tiroirs ou ont été classées sans suite, les autorités judiciaires ne pouvant ou ne voulant pas enquêter véritablement. Jusqu’à présent, à la connaissance des organisations signataires, pas une famille de «disparus» n’a obtenu d’information vérifiable concernant le sort d’un proche recherché.

Les organisations signataires reconnaissent que c’est aux Algériens eux-mêmes qu’il revient de décider de la façon dont ils géreront l’héritage de leur passé, à l’occasion d’un débat national dans lequel les libertés d’expression, de réunion et d’association seront pleinement respectées. Toutefois, les principes fondamentaux de vérité, justice et réparations ne peuvent faire l’objet de compromis. Les organisations signataires s’opposent aux amnisties, aux grâces et autres mesures du même type ayant pour effet d’empêcher que n’éclate la vérité, d’empêcher que soit rendu un verdict d’innocence ou de culpabilité et d’empêcher que ne soient versées des réparations aux victimes et aux familles.

Concernant la perspective d’un référendum sur la loi d’amnistie, les signataires rappellent au gouvernement algérien qu’il ne peut se soustraire à ses obligations internationales en adoptant à l’échelon national des lois contraires à ces obligations, que ces lois résultent d’un vote au parlement ou d’un référendum. Le respect et la protection des droits fondamentaux des personnes ne peuvent faire l’objet d’un vote à la majorité.

Les amnisties, les grâces et autres mesures nationales similaires aboutissant à l’impunité pour les auteurs de crimes contre l’humanité et autres graves atteintes aux droits humains, actes de torture, exécutions extrajudiciaires, « disparitions », bafouent les principes fondamentaux du droit international. Un certain nombre d’autorités, telles que le secrétaire général des Nations unies, des organes des Nations unies ainsi que des organes régionaux faisant autorité et des tribunaux internationaux ont établi qu’aucune amnistie ou mesure similaire ne devrait accorder l’impunité aux auteurs d’atteintes graves aux droits humains.

Les organisations signataires renouvellent leur appel au gouvernement algérien pour qu’il fasse respecter le droit de toutes les victimes d’atteintes graves aux droits humains à la vérité, à la justice et à des réparations. Les organisations considèrent ces garanties comme essentielles à tout processus de réconciliation. Elles sont également essentielles, avec d’autres mesures, à la construction de fondations solides pour la protection future des droits humains.

Complément d’information

Le président Bouteflika a, pour la première fois, évoqué publiquement la perspective d’une amnistie générale en novembre 2004. Cette proposition s’inscrit dans une série de mesures prises précédemment avec l’intention affichée de favoriser la réconciliation nationale. En 1999, la loi dite loi sur la concorde civile accordait la clémence aux membres de groupes armés qui renonçaient à la violence. Ceux qui n’avaient ni tué, ni violé, ni placé de bombes dans des lieux publics étaient exemptés de toutes poursuites, ceux qui avaient commis de tels actes bénéficiaient de peines réduites.

On dispose de peu d’informations sur l’application de cette loi et sur les poursuites judiciaires engagées contre des membres de groupes armés ayant perpétré de graves atteintes aux droits humains. D’après les informations transmises par les militants locaux, les victimes et les familles, aucune enquête judiciaire n’a été menée dans la plupart des cas et des milliers de membres de groupes armés ont été de facto exemptés de toutes poursuites, sans que l’on ait déterminé s’ils avaient ou non commis de graves atteintes aux droits humains.

Un décret présidentiel en janvier 2000 a accordé une amnistie à des centaines de membres de certains groupes armés ayant déclaré des cessez-le-feu en 1997, sans qu’ait été prise en compte leur éventuelle participation à des atteintes graves aux droits humains.


(ODHA 5.4 / Liberté 9.4) Kamel Eddine Fekhar, secrétaire fédéral du Front des forces socialistes de Ghardaïa et militant de la Ligue algérienne pour la défense des droits de l'Homme, a été libéré le 5 avril 2005, après cinq mois de détention. Il avait été condamné pour "attroupement illicite" et "obstruction de la voie publique", et pour sa participation à des manifestations qui, en octobre 2004, avaient éclaté dans le M'zab, et dégénéré en émeutes. Cette libération a été saluée à Ghardaïa par "une véritable liesse populaire", selon le quotidien "Liberté" : des centaines de personnes et des dizaines de véhicules ont accompagné le militant du FFS et de la LADDH de la prison à un meeting sur le place publique, meetin auquel ont participé plusieurs anciens prisonniers politiques, aux côtés du secrétaire national du FFS aux droits de l'Homme.

Dans un entretien à "Liberté", Kamel Eddine Fekhar décrit ses conditions de détention dans une prison surpeuplée, à Ghardaïa : 22 prisonniers dans une cellule de 20 mètres carrés, mauvaise nourriture, censure de la presse : "on ne traite pas les prisonniers de façon humaine" en Algérie, résume Kamel Eddine Fekhar.

(Liberté 5.4) Trois magistrats ont été placés sous mandat de dépôt pour corruption, dix autres sous contrôle judiciaire (en liberté provisoire) également pour corruption , une vingtaine suspendus de leurs fonctions pour négligence, un directeur de prison s'est retrouvé lui-même en prison pour trafic de stupéfiants, annonce "Liberté". Il s'agit de sanctions décidées en février par le Conseil supérieur de la magistrature, qui a également radié huit magistrats (après que dix autres aient été radiés en 2004). Toutes les affaires concernées remontent à 2004 et 2005. Une quarantaine de magistrats font l'objet d'enquêtes administratives.Le directeur du Conseil supérieur de la magistrature a regretté l'insuffisance des effectifs dont il dispose pour que le Conseil exerce sa mission. 8000 magistrats exercent en Algérie, et le pays compte officiellement 127 prisons.

(Jeune Indépendant, El Watan, Liberté 13.5) Le président de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'Homme (CNCPPDH), et du "mécanisme ad hoc" créé par le président Bouteflika sur la question des "disparus", Farouk Ksentini, est revenu, lors du forum du quotidien en arabe "El Youm", sur le rapport qu'il a adressé fin mars au président Bouteflika sur la question des "disparus", rapport fondé sur 6146 cas de "disparitions".

Farouk ksentini estime que la justice (magistrats instructeurs, procureurs) n'a pas joué son rôle, et qu'elle a notamment commis la faute d'entamer des procédures judiciaires contre des personnes gardées à vue pendant des mois alors que la garde à vue ne doit pas dépasser (pour des affaires de "terrorisme") douze jours. Le "laxisme" des magistrats a aggravé une situation de "chaos", estime Farouk Ksentini, qui a cependant quelque peu minimisé ses propres accusations contre la justice en mettant en parallèle les 6146 cas de "disparitions" recensés par sa commission avec les 500'000 affaires liées au terrorisme traitées par la justice.

Le président de la CNCPPDH a en outre réaffirmé qu'il était "difficile" d'identifier les agents de l'Etat responsables de "disparitions", en l'absence d'archives et d'aveux; pour lui, les témoignages des familles des "disparus" restent "insuffisants" pour démontrer la culpabilité des agents de l'Etat, et il est "malhonnête" d'accuser sans preuve et de "jeter l'anathème sur les institutions de la République".

Le président de la CNCPPDH a en outre réaffirmé qu'il était "difficile" d'identifier les agents de l'Etat responsables de "disparitions", en l'absence d'archives et d'aveux; pour lui, les témoignages des familles des "disparus" restent "insuffisants" pour démontrer la culpabilité des agents de l'Etat, et il est "malhonnête" d'accuser sans preuve et de "jeter l'anathème sur les institutions de la République".

Farouk Ksentini s'est également, implicitement, prononcé pour le maitien de l'état d'urgence, puisque le terrorisme fait toujours des victimes, tout en reconnaissant que cette disposition avait favorisé les violations des droits humains de la part d'agents de l'Etat ou d'institutions de l'Etat. Il s'est également prononcé en faveur de l'amnistie générale, en tant que couronnement du processus de réconciliation nationale, en affirmant que cette amnistie "laissera intacts les droits des victimes du terrorisme" (tout en affectant "les aspects pénaux" des actes commis)

(ODHA 17.4) Un rassemblement de mères de "disparus" devant le ministère de la Justice à Alger a été brutalement dispersé le 17 avril par la police, qui a bouclé le quartier, interdit son accès et attaqué les manifestantes, souvent âgées, et dont plusieurs ont été matraquées et ont reçu des coups de pied, certaines jetées à terre et tabassées.

Pour la vérité, Toute la Vérité Non à l'amnistie et à la répression


Communiqué ANFD / SOS Disparu(e)s

Alger, 17 avril 2005

A l'appel des deux associations des familles de personnes disparues enlevées par les corps constitués de lEtat, SOS disparu(e)s et lAssociation Nationale des Familles de Disparu(e)s (ANFD), plus de 300 parents de disparu(e)s se sont rassemblés le 17 avril dans la matinée devant le ministère de la Justice à Alger. Les familles protestaient contre les déclarations de M. Farouk Ksentini qui les a invité à saisir la justice pour obtenir la vérité.

Par ce rassemblement les familles de disparu(e)s voulaient rappeler aux plus hautes instances de ce pays qu'elles n'ont jamais cessé de s'adresser aux tribunaux depuis l'enlèvement de leurs proches disparus, mais qu'elles se sont toujours heurtées à l'impuissance des magistrats.

Une délégation représentant les familles devait être reçue par les services du ministère. Après une heure d'attente, le chef de la sécurité du ministère nous a indiqué que les responsables avaient changé d'avis et que la délégation ne serait pas reçue.

Les familles ont été par la suite malmenées, tabassées, insultées, « Embarquez-moi ces chiennes, vos enfants sont tous des terroristes ! » criait la police de Yazid Zerhouni, ministre de l'intérieur.

Les deux représentantes des associations SOS disparus et ANFD, Mesdames Fatima Yous et Lila Iril, ont été particulièrement visées et à plusieurs reprises elles ont failli être emmenées par la police.

Ainsi, en plus du déni de leur droit de connaître la vérité sur le sort de leurs disparus, pour certaines depuis plus de 12 ans, le pouvoir confisque toujours aux familles le droit de manifester devant une institution officielle, dès lors que les familles sortent du cadre habituel.

Nous appelons l'opinion publique nationale et internationale à condamner de telles pratiques qui témoignent encore une fois de l'absence d'une réelle volonté politique de mettre un terme au drame que vivent des milliers d'Algériens épris de vérité et de justice


(Le Soir 27.4) Le président de la Commission nationale consultative de protection et de promotion des droits de l'Homme (CNCPPDH), Farouk Ksentini, a plaidé à Bruxelles, lors d'un débat organisé par le Parlement européen, pour la "responsabilité" sans "culpabilité" de l'Etat algérien dans les "disparitions", reprenant ainsi la thèse centrale du rapport qu'il a remis au président Bouteflika sur la question : "Les disparitions sont le fait d'agents de l'Etat incontrôlés qui ont commis des dépassements", ce qui "n'exonère pas l'Etat de sa responsabilité", même s'il a été "le premier disparu" de la décennie noire. Cela étant, "il ne faut pas surculpabiliser l'Etat".

Le président de la CNCPPDH a attribué aux "groupes terroristes" les massacres de population civile.

Farouk Ksentini a annoncé que la Fédération internationale des ligues des droits de l'Homme (FIDH) et Amnesty International seront autorisées à "bientôt venir en Algérie".

Interrogé par "Le Soir d'Algérie", le président de la CNCPPDH a estimé que l'incarcération de Mohammed Benchicou était "contre-productive".


LE CARNAGE DE LA PRISON DE BERROUAGHIA

Observatoire des droits humains en Algérie (ODHA)

2 avril 2005

Les prisons algériennes connaîtront durant cette guerre une surpopulation carcérale jamais égalée depuis l’indépendance. A certains moments près de 40 000 prisonniers politiques séjournent dans ces véritables bagnes de la déchéance humaine à l’image de Serkadji, Tazoult et Berrouaghia.

Le carnage de Berrouaghia (novembre 1994) avec ses dizaines de morts fera partie de la série de tueries programmées dans les prisons par les « services » dans le cadre de la politique d’éradication pour éliminer un certain nombre de prisonniers politiques gênants. Tout comme la tuerie de Serkadji en janvier 1995, il semblerait que le stratagème était simple. Il suffisait pour les commanditaires d’introduire des provocateurs, généralement transférés d’autres prisons, pour fomenter un semblant de mutinerie, contre le gré de la majeure partie des prisonniers. Et la machine répressive dans sa forme la plus abjecte était mise en branle et le massacre fut déclenché.

Quelques mois avant ce carnage, eu lieu « l’évasion » de la prison de Tazoult au mois de mars, en plein Ramadhan de l’année 1994. Plus d’un millier de détenus « s’évaporait » dans la nature avec une facilité déconcertante d’une des prisons les mieux gardées du pays. Une grande partie de ces évadés sera massacrée dans les maquis environnants de Batna, lors d’opérations de ratissages de grande envergure avec participation de l’aviation. D’autres seront repris. Seuls certains « évadés » réussiront à rejoindre les maquis et à les « encadrer » dans le cadre de missions bien spéciales, celles de reprendre en main les maquis d'opposants armés au pouvoir algérien.

Durant le 21 février 1995 aura lieu la « mutinerie » de la prison de Serkadji avec l’effroyable massacre de plus d’une centaine de détenus sans défense. S’étant déroulé en plein cœur de la capitale, le carnage ne pouvait être étouffé. Les réactions tant nationales qu’internationales seront à la hauteur du drame. Un travail d’enquête indépendant a pu être réalisé et publié par des avocats et des militants des droits de l’homme avec la participation active des familles de victimes. Ce qui n’a pas été le cas du massacre de Berrouaghia, qui de par son isolement et son éloignement de la capitale, est pratiquement passé inaperçu malgré l’effroyable boucherie qui s’y est déroulée. A ce jour, aucun travail n’a été malheureusement fait à ce sujet. Officiellement, on annoncera huit morts. Les survivants parlent d’une cinquantaine de morts (quarante neuf lors du carnage proprement dit et un prisonnier décédé quelques jours après suite à ses blessures).

(...) Nous en appelons à nos concitoyens, survivants de ce drame d’apporter leur contribution, en nous adressant leurs témoignages et les noms des prisonniers tués pour pouvoir constituer la liste des victimes la plus proche de la réalité.


(Liberté 12.4 / AP 19.4) Une opération de destruction publique de ses stocks de mines antipersonnel par l'armée algérienne s'est déroulée les 18 et 19 avril et a permis, aavec des opérations similaires conduites fin mars et début avril, notamment dans le région de Hassi Bahbah (w. Djelfa), la destruction de plus de 93'000 mines (y compris leurs composants, dispositifs de mise à feu et corps métalliques), soit 62 % du stock. Précédemment, des opérations de déminage des zones frontalières encore infestées par des mines françaises déposées le long des anciennes lignes "Challe" et Maurice" pendant la guerre d'indépendance, ont permis la destruction de plus de 68'000 mines. depuis l'indépendance, plus de huit millions de mines antipersonnel françaises (ou autres) ont été éliminées par l'armée algérienne, mais il en resterait encore trois millions, toujours dangereuses, et tuant ou blessant régulièrement.


LES LIBERTÉS SYNDICALES ET LA LIBERTÉ D'EXPRESSION SONT EN DANGER

Ligue Algérienne pour la Défense des Droits de l’Homme

DECLARATION

Le 1° mai, journée internationale du travail, et le 3 mai, journée mondiale de la presse, sont l’occasion de faire le bilan des libertés dans notre pays et de rappeler que la situation en matière de Droits de l’Homme reste alarmante, en particulier par les violations massives, flagrantes, systématiques de la liberté d’expression et de la liberté syndicale.

Les atteintes aux droits et aux libertés se sont brutalement aggravées, et c’est à un véritable crépuscule que l’on semble à bien des égards assister. La brutalité de la répression qui frappe les journalistes et les représentants des syndicats autonomes a provoqué chez de nombreux Algériens un sentiment de rejet des mœurs politiques du pouvoir inspirées par des concepts de revanche, de punition et de vengeance, et fait naître un réflexe naturel de solidarité.

Une répression aveugle est en cours à l’encontre des dirigeants des syndicats autonomes, notamment ceux de l’enseignement, de la santé et du SNAPAP. Le pluralisme syndical est pour le moment écarté par un terrorisme administratif qui refuse le dossier d’agrément à plus de 53 syndicats autonomes. C’est un droit prévu par les lois du pays et les conventions internationales ratifiées par l’Algérie. Il finira par s’imposer. Un nouveau syndicalisme renouvelé et renforcé s’affirmera au delà de la conjoncture actuelle comme instrument de l’émancipation des travailleurs par eux mêmes.

Le travail définit la condition humaine, notamment le droit à la liberté syndicale dans ses deux dimensions : le pluralisme syndical et l’adhésion libre, sans que des réunions syndicales et autres soient prohibées et les manifestations brutalement réprimées.

La loi ne définit pas la durée d’une grève qui peut être limitée ou illimitée, selon la décision de l’assemblée générale des travailleurs. Les tribunaux sont systématiquement saisis par les pouvoirs publics pour statuer en référé sur la légalité du dépôt de préavis de grève. Bien plus le Conseil du Gouvernement du 25.10.2004 a décidé de la suspension de la grève des médecins spécialistes de la santé publique. Il a été juge et partie et a joué le rôle d’un conseil de discipline.

L’UGTA a l’exclusivité de la représentation des travailleurs alors qu’elle n’est pas seule sur le terrain. Elle est devenue une courroie de transmission du pouvoir, son organisation de masse dont la mission principale est de désamorcer la crise sociale. Elle est partie intégrante du système politique et ne peut évoluer en dehors de lui. Elle a tourné le dos à l’action syndicale, a abandonné le syndicalisme de protestation et de contestation pour un syndicalisme de concertation et de soumission à la politique du pouvoir. Ses prises de position l’ont éloigné du champ de la revendication syndicale. Elle rallie chaque fois inconditionnellement le nouveau maître du pays. La réussite de chacun des membres de la direction syndicale est le seul succès social visible et vérifiable. Le fonctionnement de cette centrale syndical est assuré par le Trésor Public à coup de milliards.

L’actualité politique nous rappelle que la liberté d’expression, prévue par l’article 19 de Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, ne se donne pas mais se gagne et se mérite, qu’il faut toujours se mobiliser pour la faire respecter, la consolider, l’élargir. La liberté d’expression est un droit élémentaire de la vie sociale et culturelle, de la création scientifique et artistique. Elle est une liberté précieuse, le fondement de toutes les libertés. La presse est le plus court chemin pour diffuser des idées et des opinions dans le corps social. Elle joue un rôle d’information, de contestation, de pédagogie, de pédagogie publique. Certains journaux reconnaissent qu’ils pratiquent l’autocensure qui fait qu’on obéit sans recevoir d’ordre, non pas pour des raisons que leurs rédactions jugent bonnes mais par crainte de poursuites judiciaires. Le respect des règles de l’éthique et de la déontologie qui sont nécessaires à l’exercice du métier de journalistes doivent émaner de la profession et non d’un code de l’information répressif.

La première urgence est de mettre fin à la répression qui frappe les journalistes et qui atteint avec les dernières condamnations en série l’inacceptable qui ne peut être accepté, l’intolérable qui ne peut être toléré. La liberté n’est jamais solitaire, on fait cercle autour d’elle. La société n’est pas désossée, affaiblie, flétrie par cette répression, mais nerveuse. Des juristes des journalistes, des militants des Droits de l’Homme, des partis politiques, résistent, revendiquent et crient à l’injustice. Il est bon que des avocats se lèvent aux bancs de la défense et disent halte à l’injustice. Les procès contre les journalistes ont mis en relief le rôle de la justice perçue par l’opinion publique comme soumise, inféodée au pouvoir exécutif, son ombre, son bras séculier. Il faut que ses jugements et arrêts soient des actes de justice et non des opérations de justice. Le pouvoir veut réduire la presse au silence par des procès. Il exclut qu’on lui oppose quelque droit que ce soit, même son propre droit.

La LADDH élève une protestation forte et solennelle contre les procès faits aux journalistes. Elle garde un rôle d’alerte et de critique. Elle a choisi de libérer la parole et l’écrit pour que l’Algérie ne se réduise pas à la pensée unique dans un mouvement unique. L’Algérie n’a pas vocation à être celle de la pensée unique. La presse n’est plus en liberté surveillée mais en prison.

La LADDH est solidaire des journalistes condamnés et emprisonnés, Mohamed Benchicou en tête, et demande leur libération.. Elle s’est donné une triple mission : défendre la liberté d’expression qui débouche sur le droit à l’information et le droit à la liberté de la presse, l’exercice la profession de journaliste et les journalistes qui ont subi l’injustice et l’humiliation, et dont les droits sont bafoués avec une régularité et un machiavélisme peu ordinaires.

Alger le 1° mai 2005
Le président, Ali Yahia Abdennour


ALGÉRIE : MISSION D'AMNESTY INTERNATIONAL


Amnesty International

Index AI : MDE 28/006/2005
ÉFAI
Jeudi 5 mai 2005

Une délégation d'Amnesty International se rendra en Algérie du 6 au 28 mai. Deux des membres de la délégation arriveront le 6 mai. Ils ont pour projet, durant les deux premières semaines de la mission, de rencontrer des organisations non-gouvernementales, des militants des droits humains, des avocats et des familles de victimes et de mener des recherches sur les principaux sujets de préoccupation d'Amnesty International en Algérie, notamment la violence contre les femmes.

Un troisième et un quatrième délégué arriveront les 18 et 19 mai pour prendre part aux rencontres organisées avec les autorités algériennes et pour de nouvelles discussions avec des organisations de défense des droits humains. Une conférence de presse aura lieu à la fin de la mission, à la fois pour le lancement du rapport annuel d'Amnesty International et pour rendre les conclusions de la mission. Les invitations à y assister seront envoyées dès confirmation de la date et du lieu de la conférence. L’après-midi du 25 mai est envisagée.


(Liberté, Quotidien d'Oran 8.5 / L'Expression, Liberté 9.5 / L'Expression 10.5) Après une absence de cinq ans, pendant lesquelles les autorités algériennes n'ont jamais accepté de lui accorder les visas et la liberté d'action nécessaires, Amnesty International a envoyé en Algérie une délégation, dont les premiers membres sont arrivés le 6 mai à Alger.

La délégation d'Amnesty International a pris contact avec les associations de familles de victimes du terrorisme et les associations de familles des "disparus", notamment SOS Disparus, le 7 mai. Des réunions approfondies sont prévues entre les représentants de l'ONG et ceux des associations. La délégation d'AI a également rencontré la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme (LADDH), le 8 mai. Les représentants d'AI rencontreront des associations de la société civile, des partis politiques et des autorités. Le 11 mai, il est prévu qu'ils se rendent à Relizane, où ils rencontreront les familles de "disparus", les milices locales ("patriotes"), les familles de victimes du terrorisme et l'association des prisonniers de droit commun. Selon "Liberté", des représentants des "repentis" (anciens membres des groupes armés, ayant déposé les armes) auraient également exprimé leur souhait de rencontrer des représentants d'AI.

L'association de familles de victimes du terrorisme Somoud a salué l'arrivée de la délégation d'Amnesty, en constatant que si les autorités n'écoutent pas les associations algériennes, lorsque les ONG internationales "interpellent les autorités algériennes, elles leur répondent", et que la pression internationale sur le dossier des "disparus" a été efficace puisqu'un comité ad hoc a été créé sur la question. Selon Somoud, près de 10'000 personnes ont "disparu" après avoir été enlevées par des groupes armés.

Une conférence de presse est prévue par Amnesty, le 25 mai, pour rendre publiques les premières conclusions de son enquête, qui va porter sur l'ensemble des questions liées aux droits humains en Algérie : l'état d'urgence, la liberté de la presse, les conditions de détention, les droits des femmes, les libertés collectives et syndicales, les disparitions, le terrorisme, l'amnistie générale. Sur ce dernier point, Amnesty International a déjà dénoncé dans plusieurs déclarations le risque d'une amnistie consacrant l'impunité, à la fois des terroristes et de l'Etat. Le 14 avril, conjointement avec la Fédération internationale des droits de l'Homme (FIDH) et Human Righty Watch (HRW), AI avait mis en garde les autorités algériennes contre le risque d'une amnistie consacrant l'impunité et privant les victimes, celles du terrorisme comme celles des violations des droits humains commises par des agents de l'Etat, de leur droit à la vérité, à la justice et à des réparations.

L'arrivée d'une délégation d'Amnesty International en Algérie après cinq ans d'absence forcée a réveillé les anciennes oppositions à l'action de l'ONG, et plusieurs personnalités, dont le président de la Commission nationale consultative pour la protection et la promotion des droits de l'Homme, Farouk Ksentini, qui a repris en l'ocurrence le discours de son prédécesseur Rezzag Bara (président de ce qui était à l'époque l'Observatoire national des droits de l'Homme, ONDH) sur l'"ingérence dans les affaires intérieures" de l'Algérie. "Cette ONG prétend gouverner le monde", a accusé Farouk Ksentini, qui a ajouté que "nous avons accepté la venue de cette ONG (...) pour lui dire en face qu'elle s'est lourdement trompée en ce qui concerne l'Algérie, qui est une maison de verre". L'ancienne ministre Saïda Benhabilès a tenu le même discours, et dénoncé "l'attitude des deux poids deux mesures" d'Amnesty dans son traitement de la question des droits de l'Homme, et l'avocat Miloud Brahimi a accusé Amnesty d'avoir prolongé la crise algérienne en prenant des "positions regrettables et indamissibles", et en remettant en cause la démarche politique du président Bouteflika. "Nous avons un problème avec la gauche française" et Amnesty, comme "bien d'autres" ONG, est liée à cette gauche, a ajouté Miloud Brahimi -qui n'a cependant pas repris le discours de dénonciation de l'"ingérence" dans les affaires intérieures de l'Algérie, mais a au contraire affirmé que les droits humains étant universels, il ne saurait être question de dénoncer une "ingérence" de la part de celles et ceux qui les défendent.

Après Amnesty, ce devrait être au tour d'Human Rights Watch d'envoyer une délégation en Algérie.

(Nouvelle République 10.5) La section de Ghardaïa de la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme (LADDH) a rendu public le 9 mai un communiqué par lequel elle demande l'installation d'une commission d'enquête "nationale et indépendante", dotée de larges prérogatives, sur la situation dans la wilaya et les événements survenus dans la région. La LADDH dénonce des "intentions de pousser la région vers l'inconnu" et de "ressusciter les luttes tribales" tout en réprimant les "doléances sociales pacifiques et légitimes avec une violence excessive", et en se livrant à des provocations.

(El Watan 10.5 / AP 13.5 / AP, Liberté 15.5 / El Watan 17.5) Amnesty International poursuit sa visite en Algérie, ses deux premiers délégués, Philip Luther et Uta Simon ayant des discussions avec des représentants des autorités et d'associations diverses, en attendant l'arrivée, en principe les 18 et 19 mai, du chef de mission, Philippe Hensmans, et du quatrième délégué, Javier Zuninga. La mission d'AI s'articule autour des questions du respect des droits humains, de la violence contre les femmes, de la liberté de la presse et du projet présidentiel d'amnistie générale. Les représentants d'AI discutent également avec les organisations et les personnalités qu'ils rencontrent de la question des "disparus" et du Code de la famille.

Les délégués d'AI ont rencontré le président de la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme, Ali Yahia Abdennour, des représentants de l'association des familles des personnes disparues (ASNFD) et des représentants de l'association des familles de personnes enlevées par les terroristes, "Somoud", dont le président, Ali Merabet, leur a exprimé son opposition à toute amnistie des crimes de sang. Les délégués d'AI ont également rencontré des élus locaux et des militants des droits humains de Ghardaïa, ainsi que la présidente des associations féministes Tharwa N'fathma N'soumer, SOS femmes en détresse.

La visite d'Amnesty International en Algérie ressuscite les vieilles oppositions à cette organisation, et à toute enquête extérieure sur la situation des droits humains en Algérie. Le président de la Commission nationale consultative de protection et de promotion des droits de l'Homme (CNCPPDH, officielle), Farouk Ksentini, explique que l'octroi de visas à des représentants d'Amnesty International, après des années de refus, s'explique par que les autorités, préfèrent que les représentants de l'ONG "soient là" et discutent avec les autorités, plutôt que l'organisation critiquent l'Algérie "de loin". Cependant, une "Alliance nationale pour la réconciliation nationale et l'amnistie générale" (ANRNAG), formée de dissidents de la Commission nationale de l'amnistie générale (CCNAG), a dénoncé l'"ingérence étrangère" que représenterait selon elle la visite de la délégation d'Amnesty International. L'ANRNAG reproche à AI de s'opposer au projet d'Amnistie générale avancé par le président Bouteflika : "Amnesty International n'a pas de leçon à donner aux Algériens ni à leurs responsables. Lutter contre l'intrusion de cette organisation dans les affaires internes de notre pays est notre mission principale", a déclaré le président de l'ANRNAG, Malek Serraï, qui a accusé AI d'être en quelque sorte manipulée par les socialistes. Le quotidien "El Watan", sous la plume de Bensalem Sofiane, accuse pour sa part Amnesty de "venir en Algérie beaucoup moins pour la quête de vérité (...) que (pour) la recherche de coupables tous désignés", soit "des généraux" algériens. "El Watan" reproche à Amnesty de qualifier les "terroristes" de "groupes armés" et d'avoir "toujours appréhendé le dossier du terrorisme en Algérie avec des oeillères pour ne voir que ce qui va dans le sens de l'idéologie de cette organisation". Le quotidien estime qu'une "opacité totale entoure le séjour" d'Amnesty, et fait mine de ne connaître ni la composante de la délégation (alors que cette composante est connue), ni l'ordre du jour de sa visite : "l'absence de transparence qui caractérise la mission de la délégation d'AI en Algérie en fait presque une activité clandestine", ajoute "El Watan" (alors que la presse algérienne et les agences de presse internationales se font chaque jour l'écho des rencontres des représentants d'Amnesty avec ceux des organisations algériennes).

(ODHA 21.5 / El Watan, Liberté 22.5) La délégation d'Amnesty International en visite en Algérie, désormais complète avec l'arrivée de Philippe Hensmans et de Javier Zuniga, a poursuivi ses rencontres avec des représentants d'organisations de la société civile, notamment les associations de familles de "disparus". Elle a également rencontré le président de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'Homme (CNCPPDH, officielle), Farouk Ksentini, avec qui elle a évoqué la quasi totalité des thèmes sur lesquels elle entend enquêter en Algérie : les violences contre les femmes, la torture, l'impunité et l'amnistie, la liberté d'expression et la liberté de la presse. La délégation d'AI a exprimé à Farouk ksentini son inquiétude à propos du "harcèlement permanent contre la presse écrite et des récentes condamnations contre les journalistes", ainsi que des amendes les frappant, et sa crainte que ces pratiques provoquent "une autocensure restrictive de la liberté de la presse chez les journalistes", en plus des difficultés d'accès aux sources de l'information. "Les journalistes ne doivent pas aller en pison", a estimé Philip Hensmans.

La délégation s'est également exprimée sur l'état des droits des femmes, en relavant l'importance des violences domestiques et des viols, et l'absence d'égalité entre femmes et hommes, y compris, après l'amendement du Code de la Famille, en matière de divorce.

