Autonomie communale : vers de nouvelles franchises ?

VIVE LA COMMUNE !

Fragments d'un programme socialiste municipal




Mise à jour : 20 septembre 2005
©Pascal Holenweg, Genève, 2005






NE PAS SAVOIR OÙ L'ON VA N'EST PAS UNE RAISON POUR NE PAS Y ALLER.



La Praille : Tirons la chasse !

PRENEZ LE POUVOIR !



Pétition au Conseil municipal de la Ville de Genève :

RACHAT DU CANTON PAR LA VILLE POUR UN FRANC SYMBOLIQUE

Plus de 400 millions de déficit budgétaire… Plus de 11 milliards de dette…

La droite cantonale creuse le trou financier du canton ?

Qu'on l'y enterre !

(et qu'on y enterre le canton avec)


Les personnes soussignées demandent au Conseil municipal et au Conseil administratif de la Ville de Genève :

De prendre toutes décisions, initiatives et mesures utiles au rachat du canton de Genève par la Ville de Genève, pour un franc symbolique et dans les plus brefs délais.


Un canton sans budget

Le Grand Conseil (à majorité de droite et d'extrême-droite) avait refusé en septembre 2003 le budget 2004 que le gouvernement (à majorité de droite) lui présentait, contraignant ainsi le canton à vivre sous le régime des " douzième provisionnels ", reconduisant mécaniquement, mois après mois, le budget de l'année précédente. Il aura fallu attendre le 1er avril (la date s'imposait) pour que le gouvernement (à majorité de droite) présente un budget remanié au parlement (à majorité de droite). Prévision de ce " nouveau " budget : un déficit de l'ordre de 400 millions. Et pas de retour à l'équilibre budgétaire avant 2007. Mais c'est encore trop demander à la droite cantonale que d'accepter de s'en tenir là : d'où la surenchère de l' " Entente " : ce déficit, faisons-le payer d'abord à la fonction publique, puis à l'ensemble de la population (les " usagers " des services publics).

Un budget sans recettes et des comptes sans appel

Comment en est-on arrivé là ? C'est tout simple : il suffisait de vider les caisses de l'Etat en diminuant les impôts (les impôts cantonaux constituent, en gros, les trois quarts des ressources de l'Etat), en supprimant des ressources, en accordant des cadeaux fiscaux. C'est ce qu'a fait l'Entente bourgeoise depuis des années, rejointe en 2001 par l'UDC. Prétexte de l'exercice : ça va attirer les gros contribuables et on vous promet des recettes supplémentaires . Résultat de cet intelligent calcul ? Pas plus de gros contribuables, et moins de recettes : 470 millions de moins que ce qui était prévu en 2003, un impôt sur les bénéfices dont le rendement chute d'un tiers par rapport au budget ! Faites confiance aux experts financiers de la droite genevoise (ou vaudoise ) : ils vous tondent un canton entier en une législature. Et dans le même mouvement, vous tondent les communes (dont les recettes fiscales dépendent essentiellement d'un impôt fixé par référence à l'impôt cantonal.), avant sans doute de tenter de supprimer purement et simplement la principale d'entre elle (la Ville).

Un Etat sans moyens

La population du canton progresse de 5000 à 7000 personnes chaque année, Genève est la seule des cinq " grandes " villes suisses dont la population augmente régulièrement (elle a dépassé Bâle et est désormais la deuxième ville du pays par sa population), et le canton est l'un de ceux dont la population va le plus augmenter ces prochaines années (les projections de l'Office fédéral de la statistique font état d'une augmentation de 15 % de la population d'ici à 2040). Les besoins en personnel, notamment dans l'enseignement et la santé, mais également dans l'ensemble des services publics, s'accroissent donc constamment, et vont continuer à s'accroître. Le deuxième projet soumis par le Conseil d'Etat prévoit pratiquement de bloquer la création de nouveaux postes de travail dans la fonction publique, et de bloquer les subventions aux institutions parapubliques (ce qui conduira à bloquer la création de nouveaux postes de travail dans ce secteur " semi-public " aussi). Et la droite parlementaire va encore plus loin, c'est-à-dire encore plus bas : quelques postes en plus, c'est encore trop ! le maintien des effectifs, c'est encore trop !