S'agissant des propositions du président Bouteflika de "réconciliation nationale" et d'amnistie générale, le chef de la délégation d'AI, Philip Hensmans, a estimé qu'un processus de "réconciliation nationale" ne pouvait aboutir à une amnistie que s'il était précédé "de la recherche de la vérité et de l'institution de la justice". Javier Zunija, autre membre de la délégation d'AI, a expliqué qu'"aucune expérience d'amnistie générale n'a réussi dans le monde", en s'appuyant notamment sur les exemples précédents en Argentine, au Chili, au Pérou, au Guatemala ou en Uruguay.

Le 18 mai, Kamel Eddine Fekhar, membre du Conseil national du FFS et militant des droits de l'Homme, a été arrêté par le gendarmerie à Guelma, avec quatre autres militants du FFS et de la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme. Les cinq militants étaient accusés de diffuser des CD retraçant la violente répression du mouvement populaire à Ghardaïa, en octobre 2004. Kamel Eddine Fekhar et ses quatre compagnons ont été libérés le 21 mai, après avoir bénéficié d'un non-lieu, mais avoir été maintenus en garde à vue pendant trois jours. Kamel Eddine Fekhar avait déja purgé une peine de cinq mois de prison à Ghardaïa, sous l'accusation d'avoir participé aux émeutes qui avaient secoué Ghardaïa en octobre 2004. Il avait été libéré le 5 avril 2005.

(Quotidien d'Oran 24.5) Le Premier ministre Ouyahia a signé deux décrets modifiant le régime d'application des peines, visant à mettre le système carcéral algérien en conformité avec les normes internationales, en assouplissant les conditions de détention et en favorisant la réinsertion des détenus, par un plus large usage de la remise en liberté conditionnelle et de la semi-liberté, ce qui aurait également pour effet de réduire la surpopulation dans les prisons. Selon le directeur de l'administration pénitentiaire, Felioun Mokhtar, les mises en liberté conditionnelle et en semi-liberté pourraient concerner 40 % de l'actuelle population carcérale.

(El Watan 31.5, 2.6) Une nouvelle association de familles de "disparus" a été officiellement crée le 25 mai, la Coordination nationale des familles de disparus (CNFD), regroupant des représentants des familles de disparus d'Oran, Constantine, Relizane, Setif et Alger. La CNFD va donc s'ajouter aux deux autres organisations de familles de disparus, SOS-Disparus, le Collectif des familles de disparus et l'Association nationale des familles de disparus, avec lesquelles elle partage un même rejet d'une amnistie générale dissimulatrice de la vérité sur le sort des "disparus", et la même revendication de la publication du rapport de Farouk Ksentini sur les disparitions forcées. Une plate-forme de revendications a été élaborée par la CNFD et adressée au président Bouteflika et aux ONG de défense des droits humains. La CNFD a dédié son travail à l'avocat Mahmoud Khelili, défenseur des droits humains.

(El Watan, Jeune Indépendant, Liberté 26.5) Au terme d'une visite de trois semaines en Algérie, la délégation d'Amnesty International a fait le 25 mai lors d'une conférence de presse à Alger un premier constat de la situation des droits humains et des libertés en Algérie. Le chef de la délégation, le Belge Philippe Hensmans, a estimé que l'Algérie était "à un tournant" et pouvait "reconstruire le pays sur des bases nouvelles (en tournant) le dos aux violations des droits humains et à l'impunité, en privilégieant le respect des droits fondamentaux". Philippe Hensmans a reconnu des "développements positifs", notamment manifestés par les modifications apportées au Code de la Famille (mais "un travail énorme reste à faire" car "la discrimination à l'égard des femmes reste bien instrite dans le Code de la Famille") et par la "volonté des autorités concernées de s'engager dans un dialogue ouvert", mais le chef de la délégation d'AI a également affirmé, s'agissant des projets de "réconciliation nationale" et d'amnistie générale, qu'"accorder l'impunité aux auteurs d'abus, c'est ouvrir la porte à des tragédies futures". Pour AI, "il faut faire éclater la vérité et rendre justice avant de décréter (une) amnistie". Cela étant, la délégation a précisé qu'elle ne pouvait pas "tirer des conclusions sur un projet dont (on ne connaît) que le nom". La délégation d'Amnesty a également fait part de sa "consternation" face au nombre "considérable" de poursuites à l'encontre de journalistes. Amnesty International invite l'Algérie à "se conformer aux obligations internationales, notamment à la convention des Nations Unies pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes".

La délégation d'AI, formée de quatre personnes, a rencontré des représentants d'associations (notamment de femmes, de victimes du terrorisme et de familles de "disparus") et des autorités (ministères de la Justice et de la Condition féminine, Commission nationale consultative des droits de l'Homme), en regrettant de n'avoir pu rencontrer des représentants des ministères de l'Intérieur et de la Défense.

Algérie: Premier rapport de la visite en Algérie de la délégation d'Amnesty International, du 6 au 25 mai 2005

AI Index: MDE 28/008/2005 (Document Public)
25 mai 2005

" L'Algérie est à un tournant, estime la délégation d'Amnesty International, à la fin de sa visite dans le pays. La population et ses dirigeants ont la possibilité, après des années de conflit sanglant -qui fait encore des victimes aujourd'hui-, de reconstruire le pays sur des bases nouvelles, et de tourner le dos aux violations des droits humains et à l'impunité, en privilégiant le respect des droits fondamentaux. "

Au terme d'une visite de trois semaines au cours de laquelle la délégation d'Amnesty International a visité plusieurs villes du pays et s'est entretenue avec de nombreux représentants de la société civile et de hauts fonctionnaires du gouvernement, ainsi que de victimes d'abus et de violations de droits humains, l'organisation a présenté ses principales conclusions et recommandations à l'opinion publique algérienne et au gouvernement.

" Les victimes et leurs familles ont droit à la vérité, quels que soient les responsables des malheurs qui les ont frappées. Oublier l'histoire, c'est se condamner à la revivre, et accorder l'impunité aux auteurs d'abus, c'est ouvrir la porte à des tragédies futures " , a insisté l'organisation, qui a tenu à saluer le courage des femmes, victimes de violences tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de la cellule familiale. " Les femmes portent le poids du conflit, parfois dans leur chair. Elles doivent absolument être associées à tout changement les concernant. Et des mesures urgentes doivent être prises. "

Les délégués ont aussi tenu à attirer l'attention des autorités sur les témoignages de tortures et de mauvais traitements qui continuent à parvenir à l'organisation, ainsi que sur les restrictions à la liberté d'expression et d'association qui continuent à s'exercer.

" Il est capital que le gouvernement associe les organisations de la société civile à la reconstruction du pays. Il faut dès lors que les entraves qui empêchent de travailler correctement aujourd'hui soient levées le plus vite possible " , ont insisté les représentants de l'organisation de défense des droits humains.

Il faut insister sur le fait que la délégation, malgré une demande en ce sens, n'a été reçue ni par le ministère de la défense, ni par celui de l'intérieur.

A. Discriminations et violences contre les femmes

La délégation a tenu à souligner les développements positifs qu'elle a constatés, comme certaines modifications apportées aux codes de la nationalité et de la famille, l'interdiction du harcèlement sexuel, ou encore l'étude sur la violence à l'égard des femmes. Elle a noté également la volonté des autorités concernées de s'engager dans un dialogue ouvert.

La discrimination contre les femmes reste cependant bien inscrite dans le code de la famille. Elle facilite la violence ; la lutte contre celle-ci requiert à la fois des lois plus adéquates et mais aussi des pratiques plus adaptées, tant au niveau de la police que des parquets ou des instances responsables de la prise en charge des victimes.

La loi actuelle, en effet, ne protège pas efficacement les femmes contre certaines violations, notamment dans le milieu familial ou encore contre la violence sexuelle. La délégation a rappelé au gouvernement les remarques et recommandations qui ont été faites par le Comité du CEDAW en la matière, et qui doivent être mises en place par les autorités de ce pays.

Les violences qu'a connues le pays ont eu de sérieuses conséquences sur la situation morale, légale et matérielle de milliers de personnes, principalement des femmes et des enfants, quels que soient les auteurs de ses exactions. Ces souffrances continuent encore aujourd'hui, et des mesures urgentes doivent être prises pour les soulager.

Recommandations

Conformément à ses obligations internationales, et au Plan d'action de Pékin, l'Algérie doit mettre en place un véritable plan d'action intégré contre la violence à l'égard des femmes.

Par ailleurs, la délégation a attiré l'attention du gouvernement sur les mesures concrètes à prendre afin de venir en aide aux femmes (ainsi qu'aux enfants) victimes des événements qui ont ensanglanté le pays, y compris en matière de violence sexuelle.

B. Liberté d'expression, d'association et de réunion

La délégation a fait part de sa consternation concernant le nombre considérable de poursuites à l'encontre de journalistes constatées ces derniers mois, poursuites débouchant régulièrement sur des peines allant jusqu'à l'emprisonnement, et/ou des amendes considérables. L'organisation a rappelé l'importance d'une presse libre et responsable et l'obligation du gouvernement de respecter ses obligations internationales en la matière.

Elle a attiré l'attention de ses interlocuteurs sur les difficultés rencontrées par les associations dans la tenue pacifique de réunions, d'activités publiques ou de manifestations, y compris l'interdiction de manifestations de sensibilisation aux droits humains.

Recommandations

Amnesty International invite le gouvernement à revoir, en concertation avec les représentants de la profession, les réglementations diverses qui concernent la presse et à ne pas condamner à la prison des personnes pour délit de presse. Par ailleurs, elle l'invite également à lever les tracasseries administratives et légales qui freinent ou visent à empêcher les activités de la société civile.

C. Torture et impunité

Malgré l'incrimination récente de la torture dans le code pénal et une diminution des allégations de torture et mauvais traitements par la police et la gendarmerie, l'organisation a reçu un nombre significatif d'allégations de tels abus, du chef d'agents du DRS. Ces allégations font état de la détention des prévenus dans des endroits qu'il leur est impossible de situer, et de méthodes de torture, notamment le passage à tabac et le supplice dit du chiffon. La délégation a interrogé les autorités sur le fait que l'on ne trouve pas trace de constatations de ces sévices dans les rapports médicaux rédigés par les médecins chargés d'examiner les détenus dans ces centres. Si ces allégations devaient être confirmées, ces manquements constitueraient de graves violations de l'éthique médicale.

Par ailleurs, l'utilisation d'aveux arrachés sous la torture constitue une violation flagrante des obligations internationales auxquelles est liée l'Algérie, comme la Convention contre la torture. De la même manière, les juges sont obligés de lancer des investigations sur toute allégation de torture qui parviendrait à leur connaissance. Cependant, aucune enquête de ce type en direction d'agents du DRS n'a été portée à la connaissance des délégués de l'organisation.

Recommandations

Tous les lieux de détention et de garde à vue, y compris ceux du DRS, devraient être accessibles à tout moment aux organisations telles que le CICR ; Amnesty International invite les procureurs à visiter régulièrement ces centres à titre préventif.

Tous les lieux de détention et de garde à vue, y compris ceux du DRS, devraient être accessibles à tout moment aux organisations telles que le CICR ; Amnesty International invite les procureurs à visiter régulièrement ces centres à titre préventif.

Les personnes arrêtées et détenues en garde à vue par le DRS et les autres agents de l'Etat doivent pouvoir communiquer avec leurs familles et recevoir des visites de celles-ci, comme le prévoit la loi.

L'organisation recommande aux autorités de modifier la réglementation existante afin de permettre aux détenus d'avoir accès à un avocat.

Par ailleurs, l'organisation suggère au conseil de l'ordre des médecins d'aider ses membres à remplir leurs obligations éthiques.

D. Impunité et amnistie

L'organisation a constaté le manque de progrès dans la détermination du sort des " disparus " du fait d'agents de l'Etat ou des personnes enlevées par les groupes armés, ou dans la recherche des responsabilités exactes dans les exactions commises dans le cadre de ce conflit.

La délégation a pris connaissance de différentes initiatives visant à évaluer la situation, comme le mécanisme ad hoc ou les statistiques du ministère de la justice. Pour intéressantes qu'elles soient, ces études restent déconnectées entre elles et ne peuvent constituer qu'une première indication de la réalité des faits, une première étape dans la nécessaire procédure à long terme que doit entamer l'Algérie pour mettre fin à l'impunité, répondre aux interrogations des familles des " disparus " et des personnes enlevées par les groupes armés, et procéder aux réparations auxquelles ces familles ont droit.

Les délégués ont rappelé à plusieurs reprises la position de l'organisation par rapport aux informations faisant état d'un projet d'amnistie générale. Aucun document concret précisant les dispositions éventuelles de cette amnistie n'étant disponible, la délégation n'a pas été en mesure d'apporter des commentaires. Elle a tenu cependant à rappeler les dangers, notamment en termes d'impunité, qu'un tel projet risque d'entraîner. Elle a aussi réitéré aux autorités ses demandes d'évaluation de l'expérience de la " concorde civile ".

Recommandations

Dans ses contacts avec les autorités, la délégation d'Amnesty International a mis l'accent sur les leçons qu'il faut retenir d'expériences similaires dans de nombreux pays, sur tous les continents, qui ont connu une évolution comparable durant les trente dernières années. Les délégués ont insisté sur le nécessaire travail de mémoire, de justice et de vérité, qui doit précéder toute initiative qui viserait à amnistier les auteurs d'abus et de violations des droits fondamentaux.

La délégation a suggéré aux autorités algériennes de mettre en place un projet global, en concertation avec les familles des victimes et les associations des droits humains. Elle a rappelé que les abus et violations constatées sont constitutifs de crimes contre l'humanité et sont dès lors imprescriptibles et ne peuvent faire l'objet d'une amnistie.


(AP 15.6 / El Watan 22.6) Une délégation de l'ONG américaine de défense des droits humains Human Rights Watch a effectué une visite en Algérie, du 14 au 21 juin, après une délégation d'Amnesty International. HRW a placé la question des "disparus" et de l'amnistie générale au coeur de son enquête et de ses entretiens sur le terrain. Pour Olivier Bercault, expert de l'ONG, l'amnistie générale est une "option à haut risque", qui "conditionne l'avenir de paix en Algérie". Pour lui, il aut d'abord "faire le bilan de la loi sur la concorde civile" avant de passer à l'amnistie générale; il faut également rendre public le contenu du projet d'amnistie et ouvrir un "débat sociétal" sur ce projet. Olivier Bercault a ajouté qu'il n'y a que "les victimes qui peuvent pardonner", et que donc une amnistie générale ne pouvait exclure que justice soit rendue pour les crimes les plus graves, et surtout qu'une telle amnistie ne pourra pas être réellement soutenue par la société si la vérité n'est pas établie sur ces crimes.

(ODHA 4.6, 5.6, 11.6, 17.6) L'Observatoire des droits de l'Homme en Algérie (ODHA) fait état de plusieurs cas de harcèlement par la police de parents de membres de groupes armés, de militants des droits humains ou de proches de "disparus" harcèlement destiné semble-t-il, dans le cas de la famille d'un membre de groupe armé, à faire pression sur lui pour qu'il se rende. A Constantine, deux jeunes hommes ont été arrêtés à leur domicile par la police, et détenus en garde-à-vue pendant une dizaine de jours, ont été libérés le 11 juin. Il semble qu'ils aient été maltraités pendant leur garde à vue. L'un d'eux est le neveu d'un homme qui auait rejoint un groupe armé, l'autre est le frère de deux "disparus".


Coordination Nationale des Familles des Disparus : Vérité et Equité
COMMUNIQUE

Les représentants de la coordination des familles des disparus (CNFD) se sont réunis le mercredi 15/06/05 a Alger pour débattre des questions relatives a leur cause et faire le point quant au développement du dossier des disparus.

Encore une fois, le bureau de la coordination, et après consultation des familles des disparus, rappelle au Président de la République ses engagements envers la nation pour faire revenir la paix et la justice et apaiser la douleur des milliers de foyers frappés par la disparition cruelle des leurs.

Le bureau de la coordination, et au nom des familles des disparus, demande solennellement au Président de la République de ne pas faire perdurer leurs souffrances et les torturer encore une fois par les feux de l’attente ; il était question de dix huit mois que la commission rende une réponse aux familles. elles attendent encore.

Par ailleurs, le bureau de la coordination invite tout le peuple algérien , classe politique et société civile à adhérer au grand et honorable projet qui est la restitution de la vérité, étape incontournable pour un état de droit.

En effet, nous, familles des disparus sommes déterminées à ce que le travail de vérité ne nous concerne pas uniquement, en tant que victimes, mais toute la nation.

Nous refusons que d’autres algériens subissent la torture de la disparition et nul n’a le droit de ternir l’image glorieuse de l’ Algérie indépendante par le recours a la disparition forcée comme moyen de répression et de terreur.

Enfin, l’engagement de tous assure l’installation de l’état de droit qui assure a son tour l’éradication de la disparition forcée.

Ensemble, faisons a ce que le projet de vérité réussisse.

Fait à Alger, le 15/06/05
Le bureau provisoire
C.N.F.D.Vérité et Equité


(El Watan, Le Quotidien d'Oran 23.6) A l'issue de sa visite entamée le 13 juin en Algérie, la délégation de Human Rights Watch a tenu une conférence de presse le 22 juin, témoignant qu'"à part Relizane", où elle a été confrontée "à un dispositif sécuritaire impressionnant" et suivie "partout", sa visite s'est déroulement "tranquillement, sans entraves". Comme avant-elle la délégation d'Amnesty International, la délégation de HRW a rencontré des représentants d'associations, d'organisations de familles de "disparus", des acteurs de la société civile. Ils se sont enquis de l'état des libertés, notamment de la liberté d'expression et de presse.

A propos de l'amnistie générale, dont HRW craint qu'elle compromette la réconciliation nationale au lieu de la faire avancer, Eric Goldstein, directeur de recherche de HRW pour le Moyen-Orient et l'Afrique du nord, a relevé l'ambiguité du projet présidentiel, et l'absence d'informations . Pour Eric Goldstein, "l'enjeu est la manière avec laquelle l'Algérie arrivera à mettre un terme à l'impunité" qui a "alimenté et provoqué les bains de sang de la décennie 1990". La délégation de HRW s'est dite convaincue de la nécessité de procéder par étapes avant d'arriver à une amnistie mettant fin à la crise. D'entre ces étapes, elle évoque celle d'un bilan de la "concorde civile" de 1999, en regrettant que les "comités de probation" installés aient "fonctionné dans l'opacité totale", et que l'on ne sache pas qui a bénéficié de la loi sur la concorde civile, qui a de plus permis de blanchir des gens qui ont du sang sur les mains. HRW estime également nécessaire l'ouverture d'un débat national et libre sur l'amnistie générale, et l'obtention de la vérité sur les disparitions forcées et les violations des droits humains : "Si le gouvernement algérien veut sincèrement aboutir à une réconciliation nationale, il doit enquêter sérieusement sur les crimes atroces dont ont été victimes les Algériens, faire la lumière sur ces années terribles et poursuivre les responsables en justice", a déclaré Eric Goldstein, qui a par ailleurs estimé que le maintien de l'état d'urgence facilitait "la violation des droits de l'homme" et que si les textes réformant la justice sont "bons", sur le terrain les choses ne changent pas (notamment en ce qui concerne l'usage systématique de la détention provisoire) et les juges continuent de condamner pour des motifs politiques, et de prononcer des "jugements prédifinis" (Eric Goldstein évoquant des cas à Labiodh Sidi Cheikh, Laghouat, Djelfa, Ghardaïa, et estimant que les journalistes sont devenus les victimes privilégiées d'un appareil judiciaire "de plus en plus politisé". A l'inverser, la justice oublie ou refuse "systématiquement" d'ouvrir des enquêtes sur les cas de torture qui lui sont dénoncés.


(AP 7.7 / Liberté 10.7 / AFP, AP 11.7) Après Amnesty International en mai et Human Rights Watch en juin, c'est au tour de la Fédération internationale des ligues des droits de l'Homme (FIDH) d'envoyer une délégation à Alger, depuis le 5 juillet, pour une mission d'information qui s'est poursuivie jusqu'au 10 juillet.

Les délégués de la FIDH, conduits par son président Sadiki Kaba, ont rencontré les responsables de leur organisation affiliée algérienne, la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme (ADDH), avec qui ils ont abordé les questions de l'amnistie générale, des "disparitions", de la liberté de la presse, des droits des femmes et des problèmes du racisme et de l'exclusion.

Les délégués de la FIDH ont également rencontré le président de la Commission nationale consultative de protection et de promotion des droits de l'Homme (CNCPPDH, officielle), Farouk Ksentini, ainsi que, notamment, le président de l'association des familles des personnes enlevées par les terroristes, "Somoud", Ali Merabet. Avec Farouk Ksentini, les représentants de la FIDH ont notamment évoqué le caractère excessivement "répressif" de la justice algérienne, caractère qu'aurait reconnu le président de la CNCPPDH, qui a estimé en particulier qu'il était "anormal que la justice condamne des journalistes à des peines de prison ferme" pour leurs articles.

Dans un communiqué commun, la FIDH et la LADDH ont dénoncé les atteintes à la liberté de la presse et appelé la justice à "ne pas céder aux pressions" du pouvoir politique. Les deux organisations ont également exprimé leurs réserves quant au projet présidentiel d'amnistie générale.

La délégation de la FIDH a quitté l'Algérie le 10 janvier en appelant à la levée de l'état d'urgence en vigueur depuis 13 ans.

(ODHA 10.7 / El Khabar 12.7) 200 prisonniers détenus dans la prison d'El Harrach, à Alger, après avoir été condamnés dans des affaires de "terrorisme", on suivi une grève de la faim du 8 au 10 juillet pour protester contre le non respect de promesses faites par les autorités d'améliorer les conditions de détention, notamment en ce qui concerne le suivi médical et l'hygiène. La grève avait commencé après la mort d'un détenu diabétique, un homme de 56 ans, décédé dans des circonstances obscures, après avoir été évacué à l'hôpital.

Observatoire des droits humains en Algérie (ODHA)

Appel des grévistes de la faim de la prison d’El Harrach

Samedi 09 juillet 2005

Les détenus condamnés dans le cadre des affaires dites de « terrorisme » ont entamé une grève de la faim illimitée à compter du vendredi 08 juillet 2005 suite au décès de l’un de leurs compagnons de détention, Mohamed Adaouri, 36 ans, dans des conditions mystérieuses. Ce dernier, diabétique connu, se plaignait de douleurs. Il fut transféré à l’infirmerie avant d’être ramené dans la salle de détention par les gardiens. Il lui fut conseillé à l’infirmerie de dormir sur le côté (!!). Son état s’est rapidement détérioré ce qui a poussé ses compagnons de salle à exiger son transfert à nouveau à l’infirmerie, ce que refusa le gardien de permanence qui répondit aux détenus : « laissez-le mourir ». Les détenus poursuivirent leur mouvement de protestation afin que Mohamed Adaouri soit soigné et finirent par obtenir gain de cause. Mais il fut trop tard car il décédera dès son admission à l’infirmerie.

Cette négligence grave de la part de l’administration poussa les détenus à entamer une grève de la faim tout en exigeant de rencontrer le procureur général pour l’informer des conditions inhumaines de détention et de cette grave négligence ayant abouti à la mort d’un détenu.

L’administration refusa comme à son habitude de répondre aux revendications des détenus en les menaçant de les transférer dans d’autres prisons de l’intérieur du pays par convois disciplinaires. Cette méthode répressive avait déjà été appliquée lors du mouvement de contestation de l’été 2001 lorsque les détenus avaient revendiqué l’amélioration de leurs conditions de détention, au vu de la surpopulation carcérale. A l’époque les contestataires avaient été transférés vers les prisons de l’intérieur, loin de leurs familles. .

Les détenus grévistes de la prison d’El Harrach lancent un appel aux organisations des droits de l’homme, à l’Observatoire national et au ministère de la justice afin d’intervenir pour mettre fin à la tyrannie de l’administration pénitentiaire.

Prison d’El Harrach.
Samedi 09 juillet 2005.


(www.naros.info 19.7) La Fédération internationale des ligues des droits de l'Homme (FIDH), au terme de la visite d'une délégation en Algérie, début juillet, estime, dans un rapport préliminaire, qu'"en dépit de quelques avancées", le respect de l'Etat de droit, le sort des disparus, la situation des femmes et celle de la liberté de la presse demeurent des "sujets de préoccupation". La FIDH, qui se félicite d'avoir été autorisée à envoyer une mission à Alger après s'être vu refuser l'accès à l'Algérie depuis des années, s'interroge sur "l'application concrète" de plusieurs réformes (code de procédure pénale, statut de la magistrature, administration pénitentiaire) et dénonce "le recours fréquent à la violence et à la torture par des membres des forces de l'ordre", sans que ces pratiques soient généralement sanctionnées par des poursuites. La FIDH estime que le maintien de l'état d'urgence est l'une des raisons de la persistance des atteintes à "un certain nombre de libertés et droits fondamentaux", comme ceux de manifestation pacifique, d'association et de réunion. La FIDH regrette que la question des "disparus" continue de ne pas être traitée réellement, et affirme que les victimes, leurs proches et "toute la société algérienne" ont un droit "imprescriptible" à connaître la vérité sur chaque cas. "La vérité des faits" est un préalable à toute démarche de réparation, et à plus forte raison d'amnistie, ajoute la FIDH.

Mission de la FIDH en Algérie

Conclusions préliminaires

FIDH 15/07/2005

Après s’être vu refuser l’accès au territoire algérien pendant plusieurs années, la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) a été autorisée à effectuer une mission à Alger du 5 au 10 juillet 2005. La FIDH accueille favorablement cette ouverture et prend acte des engagements du gouvernement algérien de laisser aux ONG internationales un accès libre à l’ensemble de son territoire.

La mission de contact menée par Sidiki Kaba, président de la FIDH, Michel Tubiana, vice-président et Paz Rojas, présidente du CODEPU, organisation membre de la FIDH au Chili, a été l’occasion de rencontrer les autorités algériennes et des acteurs de la société civile afin d’aborder la situation des droits de l’Homme dans le pays et en particulier, la question des disparitions et du projet de loi d’amnistie.

La FIDH avait déjà, à de nombreuses reprises par le passé, exprimé ses préoccupations concernant entre autres, le respect de l’état de droit, le sort des disparus, la situation des femmes et la situation de la liberté de la presse en Algérie. Notre organisation constate qu’en dépit de quelques avancées, la plupart de ces questions demeurent des sujets de préoccupation.

Si la FIDH prend bonne note des réformes du code de procédure pénale, du statut de la magistrature et de l’administration pénitentiaire entreprises, elle s’interroge néanmoins sur l’application concrète de telles réformes.

La FIDH constate en effet que le statut de la magistrature bien que réformé, n’accorde pas les garanties nécessaires à l’indépendance de ce corps. Le renforcement du devoir de réserve et l’enquête des différents services de sécurité dont font l’objet les plus hauts magistrats avant leur avancement notamment, constituent des entraves à l’indépendance de la justice. En outre, l’habilitation d’officier de police judiciaire dont bénéficient certains membres des forces armées (notamment du D.R.S.) présente des risques d’autant plus importants pour les libertés individuelles que ces membres des forces de l’ordre dépendent hiérarchiquement du Ministère de la Défense et relèvent de juridictions militaires dont la persistance n’est en rien justifiée.

La FIDH est également préoccupée par le fonctionnement de l’administration pénitentiaire qui n’est soumise à aucun contrôle extérieur et indépendant. Celle-ci doit en outre faire face à de graves carences matérielles et n’assure aucunement son rôle de réinsertion sociale. La FIDH s’inquiète par ailleurs, du recours fréquent à la violence et à la torture par les membres des forces de l’ordre, pratiques qui ne font que très rarement l’objet de poursuites.

La FIDH s’inquiète du maintien de l’état d’urgence au nom duquel un certain nombre de libertés et droits fondamentaux sont violés et en particulier, les libertés de manifestation pacifique, d’association et de réunion. Cette situation a pour corollaire un manque de transparence des autorités algériennes , ce qui ne peut qu’accroître la méfiance des citoyens à l’égard des institutions. Par ailleurs, les nombreuses poursuites engagées au cours des derniers mois à l’encontre de journalistes et d’organes de presse constituent de graves menaces pour la liberté de la presse.

La persistance des discriminations à l’égard des femmes par le maintien notamment du tutorat, de la procédure de répudiation et de la reconnaissance de la polygamie constitue une source supplémentaire de préoccupations.

Enfin, la mission de la FIDH n’a pu que constater que la question des disparitions, qu’il s’agisse des disparitions imputées aux membres des forces de l’ordre, à leurs supplétifs ou aux groupes armés rebelles continue de ne pas être traitée. La FIDH déplore que le rapport rédigé par la Commission nationale consultative de protection et de promotion des droits de l’Homme (CNCPPDH) n’ait pas été rendu public. Les grandes lignes de ses conclusions, telles que rapportées par la presse, tendent à envisager une indemnisation des victimes et une reconnaissance de la responsabilité de l’Etat. En revanche, la recherche de la vérité des faits comme des responsabilités ne semble pas avoir été envisagée. Les récentes déclarations publiques du Président de la République laissent à penser qu’une loi d’amnistie générale serait soumise, d’ici quelques mois, à référendum.

La FIDH tient à rappeler que :

La FIDH demande aux autorités algériennes de :

En ce qui concerne la question des disparus, la FIDH demande aux autorités algériennes :

La FIDH, ayant pris acte des engagements du gouvernement algérien de laisser à toutes les ONG un accès libre à l’ensemble de son territoire, enverra, dans les prochains mois une nouvelle délégation afin de poursuivre son dialogue avec les autorités algériennes et de renforcer ses liens avec tous les acteurs de la société civile.


COMMUNIQUÉ COMMUN DE LA FEDERATION INTERNATIONALE DES LIGUES DES DROITS DE L'HOMME ET DE LA LIGUE ALGÉRIENNE POUR LA DÉFENSE DES DROITS DE L'HOMME

10 juillet 2005

La Fédération Internationale des Ligues des Droits de lHomme (FIDH) et la Ligue Algérienne pour la Défense des Droits de lHomme (LADDH) qui lui est affiliée, se sont rencontrées au siége de cette dernière à Alger le 06 juillet 2005.

Au cours de leur rencontre, les deux organisations ont passé en revue différents aspects touchant à létat des droits de lHomme en Algérie et étudié avec une attention particulière les implications et les jugements à tirer :

1- Du projet damnistie générale annoncé pour septembre par le président de la république.

2- Des nombreuses poursuites judiciaires engagées contre la presse.

3- De lordonnance portant modification du Code de la famille.

4- de la persistance de létat durgence.

1- Sur le projet damnistie générale, la LADDH a exposé ses appréhensions de voir les notions généreuses de pardon, de réconciliation et de recherche de la paix sociale détournées vers des objectifs inavoués qui vont consister à consacrer limpunité de crimes contre lhumanité à travers une opération plébiscitaire ; et sans préjuger de la teneur du texte que les initiateurs envisagent de soumettre à referendum les deux parties saccordent pour qualifier toute procédure qui aurait pour finalité de prescrire les crimes contre lhumanité, contraire au droit international.

La FIDH et la LADDH rappellent limpérieuse nécessité de faire la vérité sur les faits qui se sont produits ces 15 dernières années en Algérie, den déterminer les responsables, de rendre justice et doffrir aux victimes les réparations auxquelles elles peuvent légitiment prétendre.

La FIDH et la LADDH conviennent de conjuguer leurs efforts pour faire respecter ces principes devant toutes les juridictions tant nationales quinternationales.

2- la FIDH et la LADDH ont relevé avec inquiétude les poursuites judiciaires contre les journalistes et les entreprises de presse. Elles appellent les pouvoirs publics à respecter et à faire respecter la liberté de la presse et le corps judiciaire à ne pas céder aux pressions de lexécutif.

3- la FIDH et la LADDH se sont penchées sur lordonnance portant modification du Code de la famille et ont relevé que le texte de loi loin de redresser les entorses et les violations contenues dans le précèdent Code du principe dégalité citoyenne entre lhomme et la femme, principe, pourtant consacré dans la constitution na fait au contraire que les reconduire, se bornant à de simples aménagements caritatifs. Les deux parties rappellent que lAlgérie doit se conformer rigoureusement aux conventions internationales en loccurrence la Convention sur lélimination de toutes les formes de discrimination à légard des femmes et remanier le droit de la famille à la lumière de ces conventions.

4- enfin, la FIDH et la LADDH appellent les pouvoirs publics à lever létat durgence qui perdure depuis 13 ans.

Alger le 10-07-05.
FIDH-LADDH


(Corr) Dans une déclaration commune à l'issue d'un "atelier" de la Ligue algérienne des droits de l'Homme (LADH) et de l'ONG américaine Freedom House sur le thème du "rôle de la société civile dans la réconciliation nationale", les représentants de plusieurs associations de "disparus", de victimes du terrorisme et de défense des droits des femmes*, ainsi que la LADH, désireuses de "participer à l'enrichissement du concept de réconciliation nationale", en l'absence d'un projet présidentiel "aux contours clairs", déclarent que "la réconciliation nationale dépasse (...) le concept de réconciliation entre deux parties au conflits mais s'étend à un mouvement d'évolution sociale qui vise une prise de conscience collective" pour fonder une "coexistence pacifique dans laquelle domineront les principes de tolérance et d'acceptation de l'autre". La conception de la "réconciliation nationale" que ces associations déclarent vouloir défendre implique "la vérité et la justice avant toute réconciliation", la "protection de la mémoire collective" afin de savoir "tout ce qui s'est passé pendant la période sanglante", la défense de la justice et de l'équité, ce qui implique "l'identification des coupables et des victimes", le jugement des premiers et la réparation pour les secondes, avec "reconnaissance sociale et juridique de leur statut de victime". Les signataires* demandent notamment la création d'une "commission souveraine composée de personnalités indépendantes et crédibles", la libération de toutes les personnes détenues arbitrairement au secret, la réforme des structures de l'Etat afin d'assurer "la suprématie des institutions et surtout l'indépendance de la justice", l'adaptation des lois algériennes aux textes internationaux, notamment ceux concernant les crimes contre l'humanité.

*Djazaïrouna, SOS Disparus, Soumoud, Associations des disparus de Constantine, Coordination nationale des familles de disparus est, sud, Relizane et Oran, Association des disparus de Sétif, LADH, LADDH, Rachda.

Observatoire des droits humains en Algérie :

24 juillet 2005

Appel d’une épouse de « disparu » dont un des fils est menacé de ……« disparition »

Témoignage recueilli le 24 juillet 2005

Mr Djezzar Anas est un citoyen de Relizane, arrêté au lendemain du coup d’Etat de janvier 1992, atrocement torturé à plusieurs reprises et incarcéré arbitrairement durant une année. Il a été enlevé le 09 avril 1995 à 00h 30 à son domicile par des hommes armés dirigés par le commandant de la sécurité militaire, dénommé Mustapha, originaire de Mostaganem. Il a laissé derrière lui une épouse désemparée et malade (hypertendue) et quatre enfants dont l’un d’eux est asthmatique. La mère du « disparu » est décédée de chagrin juste après son enlèvement. Les enfants en bas âge ont grandi tant bien que mal, privés du père et de ressources financières.

Le 17 juillet 2005 et aux environs de 11 heures, deux individus d’un certain âge (la cinquantaine) venus à bord d’un véhicule banalisé de type Peugeot 406 se sont présentés au domicile familial pour signifier à Mme Djezzar que son fils Sid Ahmed allait subir le même sort que son père il y a dix ans et qu’il devait quitter impérativement Relizane, en insistant qu’ils n’étaient que des gens de bien, venus l’informer de ce qui se tramait ailleurs contre son fils (!!!).

Ces deux individus iront juste après cette visite, voir son fils cadet Abdelhamid pour lui tenir les mêmes propos. Une heure après ces visites étranges, Sid Ahmed, informé et pris de panique a quitté précipitamment Relizane pour aller se réfugier dans la capitale de l’Ouest algérien, laissant la mère et les frères dans un état d’angoisse indescriptible.

Il est à noter que Sid Ahmed Djezzar est un membre actif de l'oraganisation des familles de « disparus » qui lutte depuis des années pour connaître le sort de son père. Il a été désigné représentant de Relizane au sein de la jeune Coordination nationale des familles de disparus.

Mme Djezzar lance un appel urgent et pressant aux organisations des droits de l’homme, à toutes les personnalités nationales et internationales pour intervenir et éviter que son fils Sid Ahmed subisse le même sort que son père ce qui plongera à nouveau la famille dans un nouveau cauchemar.

(Le Jour d'Algérie, Le Jeune Indépendant 3.9 / El Khabar 5.9 / El Watan 14.9) Le président de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'Homme (CNCPPDH, officielle), Farouk Ksentini, a annoncé qu'après l'approbation en référendum de la charte pour la paix et la réconciliation, approbation pour laquelle il fait campagne -et qui ne fait guère de doute-, une loi déterminera qui sont les "vrais disparus" et qui sont les "faux", c'est-à-dire ceux qui auraient rejoint les maquis islamistes. Sur les 6146 "disparus" évoqués par le rapport que lui-même avait rendu au président de la République, Farouk Ksentini estime que "plusieurs" ont "en fait rejoint les groupes terroristes", et ne sont donc pas des "disparus". Cependant, dans des déclarations précédentes, Farouk Ksentini avait admis que "plus de 5000 disparus" ont été perdus de vue après avoir répondu à des convocations de services de sécurité, qui ont confirmé les convocations mais affirment avoir relâché les personnes concernées. Cette polémique, qui dure depuis des années, sur les "disparitions" a été ravivée par de récentes déclarations d'anciens "émirs" islamistes ralliés au camp des partisans de la charte présidentielle. Un ancien "émir" de l'AIS de Relizane, Arbaoui Abdellatif, dit "Abou Djamil", a ainsi déclaré au "Jour d'Algérie" que 300 personnes portées disparues par leur famille dans la wilaya de Relizane "se trouvaient dans les maquis" à l'insu de leurs proches.A Tizi Ouzou, le Premier ministre Ahmed Ouyahia a affirmé que "90 % des disparus ont été kidnappés par les barbus" ou ont rejoint les maquis sans en informer leurs proches. Ces déclararions contredisent évidemment les évaluations et les enquêtes faites par les ONG de défense des droits humains et les associations de familles de "disparus", qui attribuent la presque totalité des "disparitions" dont elles ont pu dresser la liste aux forces de sécurité.

Le Collectif des familles de disparu(e)s en Algérie (CFDA) demande, dans un communiqué, la libération de Malik Medjoune, détenu sans jugement depuis près de six ans pour sa participation supposée (et qu'il nie) à l'assassinat du chanteur kabyle Matoub Lounès, et qui demande sa mise en liberté provisoire. Mali Medjoune a été arrêté (enlevé, selon le CFDA) le 28 septembre 1999 par les services de sécurité, détenu pendant sept mois tout en étant porté disparu, torturé et soumis depuis six ans à une détention provisoire que la loi "plafonne" à deux ans.

(El Watan 22.9 / Le Temps 24.9) Le projet de convention internationale contre les disparitions forcées, projet rédigé en 2003 par un groupe de travail créé par la Commission des droits de l'Homme, a été adopté le 22 septembre à Genève, par consensus, et sans que des réserves soient exprimées. Le projet renforce les contraintes imposées aux Etats, ainsi que l'arsenal juridique à disposition des défenseurs des droits humains et des familles de "disparus". Il souligne que la "pratique généralisée ou systématique de la disparition forcée constitue un crime contre l'humanité", imprescriptible et non amnistiable. Il fait obligation aux futurs Etats signataires de prévenir et de sanctionner pénalement "l'arrestation, la détention, l'enlèvement ou toute autre forme de privation (extrajudiciaire) de liberté par des agents de l'Etat". Il impose aux signataires de rechercher les disparus, d'accorder réparation aux victimes et de mieux former leurs forces de l'ordre et leur personnel militaire. Un Comité de suivi de la convention, doté de pouvoir d'enquête et chargé de rédiger un rapport annuel, devrait être créé une fois le texte final adopté. Le projet va être transmis à la Commission des droits de l'Homme, qui le soumettra pour adoption à l'Assemblée Générale de l'ONU -le terme de ce processus devant, au mieux, se situer à l'automne 2007.

En Algérie, le président de la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme (LADDH), Ali Yahia Abdennour, a "près de 20'000" le nombre de "disparus", dont 7204 cas individuels recensés, et faisant l'objet de dossiers complets, jusqu'en 2000. Ces cas correspondraient tous à des enlèvement par les forces de sécurité.



Agression de membres des familles de disparus par les forces de police

FIDH 23/09/2005

L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme, 
programme conjoint de la Fédération internationale des ligues des 
droits de l’Homme (FIDH) et de l’Organisation mondiale contre la 
torture (OMCT), exprime ses plus vives inquiétudes quant à la 
recrudescence du harcèlement dont font l’objet les membres de 
l’association SOS disparu(e)s à Alger, Oran et Constantine.

Selon les informations reçues du Collectif des familles de disparus en 
Algérie (CFDA) et de SOS disparu(e)s, le 22 septembre 2005, plusieurs 
membres de familles de disparus ont été frappés et arrêtés par la 
police devant le stade Ramdane Ben Abdelmalek de Constantine, où 
M. Bouteflika, président de la République, tenait un meeting sur le 
projet de Charte sur la paix et la réconciliation nationale, soumis à 
référendum le 29 septembre prochain.

En effet, ces familles, qui se réunissent habituellement devant le 
cabinet de la Wilaya, se sont rendues au stade afin de demander au 
président un entretien sur la situation de leurs proches disparus. 
Cependant, les forces de l’ordre ont empêché plusieurs représentants 
des familles de pénétrer dans l’enceinte du stade, puis les ont frappés 
de dizaines de coups de pied et de poing, malgré la présence de témoins 
et de journalistes. Plusieurs personnes ont ensuite été arrêtées et 
emmenées au commissariat central afin d’être interrogées, dont 
M. Bellatrèche, porte-parole des familles de disparus à Constantine, 
ainsi que Madame Saker et cinq autres mères de disparus, âgées de 60 à 75 ans. A l’heure actuelle, ces personnes sont toujours en détention, 
sans qu’aucune charge n’ait été officiellement retenue contre elles.

De plus, le 14 septembre 2005, Monsieur Mouloud Arab, père de disparu 
âgé de 75 ans, a été arrêté par les forces de police alors qu’il 
quittait le rassemblement hebdomadaire organisé par SOS disparu(e)s 
devant la Commission nationale pour la promotion et la protection des 
droits de l’Homme (CNCPPDH) à Alger. Quatre policiers l’ont conduit au 
commissariat, au motif qu’il distribuait des tracts concernant 
notamment le projet de Charte et la situation des familles de disparus. 
M. Arab est resté trois heures en garde à vue et a subi un 
interrogatoire sur son passé, les raisons pour lesquelles il 
distribuait ces tracts, et s’il en détenait d’autres à son domicile. A 
l’issue de cette garde à vue, ses papiers d’identité lui ont été 
confisqués, et ne lui ont été restitués que le lendemain.

Le 17 septembre 2005, M. Arab a été déféré devant le Parquet d’Alger 
pour violation de l’article 96 du Code pénal algérien, qui réprime la 
« distribution de tracts de nature à nuire à l’intérêt national ». Une 
audience doit se tenir devant le juge d’instruction d’Alger le 25 
septembre 2005. En raison de son âge, M. Arab n’a pas été placé en 
détention mais reste sous contrôle judiciaire, et doit se présenter au 
commissariat tous les mercredis.

Par ailleurs, Mme Fatima Yous, présidente de SOS disparu(e)s, a reçu 
plusieurs appels anonymes sur son téléphone portable, lui indiquant 
qu’elle devait quitter le territoire algérien si elle voulait protéger 
les familles membres du collectif, le bureau d’Alger et son personnel. 
M. Hacène Ferhati, trésorier de l’organisation, est quotidiennement 
harcelé sur son téléphone portable par des inconnus depuis le 15 
septembre 2005.

L’Observatoire rappelle également que les locaux de SOS disparu(e)s à 
Alger font l’objet d’une surveillance régulière de la part des forces 
de police, ainsi que d’appels anonymes récurrents.

Mme Fatima Nekrouf, secrétaire du bureau de l’association à Oran, a été 
à plusieurs reprises menacée de mort au téléphone. Début septembre, un 
inconnu lui avait demandé de lui remettre les dossiers de toutes les 
familles de disparus, demande à laquelle elle n’avait pas donné suite. 
L’auteur des menaces a, en outre, fait référence à la disparition de 
son père, M. Abdelkader Nekrouf, avocat militant pour les droits de 
l’Homme arrêté en 1997, et disparu depuis lors. Les 17 et 18 septembre 
2005, trois policiers en civils se sont présentés au bureau d’Oran et 
ont procédé à une fouille complète, sans présenter de mandat ni de 
carte de police. Ils ont par ailleurs interrogé Mme Nekrouf sur ses 
activités au sein de l’organisation.

L’Observatoire est vivement préoccupé par les actes de représailles, 
les menaces et les pressions subies par les membres de SOS disparu(e)s, 
qui s’inscrivent en violation flagrante des dispositions de la 
Déclaration sur les défenseurs des droits de l’Homme, adoptée par 
l’Assemblée générale des Nations unies le 9 décembre 1998, et notamment son article 6b qui stipule que « chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres, de publier, communiquer à autrui ou diffuser librement des idées, informations et connaissances sur tous les droits de l’Homme et toutes les libertés fondamentales », ainsi que son article 12.2 qui dispose que « l’Etat prend toutes les mesures nécessaires pour assurer que les autorités compétentes protègent toute personne, individuellement ou en association avec d’autres, de toute violence, menace, représailles, discrimination de facto ou de jure, pression ou autre action arbitraire dans le cadre de l’exercice légitime des droits visés dans la Déclaration ».

L’Observatoire demande aux autorités algériennes de :

i. Garantir en toutes circonstances l’intégrité physique et 
psychologique de Mme Fatima Yous, Mme Fatima Nekrouf et M. Mouloud Arab, ainsi que de tous les membres de l’organisation SOS disparu(e)s ; 
i. Procéder à la libération immédiate et inconditionnelle de 
M. Bellatrèche, Mme Saker, ainsi qu’à celle des cinq autres mères de 
disparus, aucune charge n’ayant été prononcée contre eux à ce stade ; 
ii. Cesser toute forme de représailles à l’encontre des membres de 
l’organisation SOS disparu(e)s, et plus généralement l’ensemble des 
défenseurs des droits de l’Homme algériens ; iv. Mener une enquête 
indépendante et impartiale sur l’ensemble de ces faits ; v. Se 
conformer aux dispositions de la Déclaration sur les défenseurs des 
droits de l’Homme, et plus particulièrement son article 1 qui dispose 
que « chacun a le droit, individuellement ou en association avec 
d’autres, de promouvoir la protection et la réalisation des droits de 
l’Homme et des libertés fondamentales aux niveaux national et 
international », son article 6b et son article 12.2 ; vi. Plus 
généralement, se conformer aux dispositions de la Déclaration 
universelle des droits de l’Homme, ainsi qu’aux instruments régionaux 
et internationaux relatifs aux droits de l’Homme ratifiés par 
l’Algérie.


(El Watan 24.9 / Liberté 26.9) La Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme (LADDH) a tenu les 22 et 23 septembre son deuxième congrès national, et élu son Conseil national, lequel a élu le Bureau exécutif, qui a finalement élu un nouveau président de la Ligue, en la personne de Hocine Zahouane, qui succède à Ali Yahia Abdennour, nommé président d'honneur. La Ligue a affirmé sa volonté de préserver "son autonomie et son indépendance". Elle a adopté de nouveaux statuts, excluant notamment que des personnes exerçant des responsabilités au sein de l'Etat ou de partis politiques en exercent également au sein de la Ligue. Le Congrès de la LADDH a adopté une "Charte des droits de l'Homme"

(El Watan 11.10) Le mandat quadriennal des 44 membres de la Commission consultative pour la promotion et la défense des dorits de l'Hopmme (CNCPPDH, officielle) a pris fin le 9 octobre. Les membres de la commission doivent donc à nouveau être désignés par le président Bouteflika, qui peut par ailleurs reconduire le présidentde la commission, l'avocat Farouk Ksentini, à son poste. Farouk Ksentini a tiré un bilan positif de ces quatre années d'exercice de la commission, tout en reconnaissant qu'il reste beaucoup à faire pour défendre les droits humains en Algérie. "J'espère que l'Algérie, comme elle en a fini avec le règne des mosquées, en finira avec le règne des casernes", a déclaré Farouk Ksentini.

(Le Monde 11.10) Plusieurs anciens prisonniers marocains du Front Polisario, détenus dans les camps sahraouis du sud de l'Algérie, ont témoigné au "Monde" de leurs conditions calamiteuses de détention, et des sévices subis pendant une détention qui a a duré des années, avant que n'intervienne, sous l'égide du Comité international de la Croix Rouge, leur libération. Les prisonniers marocains du Polisario ont été forcés au travail (charger et décharger des camions de munition, creuser des tranchées) jour et nuit; ils ont été victimes de brimades, de mauvais traitements, de tortures : privés de sommeil pendant des semaines, sans possibilité de se laver et de se raser pendant des semaines, de changer de vêtement pendant des mois, voire des années, couverts de poux, mal nourris, battus, fouettés avec des cables métalliques, frappés avec des ressorts de camion, obligés de donner leur sang, humiliés, enfermés dans des conteneurs. Des prisonniers ont été sommairement exécutés. Il faudra attendre 1994, près de vingt ans après le début du conflit, pour que leurs conditions de détention s'améliorent, avec l'arrivée de lettres et de colis transitant par la Croix Rouge, et de délégués du CICR.

(AP 18.10) Selon des sources proches du ministère de la Justice, les prisons algériennes restent surpeuplées et leur taux d'occupation atteindrait 120 % (50'000 détenus pour 42'000 places dans 127 établissements). Si le nombre de détenus liés à des affaires de "terrorisme" est en forte diminution, celui des droits dommuns connaît une hausse spectaculaire. Selon "Liberté", l'espace réservé à chaque détenu en Algérie est inférieur à deux mètres carrés (1,86 m2), alors que le standard européen prévoit 12,2 m2. A elle seule, la prison d'El Harrach (Alger) accueille 2500 détenus. La moitié des détenus dans les prisons algériennes sont des récidivistes. L'une des raisons de la surpopulation des prisons en Algérie réside dans le recours abusif à la détention préventive, recours que le ministère tente d'enrayer. En outre, la nouvelle loi pénitentitiaire facilile la mise en liberté conditionnelle, et le président Bouteflika décide régulièrement de mesures de grâce collective allégeant la pression sur les lieux de détention. Enfin, un plan prévoit la construction de 42 pénitenciers (36'000 places au total) d'ici 2009, et la fermeture des plus anciennes prisons, dont celle de Serkadji, à Alger. Sur les 127 prisons algériennes, la grande majorité (85) ont été construites sous le régime colonial français, 59 datant même du XIXe siècle.

(AP 1.11 / El Watan, Liberté 2.11) Le président Bouteflika a gracié 6778 détenus à l'occasion du 51e annversaire du déclenchement de la guerre d'indépendance. Les personnes grâciées sont des détenus dont la condamnation est définitive, et qui ont au plus six mois de peine à purger encore. Des remises de peines de sept à onze mois ont en outre été accordées.

La presse privée note que le nom du directeur de feu le quotidien "Le Matin", Mohammed Benchicou, qui a encore sept mois de prison à purger, ne figure pas sur la liste des bénéficiaires de la clémence présidentielle. Le chef d'accusation pour lequel il a été condamné (délit économique) semble en effet l'exclure du champ de la grâce et des remises de peine, alors qu'aucune disposition d'exclusion de tel ou tel délit ou crime n'est explicite dans le communiqué de la présidence annonçant les mesures des grâce et de réduction de peine. De plus, note "El Watan", des "ex-chefs terroristes notoirement connus pour leur participation aux crimes commis contre le peuple algérien" vont être bénéficiaires des dispositions de la concorde nationale, et selon le président de la Commission nationale consultative des droits de l'Homme (CNCPPDH), Farouk Ksentini, l'amnistie du 1er novembre "n'exclut personne (et) concerne toutes les catégories d'infractions", y compris celles relevant du "terrorisme", pour peu qu'elles concernent des personnes en fin de peine. Selon Farouk Ksentini, un demi-million de personnes ont été jugées en Algérie pour des faits relevant du "terrorisme", depuis le début des années '90.

(AFT, AFP 3.11) Le Front Polisario s'est engagé le 1er novembre à ne plus utiliser de mines antipersonnel, en signant l'Appel de Genève, comme 28 autres groupes armés "non-étatiques". L'appel de Genève est un appel lancé par une ONG genevoise aux groupes armés non-étatiques (mouvements de libérations nationales, mouvements d'opposition politique) pour qu'ils s'engagent, par leur signature, à ne plus utiliser de mines anti-personnel. L'ONU a annoncé le lancement de projets de déminage au Sahara occidental, et le Polisario a lancé un appel au Maroc pour que ce pays signe la Convention d'Ottawa d'interdiction des mines antipersonnel -qui, elle, ne recueille que la signature d'Etats. On estime à six millions le nombre des mines posées par le Maroc le long du "mur de séparation" destiné à protéger le Sahara occidental annexé par le Maroc en 1976 des incursions du Front Polisario, qui revendique l'indépendance de l'ancienne colonie espagnole.

(AP 5.11) Une délégation du Front des forces socialistes, conduite par le Secrétaire général du FFA chargé des droits de l'Homme, Ahmed Bettatech, a rendu visite le 5 novembre à Tunis à des opposants tunisiens qui observent une grève de la faim depuis le 18 octobre pour réclamer le respect des libertés fondamentales et des droits humains en Tunisie. Le FFS appelle à la création d'une Cour maghrébine des droits de l'Homme, à laquelle pourraient avoir recours les individus ou les associations dont les droits seraient violés.

(El Watan 8.11) Deux membres du Front des forces socialistes (FFS) et de la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme (LADDH) ont été arrêtés le 6 novembre à Ghardaïa, et placés sous contrôle judiciaire. Ils ne sont rien moins qu'accusés d'un meurtre. Le FFS dénponce une injustice et un complot ourdi pour faire taire des militants des droits humains et de l'opposition démocratique.

(La Tribune 22.11) 150'000 mines antipersonnel (pour la plupart de type PMD 6 et POM DZ 2 et POM Z 2 M) datant de la guerre d'indépendance ont été détruites en Algérie depuis le 24 novembre 2004, le onzième et dernier stock l'ayant été à Hassi Bahbah (w. Djelfa). Le président Boueflika a à cette occasion rappelé que l'Algérie souffrait toujours des dégâts causés par ces mines, plus de quarante ans après leur implantation. Il reste en effet des centaines de milliers de mines disséminées dans les régions frontalières de la Tunisie et du Maroc, notamment le long des anciennes "ligne Challe" et "ligne Morice", auxquelles s'ajoutent les mines posées par les groupes amés depuis dix ans dans tout le pays. Plus de trois millions de mines ont été disséminées par l'armée française le long des frontières algériennes avant 1962, et continuent de tuer.

(Quotidien d'Oran, El Watan 8.12 / Jeune Indépendant 10.12) A l'occasion du 57e anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l'Homme du 10 décembre 1948, la Ligue algérienne des droits de l'Homme (LADH) dénonce le manque de visibilité et de transparence des politiques goouvernementales algériennes, et estime que les structures existantes sont sans influence réelle sur la vie politique. La ligue de Boudjemaâ Bechir dénonce la volonté du pouvoir de continuer à contrôler le mouvement associatif, de domestiquer le mouvement associatif, la sphère politique et la justice. La LADH relève les poursuites pénales contre des citoyens et des journalistes dénonçant la corruption, et contre des défenseurs des droits humains. Elle relève que les institutions et les lois violant les droits humains n'ont pas été abolies, que la vérité sur les événenements passés n'a toujours pas été faite et que les auteurs des atteintes aux droits humains jouissent de l'impunité. Elle demande au gouvernement de se conformer aux textes internationaux des droits humains, et en particulier à lever les réserves sur la convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, à ratifier les statuts de la Cour pénale internationale, à ouvrir le champ politique et à lever l'état d'urgence.

Pour sa part, le président de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'homme (CNCPPDH, officielle), Farouk Ksentini, a déclaré qu'aucun cas de torture n'avait été signalé en Algérie depuis novembre 2004, et a estimé qu'il faudra encore quatre à cinq ans pour que l'Etat de droit s'installe en Algérie.

(Jeune Indépendant, El Watan, Quotidien d'Oran, L'Expression 8.12 / Jeune Indépendant 10.12) Le président de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'homme (CNCPPDH, officielle), Farouk Ksentini, chargé par le président Bouteflika de "gérer" le dossier des "disparus", a annoncé le 7 décembre que sur 6146 dossiers de "disparitions" ouverts, 3000 étaient des "faux disparus", soit des personnes ayant rejoint les maquis islamistes ou ayant quitté l'Algérie, ou ayant été retrouvées sans que leurs familles (ni eux-mêmes) en aient informé les autorités. Par ailleurs, toujours selon Farouk Ksentini, plus des trois quarts des familles concernées (77 %) ont accepté l'indemnisation proposée par le gouvernement -indemnisation dont le montant n'a pas encore été fixé. Le président d'honneur de la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme (LADDH), Ali Yahia Abdennour, conteste les chiffres de Farouk Ksentini : des disparitions collectives n'ont pas été signalées, et par conséquent les dossiers ouverts par la commission de Farouk Ksentini ne concernent qu'une partie seulement des "disparition". En outre, la LADDH affirme qu'aucun dossier n'a encore été réglé. Les organisations de familles de disparus exigent quant à elle "la vérité et la justice", et d'abord de connaître le sort réservé à leurs proches : "S'ils sont morts, qu'on nous le dise et qu'on nous rende leurs corps, et s'ils s'ont encore en vie, qu'ils soient libérés", a lancé la porte-parole de SOS-Disparus, Nacera Dutour. La porte-parole de l'Association nationale des familles de disparus (ANFD), Mme Ighil, considère que les déclarations de Farouk Ksentini renforcent "la conviction des familles de disparus qu'aucune volonté n'est affichée pour résoudre le problème", et que les propositions de la commission Ksentini ne sont que de "la poudre aux yeux". Le président de l'association "Somoud", Ali Merabet, exige quant à lui que Farouk Ksentini livre sa liste de "faux disparus" afin qu'elle puisse être comparée avec les listes de "disparus" dont disposent les associations des familles.

Lors d'une journée d'étude organisée conjointement par la LADDH et la fondation allemande Friedrich-Ebert, proche des syndicats et du parti social-démocrate, les organisations de familles de disparus ont appelé l'Algérie à ratifier la convention internationale du 23 septembre 2005 pour la protection contre les disparitions forcées. Pour le président de la LADDH, Hocine Zerouane, "le crime de disparition souffre d'un vide juridique que seule cette convention internationale pourrait combler". La convention définit le crime de disparition forcée comme un crime contre l'humanité, qu'aucune situation exceptionnelle ne peut justifier, et dont les responsables doivent être pénalement tenus pour tels par l'Etat. Sont responsables des "disparitions" aux termes de la convention toutes les personnes qui les commettent, les ordonnent ou les commanditent, ainsi que "le supérieur qui savait que des subordonnés placés sous son autorité et son contrôle commettaient ou allaient commettre une disparition". N'étant pas rétroactive, la convention ne peut cependant s'appliquer aux disparitions survenues en Algérie avant 2005.

(Quotidien d'Oran 10.12 / El Watan 11.12) Le nombre de personnes incarcérées en Algérie sous le régime de la détention préventive est passé de 13 à 11 % du total des incarcérations, selon le directeur général de l'administration pénitentiaire, Mokhtar Felioune. L'Algérie compterait officiellement 42'000 détenus, dans 127 centres pénitentiaires. En février 2005, le parlement a adopté une loi sur l'organisation pétentiaire prévoyant la construction de 51 nouvelles prisons, d'une capacité totale de 36'000 places, respectant les normes et standards internationaux en matière de sécurité, prise en charge sanitaire et médicale, éducation, divertissement et visites. Ce programme ferait passer la surface disponible par détenu à 9 m2, en-dessous des 12m2 reconnus comme la norme internationale, mais largement en-dessus de la situation actuelle, marquée par le surpeuplement, et n'offrant 1,68 m2 par détenu.

Une quarantaine de détenus de la prison de Chlef, l'un des plus importantes d'Algérie (avec plus de 3000 détenus) ont manifesté le 7 décembre contre leurs conditions de détention, en se retranchant dans leurs cellules et en bloquant des accès à deux salles de la prison. Les gardiens sont intervenus, des bagarres ont eu lieu, faisant des blessés.

Avocats sans frontières a annoncé que la visite prévue en Algérie de sa délégation a été annulée le 7 décembre, après le refus des autorités d'accorder le visa d'entrée aux membres de la délégation. ASF avait prévu cette visite, organisée avec le réseau Euromed des droits de l'homme, pour préparer l'installation d'une représentation en Algérie, afin de défendre gratuitement les personnes les plus vulnérables devant les tribunaux.

(Jeune Indépendant 22.12) L'organisation américaine "Freedom House" estime, dans son rapport 2006 sur l'état des libertés dans le monde, que l'Algérie ne pèeut être considérée comme un pays libre. Sur une échelle de notation allant de 1 (maximum de libertés) à 6 (minimum de libertés), l'Algérie est placée à 5 pour les libertés publiques et à 6 pour les droits politiques. Aucun pays arabe n'est considéré comme "libre" par "Freedom House"*, qui ne considère, au mieux, que comme "partiellement libres" la Mauritanie et le Maroc, alors que l'Egypte, la Tunisie et la Libye sont "non libres" (comme l'Irak). Le seul Etat du Moyen-orient que "Freedom House" considère comme "libre" est Israël.

* nous n'avons hélas pas d'information sur la "quotation" des USA par "Freedom House".

"Freedom House" n'est pas vraiment une ONG : elle a été créée par l'administration Roosevelt pendant la Guerre Mondiale (comme instrument de la lutte contre le nazisme, le fascisme et l'impérialisme japonais); elle a servi d'instrument aux diverses administrations américaines pendant la Guerre Froide. Elle est présidée actuellement par un ancien patron de la CIA, James Woolsey, et a été chargée par l'administration Bush de présenter annuellement un rapport sur les libertés publiques et politiques dans le monde, sur la base duquel les USA décideront d'accorder ou non une aide au développement. Elle a ouvert un bureau en Algérie

(Algerie-dz.com, Quotidien d'Oran 31.1) La Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme (LADDH) a inauguré le 30 janvier le premier Centre de documentation et d'information sur les droits de l'Homme (CDDH), à Alger, en présence de représentants de l'Union européenne, qui en a soutenu la création, et de plusieurs ambassades. "Les droits de l'Homme commencent à avoir une histoire en Algérie et l'ambition de la LADDH est justement d'en construire la mémoire", a déclaré le président de la Ligue, Hocine Zerouane. le président d'honneur, et fondateur, de la LADDH, Ali Yahia Abdennour, a quant à lui exprimé son espoir de "construire un institut des droits de l'Homme en Algérie", qui serait un exemple pour toute l'Afrique.

La création du CDDH entre dans le cadre des activités du programme européen Avicenne, de promotion des droits humains au sein de la société civile en Algérie à travers la formation et l'éducation civique.

(Quotidien d'Oran, L'Expression, Le Jeune Indépendant 24.1 / L'Expression 30.1) "Des progrès immenses ont été accomplis en Algérie en matière de droits de l'homme", a déclaré le 23 janvier le président de la Commission nationale consltative de promotion et de protection des droits de l'Homme (CNCPPDH, officielle), Farouk Ksentini, qui a cependant relativisé (involontairement ?) ces "progrès immenses" en ajoutant qu'ils ont été faits à partir d'une situation d'absence absolue de respect de ces droits, pendant la période coloniale, après l'indépendance et dans "le contexte des années de terrorisme". Farouk Ksentini a reconnu que "les droits de l'homme sont une culture qu'il est difficile de répandre auprès des citoyens". Le président de la CNCPPDH affirme que la majorité des familles de "disparus" (du moins de ceux, au nombre de 5000, dont la commission ad hoc a reconnu la "disparition") est favorable à l'indemnisation proposée par le gouvernement. Il affirme également que son "souci premier" est de "dire toute la vérité" sur ce dossier, mais ajoute qu' aucune personne n'est détenue "secrètement" par l'Etat, et qu'"aucune preuve n'a été établie sur l'existence de lieux secrets de détention". Selon lui, un demi-million d'Algériennes et d'Algériens ont été interpellés pendant la "décennie noire" pour des faits de "terrorisme", mais toutes ces personnes ont été soit jugées, soit relâchées, et "aucun disparu ne figure parmi elles". Sur ce point, le président d'honneur de la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme, Ali Yahia Abdennour, estime également qu'aucune personne portée disparue ne se trouve dans les prisons algériennes : "les disparus sont tous morts", et leurs familles "sont prêtes à admettre cette vérité, mais c'est à l'Etat algérien de faire le geste" de la leur annoncer.

Farouk Ksentini demande aux ONG internationales de reconnaître qu'elles se sont "trompées" sur l'Algérie et les accuse d'avoir "pris fait et cause pour le terrorisme et contre l'Etat algérien en qualifiant les groupes terroristes de groupes d'opposition" et en donnant l'impression "que les services de sécurité faisaient la guerre à des démocrates qui voulaient arriver pacifiquement au pouvoir".

(Algeria Watch 24.1 / El Watan 26.1 / ODHA 27.1) L'association Algeria-Watch signale la "disparition" d'un homme de 36 ans, Meziche Naâmane, depuis son arrivée à l'aéroport d'Alger en provenance de Francfort, le 5 janvier. Selon Algeria-Watch, il a été arrêté à son arrivée, conduit au commissariat de Châteauneuf (Ben Aknoun), d'où il a pu téléphoner à sa mère, et transféré après deux jours de détention aux services du DRS (Département du renseignement et de la sécurité, ex-Sécurité Militaire), en un lieu que la police a affirmé à sa famille ne pas connaître, et pour y être interrogé au sujet d'activités "terroristes" présumées à l'étranger. Au terme de la période légale du garde à vue, expirant le 12 janvier, ses proches affirment n'avoir reçu aucune nouvelle de lui. Le 27 février, l'Observatoire des droits de l'Homme en Algérie (ODHA) affirme toujours n'avoir aucune nouvelle de Meziche Naâmane. Le père et le frère de Meziche Naâmane (qui est né en France, est double national franco-algérien et réside en Allemagne depuis 1992), arrêtés respectivement en janvier et en mai 1995 par le DRS, sont depuis portés disparus, et son frère, qui avait rejoint un groupe armé, a été abattu par l'armée en 1996. La famille de Meziche Naâmane affirme qu'il n'était ni recherché, ni condamné, et qu'il avait pu entrer et séjourner librement en Algérie en août 2005. Algeria-Watch exprime sa crainte qu'il soit maltraité et torturé dans un centre de détention secret et demande aux autorités françaises (puisque Meziche a la nationalité française) de s'assurer de son sort. Amnesty International demande pour sa part aux autorités algériennes de respecter les dispositions du code pénal algérien, notamment la durée légale de 12 jours de la garde à vue, et autorisent les proches de Meziche Naâmane à communiquer avec lui et à lui rendre visite.

(Liberté 31.1) Sans se prononcer explicitement en faveur de l'abolition de la peine de mort en Algérie, et tout en déclarant qu'elle n'était pas à l'ordre du jour, le ministre de la Justice Tayeb Belaïz a estimé le 30 janvier que cette abolition ne serait qu'une "pure formalité", puisque la peine de mort n'est plus exécutée depuis 1993 -quoique des dizaines de condamnations à mort ont été prononcées depuis cette date.

2006

(ODHA 2.1) La famille et les avocats de l'ancien "numéro deux" du Front islamique du Salut, Ali Benhadj, annoncent qu'il a entamé le 2 janvier une grève de la faim pour prétester contre les conditions d'incarcération, l'isolement, la privation de journaux et l'absence de soins des détenus islamistes.

(El watan 16.1) Le bureau de Ghardaïa de la Ligue algérienne pour la défense des droits de l'Homme (LADDH) exige, dans un communiqué, l'envoi d'une commission nationale d'enquête "probante et indépendante" sur un meurtre dont ont été accusés deux militants des droits humains, et militants du Front des forces socialistes. La LADDH accuse "l'auxiliaire de la justice" de vouloir à tout prix faire avouer à un jeune homme que le meurtre a été commis à l'instigation du FFS, et la Ligue se demande "si l'appartenance et l'activisme dans un parti politique légal constituent un délit passible de peines judiciaires". La LADDH exige la reprise d'une instruction "sérieuse et crédible" de toute l'affaire.

(El Watan 4.2) Un adolescent de quinze ans a été tué dans l'explosion d'une mine antipersonnel datant de la guerre d'indépendance, à Haraz, près d'Aïn Sefra, le 31 janvier. Sur les 1050 kilomètres des lignes Challe et Morrice (les "barrières" tracées pendant la Guerre d'Algérie par les Français pour empêcher les infiltrations de combattants algériens depuis le Maroc et la Tunisie), on estime que plus de trois millions de mines pratiquement indétectables (de type "encrier") ont été disséminées. En cinquante ans, ces mines ont tué selon un décompte algérien datant de 2004, 40'000 personnes et en ont blessé, et souvent amputé, 80'000 autres. Il reste plusieurs centaines de milliers de ces mines, ou de mines d'autres types (à pression bondissantes, à fragmentation etc...), toujours en état de tuer ou de blesser.

(ODHA 12.2 / El Watan, le Figaro 13.2) Un franco-algérien résidant en Allemagne, et arrêté à son arrivée à Alger le 5 janvier en provenance de Francfort, Nouamane Meziche, était toujours porté disparu le 12 février, depuis le 7 janvier, où il a été localisé plur la dernière fois au centre policier de Châteauneuf (Ben Aknoun). Le Collectif des familles de disparus en Algérie (CFDA) a exprimé dans un communiqué son inquiétude sur son sort : "la disparition de M. Mezicbe est vivement inquiétante dans la mesure où plusieurs éléments permettent de croire que des menaces sérieuses pèsent sur sa personne", déclare le CFDA, qui rappelle que le délai maximum de garde à vue de 12 jours prévu par la législation algérienne (et qui ne s'applique qu'aux affaires de "terrorisme", le délai étant plus court en droit commun) est largement dépassé par la durée de la "disparition" de Nouamane Meziche (plus d'un mois). En outre, le père et le frère du "disparu" ont également "disparu" en 1995 après leur arrestation par les services du DRS (Sécurité militaire), et en 1996 un autre frère de N. Meziche a été abattu par le DRS.

Selon les avocats de Meziche Naâmane, le Comité des disparitions forcées de l'ONU a adressé une requête urgente au gouvernement algérien pour s'enquérir du sort du "disparu".

La famille d'un autre homme, M'hammed Benyamina, porté disparu depuis six mois, accuse la France de l'avoir livré à l'Algérie et l'Algérie de le détenir secrètement et de le torturer. M'Hamed Benyamina a été interpellé le 9 septembre 2005 à Oran et a disparu depuis. Son avocat a porté plainte en France pour "enlèvement et séquestration", et suggère que l'homme a été arrêté en Algérie sur demande des autorités françaises, qui le surveillent depuis des mois et le suspectent d'être lié à des groupes islamistes algériens et tunisiens. L'avocat de Benyamina affirme que son client a été interpellé (en compagnie de son neveu, qui sera relâché plus tard) par la police algérienne alors qu'il s'apprêtait à repartir pour la France, et qu'il a été interpellé en vertu d'un mandat délivré par la justice française. Benyamina aurait avoué être lié à un groupe projetant des attentats contre la DST française (contre-espionnage), l'aéroport d'Orly et le métro parisien. Des sources policières françaises ont reconnu avoir "signalé" le suspect aux autorités algériennes, d'autres sources signalait le réciproque (le "signalement" de Benyamina par les Algériens aux Français).

(Le Quotidien d'Oran 8.3) Le président Bouteflika a honoré la journée mondiale des droits des femmes en décrétant des grâces au bénéfice de près de 300 détenues définitivement condamnées : 152 grâces totales et 130 grâces partielles (remises partielles de peines) ont été accordées par le président.

(Le Quotidien d'Oran 11.3) Le rapport annuel du Département d'Etat américain sur la situation des drois de l'Homme das le monde (sauf aux USA), publié le 8 mars, évoque onze "problèmes de droits de l'Homme en Algérie" : la question des "disparus", la torture des détenus (notamment dans les prisons militaires), l'impunité, les arrestations arbitraires, l'usage abusif de la détention préventive, les arrestations arbitraires, le manque d'indépendance de la justice, le doute sur la justice (ou la justesse) des procès, les restrictions des libertés civiles (notamment la liberté de la presse), politiques et religieuses, la corruption, le manque de transparence gouvernementale, la discrimination envers les femmes et les minorités, les violations des libertés syndicales. Le rapport américain estime cependant que "le gouvernement a fait des progrès importants dans le renforcement des drois de l'homme" et assure qu'il n'y pas eu en 2005 de "meurtres politiquement motivés" commis par des agents de l'Etat, et qu'"aucune disparition n'a été signalée". En revanche, les "terroristes ont visé des civils, des membres des forces de sécurité et des infrastructures", et des actes de "vengeance", de "banditisme" et des litiges fonciers ont conduits à des meurtres. Par ailleurs, "aucune pousuite" n'a été diligentée contre des membres de forces de sécurité dans les cas des "disparitions". Le rapport du Département d'Etat note curieusement que ls conditions de détention dans les pisons algériennes "satisfont généralement aux niveaux internationaux", alors que même le gouvernement algérien reconnaît que tel n'est pas le cas*, mais note que les prisons militaires et les prisons de grande sécurité sont toujous interdites aux inspections du CICR et que plusieus grèves de la faim ont été observées dans plusieurs prisons, pour protester contre la durée des détentions préventives.

* si l'étiage des "niveaux internationaux" évoqués par l Département d'Etat est indiqué par les conditions de détention à Guantanamo ou Abou Ghraïb, les conditions de détention dans les prisons algériennes y satisfont, en effet.

(Reuters 22.3) Selon le Premier ministre Ouyahia, le nombre des "disparus" atteindrait 8000 personnes, alors que le chiffre officiel n'en reconnaît que 6146.

(AI 18.4 / El watan 25.4) Amnesty International écrit au président algérien pour lui faire part de ses préoccupations relatives à la torture. Dans un mémorandum de 34 pages adressé au présidnt Bouteflika, Amnesty fournit des détails sur des cas de torture et de détention secrète, et accuse le DRS (Sécurité Militaire) de recourir à ce genre de pratiques. L'organisation reproche aux autorités d'être incapables d'engager des investigations sur les cas de torture portées à leur connaissance. Elle dénonce l'absence de garanties sur la tenue de procès équitables, le dépassement des délais de garde à vue (12 jours, ce qu'elle considère comme déjà excessif), la détention de suspects non inculpés dans des lieux de détention secrets, sans information à la justice.


Amnesty International demande au président algérien Abdelaziz Bouteflika de prendre des mesures efficaces pour mettre un terme à la torture et à la détention au secret de suspects présumés de terrorisme

Dans une note envoyée au président, Amnesty International fournit des informations détaillées sur les résultats de ses recherches concernant l’arrestation et la détention de personnes soupçonnées de terrorisme au cours des quatre dernières années. Amnesty International invite les autorités algériennes à fournir des informations sur toute enquête qui aurait été menée sur les 12 cas particuliers d’allégations de détention au secret et de torture signalés à notre organisation depuis 2002. Les recherches d’Amnesty International ont révélé qu’il existe toujours un risque réel de torture pour toute personne soupçonnée d’implication dans des activités terroristes.

Le Département du renseignement et de la sécurité (DRS), le service de renseignement militaire algérien, joue un rôle clé dans l’arrestation et la détention de suspects de terrorisme. Quand des suspects sont arrêtés et détenus par le DRS, où que ce soit, les garanties du droit international et algérien relatives à la protection des détenus sont régulièrement bafouées. Des suspects non inculpés sont maintenus systématiquement dans des lieux de détention secrets, sans aucun contact avec le monde extérieur, et des actes de torture et autres mauvais traitements sont régulièrement signalés. Les familles des personnes détenues par le DRS ne sont pas informées de leur lieu de détention.

Dans certains cas, des personnes restent détenues au secret par le DRS pendant des mois avant d’être traduites devant un juge. Quand elles comparaissent devant un juge pour la première fois, ces personnes ne sont généralement pas assistées d’un avocat. Si des détenus se plaignent aux autorités judiciaires d’avoir été torturées en détention par le DRS, leurs plaintes semblent régulièrement rejetées sans enquête. Selon le droit algérien, les membres du DRS ont un statut militaire, mais doivent opérer sous l’autorité du procureur général quand ils arrêtent des suspects et les placent en détention. En pratique, cependant, aucune institution civile n’exerce de surveillance réelle sur les pratiques du DRS. Les procureurs ne font pas respecter les garanties du droit algérien, et ne seraient fréquemment pas informés des arrestations auxquelles procède le DRS.

Les suspects détenus par le DRS sont placés dans des baraquements militaires, qui ne sont pas des lieux de détention officiellement reconnus. Les procureurs ne semblent guère user de leur prérogative de visiter ces locaux pour s’assurer que les détenus sont traités dans le respect des normes édictées par le droit algérien. Amnesty International demande au président algérien de restreindre les pouvoirs du DRS et d’instituer une surveillance civile efficace de toutes les détentions, afin de mettre un terme au système de détention au secret et de torture dont le DRS est responsable. Le DRS ne doit pas conserver des pouvoirs d’arrestation et de détention, qui doivent être réservés à d’autres responsables du maintien de l’ordre.

Amnesty International demande également au président algérien de : faire respecter les garanties protégeant les détenus contre la détention au secret et la torture, telles qu’elles figurent dans le droit international et algérien, et mettre fin à la détention de suspects dans des lieux de détention non officiels ; faire en sorte que toutes les allégations de torture ou autres mauvais traitements fassent l’objet d’une enquête, dans le respect des obligations internationales de l’Algérie, et que tous les responsables soient traduits en justice ; transmettre au Rapporteur spécial des Nations unies sur la torture une invitation à se rendre en Algérie dans un avenir proche.


Pour obtenir un exemplaire du document d'Amnesty International

(ODHA 7.4, 8.4, 15.4) L'Observatoire des droits de l'Homme en Algérie (ODHA) signale l'arrestation à l'aéroport d'Alger, le 6 avril, à son arrivée de Ouagadougou, d'un homme, Soufiane Naami, expulsé de France en 1994 vers le Burkina Faso avec 18 autres personnes, et qui avait décidé, ayant semble-t-il reçu des "garanties" algériennes sur sa sécurité et sa liberté, de revenir en Algérie. Arrêté à sa descente d'avion le 6 avril, il a été emmené par des policiers, sans explication, mais avec la promesse donnée à son père qu'il allait être relâché "bientôt". Selon l'ODHA, il aurait été ensuite détenu à Chateauneuf. Après 10 jours de garde à vue, et cinq interrogatoires sur ses activités en France avant son expulsion en 1994, il a été relâché et mis sous contrôle judiciaire, avec interdiction de retourner dans sa famille.

(Liberté, El Khabar 24.4) Une liste nominative de 7100 noms de personnes "disparues", dont 3000 sont officiellement considérées comme décédées, a été établie par la Commission chargée de faire le bilan de la mise en oeuvre de la Charte sur la paix et la réconciliation. Ce chiffre de 7100 "disparus" rejoint celui donné par la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'Homme (CNCPPDH, officielle), mais est considérablement plus bas que celui avancé par les organisations de familles de "disparus", qui situent le nombre de "disparitions" dans une fourchette de 15 à 20'000 personnes.

La Coordination nationale des familles de "disparus" a écrit au Secrétaire général des Nations Unies Kofi Annan pour l'alerter sur "la gravité des lois découlant de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale", qui ne répond pas aux exigences de "révélation de la vérité et d'établissement de la justice". La Coordination appelle a la création d'un tribunal international capable de juger ceux qui sont responsables de la crise algérienne. Elle dénonce la fermeture du débat sur la question des "disparus" et l'octroi, dans le cadre de la Charte pour la paix et la réconciliation, de privilèges aux criminels sur le dos de leurs victimes.

(ONU 9.5 / Corr.) L'Algérie a été élue le 9 mai au nombre des 47 membres du nouveau Conseil des droits de l'homme de l'ONU, "organe subsidiaire de l'Assemblée Générale", qui siégera à Genève à partir du 19 juin. L'Algérie y siégera, pour un an, comme la Tunisie et le Maroc au titre du groupe des Etats africains (13 sièges), aux côtés des 13 représentants de l'Asie, des 8 de l'Amérique latine et des Caraïbes, des sept (dont la France, pour deux ans, et la Suisse pour trois ans) pour l'Europe occidentale et "autres Etats" et des six d'Europe "de l'Est". Dans le groupe africain, le Kenya, quatorzième candidat, s'est désisté au dernier moment, ce qui a permis l'élection tacite des treize postulants restant pour les treize sièges à pourvoir. La durée des mandats de chaque pays élu (un, deux ou trois ans) est tirée au sort. L'Algérie a été élus pour un an. Les membres du Conseil des droits de l'homme pourront être suspendus de leurs droits à la majorité des deux tiers de l'Assemblée Générale, si ils sont reconnus coupables de violations "flagrantes et systématiques" des droits de l'Homme.

Le Conseil remplace la Commission des droits de l'Homme de l'ONU. Sa création a été décidée en septembre 2005.

Reporters sans frontières a dénoncé l'élection au Conseil des droits de l'Homme de pays qui "violent massivement les droits des journalistes et la liberté d'expression" : l'Algérie, l'Arabie Saoudite, l'Azerbaïdjan, le Bangladesh, la Chine, Cuba, le Nigeria, le Pakistan, la Russie et la Tunisie. RSF note en outre que 17 des 47 pays élus sont membres de l'organisation de la conférence islamique, et que 90 % des exécutions capitales commises dans le monde en 2005 l'ont été dans des pays élus au Conseil des droits de l'Homme.

Opposés à la création du Conseil, les USA n'y ont pas présenté leur candidature, mais ont néanmoins participé à l'élection de ses membres.

Justitia Universalis prend position sur la candidature de l'Algérie au Conseil des Droits de l'Homme

(source : Bulletin de la Coordination Nationale des Familles des Disparus en Algérie - Nº 2 - 2ème trimestre 2006)

Après avoir décrété, dans l'indifférence de la population, la mise en oeuvre de la « Charte de paix et de réconciliation » garantissant l'impunité aux criminels encore au pouvoir, en retraite et/ou convertis aux affaires, Charte encouragée par l’ignominieuse déclaration du président du Parlement européen - qui n’a pas eu le courage de répondre à la lettre que lui a adressé la Coordination Nationale des Familles de Disparus - le régime algérien vient de franchir un nouveau pas dans l'arrogance et l'absurde en se posant comme exemple d'un Etat de droit.

L'Algérie et le droit international

A lire les motivations d'ordre juridique de la demande de cette candidature*, on croirait volontiers que l'Algérie « a toujours inscrit dans ses priorités la promotion des droits de l'Homme ». Qui dit mieux ?

N’est-ce pas l'Algérie qui, une décennie après l'annulation des premières élections libres de son histoire, peut afficher un bilan à faire pâlir de jalousie Pinochet et Videla réunis ? 150 000 à 250 000 morts, des milliers de disparus, sans oublier des dizaines de milliers de traumatisés à vie que sont les familles de disparus, les torturés et les violés. Et que dire de l’instauration des Cours spéciales inspirées du régime de Vichy ? Les victimes se reconnaîtront-elles dans cet Etat ? Elles viennent justement, par cet oukase, se voir fermer toute possibilité de recours à la justice et, les familles de disparus, « conviées à venir chercher le certificat de décès » sont sommées de se taire, sous peine de poursuites pénales.

Est-ce bien en Algérie que l’on a installé une Commission « indépendante » de promotion des droits de l’Homme qui, en cinq ans d’existence, n’a pas été capable - ou n’a pas eu la volonté - d’enquêter sur un seul un cas de disparition forcée? Qui plus est, son président, M. Ksentini, n’hésite pas à affirmer que le crime de disparition est prescriptible ? Un piteux exemple de la prétendue « adhésion aux instruments juridiques internationaux en matière de droits de l'homme [qui] a permis [à l’Algérie] de poursuivre graduellement la mise à niveau de sa législation nationale par rapport aux standards internationaux. »

La presse algérienne

On veut bien admettre que, depuis la fin des années quatre-vingts, « la presse se distingue par sa variété, sa richesse et la liberté de son ton » mais force est de constater que les tribunaux jugeant et emprisonnant les journalistes ne désemplissent pas. Les affaires les plus récentes datent de ce mois d'avril même. Oui, en Algérie, on peut être journaliste, à condition d’être au moins révérencieux, ou mieux encore, un « chien de garde ». Après avoir des années durant, comme M. Benchicou, directeur du défunt quotidien Le Matin, l’a affirmé lui-même, « pris la défense [de l’armée] en de nombreuses circonstances, notamment dans le débat du « qui tue qui » et qui, (enfin !) pris de doutes, assène que « la hiérarchie militaire ne doit plus compter sur nous pour transmettre ses messages ». Ce journaliste « repenti » se trouve aujourd’hui écroué pour crime de lèse-majesté(s). Vous avez dit liberté de la presse ?

Le quotidien des Algériens

On veut bien applaudir une Algérie qui, « dès son indépendance », s'est attelée « pour assurer à ses citoyens l'exercice de leurs droits fondamentaux […] ce qui lui a permis de réaliser des progrès considérables, de réduire notablement la pauvreté […]. » La réalité veut, hélas !, que malgré une réserve officielle de devises dépassant les 55 milliards de dollars, le quotidien d'une grande partie de la population (dont 14 millions de personnes vivent en dessous du seuil de pauvreté) est plus que difficile, sinon insoutenable.

Manifestations et émeutes se banalisent à travers le pays en raison du chômage endémique qui affecte surtout les jeunes, sans compter l’absence Réponse de « l’Etat de droit » : envoyer la police anti-émeutes.

Et que dire de la situation du logements, des privations d'eau, d'électricité… de la situation de la femme qui n’a cessé de se dégrader durant ces dix dernières années (paupérisation, prostitution, régression de la scolarisation des filles) ? Bel exemple de progrès social !

Ainsi, la présence dans le Conseil des Droits d'Homme d'un pays comme l'Algérie - qui, il faut le rappeler, il n'y a pas si longtemps, s'opposait activement au projet de Convention internationale sur les disparitions forcées, et où l'état d'urgence est toujours en vigueur - viendrait certainement entacher la mutation et la crédibilité de cette importante instance des Nations-Unies. Le rejet de la candidature de l'Algérie serait, au contraire, un message d'espoir pour les victimes et les défenseurs des droits de l'Homme.

Anouar Koutchoukali, secrétaire général La Haye, 08 avril 2006


(El Watan 23.5) Dans son rapport annuel sur l'état des droits de l'homme en 2005, Amnesty International signale que "de nouvelles informations ont fait état du recours à la torture, notamment contre des personnes soupçonnées d'appartenance à un groupe terroriste", et dénonce les "restrictions à la liberté d'expression" et le prononcement de peines d'emprisonnement pour diffamation contre une vingtaine de journalistes. AI déplore que le processus de réconciliation laisse "impunis" les auteurs des crimes : "L'impunité (reste) l'obstacle principal au traitement des séquelles du passé : des dizaines de milliers de cas d'homicide, d'enlèvement, de disparition et de torture (...) (n'ont) toujours fait l'objet d'aucune enquête". Amnesty note que "le niveau de violence a diminué par rapport aux années précédentes", mais que "plusieurws centaines de personnes dont des dizaines de civils ont été tuées" en Algérie en 2005.

(L'Expression 25.5) La peine de mort n'a plus de raison d'être dans la législation algérienne, a admis Farouk Ksentini, président de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'homme (CNCPPDH, officielle), qui estime que le maintien de la peine de mort dans l'arsenal pénal est à l'origine du blocage des procédures d'extradition vers l'Algérie. Farouk Ksentini demande donc l'abolition de la peine de mort.

La peine de mort n'est cependant plus appliquée depuis 1993, sinon sous la forme d'exécutions sommaires, extrajudiciaires. Des condamnés à mort ont par ailleurs été graciés à la suite de décisions présidentielles.

(Corr. / Le Monde 1.6 / El Watan 18.6 ) Le Comité des droits de l'Homme de l'ONU a déclaré l'Etat algérien coupable de "graves violations" des droits humains, et plus précisément du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, dans deux affaires de disparitions forcées, celles de Salah Saker, arrêté en mai 1994 à Constantine et de Riadh Boucherf, enlevé à Alger en juillet 1995. L'un et l'autre ont été emmenés dans des commissariats de police, puis ont disparu. Le Comité de l'ONU a agi dans les deux cas sur plaintes des familles, en 2002 et 2003. Dans les deux cas, le gouvernement algérien avait nié toute responsabilité dans ces "disparitions". Le Comité donne 90 jours à l'Algérie pour engager des enquêtes approfondies sur les deux disparitions, engager des poursuites pénales contre leurs auteurs, les juger et les punir, et, si les deux hommes sont toujours en vie et détenus par les autorités, les libérer sans délai. Le Comité demande aux autorités algériennes de rendre compte aux familles du résultat de leurs enquêtes. Le fait que le Comité demande aux autorités dêngager des poursuites pénales contre des auteurs de "disparition", de les juger et de les punir, implique que pour le Comité les dispositions amnistiantes de la Charte présidentielle pour la paix et la réconciliation sont nulles et non evanues dans des cas relevant de crimes contre l'humanité, de tels crimes étant en droit international inamnistiables et imprescriptibles.

Le Comité reconnait donc le droit des familles de "disparus" d'introduire des requêtes devant les autorités nationales algériennes, comme devant les instances internationales, quelles que soient les dispositions des lois nationales, le droit international s'imposant au droit national dans tous les pays ayant ratifié les textes du premier.

Dans un "point de vue" paru dans "Le Monde" le 1er juin, la vice-présidente du Collectif des familles de disparus, Nedjma Benaziza, rappelle que sa grand-mère, âgée de 68 ans et malade, a été enlevée par "des agents de l'Etat en uniforme" le 2 juin 1996, à la place de son fils, et qu'elle n'a plus reparu depuis dix ans.

SOS Disparus Collectif des familles de disparu(e)s en Algérie

COMMUNIQUÉ: L'Algérie condamnée par l'ONU pour les disparitions forcées

(condamnations de l'Algérie dans les cas de Salah Saker et Riad Boucherf)

Le 30 mars 2006, le Comité des droits de l'Homme des Nations Unies, ayant pour mandat d'assurer le respect par les États des droits del'Homme inscrits dans le Pacte international des droits civils etpolitiques, a reconnu l'Algérie coupable de graves violations pour les disparitions forcées de Salah Saker et de Riad Boucherf.

Salah Saker, enseignant, a été arrêté par la police à Constantine en mai 1994. Riad Boucherf, a été enlevé par les forces de l'ordre à Alger en juillet 1995. Tous les deux ont ensuite été emmenés dans des commissariats, mais leurs familles ne les ont plus jamais revus. Ils ont disparu.

Pendant des années, rongées par une même douleur, Mme Madame Bousroual, épouse de Monsieur Saker, et Madame Boucherf, ont écrit à toutes les instances algériennes pour retrouver les leurs. Madame Boucherf déposera 14 requêtes, entre 1995 et 1998, devant la justice, elles seront toutes classées sans suite.

Devant l'attitude méprisante des autorités et le mutisme de la justice algérienne, Madame Saker et Madame Boucherf se sont engagées dans le mouvement de défense des mères de disparu(e)s en Algérie et imposées comme des porte-drapeaux du combat pour la vérité et la justice. En 2000, Madame Saker mandate Maître Sofiane Chouiter, et en 2003, Madame Boucherf, mandate le Collectif des familles de disparu(es en Algérie (CFDA) afin que des plaintes pour la disparition des leurs soient déposées devant le Comité des droits de l'Homme de l'ONU.

Aujourd'hui, les décisions rendues par le Comité, au cours de la même session, dans les affaires de Salah Saker et de Riad Boucherf, sont des précédents : il s'agit des premières condamnations prononcées par le Comité onusien contre l'Algérie. Le Comité laisse 90 jours à l'État algérien pour mener « une enquête approfondie et diligente sur la disparition et le sort de Riad Boucherf et Salah Saker et de remettre ceux-ci immédiatement en liberté si ils sont toujours en vie... ».

C'est une victoire pour les familles de disparu(e)s auxquelles le Comité reconnaît le droit d'introduire des requêtes devant l'ONU au mépris des injonctions de l'État algérien. En voulant fermer l'accès à la justice pour les victimes de l'État, l'Algérie a ouvert la voie à toutes les familles de disparu(e)s pour recourir aux instances internationales.

SOS Disparus, le CFDA et leur avocat Maître Sofiane Chouiter demandent à l'État algérien la *libération immédiate* de Riad Boucherf.

Fait à Alger, le 16 juin 2006


(El Khabar 25.6) La Commission consultative pour la promotion et la protection des droits de l'Homme (CNCPPDH) a annoncé, par la voix de son président Farouk Ksentini, avoir rayé 183 cas de la liste officielle des "disparus" (qui en comportait 5963, alors que les familles de "disparus" ont de leur côté constitué 8000 dossiers), en précisant que ces cas s'étaient avérés concerner des personnes toujours en vie (80 d'entre elles vivant actuellement à l'étranger, selon Farouk Ksentini). le président de la CNCPPDH a déclaré que les radiations de ces cas ont été faites sur demande des personnes concernées elles-mêmes, ou de leurs proches après que ceux-ci aient présenté des documents probant.

Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme (LADDH)

Lettre ouverte de la LADDH à Monsieur Farouk Ksentini, Président de la Commission Nationale Consultative pour la promotion et la protection des droits de l’Homme (CNCPPDH).

Monsieur le président,

La radio nationale (chaîne 03) a mis en exergue dans son bulletin d’information du 23.06.06 à 8 h du matin une interview que vous lui avez accordée et de laquelle il émane que 183 personnes réputées et recensées disparues auraient été retrouvées vivantes et feraient l’objet d’une étude des services de votre organisme et de l’administration quant au traitement et au statut qui leur seront réservés.

La LADDH, sans préjuger de la bonne foi de telles déclarations demande de rendre publique immédiatement la liste complète des personnes en question assortie des renseignements exhaustifs permettant de les identifier et de circonscrire les circonstances de leur inscription au registre des disparus et de leur réapparition aujourd’hui sur la scène publique.

Une telle mesure s’impose pour permettre à l’opinion publique d’être confortée qu’il s’agit là d’une information loyale et dénuée de tout esprit de montage aux fins de manipulations et de désinformation.

Elle permettrait également à tous ceux qui se sentent concernés par le problème des disparus et aux ONG internationales et nationales en particulier dont la notre d’opérer la mise à jour de leur fichier et de considérer cette annonce comme une action positive dans la recherche d’un traitement juste, loyal et global de la question des disparus.

Veuillez croire à l’expression de notre considération distinguée.

Alger le  25-06-06
Maître Hocine Zehouane
Président du Comité directeur de la LADDH.


(ONU 30.6) Lors de sa première session, le Conseil des droits de l'Homme de l'ONU a adopté, par consensus et sans vote le 29 juin, un Traité international sur les disparitions forcées. Le texte proclame notamment "qu'aucune circonstance exceptionnelle, qu'il s'agisse de l'état de guerre ou de menace de guerre, d'instabilité politique intérieure (...) ne peut être invoqué pour justifier la disparition forcée", et que tout Etat partie garantit aux victimes des "disparitions" le droit d'obtenir réparation et indemnisation. Ce texte doit encore être soumis à l'Assemblée générale de l'ONU pour adoption.

(Liberté 22.6) S'exprimant le 21 juin lors de l'ouverture à Genève de la première session du tout nouveau Conseil des droits de l'Homme de l'ONU, le ministre algérien des Affaires étrangères Mohamed Bedjaoui a plaidé pour la politique de réconciliation nationale menée par le président Bouteflika et le gouvernement algérien, a défendu les réformes engagées en Algérie, et s'est prononcé et pour un "traitement juste, égal et équitable dans l'interdépendance, l'objectivité et la non-sélectivité" de tous les pays sur la question des droits humains. Mohamed Bedjaoui s'en est prix aux "explications simplistes et réductrices qui ont accordél du crédit aux tueurs d'enfants et de handicapés, ainsi qu'un statut aux criminels qui ont cherché à faire assumer à la religion leurs sinistres forfaits". Le ministre a cependant reconnu, dans une formulation particulièrement contournée, que l'Algérie avait, dans sa lutte contre le terrorisme, "peiné dans la détermination d'un équilibre irréprochable entre sécurité et liberté", et qu'en apportant "des correctifs à un certain déséquilibre dans l'action en faveur de ces deux objectifs, on peut involontairement créér d'autres déséquilibres, affectant par défaut et non par dessein les justiciables eux-mêmes, donnant ainsi matière à des lectures excessives, inspirées par le prisme désormant des préjugés".

Au passage, Mohamed Bedjaoui a assuré que les rapporteurs spéciaux de l'ONU sur la violence à l'égard des femmes et sur la promotion du droit à la liberté d'opinion et d'expression, dont les visites en Algérie en décembre 2005 et janvier 2006 avaient été déprogrammées, étaient toujours les bienvenus en Algérie, qui "se réjouit à la perspective de les recevoir".

(L'Expression 12.7) Le porte-parole de la Gendarmerie, le colonel Ayoub Abderrahmane, a annoncé le 11 juilet que 4200 gendarmes avaient été radiés de ce corps entre 2000 et 2005, la plupart pour manquement à la discipline. La période concernée par ces radictaions comprend celle des "événements" de Kabylie, en 2001, où la responsabilité des gendarmes dans la mort d'une centaine de manifestants a été mise en évidence. Outre les "manquements à la discipline", les raisons des radiations de gendarmes renvoie à des cas d'abus de pouvoir et de corruption, selon "l'Expression".

(L'Expression 24.7) Selon le ministre de la Justice Tayeb Belaïz, la population pénale a atteint 51'000 personnes détenues en Algérie, soit plus de 12'000 détenus supplémentaires par rapport à 2003. Cette population carcérale est détenus dans 127 établissements, dont 78 % ont été construits avant 1962, et dont presque tous sont vétustes et surpeuplés. Certains datent d'ailleurs du XIXe siècle. 51 nouveaux établissements pénitenciaires devraient être construits. La vétusté et la saturation des établissements pénitentiaires algériens ont été la cause ces dernières années de nombreuses mutineries, d'actes de violences, de déclenchement d'incendies volontaires, de suicides et d'automutilations.

(Liberté 20.6) La coordinatrice du CICR en Algérie, Elizabeth Knecht, a annoncé qu'en 2005 le Comité international de la Croix-Rouge avait visité une vingtaine d'établissements pénitentiaires en Algérie, dans "plusieurs régions". Lors de ces visites, les délégués du CICR se sont notamment entretenus avec les responsables des centres de détention pour soulever les problèmes constatés, et que le CICR a ensuite opéré dans plusieurs centres déjéà visités de nouvelles visites pour vérifier si les améliorations demandées ont été effectuées.

(Algeria-Watch 4.7) Algeria-Watch signale que, selon des informations non vérifiées mais qui lui semblent "fiables", cinq hommes ont été enlevés dans la nuit du 26 au 27 avril à El-Aouana, près de Jijel, par des agents du DRS (Sécurité militaire) en civil. Les cinq hommes ont été transférés au siège du DRS à Jijel et détenus au secret pendant une semaine, avant d'être innocentés des accusations de "soutien au terrorisme" portées contre eux. Selon Algeria-Watch, les cinq hommes ont été torturés : déshabillés, contraints de s'assoir sur une bouteille de limonade, brûlés, contraints de boire de l'eau savonneuse en abondance, frappés avec des cannes et des cravaches, et sodomisés.

(Quotidien d'Oran 4.7) Le président Bouteflika a décidé le 3 juillet de mesures de grâce bénéficiant aux journalistes condamnés pour outrage à fonctionnaire, outrage à institutions et corps constitués, diffamation e/o injures, ainsi qu'aux détenus condamnés définitivement et ayant suivi une formation sanctionnée par des examens réussis.

(Le Monde, El Watan 11.7 / El Watan 12.7) Selon un rapport d'Amnesty International publié à Londres le 10 juillet, et fondé sur l'examen de cas concrets dont l'organisation s'est saisie entre 2002 et 2006, la pratique de la torture continue en Algérie, par le fait du Département du renseignement et de la sécurité (DRS, Sécurité Militaire), en toute impunité, même si le nombre de cas signalés a diminué. Le document fait état de pratiques tortionnaires (coups, décharges électriques, ingestion forcée d'eau sale, d'urine, de produits chimiques etc.), pratiques qui restent "systématiques", et qui sont justifiées au nom des nécessités de la lutte contre le terrorisme. Le rapport évoque des lieux de détention secrets, sans supervision civile, où les personnes torturées sont maintenues au secret et ne peuvent souvent pendant des périodes prolongées entrer en contact ni avec un avocat, ni avec un médecin indépendant, ni avec leur famille. Les conditions de détention de ces détenus s'apparentent en soi à de mauvais traitements, ajoute l'ONG, qui ajoute cependant qu'en dehors du DRS, les services de sécurité (la police et la gendarmerie) respectent de mieux en mieux les garanties minimales prévues par le droit algérien et le droit international. Le rapport d'Amnesty "cible" spécifiquement le DRS, service entouré de secret alors même que ses agents peuvent exercer des fonctions de police judiciaire.

Le rapport évoque également des cas de renvois forcés en Algérie d'Algériens soupçonnés d'activités "terroristes", et met en cause plusieurs pays dans ces renvois : le Canada, l'Espagne, la France, l'Italie, la Malaisie, les Pays-Bas, notamment. L'organisation demande aux Etats concernés de mettre un terme aux renvois forcés en Algérie de personnes qui risquent d'y subir des actes de torture, et de s'assurer que les personnes arrêtées sur leur demande par les autorités algériennes ne soient pas incarcérées par le DRS. Au passage, Amnesty International exprime de sérieux doute sur la véracité des liens évoqués par les autorités algériennes entre les groupes armés algériens (notamment le GSPC) et la Qaeda, liens évoqués pour renforcer la coopération "sécuritaire" entre l'Algérie d'une part, les USA et l'UE d'autre part.

Amnesty s'inquiète en outre de l'impunité accordée par la loi algérienne de février dernier aux auteurs de crimes de droit international, dont la torture. Pour l'organisation, ces mesures sont contraires aux principes fondamentaux du droit international, et manifestent un déni de vérité et de justice pour les victimes et leurs familles.

Amnesty demande au président Bouteflika de s'engager à enquêter au sujet des allégations de tortures et de mauvais traitements commis par la Sécurité Militaire, de veiller à ce que les agents du DRS n'arrêtent plus de suspects et n'en maintiennent plus en détention, et à ce que toute personne responsable d'actes de torture ou de mauvais traitements infligés à des détenus soit traduite devant la justice.

(CSSI) On notera au sujet de ce rapport le commentaire particulièrement imbécile d'"El Watan" (édition du 12 juillet) accusant (sous la plume d'un improbable A. Benchabane) non seulement Amnesty International de vouer une "haine viscérale" à l'Algérie, mais aussi de ne pas s'intéresser "au terrorisme d'Etat qui se pratique en Palestine, ni aux horreurs de la guerre américano-britannique livrée contre le peuple irakien", et de pas se préoccuper de la torture dans la prison irakienne d'Abou Ghraib. On ne saurait trop conseiller aux auteurs de semblables âneries de prendre connaissance de la longue liste, et si possible du contenu, des rapports et documents produits par Amnesty sur la Palestine, l'Irak et Abou Ghraib.

(El Khabar 13.8) La coordination des associations des familles de disparus a saisi les ONG de défense des droits humains (notamment Amnesty International et la Fédération internationale des droits de l'Homme) du "voile qui entoure l'affaire des disparus" après l'adoption de la Charte sur la paix et la réconciliation nationale, qui a "provoqué une nouvelle torture pour les familles vu les obstacles qu'elles rencontrent sur le terrain", en plus des problèmes déjà rencontrés. La coordination dénonce le fait que la Charte et les lois qui l'appliquent ne prennent pas en compte la requête de vérité et de justice sur les disparitions, et la tentative de régler le problème en dispensant des compensations matérielles à la place de la vérité et de la justice.

(Liberté 30.7 / L'Expression 12.8) Des milliers, peut-être des dizaines de milliers, de mines et bombes artisanales déposées par les groupes armés infestent les régions du nord de l'Algérie. Ces mines ont tué 4000 personnes et en ont blessé 13'000 autres depuis le début des années '90. Plus de 20'000 mines ont été désamorcées, mais 13'000 ont explosé, et les positions de celles qui restent sont inconnues, contrairement aux mines posées pendant la Guerre d'Algérie aux frontières est et ouest par l'armée française. Plus de 200'000 de ces mines françaises (dont près de 160'000 mines antipersonnel et plus de 45'000 mines antigroupes) ont été découvertes et détruites dans les sept premiers mois de 2006. Selon les autorités algériennes, 11 millions de mines ont été posées par l'armée française le long des frontières est et ouest de l'Algéri entre 1954 et 1962.

(L'Expression 9.9 / El Watan 21.9 / Liberté 26.9 / El Watan 30.9 / El Watan 3.10) Selon le président de la Commission nationale consultative pour la promotion et la protection des droits de l'Homme (CNCPPDH, officielle), Farouk Ksentini, 77 % des familles de disparus ont donné leur accord de principe sur les propositions d'indemnisation faites par les autorités dans le cadre de la Charte présidentielle pour la paix et la réconciliation nationale. "Le problème des disparus n'existe plus" puisque "le ministère de la Justice a traité tous les dossiers des personnes disparues", a proclamé le ministre de la Solidarité, Djamal Ould Abbès, qui a ajouté que "les familles concernées par ces disparitions peuvent faire leur deuil". A quoi Farouk Ksentini a répondu que la question des "disparus" ne sera "définitivement résolue (que) lorsque le président de la République (aura) décidé de la clôture", ce qui n'est pas le cas. L'association de familles de disparus SOS-Disparus a dénoncé la "méconnaissance du dossier" par le ministre et son "mépris aux familles victimes du terrorisme".

La Commission consultative des droits de l'Homme a officiellement reconnu 6146 cas avérés de disparitions. A Boumerdès, le Parquet a annoncé que dans la circonscription de Boumerdès et de Rouiba, 304 cas de "disparitions" avaient été officiellement confirmés, dont 140 ont abouti à un jugement de décès. Le porte-parole du Front des Forces Socialistes, Karim Tabbou, s'est demandé pourquoi, dès lors que le pouvoir reconnaissait des milliers de disparitions, il ne reconnaissait pas qu'il y a des milliers de responsables de ces disparitions.

Les familles de disparu(e)s exhortent le Président à trouver une solution juste au dossier des disparu(e)s

COMMUNIQUÉ de SOS DISPARUS
Alger, 5 septembre 2006

Afin de faire entendre leurs voix, SOS Disparu(e)s et les familles de disparu(e)s ont décidé de prolonger exceptionnellement jusqu’à 18 heures leur rassemblement hebdomadaire qui a lieu tous les mercredis matin devant la Commission Nationale Consultative pour la Promotion et la Protection des Droits de l’Homme (CNCDH). Cette manifestation a pour but d’interpeller de nouveau le Président de la République, Abdelaziz Bouteflika, sur le dossier des disparitions forcées en Algérie. Les familles de disparu(e)s exhortent le Président à proposer une solution autre que la Charte pour la paix et la réconciliation nationale et ses textes d’application et ce pour mettre un terme à cette tragédie qui secoue l’Algérie depuis trop d’années.

Au moment où plusieurs personnalités politiques algériennes demandent au Président de proroger les délais d’application de ces textes, SOS Disparu(e)s s’indigne de cet éternel recommencement. En effet, avec la Charte pour la paix et la réconciliation nationale, le peuple algérien revit le même scénario vécu en 1999 avec la Concorde civile. C’est donner de faux espoirs et «remuer continuellement le couteau dans la plaie».

Les autorités algériennes ont toujours refusé d’engager de réelles procédures pour établir la Vérité et la Justice dans le dossier des disparitions forcées dont sont victimes des milliers d’Algériens. Toutes les mesures amnistiantes édictées et appliquées n’ont jamais permis aux familles de disparu(e)s de faire la lumière sur le sort de leur proche. Ces textes de loi occultent la vérité, prônent l’impunité et interdisent aux familles de disparu(e)s d’exercer leurs droits les plus élémentaires.

En conséquence, les familles de disparu(e)s sont déterminées à continuer leur combat tant que les autorités algériennes n’auront pas admis que le dossier des disparu(e)s ne pourra trouver une solution juste sans l’implication des familles de disparu(e)s, des associations qui les représentent et de toute la société civile algérienne. Elles ont ainsi saisi le Président par un recours gracieux pour l’annulation des textes d’application de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale. Le Président n’y ayant jamais répondu, ignorant cette requête au même titre que les nombreuses demandes d’audience adressées par SOS Disparu(e)s, ce recours est aujourd’hui devant le Conseil d’État.

SOS Disparu(e)s entend, par ce rassemblement, interpeller Abdelaziz Bouteflika dans la mesure où il est le seul qui puisse mettre fin à cette injustice. Il est temps pour le Président de la République d’envoyer un signal fort aux familles de disparu(e)s.

Fatima Yous,
Présidente


(L'Expression 24.9 / Corr. ) Amnesty International a dénoncé le harcèlement judiciaire" contre deux avocats, Hassiba Boumerdassi et Amine Sidhoum, qui devaient comparaître le 25 septembre devant le tribunal d'Alger pour avoir "violé les dispositions législatives régissant l'organisation et la sécurité des prisons" en transmettant à leurs cliens des objets et des documents sans en avoir obtenu l'autorisation, accusations repoussées par les deux avocats. Amine Sidhoum est en outre accusé de diffamation à l'encontre de la justice, pour avoir critiqué publiquement dans un journal la détention "arbitraire", sans jugement pendant deux ans et demi, d'un de ses clients. Amnesty International demande que les poursuites contre les avocats soient abandonnées, et appelle les autorités algériennes à les protéger contre toute manoeuvre d'intimidation et de harcèlement. L'organisation critique en outre une disposition légale adoptée en février 2006, rendant passible d'emprisonnement (jusqu'à dix ans) la critique publique de la conduite des forces de sécurité, disposition qui, même si elle n'a pas encore été appliquée, "menace directement les défenseurs des droits humains".

Le Collectif des familles de disparu(e)s en Algérie (CFDA) a également dénoncé le "harcèlement judiciaire" à l'encontre d'Amine Sidhoum, et les "menaces et manoeuvres d'intimidation visant à éteindre la voix des défenseurs des droits de l'Homme" en Algérie.

Maître Hassiba Boumerdassi : nouvelle cible de la justice arbitraire en Algérie

Communiqué du Collectif des familles de disparu(e)s en Algérie
Paris, 20 septembre 2006

Le Collectif des Familles de Disparu(e)s en Algérie (CFDA) s'indigne des
graves pressions exercées par les autorités judiciaires algériennes sur
Maître Hassiba Boumerdassi et son confrère, Maître Amine Sidhoum (voir
nos communiqués du 1er et du 18 septembre 2006).
En effet, Maître Boumerdassi tout comme Maître Sidhoum,  a comparu
dimanche 10 septembre 2006, devant le juge d'instruction du tribunal de
Bab El Oued. Elle est poursuivie pour avoir remis un procès-verbal (le
concernant) à l'un de ses clients, détenu en prison.
L'accusation se fonde ainsi sur l'article 166 du Code de l'organisation
pénitentiaire et de l'insertion sociale des détenus stipulant [qu']
« est puni d'un emprisonnement de 6 mois à 3 ans et d'une amende de
10000 à 50000 dinars quiconque a dans des conditions illégales remis
ou  fait parvenir ou tenté de remettre ou de faire parvenir à un détenu,
en quelque lieu que ce soit des sommes d'argent, des correspondances,
des médicaments ou toute autre objet non autorisé. S'il s'agit d'une
personne habilitée par ses fonctions à approcher les détenus la peine
sera d'un emprisonnement de 1 an à 5 ans et d'une amende de 10000 à
50000 dinars ».
L'article 16 de la loi relative à la sécurité des prisons est également
mentionné dans l'acte d'accusation et énonce [qu'] : « il n'est pas
permis d'introduire ou de faire sortir des sommes d'argent ou
correspondances sauf si elles sont permises par le règlement intérieur
de la prison ou si elles ne sont pas autorisées expressément par le
directeur de la prison. »
Enfin, Me Boumerdassi est accusée d'avoir violé l'article 31 de la loi
portant sur le règlement intérieur des prisons stipulant que : « Le
prisonnier qui remet ou envoie dans des conditions illégales ou tente de
remettre a une autre prisonnier ou toute autre personne dans n'importe
quel endroit des sommes d'argent ou correspondances ou médicaments ou
autre chose s'expose a des sanctions pénales citées à l'art 203 portant
organisation des prisons. »

Toutes ces accusations semblent totalement incongrues puisque Maître
Boumerdassi avait demandé l'autorisation préalable d'un gardien de la
prison, avant de remettre le procès-verbal destiné à son client.

En conséquence, l'acharnement judiciaire à l'encontre de ces deux
avocats démontre clairement que ce sont leurs engagements pour les
droits de l'Homme, et plus particulièrement en faveur des familles de
disparu(e)s, qui sont en cause et non leur intégrité professionnelle.

Me Boumerdassi et Me Sidhoum, qui a été mis lundi en liberté provisoire,
doivent être entendus une nouvelle fois par le juge d'instruction le 25
septembre prochain. D'ici cette nouvelle comparution, le Collectif des
Familles de Disparu(e)s en Algérie enjoint toutes les organisations de
défense des droits de l'Homme à protester vigoureusement, auprès des
autorités algériennes, contre l'absurdité et l'arbitraire de ces
accusations.

Nassera Dutour,
Porte-Parole

APPEL URGENT DE L'OBSERVATOIRE POUR LA PROTECTION DES DEFENSEURS DES DROITS DE L'HOMME

Libération / Poursuites judiciaires / Harcèlement - DZA 001 / 0506 / OBS 063.2 - 20/09/2006

L’Observatoire a été informé par le Collectif des familles de disparu(e)s en Algérie (CFDA) d’actes de harcèlement judiciaire dont font l’objet deux avocats algériens engagé dans la défense des droits des familles de disparus, Me Amine Sidhoum Abderramane, membre de l’ONG SOS Disparu(e)s, et Me Hassiba Boumerdassi, avocate membre du CFDA.

L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme, programme conjoint de la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) et de l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT), a reçu de nouvelles informations et vous prie d’intervenir de toute urgence sur la situation suivante en Algérie.

Nouvelles informations :

Selon les informations reçues, le 18 septembre 2006, M. Sidhoum a comparu devant la 8ème Chambre du tribunal de Sidi M’hamed à Alger, pour répondre des charges de « discrédit sur une décision de justice » et d’« outrage à un corps constitué de l’Etat », sur la base des articles 144 bis, 144 bis 1, 146 et 147 du Code pénal (cf. rappel des faits).

Après plusieurs heures d’attente, Me Sidhoum a été entendu par le juge d’instruction. Au terme de cette audition, le juge a ordonné sa mise en liberté provisoire, ainsi que le maintien des charges, pour lesquelles M. Sidhoum encourt une peine de trois à six ans de prison ferme et une amende comprise entre 2 500 et 5 000 euros.

Parallèlement, Me Sidhoum a été auditionné le 10 septembre 2006 par le juge d’instruction de la 1ère chambre de Bab El Oued, dans le cadre de poursuites engagées à son encontre pour « introduction d’objets non autorisés à la prison », sur la base de l’article 166 du Code de réglementation des prisons et de la réinsertion des prisonniers, ainsi que des articles 16 et 31 du Code de la sécurité des prisons, texte juridique que les avocats de Me Sidhoum n’ont pu se procurer jusqu’à aujourd’hui. Il doit à nouveau se présenter devant le juge le 25 septembre 2006 (cf. rappel des faits).

Par ailleurs, l’Observatoire a été informé que Me Hassiba Boumerdassi a reçu une convocation l’informant qu’elle devrait se rendre le 25 septembre 2006 au tribunal de Bab El Oued, pour répondre des charges d’« introduction d’objets non autorisés à la prison ». Ces poursuites se fondent sur le fait que Me Boumerdassi a fourni à l’un de ses clients détenus, avec l’autorisation du gardien de prison, un exemplaire de son procès-verbal d’audition. Elle a déjà été convoquée une première fois le 10 septembre 2006.

L’Observatoire exprime sa plus vive préoccupation au regard de ce harcèlement judiciaire à l’encontre de Me Sidhoum et de Me Boumerdassi, qui s’inscrit dans un contexte d’intimidation et de harcèlement auquel sont confrontés les défenseurs algériens, impliqués dans la défense des familles de disparus.

L’Observatoire s’inquiète d’autant plus de ces poursuites judiciaires que l’Algérie, qui a été élue au sein du nouveau Conseil des droits de l’Homme des Nations unies le 9 mai dernier, s’est engagée publiquement en mars 2006 à prendre plusieurs engagements en faveur de la protection et de la promotion des droits de l’Homme si elle était élue au sein de ce Conseil, notamment « en plaidant pour un traitement égal des droits de l’Homme [...] et [en privilégiant] le dialogue et la concertation [...] ».

Rappel des faits :

Le 12 mai 2006, lors de la 39ème session de la Commission africaine des droits de l’Homme et des peuples (CADHP), qui se tenait à Banjul (Gambie) du 11 au 25 mai 2006, et à la veille de son intervention au nom de la FIDH sur la situation des droits de l’Homme sur le continent, portant notamment sur les conséquences de l’adoption de la Charte de réconciliation nationale[1] en Algérie, M. Sidhoum a été menacé par un représentant de la délégation algérienne, afin de le dissuader de s’exprimer devant la Commission. Celui-ci a tenu à lui « rappeler » que s’il persistait à présenter son intervention, il serait passible de trois à cinq ans de prison dès [son retour] en Algérie». Du fait de ces menaces, M. Sidhoum n’a pu intervenir oralement le 13 mai 2006.

Les menaces de ce représentant officiel se fondent sur l’article 46 de l’ordonnance du 27 février 2006, portant sur la mise en œuvre de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale. Cette ordonnance prévoit en effet une peine allant de trois à cinq ans d’emprisonnement et une amende de 250 000 à 500 000 dinars algériens (environ 2830 à 5660 euros) pour « quiconque qui, par ses déclarations, écrits ou tout autre acte, utilise ou instrumentalise les blessures de la tragédie nationale, pour porter atteinte aux institutions de la République algérienne démocratique et populaire, fragiliser l’Etat, nuire à l’honorabilité de ses agents qui l’ont dignement servie, ou ternir l’image de l’Algérie sur le plan international ».

Le 23 août 2006, Me Sidhoum avait reçu une convocation du juge d’instruction du tribunal de Sidi M’Hamed à Alger, qui l’informait d’une plainte déposée à son encontre par le ministre de la Justice pour « diffamation », à la suite de la publication, le 30 mai 2004, dans le quotidien arabophone El Chourouk, d’un article intitulé « Aoufi passe son trentième mois en détention ».

Selon l’auteur de l’article, Me Sidhoum aurait déclaré que l’un de ses clients était détenu depuis trente mois à [la prison de] Serkadji « suite à une décision arbitraire rendue par la Cour Suprême ». Le ministre de la Justice estimait que de telles paroles avaient «jeté le discrédit sur une décision de justice et porté outrage à un corps constitué de l’Etat». Toutefois, au moment où Me Sidhoum aurait tenu de tels propos, aucune décision n’avait encore été rendue par la Cour suprême, qui ne s’est prononcée que le 28 avril 2005, soit un an après la publication de l’article.

Parallèlement, le 22 août 2006, Me Sidhoum avait été convoqué en tant qu’« accusé » par le juge d’instruction du tribunal de Bab El Oued pour « introduction d’objets interdits à un détenu », en vertu de l’article 166 du Code de la réforme pénitentiaire et de la réinsertion des détenus, suite à la découverte de deux cartes de visites à son nom chez l’un de ses clients détenus.

Algérie. Deux avocats menacés d'emprisonnement sur la base d'accusations abusives

AMNESTY INTERNATIONAL
Déclaration publique
Index AI : MDE 28/018/2006    (Public)
23 septembre 2006

Amnesty International craint que deux avocats appelés à comparaître lundi devant un tribunal d'Alger ne soient emprisonnés à cause de leur travail en faveur des droits humains.Les informations dont dispose l'organisation donnent nettement à penser que les avocats Hassiba Boumerdesi et Amine Sidhoum font l'objet d'une inculpation abusive visant à les intimider et à les dissuader de poursuivre leur activité. Amnesty International estime que les deux avocats sont soumis à un harcèlement judiciaire et que les poursuites engagées contre eux doivent être abandonnées.

Hassiba Boumerdesi et Amine Sidhoum ont été inculpés d'avoir violé les dispositions législatives régissant l'organisation et la sécurité des prisons, après que les autorités pénitentiaires eurent affirmé que tous deux avaient fait passer des objets à leurs clients en détention sans en avoir obtenu l'autorisation. Cette infraction est passible d'une peine de cinq ans d'emprisonnement. Selon la loi qui définit les modalités d'exercice de la profession d'avocat, les pouvoirs publics peuvent demander qu'un avocat faisant l'objet d'une enquête pour une infraction soit suspendu de ses fonctions.

Dans le cas d'Hassiba Boumerdesi, les autorités pénitentiaires assurent qu'elle a transmis à un détenu, sans autorisation, le compte rendu d'une audience qui portait sur son cas. Hassiba Boumerdesi, de son côté, déclare qu'elle a obtenu l'accord oral des autorités pénitentiaires avant de faire passer le document en question. Amine Sidhoum, quant à lui, est accusé d'avoir distribué plusieurs de ses cartes de visite comportant ses cordonnées à un client en détention. Amine Sidhoum reconnaît les faits, mais considère qu'il n'a pas commis d'infraction en donnant ses cartes de visite au détenu.

Amnesty International craint que Hassiba Boumerdesi et Amine Sidhoum ne soient poursuivis à cause d'activités qu'ils ont menées en toute légalité et pour défendre leurs clients. Les charges retenues contre eux sont basées sur une disposition juridique qui interdit expressément de transférer illégalement " des sommes d'argent, des correspondances, des médicaments ou tout autre objet non autorisé " à un détenu. En utilisant abusivement cette disposition pour criminaliser la communication de documents juridiques et de coordonnées, les autorités empêchent les avocats d'assurer efficacement la défense de leurs clients.

Amnesty International pense que Hassiba Boumerdesi et Amine Sidhoum pourraient en fait être poursuivis parce qu'ils ont dénoncé des violations du droit algérien et du droit international commises par les autorités. Les deux avocats sont connus pour leur travail en faveur des droits humains. Ils ont notamment défendu des personnes accusées d'infractions liées au terrorisme et ont révélé des violations systématiques des droits humains dans des affaires liées au terrorisme, notamment l'usage fréquent de la torture, les procès inéquitables et le fait que les autorités judiciaires enquêtent rarement sur les allégations de torture et d'autres mauvais traitements.

En plus de l'accusation citée plus haut, Amine Sidhoum est inculpé de diffamation dans une autre affaire, parce qu'il a critiqué publiquement la détention sans jugement, pendant deux ans et demi, d'un de ses clients. Sur la base de propos qui lui ont été attribués dans une interview parue dans un journal, Amine Sidhoum a été inculpé ce mois-ci pour avoir jeté le discrédit sur la justice. Il demeure pour l'instant en liberté, en attendant son procès.

Amnesty International rappelle que les avocats ont le droit et le devoir de faire respecter les droits humains inscrits dans le droit international et les normes internationales. Le Principe 14 des Principes de base relatifs au rôle du barreau (ONU) dispose : " En protégeant les droits de leurs clients et en promouvant la cause de la justice, les avocats doivent chercher à faire respecter les droits de l'homme et les libertés fondamentales reconnus par le droit national et international et agissent à tout moment librement et avec diligence, conformément à la loi et aux normes reconnues et à la déontologie de la profession d'avocat. "

Amnesty International appelle les autorités algériennes à protéger les avocats contre toute manSuvre d'intimidation et de harcèlement, conformément au droit international et aux normes internationales. Le Principe 16 des Principes de base relatifs au rôle du barreau prévoit que " les pouvoirs publics veillent à ce que les avocats [&] ne fassent pas l'objet, ni ne soient menacés de poursuites ou de sanctions économiques ou autres pour toutes mesures prises conformément à leurs obligations et normes professionnelles reconnues et à leur déontologie ".

Informations générales

Les années de violent conflit au cours desquelles environ 200 000 personnes ont été tuées ont eu d'importantes répercussions sur la communauté des défenseurs des droits humains en Algérie, qui se sont heurtés à de graves difficultés pour mener leurs activités en faveur des droits humains. Les avocats sont rares, aujourd'hui, à défendre ouvertement les droits des détenus dans les dossiers politiques sensibles comme les affaires liées au terrorisme.

Ces dernières années, le gouvernement algérien a durci l'arsenal législatif sur la liberté d'expression. La mesure la plus récente a été prise en février 2006, lorsqu'une loi a été adoptée afin de rendre toute critique publique de la conduite des forces de sécurité passible de dix ans d'emprisonnement. À la connaissance d'Amnesty International, cette disposition n'a pas été appliquée jusqu'à présent, mais elle menace directement les défenseurs des droits humains et toute autre personne qui ferait un commentaire ou un compte rendu critique sur les violations des droits humains. Cette loi prévoit également qu'aucune plainte visant les forces de sécurité ne peut être examinée par les tribunaux algériens, ce qui a pour conséquence d'accorder une immunité de fait aux membres des forces de sécurité.


(El Watan, Le Jeune Indépendant 26.8 / El Watan 30.9 / El Khabar 5.10) Le président de la Commission nationale consultative de protection et de promotion des droits de l'Homme, Farouk Ksentini, a annoncé que sa commission avait enregistré plusieurs cas d'emprisonnement d'Algériens dans des pays étrangers (Espagne, Italie, camp de Guantanamo) au nom de la "lutte antiterroriste". 300 ressortissants algériens seraient détenus, à ce titre ou un autre, hors d'Algérie, et plusieurs le seraient arbitrairement, dont un homme d'affaire condamné en Espagne à dix ans de prison pour "avoir diffusé des sourates du Coran sur internet". Cela étant, Farouk Ksentini estime que le nombre d'Algérient arrêtés et détenus à l'étranger reste infime, compte tenu du nombre considérable d'Algériens vivant à l'étranger.

En Grande-Bretagne, l'expulsion d'un Algérien passible de la peine de mort en Algérie a été autorisée le 24 août par la justice, qui a assuré que l'homme ne risquait pas d'être torturé dans son pays, et que l'on pouvait donc l'y renvoyer sans violer ses droits fondamentaux. Amnesty International est d'un autre avis, et considère que la décision d'expulsion "bafoue la justice et restera injustifiée", car basée sur une procédure inéquitable, lors de laquelle le dossier n'a jamais été rendu accessible aux avocats, et l'accusé n'a jamais pu bénéficier des garanties juridictionnelles.

Au Portugal, un Algérien suspecté d'être impliqué dans les attentats du 11 septembre 2001 aux USA a été renvoyé en Algérie le 1er octobre. Sofiane Ayeb avait été arrêté en avril 2003 alors qu'il achetait un téléphone portable avec une carte de crédit trafiquée. Son avocate dénonce une expulsion décidée à son insu, alors que la justice portugaise avait décidé d'y surseoir compte tenu des risques encourus par Sofiane Ayeb en Algérie.

(ODHA 4.10 / Liberté 8.10 / El Watan 9.10) Selon sa famille, le fils d'Ali Benhadj, vice-président du FIS interdit, a disparu le 2 octobre, à l'heure de la prière du matin, alors qu'il se rendait à la mosquée pour l'accomplir. Son père a déposé plainte auprès du commissariat de Kouba le lendemain. Abdelkahar Benhadj est âgé de 18 ans. Pour son père, il pourrait s'agir d'un enlèvement. Pour plusieurs journaux algériens en revanche (notamment "Liberté" et "El Watan", le fils du N° 2 du FIS aurait pris le maquis et rejoint le GSPC, et sa famille en aurait été avertie.

(Quotidien d'Oran 17.10 / El Watan 6.11) Les lois modifiant le code pénal et le code de procédure pénale ont été adoptées le 16 octobre par l'Assemblée nationale. Les projets présentés par le gouvernement ont été adoptés sans modification. La peine de mort reste prévue dans le code pénal, mais le président de la Commission nationale consultative des droits de l'homme (officielle), Farouk Ksentini, s'est prononcé pour son abolition. Les modifications approuvées sont justifiées par le gouvernement au nom de la lutte contre le crime organisé, le trafic de drogue, le blanchiment d'argent, le terrorisme et la corruption.

(L'Expression 28.10 / El Watan 29.10) 5300 détenus ont été grâciés par le président Bouteflika à l'occasion de la fin du Ramadan et de la fête du 1er novembre (déclenchement e l'insurrection de 1954).La mesure de grâce excluait les personnes concernées par les mesures de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale, les personnes condamnées définitivement pour des infractions à la paix et à la sécurité publique, à l'intégrité physique des personnes et aux moeurs, ni les détenus juugés pour des affaires de corruption,. d'homicide, de trafic de drogue, de contrebande, de viol. La grâce a principalement bénéficié à des détenus primaires condamnés à des peines ne dépassant pas 12 mois de prison (ceux condamnés à des peines supérieures ont bénéficié de remises de peine).

Les 5300 détenus élargis par la grâce du 22 octobre s'ajoutent aux 2800 élargis dans le cadre de la Charte présidentielle, en avril 2006. Malgré ces libérations, les prisons algériennes restent surpeuplées, et les conditions de détention calamiteuses, dans la plupart des 127 centres de détention du pays, où sont détenues 50'000 personnes, qui ne disposent en moyenne que de moins de 2mètres carrés chacune (six fois moins que le standard européen). D'ici à 2009, 81 nouveaux établissements devraient être construits.

(Liberté 13.11 / Amnesty International 17.11 / L'Expression 17.12) Le Conseil de la Nation (Sénat) a adopté le 15 novembre les amendements du code pénal et du code de procédure pénale proposés par le gouvernement, déjà approuvés par l'Assemblée nationale. Ces amendements introduisent notamment la possibilité de peines de sûreté (sans libération provisoire ou conditionnelle, ni congés) pour les crimes les plus graves. En revanche, la peine de mort n'a pas été abrogée, contrairement à ce que la Commission africaine des droits de l'Homme et des peuples a demandé en 1999 à tous les Etats africains, et ce que, selon "L'Expression", s'apprête à demander au président Bouteflika le président de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'Homme (CNCPPDH, officielle), Farouk Ksentini, qui considère que cette peine "absurde et cruelle" n'a plus sa place dans la législation algérienne. Officiellement, l'Algérie n'a procédé à aucune exécution (sauf extra-judiciairement, dans le cadre de la lutte antiterroriste) depuis 1993, mais des dizaines de condamnés à mort sont détenus dans les prisons algériennes. Farouk Ksentini estime que l'Algérie s'honorerait à être le premier pays arabe à abolir la peine de mort.

En 2006, sur 190 Etats reconnus comme tels, 129 avaient aboli de fait ou de droit la peine de mort (dont 99 l'avaient aboli de droit). En 2005, sur 53 Etats membres de l'Union africaine, quatre (l'Egypte, la Libye, la Somalie et le Soudan) avaient procédé à des exécutions. En 2006, ces quatre pays ont été rejoints dans la pratique de la peine de mort par le Botswana. 13 Etats africains (mais aucun des Etats d'Afrique du nord) ont aboli la peine de mort en droit, 17 (dont l'Algérie) l'ont abolie en pratique et 23 la maintiennent et la pratiquent. Trois gouvernements (Kenya, Togo et Rwanda) se sont prononcés en 2006 pour son abolition, l'un (le Nigeria) a renoncé à l'appliquer. Dans deux Etats (Congo-Kin et Soudan), la loi autorise le prononcement de la peine de mort contre des mineurs.

(Quotidien d'Oran 13.11 / L'Expression 17.12) Selon les chiffres donnés par le Premier ministre Abdelaziz Belkhadem le 11 novembre, 6601 "disparitions" sont reconnues comme telles par les autorités, et 3610 cas de "disparitions" ont été reconnus comme donnant droit aux indemnisations prévues par la charte pour la paix et la réconciliation. Selon le ministre de la Solidarité nationale, cependant, 2900 dossiers ont été traités, ouvrant à des droits aux indemnités d'un montant total de 15,6 milliards de dinars (soit environ 160 millions d'euros). Les corps non identifiés de 3000 personnes doivent en outre être identifiés par un labo scientifique doté des techniques d'identification de l'ADN.

(ONU 20.12) L'Assemblée générale de l'ONU a adopté le 20 décembre la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les mdisparition forcée. Cette convention créée ainsi un nouveau crime au sens du droit international, en temps de paix comme en temps de guerre. Elle dispose qu'aucune circonstance exceptionnelle, quelle qu'elle soit, ne peut être invoquée pour justifier la "disparition" forcée. Elle donne aux victimes directes droit aux réparations et indemnisations. Elle institue un Comité des disparitions forcées, qui peut être saisi par les proches d'une personne disparue ou toute personne mandatée par eux. La Convention oblige tout Etat partie à présenter un rapport sur les mesures qu'il aura prises pour donner effet à ses obligations, et donne au Comité le droit de demander à ses membres d'effectuer des visites dans les pays où des "disparitions" lui sont signalées. Selon l'ONU, plus de 40'000 personnes sont recensées comme "disparues" au sens de la Convention, depuis 1980, dans plus de 90 pays, et 535 personnes en 2005.

Communiqué du Collectif des familles de disparu(e)s en Algérie :

La Convention internationale pour la protection des personnes contre les disparitions forcées est adoptée officiellement.

Le Collectif des familles de disparu(e)s en Algérie a le plaisir de vous
annoncer que la Convention internationale pour la protection de toutes
les personnes contre les disparitions forcées a été adoptée hier par
l'Assemblée Générale des Nations Unies.

Ce texte international  est la concrétisation d'un effort soutenu par de
nombreuses ONG de défense des droits de l'Homme depuis de longues
années. Cette convention est la transposition en droit de notre combat
quotidien enfin reconnu expressément au niveau international. 

La Convention dispose que «  la pratique généralisée ou systématique de
la disparition forcée constitue un crime contre l'humanité tel que
défini dans le droit international applicable [?] ». Elle contient une
interdiction absolue des disparitions forcées en temps de paix comme en
temps de guerre. Une disparition forcée s'entend au terme des articles 2 et 3 
par toute arrestation, détention enlèvement ou toute autre forme de
privation de liberté commis avec ou sans l?autorisation, l'appui ou
l'acquiescement de l?Etat, suivi du déni de la reconnaissance de la
privation de liberté ou de la dissimulation du sort réservé à la
personne disparue ou du lieu où elle se trouve, la soustrayant à la
protection de la loi.

Obligation est faite aux Etats parties de divulguer toutes les
informations en leur possession, sur les personnes disparu(e)s ou
détenues arbitrairement, à leurs proches ou à leurs représentants. Tout
Etat partie doit également prendre les mesures nécessaires afin que les
auteurs de ce crime, qu'ils soient des représentants de l'autorité
publique, civile ou militaire, soient tenus pénalement responsables [1]. 
Enfin, le droit des victimes à la vérité et à la réparation
est pleinement reconnu. Une fois ratifiée, la convention prévoit la mise
en place d'un nouveau Comité contre les disparitions forcées, composé
d'experts indépendants et chargé de contrôler la mise en oeuvre par les
Etats de leurs obligations.

La Convention deviendra donc un instrument incontournable pour que la
vérité et la justice soient faites au nom des disparu(e)s et de leurs
familles mais elle offre également un espoir pour prévenir les
disparitions forcées.

Nous souhaitons donc que le nombre de 20 ratifications nécessaires pour
l'entrée en vigueur de cet instrument soit rapidement atteint. Nous
espérons que celles-ci n'émaneront pas uniquement de pays qui ne
connaissent pas cette pratique mais que les pays directement et
actuellement concernés s'engageront également afin que cette Convention
internationale ne reste pas lettre morte. Nous attendons donc de
l'Algérie, aujourd'hui membre du Conseil des droits de l'Homme des
Nations Unies, qu'elle ratifie rapidement ce texte international dans la
rédaction duquel elle s'est d'ailleurs beaucoup impliquée.

Le CFDA appelle donc solennellement tous les pays à ratifier la
Convention pour la protection des personnes contre les disparitions
forcées afin que cessla pratique des disparitions forcées et que soit
reconnu, dans le monde entier, le droit intangible de ne pas disparaître.

A Paris, le 21 décembre 2006
Nassera Dutour, Porte-Parole


(El Watan 16.12) La Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme alerte, dans un communiqué, sur l'enlèvement par des inconnus d'un enseignant d'arabe de Zeribet el Ouedi (Biskra), le 11 novembre. Selon le communiqué, les gendarmes auraient suggéré au père de l'enseignant que celui-ci avait été arrêté par des agents du DRS, ce qui aurait été confirmé par le DRS de Biskra. Un frère de l'enseignant a "disparu" le 21 janvier 2000.

(Le Quotidien d'Oran 21.11) Le directeur central du ministère de la Justice, chargé de la réinsertion des détenus, Bacha Boumediene, a annoncé que 7840 détenus avaient bénéficié de différentes mesures de remises en liberté : 3624 condamnés ont bénéficié d'une mise en liberté conditionnelle, 628 d'une semi-liberté, 3233 de permissions de sortie et 355 de transformation de leur détention en travaux d'utilité générale.

(Le Quotidien d'Oran 21.12) La délégation de la Commission européenne en Algérie a accordé environ 480'000 euros de subventions à cinq associations algériennes actives dans la promotion de la démocratie et des droits de l'Homme, dont l'Association pour la culture et le développement communautaire, et Djazaïrouna.

2007

(El Khabar 3.1 / El Watan 8.2 / Algerie-dz.com 9.2/ Le Monde 10.2 / L'Expression, El Watan 11.2) L'Algérie a signé le 6 janvier, avec 56 autres pays, la convention de l'ONU contre les disparition forcée. La convention avait besoin de vingt signatures pour entrer en vigueur. La porte-parole de SOS-Disparus et du Comité des familles des disparus en Algérie (CFDA) relève la contradiction qu'il y a, dans l'attitude du gouvernement algérien, entre la signature d'une convention internationale qui "criminalise la disparition forcée", d'une part, et d'autre part les "dispositions de la charte pour la paix et la réconciliation qui interdit toute poursuite contre les auteurs présumés de disparitions forcées".

Le lendemain de la signature par Alger de la convention onusienne, les autorités algériennes ont interdit un colloque international sur ce thème, devant se tenir à Alger les 7 et 8 janvier à l'initiative des associations de famille de "disparus" en Algérie (Somoud, Djazairouna, Collectif des familles de disparus en Algérie, Association nationale des familles de disparus et SOS-Disparus) qui y avaient invité des experts sud-américains et sud-africains. D'importantes forces de police ont bloqué l'accès à l'hôtel où la manifestation était prévue. De nombreux policiers en civil, et agents du DRS, filmaient et photographiaient les personnes qui se rendaient au colloque interdit (y compris l'ambassadeur de Suisse). Les organisateurs du colloque ont annoncé qu'ils le tiendraient coûte que coûte, quitte à l'organiser hors d'Algérie. Le président d'honneur de la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme, Ali Yahia Abdennour, q qualifié l'interdeiction du colloque algérois de "grave atteinte à la liberté d'expression et d'association", la vice-présidente de la Fédération internationale des ligues des droits de l'Homme, Souhait Belhassen, y a vu une "entorse au droit international", et le président de Somoud, Ali Mrabet, une "manière de faire des familles de disparus des victimes éternelles". En revanche, le président de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'Homme (CNCPPDH, officielle), Farouk Ksentini, a justifié l'interdiction du colloque par le respect des "directives de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale", de l'état d'urgence et de "l'ordre public".

Depuis l'adoption par référendum, le 29 septembre 2005, de la "Charte pour la paix et la réconciliation", le dossier des "disparus" est officiellement clos. Les familles des "disparus" ont été priées d'accepter de recevoir une indemnisation financière en échange de leur renoncement à connaître la vérité. La plupart de celles officiellement reconnues comme telles par les autorités ont accepté ce marché -celles qui l'ont refusé se retrouvent dans les associations comme SOS-Disparus ou Somoud, qui refusent ce "chantage" et continuent d'exiger la vérité.

Selon les autorités, qui en accusent entièrement les groupes armés islamistes, 6000 personnes ont "disparu" pendant la "décennie noire" (1991-2000). Le président de la CNCPPDH, Farouk Ksentini, a annoncé à "El Khabar" que 183 personnes déclarées "disparues" avaient réapparu depuis plus d'un an, sans que leurs familles le signalent. Selon les organisations de défense des droits humains, le nombre de "disparitions" atteint le triple (18'000 personnes) et la responsabilité de ces "disparitions" incombe essentiellement aux forces de sécurité et aux milices locales.

Selon la convention internationale signée le 6 février, la "disparition" est assimilable à une "détention secrète", exercée "pour le compte de l'Etat ou avec son aval". Affirmant l'illégalité en droit international des disparitions forcées et confirmant le droit des victimes à la vérité concernant les circonstances et le sort des disparus, la convention POUR LA PROTECTION DE TOUTES LES PERSONNES CONTRE LES DISPARITIONS FORCÉES a été officiellement ouverte à la signature lors d'une cérémonie à Paris. Elle entrera en vigueur une fois que 20 pays l'auront ratifiée.


FEDERATION INTERNATIONALE DES LIGUES DE DEFENSE DES DROITS DE L'HOMME (FIDH)

Interdiction du séminaire pour la Vérité, la Paix et la Conciliation

mercredi 7 février 2007

Au lendemain de la signature par l’Algérie de la convention sur les disparitions forcées à Paris, les autorités algériennes empêchent la tenue d’un colloque d’ONG et d’experts sur la problématique des disparitions en Algérie.

Organisé par les associations de familles de disparus en Algérie, le Collectif des familles de disparus en Algérie (CFDA), SOS Disparus, Djazairouna, l’Association nationale des familles de disparus (ANFD) et Somoud, le séminaire « Pour la Vérité, la Paix et la Conciliation » devait réunir experts, ONG internationales et algériennes, familles de victimes et toute la société civile algérienne.

Dûment informées et invitées au séminaire les autorités algériennes ont tout mis en oeuvre pour empêcher sa tenue :

Pour autant, ces mêmes autorités n’ont jamais fait part aux organisateurs de leur opposition à la tenue de ce séminaire. Le Président de la Commission nationale consultative pour la promotion et la protection des droits de l’Homme en Algérie, M. Farouk Ksentini, avait notamment été rencontré et destinataire du programme du séminaire ainsi que de la liste des personnes invitées. Autorisation avait également été demandée et invitations étendues aux ministres de l’Intérieur, des Affaires étrangères et de la Justice.

Sidiki Kaba, président de la FIDH se joint aux organisateurs de ce séminaire pour dénoncer avec la plus grande vigueur l’attitude des autorités algériennes : « Hier, M. Bedjaoui, le Ministre de la justice algérien était à nos côtés pour signer la convention sur les disparitions forcées. Aujourd’hui, c’est un véritable camouflet : la signature n’a-t-elle aucune valeur à leurs yeux ? ».

En effet, en signant cette convention, l’Algérie en reconnaît officiellement le contenu qui prévoit notamment en son article 18.2 que la protection des [proches de la personne privée de liberté, leurs représentants ou leurs avocats] (...) « contre tout mauvais traitement, toute intimidation ou toute sanction en raison de la recherche d’informations concernant une personne privée de liberté ».

Cette attitude s’inscrit par ailleurs, en totale contradiction avec les déclarations publiques de l’Algérie qui à l’occasion de sa candidature au Conseil des droits de l’Homme des Nations unies, dont elle est membre depuis le 9 mai dernier, s’est engagée à « privilégier le dialogue et la concertation » en réaction aux violations des droits de l’Homme.

La FIDH rappelle par ailleurs que cette interdiction n’est que le dernier d’une longue liste d’incidents qui, ces derniers mois, visent défenseurs des droits humains et avocats impliqués dans la défense des familles de disparus. « l’Algérie, qui fut le théâtre pendant une décennie de violations graves des droits humains et particulièrement, de plusieurs milliers de disparitions forcées, voit ses autorités refuser de faire la vérité sur ces agissements, au mépris de tous ses engagements internationaux, laissant les familles des victimes et des disparus dans l’abandon et l’isolement », a regretté Sidiki Kaba.


CFDA, SOS DISPARU(E)S, ANFD, DJAZAIROUNA, SOUMOUD

7 février

Après avoir signé la Convention internationale contre les disparitions forcées, les autorités algériennes interdisent le séminaire pour la Vérité, la Paix et la Conciliation.

Ce matin dès 8 heures, les agents de la sûreté d'Alger sont entrés dans l'Hôtel Mercure où devait se tenir le séminaire afin de notifier aux organisateurs son interdiction. Alors que l'autorisation avait été demandée aux ministères concernés, il y a plus de deux mois et qu'aucune réponse n'était parvenue, c'est à la dernière minute que les autorités algériennes ont démontré une fois encore leur volonté de bafouer les libertés de réunion, de manifestation et d'expression en Algérie. Le commissaire général, les services de renseignements généraux et le chef de la sûreté sont venus en force pour empêcher en toute impunité les participants de se réunir alors que des familles de victimes, des représentants d'ONG, des journalistes et des représentants d'ambassade étaient déjà arrivés.

Après plus d'une heure de discussion, une grande partie des invités n'ont même pas pu passer la porte de l'hôtel. A l'intérieur de la salle, l'électricité a été coupée, le matériel d'enregistrement a été retiré et les participants ont même éprouvé des difficultés à entrer dans la salle de conférence.

C'est donc dans l'obscurité que les difficiles négociations se sont poursuivies entre les forces de police et les organisateurs. Ces derniers n'ont néanmoins pas cédé et ont essayé par tous les moyens de joindre un "haut responsable" qui n'a jamais répondu.

Les avocats présents ont vivement contesté ce déni de liberté tout comme les familles de victimes. C'est donc à la lueur des bougies que les conférenciers se sont installés à la tribune. Malgré la résistance, les autorités ont obligé tout le monde à sortir de l'hôtel. Tandis qu'un des objectifs du séminaire était d'ouvrir le dialogue avec le gouvernement, force est de constater qu'il n'est même pas prêt à respecter les droits les plus élémentaires.

Le Ministre des Affaires Etrangères algérien s'est pourtant rendu hier à Paris et a signé la Convention pour la protection des personnes contre les disparitions forcées, qui aurait dû être un signe d'ouverture d'esprit sur cette question cruciale pour l'Algérie de demain mais les associations de victimes sont une nouvelle fois la cible d'une politique de deux poids, deux mesures et de manoeuvres dictatoriales et subversives d'un pays qui affirme vouloir la "paix et la réconciliation".

Tous les participants se sont ensuite rendu devant la maison de la presse. La conférence de presse a été tenue dans la rue puisqu' aucune salle ne nous a été prêtée. Les mères de disparu(e)s ont manifesté et ont brandi les photos de leurs proches et la banderole confectionnée pour le séminaire. Des membres du comité organisateur, des personnalités et des avocats ont été interviewés par des journalistes pour décrier cette violation flagrante des libertés fondamentales.

Le CFDA, SOS Disparu(e)s, l'ANFD, Djazairouna et Somoud regrettent amèrement de constater que les autorités algériennes refusent encore le dialogue et de construire une véritable paix et réconciliation.


Front des forces socialistes

FFS

DECLARATION

Les autorités administratives de l'Etat d'urgence ont mobilisé Renseignements Généraux, DRS et police BLEUE, pour empêcher avec brutalité la tenue d'un séminaire ayant pour thème, "Pour la Vérité, la Paix et la conciliation".

Ce séminaire préparé avec sérieux par ses initiateurs, le Collectif des familles de disparus en Algérie, SOS Disparus, Djazairouna, l'Association nationale des familles de disparus et Somoud, semblait avoir réuni toutes les conditions de sa tenue, voire de sa réussite.

Le thème qui n'évoque plus la justice semblait un signal de décrispation envers les autorités, lesquelles autorités avaient signé la veille à Paris la Convention internationale contre les disparitions forcées.

Les contacts avec les animateurs officiels et civils de la devanture démocratique de l'administration actuelle, ainsi que leur invitation, laissaient augurer une issue favorable, un possible débat, à tout le moins un échange de points de vue.

La violence avec laquelle a été gérée cette interdiction, sous les yeux du corps diplomatique et de quelques invités étrangers et nationaux, a surpris même ceux qui nourrissaient de grands espoirs sur la bonne foi du système et entretenaient avec lui une proximité assidue.

Force est de constater que le système n'a changé ni de nature ni de méthode. Il impose la paix sociale par la DOMINATION et l'AUTO AMNISTIE, à l'exclusion de tout débat, de toute négociation, de toute recherche de la vérité et de la justice. Il interdit aussi bien les recours internes qu'externes qui échappent à sa tutelle ou à son agenda.

La férocité avec laquelle ont été réprimés des mères de disparus et des défenseurs des droits de l'homme n'a d'égal que la dignité de ces associations connues et reconnues pour leur attachement à la légalité et à la voie pacifique.

Cet acharnement à empêcher ou détruire tout rassemblement sérieux ou tout contrat consensuel issus d'un débat large ou du recensement de tous les points de vues - y compris les siens -, montre la véritable image du pouvoir que même " les plus naïfs " ou " les mieux disposés " ne peuvent ignorer. L'image d'un régime maffieux, méprisant ses propres lois, fier de neutraliser toute opposition ou contestation pacifiques.

La complaisance de " partenaires " internationaux, qu'elle soit motivée par le chantage aux hydrocarbures ou par la quête de soutien en vue d'une certaine élection, lui permet de violer avec arrogance les engagements internationaux signés par l'Algérie. L'encre du dernier en date n'a pas encore séché que le régime a tenu à rappeler à tout le monde que " le boucher reste maître chez soi "

Ces dans ces moments d'aveuglement que les régimes omnipotents, se croyant invulnérables, sont les plus dangereux. Pour eux-mêmes, pour leurs alliés et pour leur société.

Ces dans ces moments et dans ce contexte que la société algérienne doit s'organiser en convoquant le Contrat de Novembre et l'esprit de la Soummam, en ne cédant aucun droit, à qui que ce soit, avec qui que ce soit, où que ce soit et sous aucun motif d'oubli ou de mystification.

LA DIGNITE EST UNE ET INDIVISIBLE. Chaque algérienne et chaque algérien, présent ou disparu, a le devoir de revendiquer et d'assumer le droit d'avoir des droits.


(Le Soir d'Algérie 18.1) Deux avocats, MMee Hassiba Boumerdassi et Amine Sidhoum, accusés d'avoir remis des "objets illicites" (des cartes de visite et un procès-verbal d'audition) à leurs clients détenus dans la prison algéroise de Serkadji ont comparu le 17 janvier devant le tribun al de Bab El Oued. La défense ayant exigé la comparution en tant que témoin du directeur de la prison, l'affaire a été renvoyée au 21 février. Les avocats ont dénoncé les "pires difficultés" rencontrées par les avocats des détenus de Serkadji et d'El Harrach pour faire leur travail. Chacun des deux avocats accusé s'est fait l'avocat de l'autre.

(Liberté 24.1) 44 membres de la Commission nationale consultative pour la protection et la promotion des droits de l'Homme (CNCPPDH) ont été désignés, ou confirmés sur proposition d'autres instances, par le président Bouteflika par décret, le 10 décembre. La commission est composée de quatre membres désignés directement par le président de la République, de deux membres proposés par chacun des deux chambres du parlement, d'un membre proposé par, respectivement, le Conseil supérieur de la magistrature, le Conseil national économique et social, le Conseil national de la déontologie médicale, le Conseil de l'ordre des avocats et le Haut commissariat à l'amazighité. de deux représentants de l'UGTA, de 16z représentants d'associations de défense des droits humains et de neuf représentants de différents ministères.

(Le Jeune Indépendant 8.2) Le 9 février marquera le quinzième anniversaire de l'instauration par le président Boudiaf de l'état d'urgence, jamais abrogé depuis alors qu'il était initialement limité à une durée d'un an et devait prendre fin le 8 février 1993. Ni le pouvoir législatif, ni le pouvoir judiciaire n'ont jamais rien tenté pour sortir l'Algérie de l'état d'urgence instauré en 1992, alors que la constitution prévoit non seulement que l'état d'urgence ne peut être instauré que pour une durée déterminée (en l'occurrence un an -mais il y a quinze ans...) mais également que sa durée ne peut être prorogée qu'après approbation du Parlement, les deux chambres réunies (ce qui n'a jamais été fait), et que "l'organisation de l'état d'urgence et de l'état de siège est fixée par une loi organique", qui n'a jamais été adoptée. Hormis le Front des forces socialistes, qui l'a toujours exigé, les partis d'opposition se sont parfaitement accomodé d'un dispositif qui certes leur interdit de fonctionner normalement, mais qui a l'avantage d'interdire de fait la création de nouveaux partis, et entrave les activités des partis concurrents. Quant aux partis de la coalition gouvernementale, seul le MSP (islamiste) a demandé la levée de l'état d'urgence. Pourtant, même l'armée ne voit plus d'inconvénient à cette levée, le général Lamari ayant déclaré en 2003 et 2004 que la fin de l'état d'urgence ne lui poserait pas de problème.

(El Watan 4.3 / AI 5.3 / Algeria-Watch 14.3 / Algeria-Watch 17.3) Amnesty International a appelé le 5 mars, dans une lettre au ministre algérien de la Justice Tayeb Belaiz, le gouvernement algérien à communiquer "immédiatement" des informations sur le sort et le statut juridique de deux jeunes hommes qui seraient détenus au secret depuis novembre 2006 par le DRS (Sécurité militaire), Youcef Belmouaz et Brahim Abed, qui auraient été arrêtés par des policiers en civil à Tiaret, les 26 et 27 novembre. Fin décembre, le procureur de Tiaret a informé leurs familles qu'ils avaient été transférés à Alger et se trouvaient sous la responsabilité du DRS. Le 3 mars, la famille de Youcef Belmouaz a été informée, anonymement, du transfert des deux hommes dans une prison d'Alger, ce que les mautorités judiciaires se sont refusées à confirmer. En tout état de cause, les deux hommes ont été maintenus au secret bien au delà de la limite légale des douze jours. Amnesty International a demandé la remise en liberté immédiate, ou la traduction devant une autorité judic iaire, de Youcef Belmouaz et Brahim Abed. Le Collectif des familles de disparus en Algérie a formulé la même demande. Finalement, après avoir été détenus plus de trois mois au secret dans des locaux du DRS, les deux hommes ont été présentés à un juge d'instruction d'Alger le 4 mars, et mis en détention préventive dans la prison algéroise de Sarkadji, où leurs parents ont pu leur rendre visite le 10 mars.

Algeria-Watch a annoncé le 17 avril la "disparition" d'un étudiant de Constantine, Abdelaziz Zoubida, depuis le 11 avril. Selon Algeria-Watch, il aurait été enlevé par des agents du DRS.

L’ALGERIE EST-ELLE AUSSI TRANSPARENTE QU’UNE MAISON DE VERRE ?

Collectif des familles de disparu(e)s en Algérie, 14 février 2007

« La signature de la Convention sur les disparitions forcées est un témoignage de la volonté de l’Etat algérien de ne rien cacher » (1). C’est en ces termes que le Ministre des Affaires Etrangères algérien, M. Bedjaoui, a tenté d’atténuer la polémique concernant l’interdiction du séminaire des associations de disparus et de victimes du terrorisme. Si M. Bedjaoui n’a donné aucune explication quant à cette interdiction il s’est en revanche de nouveau illustré par sa volonté de cultiver l’oubli : « apaiser les cœurs et les esprits pour tourner définitivement une page douloureuse de son histoire »(2). Amnistie et amnésie semble aller de pair pour M. Bedjaoui.

Par ailleurs M. Ksentini se démarque par un flegme sans faille : «l’article 46 de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale interdit d’évoquer, derechef, l’affaire des disparus» (3). Représentant l’organe officiel de protection des Droits de l’Homme, il n’a vu dans cette interdiction aucune atteinte aux libertés fondamentales inhérentes à chaque individu et groupe d’individus garanties par de nombreux traités internationaux. On a peine à croire que cet homme soit un défenseur des Droits de l’Homme! Le paradoxe atteint son comble quand on sait que ce Monsieur avait félicité l’initiative et devait participer pleinement à cette rencontre et qu’il avait donné son accord avec enthousiasme. Ce revirement est donc difficilement compréhensible quand on l’entend par la suite déclarer que «ce dossier est clos et personne n’a le droit d’en parler» (4).

M. Ksentini avance que l’interdiction dont le comité organisateur mais aussi tous les invités, qu’ils soient proches de victimes, défenseurs des droits de l’Homme, experts, représentants d’ambassades ou journalistes, ont été victimes allait « droit avec les directives de la Charte pour la Paix et la Réconciliation nationale ». Selon le Président de la CNCPPDH, « l’Algérie vit toujours dans l’état d’urgence » et que par conséquent « aucune rencontre, aucune manifestation de rue ne peuvent être organisées sans l’aval du Ministère de l’Intérieur et des collectivités locales » (5 ). Ce séminaire n’était en aucun cas une manifestation de rue mais une réunion privée sur invitation, une salle de conférence ayant été louée à cet effet dans un hôtel algérois.

Le Président de la Commission nationale consultative pour la protection et la défense des droits de l’Homme, garant donc du respect des droits de l’Homme en Algérie, nie par ses déclarations les droits fondamentaux les plus élémentaires, ceux d’expression et de réunion (6).

Les victimes des malversations étatiques et non étatiques ne peuvent se résigner à tomber sous le coup d’une loi anti-démocratique et violatrice des libertés fondamentales. Nous demandons la vérité, rien que la vérité et pour cela nous exigeons de faire usage librement de nos droits en vertu du droit international des droits de l’Homme, en l’espèce le droit qui est reconnu aux victimes « de savoir la vérité sur les circonstances de la disparition forcée (…) et le sort de la personne disparue» (7). M. Ksentini semble cependant être bien plus soumis aux directives politiques, qu’animé par la mission qui lui a été confiée.

Si « l’Algérie n’a rien à cacher sur la question des disparus », cher Monsieur Bedjaoui, alors pourquoi vouloir à tout prix camoufler la vérité sur le sort des victimes ?

Le fait que l’Algérie ait signé la Convention n’atteste cependant pas de sa bonne foi contrairement aux dires du Ministre des Affaires Etrangères. L’Algérie a en effet signé et ratifié de nombreux textes internationaux de protection des droits de l’Homme, tel que pour ne citer que lui, le Pacte international sur les droits civils et politiques, qui n’est pourtant pas respecté dans ce pays de non droit.

Il conviendrait donc aujourd’hui de rappeler aux autorités algériennes leurs engagements internationaux qui, en vertu de l’article 132 de la Constitution algérienne, priment sur les lois nationales.

Porte parole du CFDA : Nassera DUTOUR

1 El Watan du 10.02.2007: « Interdiction du séminaire des associations de disparus : Vérité à Rome, erreur à Alger ! » 2 Ibid. 3 L’Expression du 11.02.07: « Colloque sur les disparitions forcées : Ksentini justifie l’interdiction » 4 Ibid. 5 Ibid. 6 La liberté d’expression et de réunion sont consacrés par les articles 19 et 21 du Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques ratifié par l’Algérie. 7 Article 24 alinéa 2 de la Convention Internationale pour la Protection de toutes les Personnes contre les Disparitions Forcées signée le 6.02.07 par l’Etat algérien

(El Watan 26.4) Deux avocats accusés d'avoir transmis illégalement des documents à leurs clients ont été cquittés le 25 avril par le tribunal de Bab El Oued, après trois reports. Amine Sidhoum était jugé pour avoir remis des cartes de visite à l'un de ses clients en prison, et Hassiba Boumerdassi pour voir remis un procès-verbal à l'un de ses clients en prison.

Des avocats des droits humains jugés sur la base d’accusations douteuses

Bruxelles, le 20 février 2007
Les autorités algériennes devraient abandonner des accusations basées sur des motifs politiques visant deux avocats des droits humains quand leur procès reprend mercredi, a déclaré Human Rights Watch.

Les autorités algériennes devraient abandonner des accusations basées sur des motifs politiques visant deux avocats des droits humains quand leur procès reprend mercredi, a déclaré Human Rights Watch.

Sidhoum et Boumerdassi sont des avocats basés à Alger reconnus pour leur défense publique des droits humains. Ils représentent régulièrement des détenus accusés de terrorisme et d’infractions a la sécurité, des familles de personnes “disparues” par les forces de sécurité de l’Etat durant le conflit civil des années 1990, ainsi que des suspects qui soutiennent que la police les a torturés lors d’interrogatoires.

“Le vrai enjeu dans ces affaires est d’intimider des avocats des droits humains qui prennent la défense de leurs clients,” a déclaré Sarah Leah Whitson, Directrice de la division Moyen Orient et Afrique du Nord à Human Rights Watch.

Les deux avocats critiquent fréquemment les violations de droits humains dans des interviews accordées aux médias. Ils ont persévéré en dépit d’une loi de 2006 qui accorde l’immunité judiciaire aux auteurs de la plupart des atrocités commises durant les années 1990, tout en infligeant des sanctions pénales aux personnes qui parlent ou agissent par rapport a ces événements de façon “à nuire à l’honorabilité de ses agents qui ont dignement servi [l’Etat], ou à ternir l’image de l’Algérie sur le plan international.” Le gouvernement a approuvé l’Ordonnance portant mise en œuvre de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale en février 2006.

Par ailleurs les autorités algériennes ont interdit le 7 février un séminaire intitulé “Vérité, paix et conciliation nationale” que des organisations indépendantes des droits humains avaient tenté d’organiser a Alger.

Le procureur a accusé Sidhoum de remettre à un prisonnier cinq de ses cartes de visite en juillet sans en demander la permission aux autorités pénitentiaires. Sur ces cartes ne figurait que l’information pour contacter Sidhoum. Il reconnaît avoir remis les cartes au prisonnier, mais dit qu’il l’a fait à la demande de celui-ci. Il a souligné que les avocats algériens donnent souvent leurs cartes de visite aux prisonniers quand ceux-ci les leur demandent, parfois pour le compte d’autres prisonniers. Ceci ne représente ni une violation des lois ou règlements affichés a la prison, ni un danger pour la sécurité de la prison, a-t-il déclaré.

Dans le cas de Boumerdassi, le procureur soutient que le 27 juin, sans en avoir demandé la permission au préalable, elle a remis à un client dans la prison de Serkadji à Alger le procès-verbal de sa première comparution devant le juge d’instruction. Boumerdassi nie l’accusation, expliquant qu’elle a remis le document en question à un gardien de la prison, qui a promis de le transmettre à son client une fois qu’il aurait obtenu l’autorisation de le faire.

Les procureurs ont accusé Boumerdassi ainsi que Sidhoum d’avoir enfreint l’Article 166 du Code pénitentiaire, qui punit quiconque remettrait ou tenterait de remettre à un détenu, dans des conditions illégales, “des sommes d’argent, des correspondances, des médicaments ou tout autre objet non autorisé.” S’il s’agit d’une personne, comme un avocat de la défense, qui est habilitée par ses fonctions à approcher le détenu, la peine sera un emprisonnement d’un an à cinq ans et d’une amende de 10 000 à 50 000 dinars (de US$141 à $705). Un avocat reconnu coupable sous cette provision peut faire l’objet d’une interdiction d’exercer sa profession.

Les affaires Boumerdassi et Sidhoum sont distinctes mais sont jugées en tandem devant le Tribunal de Première Instance de Bab-el-Oued . Des membres du barreau d’Alger ont assisté à des séances du procès afin de témoigner leur solidarité à l’égard de leurs deux confrères.

Sidhoum fait actuellement face à un second procès à la suite d’accusations qui paraissent également infondées et politiquement motivées. Selon une plainte déposée par le Ministre de la Justice, Sidhoum aurait diffamé une institution de l’Etat en déclarant, dans des propos cités par le journal Ech-Chourouk al-Yaoumi dans son édition du 30 mai 2004, que l’un de ses clients “passe son trentième mois [dans la prison de] Serkadji suite à une décision arbitraire rendue par la Cour suprême.” Sidhoum soutient que le quotidien l’a manifestement cité de façon erronée, au regard du fait que la Cour suprême n’avait pas encore rendu son jugement sur ce cas, et ne l’a fait que le 28 avril de l’année suivante. L’affaire est entre les mains du juge d’instruction.

Le 7 février les autorités ont empêché la tenue du colloque “Vérité, paix et conciliation nationale” organisé par cinq organisations algériennes représentant les familles de quelques personnes parmi les milliers d’individus “disparus” par des agents de l’Etat dans les années 1990, ainsi que des familles de personnes enlevées ou tuées par des groupes terroristes. Après que plusieurs participants étrangers se sont vu refuser des visas pour se rendre en Algérie, la police s’est amassée à l’Hôtel Mercure à Alger le matin du 7 février et a empêché l’ouverture de la conférence de deux jours.

La veille à 21 heures, la préfecture d’Alger avait notifié les organisateurs, qui avaient demandé cinq semaines auparavant la permission de tenir cette conférence, que celle-ci ne pourrait avoir lieu. La préfecture n’a pas motivé sa décision. Cependant Farouk Ksentini, qui préside la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits humains, instance qui dépend de la Présidence, a déclaré selon le quotidien francophone L’Expression daté du 11 février que l’interdiction du colloque “va droit avec les directives de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale.” Il a dit : “L’Article 46 [de la Charte] ... interdit d’évoquer, derechef, l’affaire des ‘disparus.’ Ce dossier est clos et personne n’a le droit d’en parler.”

En réponse à la demande de confirmer ses remarques citées dans L’Expression, Ksentini a déclaré à Human Rights Watch le 15 février qu’il n’y exprimait pas son propre point de vue mais ne faisait que spéculer sur les motifs ayant conduit les autorités à interdire le rassemblement. Toutefois il a reconnu ne pas avoir à ce jour critiqué ou regretté publiquement l’interdiction de la conférence - à laquelle il avait été lui-même invité à parler.

La veille de l’interdiction par les autorités de la tenue du colloque, le Ministre algérien des Affaires étrangères se trouvait à Paris afin d’y signer la Convention internationale pour la Protection de toutes les Personnes contre les Disparitions forcées, lors d’une cérémonie de signature du nouveau traité par les Etats.

La convention, qui vise à prévenir les “disparitions” et à mettre fin à l’impunité pour ces actes, stipule dans l’Article 24 que “tout Etat partie garantit le droit de former des organisations et associations ayant pour objet de contribuer à l’établissement des circonstances des disparitions forcées et du sort des personnes disparues, et de participer librement a de telles organisations ou associations.” Ce type d’activité associative pacifique est en outre protégé par la Convention internationale sur les Droits civiques et politiques, que l’Algérie a ratifiée.

“Le nouveau traité de l’ONU contre les disparitions forcées est clair: les pays doivent autoriser des activités indépendantes en matière de droits humains, dans le cadre de leur engagement solennel à empêcher les ‘disparitions,’” a déclaré Whitson.

“Pour que sa signature puisse être prise au sérieux, l’Algérie doit autoriser les groupes qui représentent les familles des ‘disparus’ ainsi que les avocats comme Hassiba Boumerdassi et Amine Sidhoum à travailler librement et sans être harcelés,” a ajouté Whitson.


COMMUNIQUE de la Coordination Nationale des Familles des Disparus/Association des familles des disparus Forcés de Constantine

Constantine le 07 04 2007

Les familles des disparus de Constantine ont fait l'objet ce jeudi matin 05/04/2007 de harcèlements par les services de sécurité dépêchés en renfort sans que cette soudaine intervention ne s'explique. Les familles comme à leur accoutumer étaient rassemblées en face du siège du Wali arborant deux banderoles portant les inscriptions " Nous voulons nos enfants morts ou vivants " et " Généraux criminels = cour de justice universelle ". Banderoles plusieurs fois arborées sans susciter une telle hargne, bien qu'il n'y ait pas eu vraiment violence, un officier de police a arraché des mains d'une femme une des banderoles et qu'il a refusé de restitué au président de l'association.

Malgré ces pressions, les familles demeurent attachées à leur combat pour faire triompher la vérité, la justice et dénoncent par la même occasion les manœuvres auxquelles participent différentes associations de familles de disparus (Somoud, SOS Disparus, Collectif des Familles de Disparus en Algérie et A N F D). En effet, nous dénonçons l'instrumentalisation du dossier des disparus par ces associations et par le Centre International pour la Justice Transitionnelle). Il est évident que l'on veut étouffer nos revendications de justice (identifier et juger les auteurs du crime de disparition) notamment par le recours aux mécanismes juridiques internationaux qui sont loin d'être épuisés. Après l'échec d'Alger, la rencontre tenue à Bruxelles par ces organisations est une trahison et surtout un crime moral contre les familles de disparus, d'assassinés et de torturés que l'on veut draper sous le vocable de " justice transitionnelle " sans transition.

Il est temps que nos autorités admettent l'évidence du drame des familles de disparu et s'activent à donner la solution idoine, plutôt qu'à s'employer à de faux-fuyants par de sordides marchandages, réduisant le disparu à une vulgaire marchandise périssable dont le cours s'érode avec le temps. La mascarade des pseudo-indemnisations n'a fait qu'exaspérer les familles de disparus par la disparité et l'incohérence dans l'évaluation et l'attribution de cette indemnité.

Par ailleurs les ONG algériennes et les ONG internationales des droits de l'homme (AMNESTY, F I D H ,HUMAN RIGHTS WATCH) se doivent de se démarquer de cette grossière manipulation et prennent leurs responsabilités dans cette affaire : sachant que toute démarche judiciaire est vaine en Algérie, c'est vers les mécanismes onusiens qu'elles devraient investir leur effort et vers un but unique : la mise en place d'un tribunal ad hoc sur les crimes commis en Algérie pour juger aussi bien les commanditaires militaires et civils que les " islamistes ".

AFDFC -CNFD 
Le président : R.BENLATRECHE 

Saisine de la procédure d’urgence du Groupe de travail sur les disparitions forcées et involontaires de l’ONU

Collectif des Familles de Disparu(e)s en Algérie, 19 avril 2007

Abdelaziz Zoubida, étudiant âgé de 25 ans, a été arrêté mercredi 11 avril 2007 vers 19h45 par des agents du DRS à la cité universitaire de Constantine. Des agents étaient venus le chercher le matin même au moment où il suivait des cours. De retour dans sa chambre, il a été informé par un des gardiens de l’université que des visiteurs l’attendaient à la loge de la cité universitaire. Abdelaziz s’y est rendu et n’a pas réapparu à ce jour. Ne le voyant pas rentrer, ses amis ont averti les gardiens qui les ont informé qu’Abdelaziz avait été arrêté par deux agents du DRS venus sans mandat d’arrêt, à bord d’un véhicule Cielo gris immatriculé à Alger. Ses amis ont alors prévenu la brigade de gendarmerie qui les a assuré de l’ouverture d’une enquête. Or, depuis aucune nouvelle d’Abdelaziz n’a pu être obtenue.

Dès que le CFDA a reçu cette information, il en a averti sa famille résidant à Tiaret. Ses parents et un de ses frères se sont immédiatement rendus à Constantine afin de déposer plainte. Accompagné du responsable du Comité de Sos Disparus, ils ont d’abord rencontré les gardiens de la cité universitaire avant de se rendre à la brigade de gendarmerie nationale de Zouaghi. Le chef de brigade prétend néanmoins ne rien savoir sur le sort d’Abdelaziz. La famille du disparu a ensuite déposé une plainte auprès du Procureur de la république près le tribunal de Ziadia qui les assurait qu’il mènerait une enquête approfondie. Puis, les membres de la famille se sont rendus au centre territorial des renseignements et des investigations (CRDI) du Ministère de la Défense, où les agents ont affirmé n’avoir aucune information sur le disparu. Malgré toutes ces tentatives en vue d’obtenir des renseignements, la famille et les amis d’Abdelaziz Zoubida restent donc sans aucune nouvelle de lui.

Un autre étudiant a été arrêté hier, 18 avril, à Constantine et nous vous informerons du sort qu’il lui a été réservé dès que possible.

Le CFDA, SOS Disparu(e)s et la famille Zoubida craignent pour la vie et l’intégrité physique et morale de Zoubida Abdlaziz, privé de sa liberté et de ses droits les plus élémentaires à connaître les motifs de sa détention et à bénéficier de l’assistance d’un avocat ; et s’inquiète du sort qui lui est réservé. Ce sont souvent dans les premiers jours de détention que les victimes subissent des tortures et autres traitements inhumains.

C’est pourquoi, le CFDA et SOS Disparus demandent au Groupe de travail sur les disparitions forcées et involontaires de l’ONU (GTDF) et à toutes les instances onusiennes de se mettre rapidement en contact avec les autorités algériennes pour qu’elles donnent des informations sur le sort de Zoubida Abdelaziz et qu’elles le remettent sous la protection de la loi.

P/ Le Collectif des Familles de Disparu(e )s en Algérie
Nassera Dutour, Porte-Parole


(El Watan 19.3 / El Watan 20.3 / Corr.) Un séminaire interdit à Alger, où il devait se tenir les 7 et 8 février, s'est tenu les 18 et 19 mars à Bruxelles, sous l'intitulé "Pour la vérité, la justice et la conciliation", avec le soutien de la Fédération internationale des ligues des droits de l'Homme (FIDH) et la participation de la plupart des ONG algérienne de défense des droits humains (les organisations de familles de "disparus" et de familles de victimes du "terrorisme", la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme, des organisations de défense des droits des femmes) et d'experts étrangers. Les ONG participant au séminaire ont adopté le projet de créatioon d'une "commission pour la v érité, la paix et la conciliation", qui aura pour premier objectif d'établir la vérité, "premier pas vers la réparation et la justice", et que ses initiateurs présentent comme une "alternative" à la charte présidentielle, qui prône une réconciliation à partir de l'oubli. Le mandat de la commission devrait s'étendre sur au moins deux ans, avec comme mandat l'investigation autour des atteintes aux droits humains en Algérie à partir de 1988 -sans exclure une mise en perspective historique plus longue. Dans le meilleur des cas, les inititiateurs de la proposition espèrent passer par le parlement et l'établissement de la commission par une loi, afin de donner à la commission des capacités d'investigation, de débat et d'audiences publiques. Lsa soixantaine de participants au séminaire ont également appelé à l'abrogation de l'ordonnance de mise en oeuvre de la charte porésidentielle "pour la Paix et la Réconciliation nationale, qui instaure le déni de tout droit à la justice, à la vérité et à la libre expression".

QUELLE "JUSTICE TRANSITIONNELLE" EN ALGÉRIE ?

Interrogations sur le projet de constitution d'une " Commission Vérité, Paix et Conciliation "

COMMUNIQUÉ d'Algeria-Watch, 3 avril 2007

Engagée depuis 1997 dans une action d'information sur les violations des droits humains en Algérie et de mobilisation en faveur du " rétablissement de la paix, la vérité et la justice en Algérie ", l'association Algeria-Watch a toujours accordé une grande importance à toute initiative en ce sens. C'est pourquoi il lui a paru important de réagir au projet, élaboré en mars 2007 à Bruxelles par certaines associations algériennes de défense des droits humains, d'une " Commission pour la Vérité, la paix et la Conciliation respectueuse des devoirs de Justice, de Vérité, de Mémoire, de Dignité et de Réparation ".

Ce projet s'inscrit dans une optique de " justice transitionnelle " qui a fait ses preuves dans certains pays, dès lors que certaines conditions bien précises sont réunies. Or elles sont loin de l'être en Algérie aujourd'hui, puisque la réalité de la " transition " politique actuelle reste des plus limitées, les principaux responsables du pays au cours des années de guerre étant toujours en place. Dans ce contexte, les modalités du projet proposé d'une " Commission pour la Vérité, la paix et la Conciliation " apparaissent inadaptées à la situation actuelle, en particulier parce que : a) elles semblent exclure a priori toute perspective de recours à la Justice ; b) elles ne sont de facto l'expression que d'une partie des différentes composantes de la société algérienne.

La réunion de Bruxelles de mars 2007

Les 18 et 19 mars 2007, cinq associations algériennes (Collectif des Familles de Disparu(e)s en Algérie, SOS Disparu(e)s, Djazairouna, ANFD et Somoud) se sont réunies à Bruxelles, avec le soutien de la FIDH et en présence d'une " soixantaine de personnes parmi lesquelles des familles de victimes, des représentants d'ONG, des intellectuels algériens, des avocats et des experts internationaux de la justice transitionnelle ". Ce séminaire devait initialement se tenir à Alger début février, mais il avait été interdit par les autorités algériennes.

L'objectif de cette rencontre était de jeter les bases pour l'établissement d'une " commission pour la Vérité, la paix et la Conciliation respectueuse des devoirs de Justice, de Vérité, de Mémoire, de Dignité et de Réparation ". Les participants de ce séminaire ont conclu que " la solution la plus adaptée au contexte dramatique algérien passait par l'instauration d'une justice transitionnelle " et en conséquence ont formulé une série de recommandations exhortant le pouvoir à s'engager dans un tel processus.

Dans l'absolu, que des " associations de victimes de l'État et des groupes armés islamistes, longtemps divisées " aient engagé une démarche commune représente indiscutablement une évolution positive dans une conjoncture où le camp des défenseurs des droits humains en Algérie est toujours en butte aux menées répressives du pouvoir. La sincérité de l'engagement des participants au séminaire de Bruxelles ne saurait évidemment être mise en cause.

Le communiqué rendu public à l'issue de cette réunion suscite toutefois maints questionnements.

Une " justice transitionnelle " sans transition ?

D'une manière générale, les débats autour de l'établissement d'une commission ayant vocation de traiter des graves violations de droits humains commises durant une période déterminée, comme une nécessité permettant de rétablir la paix et la justice, constituent une entreprise complexe et délicate. Celle-ci engage tout le mouvement de défense des droits humains et concerne toutes les victimes de ces violations. Cette réflexion suppose donc la participation du plus grand nombre d'acteurs possibles, condition qui, dans le cas de la réunion de Bruxelles, n'a pas été remplie : des femmes et des hommes de sensibilités politiques très diverses, pourtant connues pour leur engagement datant parfois d'avant le putsch de 1992, n'y ont pas été conviées.

Quelles en sont les raisons ?

Or, en se revendiquant d'une " Coalition des associations de victimes ", le communiqué final du séminaire exprime implicitement une représentativité complète. Et de fait, il ne se présente pas comme une contribution à un débat nécessaire, mais il énonce les préalables à l'établissement d'une commission définie d'avance, comme s'il n'existait aucune alternative.

Plus essentiellement, la question se pose de l'opportunité de définir aujourd'hui les modalités d'une " justice transitionnelle " en Algérie, alors même que les conditions d'une authentique " transition " sont loin d'être réunies. Lors du séminaire, expliquent ses responsables, " plusieurs experts internationaux ont fait partager leurs expériences de justice transitionnelle dans d'autres pays comme le Chili, le Pérou, le Maroc, le Rwanda, la Colombie et l'Afrique du Sud ". Mais dans tous ces pays, les dispositifs mis en place - selon des modalités certes très variables - l'ont été après que les principaux responsables étatiques des violations des droits humains et/ou du terrorisme d'État ont quitté le pouvoir.

Or tel n'est pas le cas dans l'Algérie de 2007. Les chefs du DRS, les généraux Mohammed Médiène et Smaïl Lamari, principaux responsables de la terrible " machine de mort " qui a ensanglanté le pays depuis 1992, restent à leur poste (depuis 1990) et contrôlent toujours le cœur du pouvoir. Certains chefs de l'armée ont certes été écartés et remplacés, mais les principaux dirigeants de partis politiques et des médias aux ordres sont toujours là, et l'encadrement de la société sur le plan civil et militaire n'a pas connu de bouleversements sensibles. C'est le même système politique cadenassé et rigidement contrôlé qui continue de fonctionner. C'est le même appareil judiciaire inféodé qui continue de servir les intérêts des dirigeants effectifs de ce système. Et même si ce n'est plus avec la terrible intensité qu'hier, l'appareil répressif mis en place à partir de 1992 continue aujourd'hui encore de manipuler, torturer, faire disparaître, tuer. Tandis que de nombreux membres de groupes armés - souvent non identifiés, mais systématiquement identifiés à des islamistes - ont été exonérés de toute sanction de leurs crimes par l'ordonnance de mise en œuvre de la " Charte pour la paix et la réconciliation nationale ", adoptée par le pouvoir en février 2006.

Le séminaire de Bruxelles réclame à juste titre l'abrogation de cette Charte, qui prétend également interdire toute poursuite contre les responsables et membres des forces de sécurité auteurs de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité. Mais comment peut-il, simultanément, " exhorter " les " plus hautes instances du pays " à " lancer un processus institutionnel pour la mise en place d'une Commission pour la Vérité, la Paix et la Conciliation " ? Dans les conditions évoquées plus haut, cela ne revient-il pas à conférer aux premiers responsables de la tragédie algérienne, toujours détenteurs du pouvoir réel, la légitimité de trouver une solution aux souffrances de leurs victimes et à leur quête de reconnaissance et de justice ? Une perspective qu'aucune expérience sérieuse de justice transitionnelle dans le monde n'a jamais envisagée au cours des dernières décennies.

La " conciliation " à la place de la Justice ?

L'intitulé du projet d'une " Commission pour la Vérité, la Paix et la Conciliation " - mais sans la Justice - avait déjà été évoqué dans l'invitation à la réunion qui devait à l'origine avoir lieu à Alger début février 2007 et interdite par les autorités. En l'absence de plus amples explications sur les objectifs des auteurs de cette initiative, il faut s'interroger sur l'intitulé retenu par ces derniers, celui-ci faisant figure de programme. En effet, quid du terme " conciliation " ? La conciliation renvoie à une signification juridique très précise, désignant une procédure utilisée par des parties en conflit, désireuses d'arriver à un règlement amiable sans avoir à passer par une procédure judiciaire. Ce qui impliquerait donc que l'intention des initiateurs de la rencontre bruxelloise serait d'éviter le recours à la Justice, alors que cela a toujours été en Algérie une revendication majeure pour des dizaines de milliers de victimes (des forces de sécurité comme des groupes armés, de quelque obédience qu'ils soient). Sinon, comment expliquer les innombrables plaintes, notamment de familles de disparus, déposées auprès des tribunaux algériens ?

Les discussions autour de la création d'une commission " Vérité et Justice " ne datent pas de cette année et s'insèrent dans un long travail effectué depuis plus d'une décennie par des défenseurs des droits humains, tant sur le plan national qu'international. En attestent les centaines de plaintes pour tortures, détention abusive, disparition déposées en Algérie dès 1992, les milliers de dossiers remis aux différents groupes de travail de l'ONU, la mobilisation internationale autour d'une commission d'enquête sur les massacres en Algérie à partir de 1997, les plaintes pour torture déposées en Europe contre les plus hauts responsables de l'armée algérienne et nombre d'autres actions sur le plan national et international. Ces initiatives ayant pour objectif d'aboutir au déclenchement de procédures judiciaires devraient-elles donc être toutes classées sans suite et vouées aux oubliettes, au prix d'un arrangement avec le pouvoir ?

Certes, cela a été dit, dans les revendications finales du communiqué publié à l'issue du séminaire de Bruxelles, il est affirmé que la " Commission pour la Vérité, la Paix et la Conciliation " serait " respectueuse des devoirs de Justice, de Vérité, de Mémoire, de Dignité et de Réparation ". Mais, s'agissant de " Justice ", on doit comprendre qu'il s'agit d'une singulière " justice transitionnelle ", puisque ne sont jamais envisagées des procédures judiciaires, des comparutions devant des tribunaux ni l'appel au pénal. Sans définir les conditions dans lesquelles une justice transitionnelle peut être envisagée, celle-ci semble être réduite à une réforme des propositions émises en la matière ces dix dernières années par ceux-là mêmes qui sont responsables des crimes contre l'humanité commis à leur instigation par les " forces de sécurité " et qui ont amnistiés en pratique ceux perpétrés par les groupes armés se réclamant de l'islam.

Les détenteurs du pouvoir réel en Algérie ont en effet pratiqué à leur manière une espèce de " justice transitionnelle " en promulguant différentes lois, qu'il s'agisse de celle de la " Rahma " en 1995, de la " concorde civile " en 1999 ou de la " paix et la réconciliation nationale " en 2006. D'ailleurs, l'un des participants au séminaire l'a constaté lui-même en affirmant que " la charte pour la paix et la réconciliation poursuit donc des objectifs comparables à ceux que poursuivent les commissions vérité " (Le Soir d'Algérie, 24 mars 2007). Le seul point nouveau revendiqué dans le communiqué est la recherche de Vérité, objectif de fait absent pour les instances constituées par le pouvoir (comme la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'homme, présidée depuis 2001 par l'avocat Farouk Ksentini).

Les conditions d'une authentique " paix réelle et durable "

Reste que les points communs entre les dispositions prises par le pouvoir et les suggestions de la " Coalition des associations de victimes " sont plus nombreux qu'il peut paraître à première vue. Tandis que le pouvoir chercherait à instaurer la paix et la réconciliation à coups de diktats, la commission conçue par la coalition semble ainsi préconiser implicitement le modèle marocain de l'" Instance Équité Réconciliation " (IER). Celle-ci, très controversée, s'est contentée de répertorier les violations des droits humains commises entre 1956 et 1999 et de rédiger un rapport remis au roi. La version publique de ce rapport, elle, ne devait pas mentionner de noms de responsables de crimes et aucune sanction n'est prévue contre eux. L'IER a pu organiser des séances télévisées offrant à quelques victimes la possibilité de parler de leurs souffrances. À défaut de justice, une attention particulière a été portée aux réparations en faveur des victimes, préoccupation que l'on retrouve dans le projet de Bruxelles.

Force est donc de constater que la " Coalition des associations de victimes " semble favoriser une solution excluant toute intervention de la Justice, ce que prétend justement imposer le pouvoir algérien. L'un comme l'autre font en tout cas l'économie d'une analyse des causes de la guerre déclenchée en Algérie en 1992 et de la situation de violence qui perdure depuis 1999. Or cette analyse permettrait de mieux situer les responsabilités et de proposer des issues, indépendamment des sensibilités politiques des participants.

Et c'est là que la composition du séminaire de Bruxelles pèche par sa sélectivité ou son exclusivisme. Pour le formuler très clairement : ses organisateurs ont omis d'inviter ou d'associer à leur initiative des militant(e)s des droits humains qui continuent à juger essentielle la revendication de Justice, en particulier ceux se revendiquant de l'islam politique, comme d'ailleurs toute personne suspectée - à tort ou à raison - de proximité avec ces derniers. Et cela alors même que la majeure partie des victimes des " années de sang " ont été des militant(e)s ou des sympathisant(e)s du Front islamique du salut (FIS).

En janvier 1995, les représentants de ces derniers étaient pourtant partie prenante de la " plateforme de Sant'Egidio ", adoptée à Rome par l'ensemble des organisations politiques algériennes d'opposition partageant le " rejet de la violence pour accéder ou se maintenir au pouvoir ", le " respect de l'alternance politique à travers le suffrage universel " et la " consécration du multipartisme ", et proposant au pouvoir des " négociations " pour mettre fin à la " guerre civile ". Douze ans après le rejet de ce programme - par ce pouvoir toujours en place à ce jour -, dont la mise en œuvre aurait pourtant permis d'épargner des dizaines de milliers de victimes, comment pourrait-on croire aujourd'hui que l'éviction de ceux qui, se revendiquant de l'islam politique, affirment leur volonté de lutte pour les droits humains uni-versels, puisse déboucher sur une " paix réelle et durable " ?

La confusion régnant autour des termes " islamiste ", " terrorisme/terroristes ", " amnistie ", " disparitions ", " massacres ", " patriote " ou " repenti " produit dès le départ une perception biaisée de la situation algérienne et tend à légitimer et à perpétuer la version officielle des faits. La recherche de vérité ne passe pas seulement par l'identification des véritables commanditaires et auteurs de crimes, mais aussi par celle de définitions adéquates et d'une terminologie propre à l'expérience algérienne. Sans ce travail de fond, toute solution ne peut être que partielle et superficielle - comme l'a montré notamment l'expérience de l'Argentine.

Cette démarche implique que soient conduites des enquêtes impartiales et rigoureuses sur les violations des droits humains, quels qu'en soient les responsables, commises depuis 1992. Or, malgré les efforts des uns et des autres - y compris ceux des participant(e)s au séminaire de Bruxelles -, il faut admettre que les nombreuses informations disponibles à ce jour n'ont pas suffi à fissurer effectivement le mur de désinformation et d'idées préconçues édifié par le pouvoir, seule condition d'un vrai consensus entre toutes celles et ceux qui, en Algérie, partagent l'objectif d'une " paix réelle et durable ". Ce constat indique clairement que les conclusions du séminaire de Bruxelles ne sont à tout le moins que préliminaires et qu'un travail collectif plus large reste nécessaire pour pouvoir prétendre à l'établissement d'une " commission Vérité, Justice et réconciliation ".

Pour Algeria-Watch, si une justice transitionnelle doit intervenir, elle ne peut aboutir à des résultats satisfaisants pour une majorité de victimes, qu'à la condition d'être mise en œuvre au cours d'une période de transition réelle. Et à l'issue d'une négociation entre acteurs indépendants et intègres, d'obédiences différentes, dans le but de trouver ensemble une sortie à la crise viable, durable et acceptable par le plus grand nombre.


(Le Jeune Indépendant 11.3 / Le Jeune Indépendant, Liberté 13.3) La population carcérale alégérienne est estimée à environ 55'000 personnes en 2006, selon le directeur général des centres pénitentiaires, Mokhtar Felioune. Ce chiffre révèle une augmentation importante, puisque la population pénitantiaire était estimée en environ 45'000 personnes au début du siècle. Mokhtar Felioune explique cette augmentation par la réduction du nombre de bénéficiaires des mesures de grâce présidentielle et de réductions de peine. Sur les 55'000 détenus des prisons algériennes, 7100 suivent une formation professionnelle ou un enseignement à distance.

Le directeur des centres pénitentiaires a annoncé que 81 centres pénitentiaires répondant aux normes internationales sont actuellement en construction, et qu'au fur et à mesure de leur entrée en activité, les centres pénitentiaires datant de l'époque coloniale (comme la prison algéroise de Serkadji) seront fermés.

L'organisation mondiale contre la torture (OMCT) a annoncé le 10 mars que 93 détenus de la prison algéroise d'El Harrach avaient entamé le 3 mars une grève de la faim pour protester contre leurs mauvsises conditions de détention. Selon l'OMCT, ces 93 détenus avaient été enfermés pendant plusieurs mois dans une cellule prévue pour 45 personnes, puis transférés dans des cellules encore plus exiguës, et presque sans aération. Une source proche du parquet d'Alger a confirmé au "Jeune Indépendant" la grève des détenus, tout en rejetant l'accusation de mauvais traitements et de mauvaises conditions de détention. En revanche, le président de la Commission nationale consultative pour la promotion et la protection des droits de l'homme (CNCPDH) a déclaré ne pas être au courant d'une grève de la faim collective, mais seulement d'une grève de la faim individuelle à El Harrach. Le directeur général des centres pénitentiaires, Mokhtar Felioune, a pour sa part démenti formellement qu'une grève de la faim collective d'une centaine de détenus se soit produite à El Harrach, et démenti également l'existence de mauvais traitement et de mauvaises conditions de détention.

(Liberté 18.3) 27 membres de groupes armés, dont deux chefs ou anciens chefs du GSPC, Hassan Hattab et Mokhtar Belmokhtar, ont été condamnés à mort le 17 mars par la Cour d'assises de Batna, pour (notamment) constitution de groupes terroristes armés, assassinat avec préméditation, incendie volontaire. Les deux hommes ont été condamnés par contumace, mais seul Mokhtar Belmokhtar est toujours en activité en tant qu'"émir" du GSPC (devenu Al-Qaida au Maghreb), dans le sud algérien, mais également au Mali, au Niger, en Mauritanie et au Tchad.

(Liberté 28.2 / El Khabar 7.4) Selon des sources de la direction générale de la Sûreté nationale (DGSN), 900 policiers ont fait l'objet de sanctions administratives (dont 145 exclusions de la police) en 2006, par décision de la commission disciplinaire de la DGSN, et 192 dossiers ont été transmis à la justice. 65 policiers ont été mis en détention provisoire, 12 laissés en liberté provisoire, un acquitté. Les fautes retenues contre les policiers sanctionnés vont des "dépassements" de l'éthique policière au trafic de drogue, en passant par la corruption, le vol et l'homicide. Plusieurs chefs ont été sanctionnés : ainsi, le chef de la sûreté d'Alger, le chef de la brigade criminelle et son adjoint ont été révoqués pour leur implication dans une affaire de drogue.

LETTRE OUVERTE au Conseil d'Association UE - Algérie du 24 Avril 2007

Fédération internationale des ligues des droits de l'Homme - FIDH Réseau Euroméditerranéen des droits de l'Homme - REMDH Organisation mondiale contre la Torture - OMCT Ligue Algérienne des Droits de l'Homme - LADH Ligue Algérienne de Défense des droits de l'Homme - LADDH SOS Disparus Comité pour les Familles de Disparus en Algérie - CFDA

ATTN. 
S.E. Dr Frank-Walter Steinmeier, Ministre des Affaires étrangères de la République Fédérale d'Allemagne
Ministres des Affaires étrangères des Etats membres de l'Union européenne
M. Javier Solana, Haut Représentant de l'UE pour la PESC 
Mme. Benita Ferrero Waldner, Commissaire aux Affaires étrangères
M. Hans Gert Pöttering, Président du Parlement Européen

Bruxelles, Alger, 17 avril 2007

Excellences, Mesdames, Messieurs,

A quelques jours du prochain Conseil d'association Union européenne - Algérie, le 24 avril 2007, les organisations signataires souhaitent attirer votre attention sur plusieurs préoccupations concernant la situation des droits humains en Algérie, et vous appeler à les soulever auprès des autorités algériennes en vertu de l'article 2 de l'Accord d'association liant l'UE à l'Algérie, ainsi que des lignes directrices de l'UE sur les défenseurs des droits de l'Homme et sur la torture.

La Charte pour la paix et la réconciliation nationale est entrée en vigueur avec la mise en oeuvre de ses textes d'application (ordonnance 06-01 et les 3 décrets présidentiels) le 27 février 2006[1].

Cette Charte fournit une amnistie généralisée aux membres des forces de sécurité, des milices armées par l'Etat et des groupes armés terroristes[2] responsables de crimes au regard de la législation pénale algérienne, du droit international et d'autres graves atteintes aux droits humains et qui n'ont, à ce jour, pas fait l'objet d'enquêtes.

Les dispositions législatives officialisent un déni du droit à la vérité et à la justice des victimes des violations et de leurs familles. Elles pénalisent en outre l'exercice du droit à la liberté d'expression des victimes et des défenseurs des droits de l'Homme, en prévoyant de punir, par des peines allant jusqu'à 5 années d'emprisonnement, tout travail de recherche de la vérité et de justice (article 46 du décret d'application). Enfin, elles interdisent tout recours en justice sur ces crimes devant les juridictions algériennes.

Cette loi s'étend aux crimes de disparition forcée et autres crimes contre l'humanité commis en Algérie, en contravention des obligations de l'Algérie au regard du droit international d'enquêter sur les crimes, d'établir les responsabilités et de fournir des réparations judiciaires aux victimes.

Plusieurs Procédures spéciales des Nations unies ont condamné à plusieurs reprises cette loi. Ainsi, le Rapporteur spécial sur l'indépendance des juges et des avocats, conjointement avec le Rapporteur Spécial sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, et le Président Rapporteur du Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires, ont dénoncé les provisions prévoyant l'amnistie ainsi que celles pénalisant les défenseurs des droits de l'Homme et les familles de victimes. Ils rappellent notamment "qu'aucun plan de paix, même soutenu par un processus démocratique, ne peut ignorer le droit à la vérité et à la pleine réparation des victimes de violations graves des droits de l'homme".

Ils soulignent en outre, s'agissant des disparitions forcées, que " la disparition est un délit continu tant que le sort de la victime ou le lieu où elle se trouve ne sont pas établis clairement. (...) que les auteurs de faits de disparition forcée ne peuvent pas bénéficier de lois d'amnistie spéciales et que l'existence de circonstances atténuantes ne peut être invoquée que dans les cas où l'auteur a contribué à l'éclaircissement de l'affaire ", ce qui n'est pas le cas ici.[3]

Les organisations signataires demandent instamment à l'Union européenne d'intervenir, notamment en vertu des lignes directrices sur la torture et celles sur les défenseurs des droits de l'Homme, afin d'enjoindre les autorités algériennes à

- abroger l’ordonnance 06-01 et les décrets présidentiels du 27 février 2006;

- autoriser le Groupe de travail sur les disparitions forcées à entreprendre une mission d'enquête en Algérie, comme il en a réitéré la demande en 2006.

Même s'il n'a pas été fait recours à l'article 46 du décret d'application de la Charte qui prévoit des sanctions pouvant aller jusqu'à 5 ans d'emprisonnement pour quiconque continuera de parler ou d'écrire "en exploitant les blessures de la tragédie nationale" dans le but de nuire à l'image de l'Algérie et à la bonne réputation de ses agents, les autorités algériennes n'ont pas hésité à interdire à Alger et ce, au lendemain de la signature par l’Algérie de la Convention sur les disparitions forcées, la tenue du séminaire pour « la Vérité, la Paix et la Conciliation » qui portait notamment sur cette question et qui devait se tenir les 8 et 9 février 2007. Plusieurs experts internationaux et représentants d'ONG internationales se sont vus refuser par plusieurs représentations diplomatiques algériennes la délivrance de visa pour participer à cette rencontre.

Les défenseurs qui luttent contre l’impunité des auteurs de violations des droits de l’Homme et qui, dans ce cadre ont critiqué l’adoption du projet de Charte pour la paix et la réconciliation nationale, et de ses textes d’application entrés en vigueur le 28 février 2006 ont été pris pour cible par les autorités). Ainsi, le 12 mai 2006, Me Amine Sidhoum, avocat membre de SOS Disparu(e)s, a été menacé par un représentant de la délégation algérienne, lors de la 39ème session de la Commission africaine des droits de l’Homme et des peuples (CADHP), pour le dissuader de s’exprimer devant la Commission. Me Sidhoum fait l’objet, depuis plusieurs mois, de poursuites judiciaires pour “introduction d’objets non autorisés à la prison”, tout comme Me Hassiba Boumerdassi, avocate membre du Collectif des familles de disparu(e)s en Algérie (CFDA). Leur procès a été reporté pour la troisième fois, le 21 avril 2007.[4]

Dans son rapport remis en mars 2007 au Conseil des droits de l'Homme, la Représentante spéciale du SG des Nations unies sur les défenseurs des droits de l'Homme, Mme Hina Jilani, rapporte les nombreux cas sur lesquels elle est intervenue et exprime sa préoccupation sur la situation des défenseurs des droits de l'Homme en Algérie, en particulier ceux travaillant sur les disparitions forcées. Elle enjoint les autorités algériennes à mettre en oeuvre pleinement la déclaration des Nations unies sur les défenseurs des droits de l'Homme.[5] Cette préoccupation est notamment reprise par le Groupe de travail sur les disparitions forcées, le Rapporteur sur l'indépendance des juges et des avocats, le Rapporteur sur les exécutions sommaires.

En outre, et en dépit de la grâce accordée à tous les journalistes condamnés pour “insultes graves envers des représentants officiels de l’Etat”, “offense envers le président de la République” et “injures, diffamation et insultes visant les institutions de l’Etat”, le 5 juillet 2006[6], des journalistes continuent d'être poursuivis et condamnés à des peines de prison pour " diffamation ", peines d'emprisonnement prévues par le code de la presse algérien.

Dans son rapport remis en mars 2007 au Conseil des droits de l'Homme, le Rapporteur Spécial des Nations Unies sur la liberté d'expression et d'opinion, M. Ambeyi Ligabo, revient sur les allégations qu'il a envoyées tout au long de l'année aux autorités algériennes faisiant montre de sa préoccupation sur la liberté d'expression en Algérie. Il condamne en particulier la pénalisation de la diffamation, qui en vertu du droit international, est rigoureusement interdite.[7]

Les organisations signataires appellent donc l'Union européenne, notamment en vertu des lignes directrices de l’UE sur la protection des défenseurs des droits de l’Homme, et de la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’Homme des Nations unies, de prier instamment le gouvernement algérien à

- garantir la liberté d'action des défenseurs des droits de l'Homme

- lever toutes les formes d’entraves à la liberté de penser, d'expression, de réunion et de rassemblement pacifique.

Nos organisations condamnent vivement les attentats qui ont eu lieu à Alger, le 11 avril 2007 et qui ont occasionné la mort de près de 40 personnes et ont fait plus de 200 blessés. Elles appellent les autorités algériennes dans le cadre des enquêtes et poursuites qui seront menées à la suite de ces événements tragiques, à se conformer scrupuleusement à leurs obligations internationales en matière de respect des droits humains.

La lutte contre pareils crimes odieux relève de l'impérieux devoir des Etats. Toutefois, cette lutte doit se faire dans le respect des droits humains et des libertés fondamentales.

Quelle que soit la motivation de ses auteurs - politique, religieuse ou sociale - , le terrorisme a pour effet et parfois comme objectif ultime d’annihiler les principes de démocratie, de liberté et d’humanité. L'expérience démontre, hélas, combien déroger à ces valeurs pour combattre ceux qui cherchent précisément à les détruire revient à leur prêter main forte et à les conforter dans leur aversion des normes universelles qui fondent l’organisation de nos sociétés.

En Algérie, plusieurs détenus suspectés d'activités liées au terrorisme continuent d'être maintenus dans des lieux de détention secrets, sous contrôle policier, sans avoir la possibilité de communiquer avec leurs familles et l'extérieur avec les risques de mauvais traitements que cela entraîne. Nos organisations s'inquiètent en outre de la recrudescence des cas de disparition de personnes et en particulier, de personnes suspectées d'activités ou d'appartenance à un groupe terroriste. Au cours des derniers mois, plusieurs personnes ont ainsi été portées disparues pendant plusieurs semaines voire plusieurs mois. Il s'est avéré par la suite que la plupart d'entre elles, avaient été arrêtées et maintenues au secret pour la plupart d'entre eux, à la caserne Antar à Alger.

Enfin, plusieurs personnes suspectées d'avoir participé à des activités terroristes ou d'appartenance à des groupes terroristes, arrêtées et détenues dans des Etats-membres de l'Union européenne, et notamment au Royaume Uni, ont fait l'objet d'extradition vers l'Algérie où elles ont été remises entre les mains des services de sécurité, ce qui fait craindre pour leur intégrité physique et psychologique.

Ces craintes sont renforcées par le fait que plusieurs témoignages de personnes interrogées, arrêtées et détenues, soupçonnées d'activités terroristes font état de pratiques de torture systématique à leur encontre du fait des personnes en charge des interrogatoires et du personnel des lieux de détention. En outre, la majorité des allégations de torture faites en 2005 et au cours des années précédentes n'ont pas fait l'objet d'investigations.

Les organisations signataires demandent à l'Union européenne d'intervenir en application des lignes directrices de l'UE sur la Torture, en appelant l'Algérie à

- l’arrêt immédiat des pratiques de torture et de mauvais traitements;

- ratifier le Protocole facultatif à la Convention contre la torture

- autoriser le Rapporteur spécial sur la torture qui en a réitéré la demande à maintes reprises depuis 1997 ainsi que le Rapporteur spécial sur la promotion et la protection des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans la lutte anti-terroriste qui en a fait la demande en 2006, à se rendre en Algérie dans les meilleurs délais.

Bien que l'Algérie ait ratifié la Convention de Genève de 1951 relative aux statuts des réfugiés ainsi que la Convention sur la protection des droits de travailleurs migrants, nos organisations déplorent le non-respect de ces instruments internationaux et l'absence de leur mise en oeuvre.

De nombreux cas de mauvais traitements de migrants notamment sub-sahariens par les forces de sécurité algériennes à l'occasion de reconduites musclées à la frontière ont été rapportés à nos organisations. Nos organisations rappellent aux autorités algériennes mais également à l'UE dans le cadre notamment de leur coopération dans la lutte contre la migration illégale, leur devoir d'assurer la primauté des normes universelles des droits des migrants.

Kofi Annan, dans son rapport sur les migrations et le développement, a rappelé combien les droits de l’Homme ont un caractère primordial dans l’élaboration des politiques migratoires. Il précise en outre que le droit des Etats « de décider qui entre sur leur territoire et y séjourne » reste soumis " au respect des obligations conventionnelles et de celles qui découlent du droit international coutumier "8].

Nos organisations appellent en outre, les Etats membres de l'Union européenne qui ne l'ont pas encore fait à ratifier dans les meilleurs délais, la Convention sur la protection des droits de travailleurs migrants.

Organisations signataires:

Fédération internationale des ligues des droits de l'Homme - FIDH
Réseau Euroméditerranéen des droits de l'Homme - REMDH
Organisation mondiale contre la Torture - OMCT
Ligue Algérienne des Droits de l'Homme - LADH
Ligue Algérienne de Défense des droits de l'Homme - LADDH
SOS Disparus
Comité pour les Familles de Disparus en Algérie - CFDA

[1] Le 27 février 2006, le cabinet algérien au complet réuni sous la Présidence d’Abdelaziz Bouteflika, a approuvé le « Décret de mise en œuvre de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale » du Président Bouteflika, charte que les électeurs algériens ont adopté lors d’un référendum le 29 septembre 2005. [2] Voir les articles 44 et 45 du texte de la Charte, dans le chapitre intitulé « Mesures de mise en oeuvre de la reconnaissance du peuple algérien envers les artisans de la sauvegarde de la République algérienne démocratique et populaire » [3] Voir notamment E/CN.4/2006/52/Add.1 paras 10-13, E/CN.4/2006/56 paras 55-78 [4] Voir notamment le Rapport Annuel 2006 de l'Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l'Homme (FIDH/OMCT) [5] E/CN.4/2006/95/Add.1, paras 8-15 [6] Le fait que cette grâce ne concerne que les journalistes condamnés “définitivement” réduit considérablement sa portée, la majorité d’entre eux étant soumis à des procédures en appel pendantes depuis de nombreux mois, voire de nombreuses années. Une majorité de journalistes poursuivis pour avoir dénoncé des violations des droits de l’Homme reste susceptible de condamnations. [7] E/CN.4/2006/55/Add.1, paras 9-19 [8] Rapport du Secrétaire général sur les migrations et le développement, A/60/871, 18 mai 2006. Pages 18 et 19.

(El Watan 24.5 / Algeria-Watch 25.6 / El Khabar 23.7) Le Comité des droits de l'Homme de l'ONU a commencé le 23 juillet a étudier le 3ème rapport périodique présenté (avec plusieurs années de retard) par l'Algérie, qui répondra en octobre prochain, lors de la discussion du rapport, aux questions posées à son sujet par les ONG. Dans son rapport annuel, Amnesty International a ainsi critiqué l'application de la Charte de réconciliation nationale, et la consécration de l'impunité des responsables de violations des droits humains. AI a également critiqué les poursuites contre les media et les défenseurs des droits humains.De leur côté, Algeria-Watch et Al Karama ont lancé un appel aux ONG, mais également aux journalistes, syndicats autonomes, militants associatifs et politiques et défenseurs des droits humains à "s'impliquer dans l'examen par les experts du Comité des droits de l'Homme de l'ONU du troisième rapport périodique du gouvernement algérien".

Lors de l'examen du second rapport algérien, en 1998, le comité onusien avait relevé l'insuffisance des données transmises par l'Algérie sur la situation des droits humains, et s'était dit "préoccupé" par les informations reçues à propos, notamment, d'exécutions arbitraires, de recours à la torture, de "disparitions", de centres de détentiopn secrets, de restrictions des libertés fondamentales.

(El Moudjahid 15.7 / Liberté, Quodtiien d'Oran 24.7) Les organisations de familles de "disparus" ont annoncé leur intention de rouvrir le dossier des "disparitions", que le gouvernement algérien con sidère comme ayant été clos par la charte sur la réconciliation nationale. Les familles de "disparus" vont demander à l'ONU de se repencher sur le problème, à l'occasion de la réunion du Comité des droits de l'Homme à Genève. Selon l'avocat Azzi Mérouane, 6145 dossiers de "disparus" et 17'000 de "terroristes" abattus ont été traités dans le cadre des dispositions de la "réconciliation nationale". Les organisations de familles de "disparus" estiment, elles, à 8200 le nombre de personnes disparues, la Ligue algérien des droits de l'Homme avançant même le chiffre de 18'000 disparitions. Le comité des familles de disparus et la Fédération internationale des ligues des droits de l'Homme demandent l'établissement d'une commission pour la vérité, la paix et la conciliation, et dénoncent les "pressions exercées par les pouvoirs publics" sur les familles pour les convaincre, ou les contraindre, à accepter des indemnisations en échange de leur "silence".

Collectif des familles de disparu(e)s

Saisine de la procédure d’urgence du Groupe de travail sur les disparitions forcées et involontaires de l’ONU

15 mai 2007

Fethi Hamaddouche, âgé de 24 ans, est sorti du domicile familial à Mostaganem le 2 mars et est disparu à ce jour. Le 5 mars à 10h30, les agents du Département de la Sûreté et du Renseignements (DRS) ont envahi son domicile. Venus très nombreux, véhiculés et lourdement armés ces agents prétendaient rechercher Fethi. Ils ont été très menaçants et virulents envers toute la famille. Ne trouvant pas Fethi, ils ont embarqué son frère Samir par la force. Ils l‘ont roué de coups, parce qu’il avait osé demander si ils avaient un mandat de perquisition et un mandat d’arrêt, puis ils lui ont recouvert le visage avec son pull et l’ont emmené jusqu’à la caserne du quartier appelé « le Plateau ». Samir a été jeté dans une cellule et quelques minutes après, les agents ont amené Fethi devant lui en lui demandant s’il le connaissait. Samir a rétorqué qu’il le connaissait puisque c’était son frère. Après quoi, ils l’ont refrappé violemment devant son frère Fethi. Samir a été relâché le soir même vers 21 heures.

Fethi Hamaddouche, âgé de 24 ans, est sorti du domicile familial à Mostaganem le 2 mars et est disparu à ce jour. Le 5 mars à 10h30, les agents du Département de la Sûreté et du Renseignements (DRS) ont envahi son domicile. Venus très nombreux, véhiculés et lourdement armés ces agents prétendaient rechercher Fethi. Ils ont été très menaçants et virulents envers toute la famille. Ne trouvant pas Fethi, ils ont embarqué son frère Samir par la force. Ils l‘ont roué de coups, parce qu’il avait osé demander si ils avaient un mandat de perquisition et un mandat d’arrêt, puis ils lui ont recouvert le visage avec son pull et l’ont emmené jusqu’à la caserne du quartier appelé « le Plateau ». Samir a été jeté dans une cellule et quelques minutes après, les agents ont amené Fethi devant lui en lui demandant s’il le connaissait. Samir a rétorqué qu’il le connaissait puisque c’était son frère. Après quoi, ils l’ont refrappé violemment devant son frère Fethi. Samir a été relâché le soir même vers 21 heures.

Touati Hamreras qui a été lui aussi arrêté le 5 mars à Mostaganem et qui se trouve aujourd’hui à la prison de Serkadji affirme avoir été transféré avec Fethi de Mostaganem à Alger le 7 mars 2007 dans une caserne du DRS. Il y a laissé Fethi Hamaddouche vivant mais depuis aucune nouvelle de Fethi n’a pu être obtenue.

Le CFDA, SOS Disparu(e)s et la famille Hamaddouche craignent pour la vie et l’intégrité physique et morale de Fethi Hamaddouche privé de sa liberté et de ses droits les plus élémentaires à connaître les motifs de sa détention et à bénéficier de l’assistance d’un avocat et s’inquiète du sort qui lui est réservé.

C’est pourquoi, le CFDA et SOS Disparus demandent au Groupe de travail sur les disparitions forcées et involontaires de l’ONU (GTDF) et à toutes les instances onusiennes de se mettre rapidement en contact avec les autorités algériennes pour qu’elles donnent des informations sur le sort de Fethi Hamaddouche et qu’elles le remettent sous la protection de la loi. Nous prions également toutes les ONG de défense des droits de l’Homme de bien vouloir lancer un appel urgent au sujet de la disparition de Fethi Hamaddouche.

Paris, le 15 mai 2007
P/Le Collectif des Familles de Disparu(e )s en Algérie
Nassera Dutour, Porte-parole


(Jeune Indépendant 10.6 / El Watan 11.6 / Algeria-Watch 21.6) Les avocats algériens, à l'appel du Conseil du barreau d'Alger, se sont mis en grève le 10 juin. Ils dénoncent leurs conditions de travail, et les atteintes aux droits de la défense. La grève (qui s'est traduite par un boycott des audiences) avait aussi pour but de manifester la solidarité des avocats avec l'un d'entre eux, poursuivi à Tlemcen pour "dénonciation calomnieuse et outrage à magistrat", après qu'il ait déposé plainte, au nom de son client, contre une juge, l'accusant d'avoir établi un document antidaté.

Algeria-Watch signale des cas répétés de "harcèlement" d'avocats et défenseurs des droits humains : interrogatoire à l'aéroport d'Alger, en juin, d'un avocat de Constantine, après son intervention devant la commission des droits de l'homme du Parlement européen en mars; expulsion d'Algérie d'un avocat stagiaire français, en mai, après qu'il ait recueilli des témoignages de familles de disparus; harcèlement du président de la Ligue des droits de l'Homme, Hocine Zehouane, à son retour du congrès de la Fédération internationale des ligues des droits de l'homme, en avril; harcèlement judiciaire depuis deux ans de l'avocat de SOS-Disparu(e)s, Amine Sidhoum... Algeria-Watch craint que les autorités se mettent à poursuivre en justice les défenseurs des droits humains, en se basant sur l'ordonnance d'application de la Charte pour la réconciliation, qui prévoit jusqu'à cinq ans de prison pour "quiconque qui, par ses déclarations, écrits ou tout autre acte, utilise ou instrumentalise les blessures de la tragédie nationale pour porter atteinte aux institutions de la République (...),, fragiliser l'EWtat, nuire à l'honorabilité de ses agents (...) ou ternir l'image de l'Algérie sur le plan international".

(Liberté 28.6) Quatre auteurs présumés d'attentats à l'explosif commis en septembre et décembre 2006 à Reghaïa, Dergana et Baghlia ont été condamnés à mort par contumace le 27 juin par la Cour de Boumerdpès. Quant à l'"émir national" du GSPC (Al Qaïda au Maghreb), Abdelmalek Droukdel, il a également été condamné à mort par contumace le 3 juillet par la Cour de Bouira, pour plusieurs actes terroristes attribués au GSPC dans la wilaya.

(L'Expression 16.7 / L'Expression 24.7) Selon le directeur général de l'administration pénitentiaire algérienne, Mokhtar Felioune, 54'220 personnes sont détenues dans les 127 prisons algériennes. 12 % de ces détenus sont en détention conditionnelle. Le taux de récidive des prisonniers est de 43 %. A elle seule, la prison algéroise d'El Harrach compte 2500 détenus, dont 40 % ont moins de 27 ans. La forte hausse du nombre de détenus a considérablement détérioré leurs conditions de détention : l'espace réservé à chacun n'excède pas, en moyenne, 1,8l6 m2, alors que le standatd européen prévoit 12,2 m2. La vétusté des prisons n'arrange pas les choses : sur 127 prisons, 95 datent de l'époque française, dont 59 du XIXe siècle. La construction de 13 établissements pénitentiaires, pour 190999 places de détention, est prévue pour 2009. Des délégués du Comité international de la Croix Rouge (CICR) visitent actuellement les lieux de détention en Algérie.

9474 détenus ont bénéficié en 2007 de mesures de remise en liberté conditionnelle. A l'occasion de la fête de l'Indépendnce, le président Bouteflika a pris des mesures de grâce pour toutes les personnes détenues, condamnées définitivement, n'ayant plus que 18 mois de détention, ou moins, à purger. Des remises partielles de peine ont également été accordées à d'autres détenus, ayant moins de 20 ans de détention à purger encore. Les personnes détenues pour des actes liées au "terrorisme", à la "subversion", ou pour vol, association de malfaiteurs, homicides volontaires, coups et blessures volontaires sur leurs parents, détournement de deniers publics ou privés, corruption, trafic d'influence, évasion, fausse monnaie, contrebande ou trafic de stupéfiants sont exclues de ces mesures, ainsi que les personnes condamnées par des tribunaux militaires.


Asile politique, immigration : les parias algériens

Les rapports d'Amnesty International




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