Une majorité irresponsable

Majoritaire au Conseil d'Etat depuis 1936 et au Grand Conseil depuis plus d'un siècle (à une interruption près, entre 1997 et 2001, le temps pour la gauche de créer une assurance-maternité, un revenu minimum d'insertion et le PACS, et le temps pour les finances cantonales de retrouver le goût des bonis financiers), la droite genevoise refuse d'assumer la moindre responsabilité dans le résultat financier calamiteux de l'exercice budgétaire cantonal. Elle se révèle même incapable d'élaborer un budget cantonal 2004. Elle se révèle plus incapable encore de remettre en cause ses propres dogmes fiscaux, lesquels ont précisément abouti à la crise des finances publiques : la majorité de droite et d'extrême-droite du parlement cantonal a passé son temps à caresser son propre électorat dans le sens du porte-monnaie, faisant se succéder des diminutions d'impôts bénéficiant essentiellement aux contribuables les plus riches. Résultat : les recettes publiques ont plongé, les déficits se sont creusés. Et pour l'avenir, une seule ressource : la prière aux dieux du marché pour que la conjoncture redevienne favorable, pendant qu'on s'obstine à proposer de nouvelles baisses d'impôts, et donc de nouvelles pertes de ressources pour les collectivités publiques.

C'est pas moi, c'est l'autre

Cette majorité de droite ne se révèle finalement capable que d'une chose : accuser la minorité de gauche d'être responsable des conséquences d'une politique de sous-enchère fiscale que la gauche, précisément, avait combattu. Et pour couronner le tout, et conformément au seul principe politique qu'elle se révèle capable de respecter, celui du " c'est pas moi, c'est l'autre ! ", l' " Entente " ne s'entend guère que pour rendre responsable des résultats financiers genevois de 2003 une ancienne Conseillère d'Etat, devenue Conseillère fédérale fin 2002, qui ne siégeait donc plus au gouvernement cantonal en 2003, n'était plus en charge de la gestion des finances publiques, ni du respect d'un budget présenté en septembre 2002, étudié, retravaillé en commission parlementaire (majoritairement composée de députés de droite, comme le parlement), contrôlé par l'Inspection cantonale des finances et par l'institution de cotation, et voté finalement par le parlement (à majorité de droite) après l'élection de Micheline Calmy-Rey au Conseil fédéral, en décembre 2002. Quand une municipalité de gauche (par exemple celle de la Ville) équilibre ses finances, la droite (municipale et cantonale) explique : la gauche n'y est pour rien, c'est grâce à la bonne conjoncture. Et quand les finances cantonales plongent parce que la droite cantonale elle-même s'est acharnée à en réduire les ressources, à qui doit-t-on rendre grâce ? Et quand les finances cantonales vaudoises plongent elles aussi, aussi profondément que les genevoises, parce que la même politique de sous-enchère fiscale a été pratiquée des deux côtés de la Versoix par le même genre de majorité de droite, et qu'elle a eu les mêmes conséquences (chute des recettes et déficit) c'est aussi " la faute à Calmy-Rey " et au Cartel intersyndical genevois ? En réalité, la même cause (la sous-enchère fiscale) et la même majorité (de droite) produisent le même effet (le déficit) et le même discours (c'est la faute, dans l'ordre, aux fonctionnaires, à la gauche et à pas de chance).

Les fossoyeurs bourgeois des finances du canton

Vous avez admiré le trou financier de 2003 ? Vous serez ébahi par celui de 2004. Parce qu'entre-temps, la droite cantonale a encore réussi à réduire les recettes du canton, et donc ses sources de financement (suppression des droits de succession). L'initiative libérale de réduction des impôts a fait perdre à elle seule entre 350 et 400 millions de recettes au canton, soit l'équivalent du déficit prévu par le budget 2004. Argument massue des initiants : la baisse des impôts va faire tomber sur Genève une pluie de gros contribuables par l'odeur des économies alléchés . Mais au bout du compte, les impôts sur le capital et les bénéfices plongent de plus de 200 millions en un an, les impôts sur les gains des entreprises de 400 millions en deux ans, et entre 2002 et 2003, les rentrées fiscales reculent de 8 %.

L'étonnement n'est pas de mise : en réalité, l'assèchement des finances publiques cantonales (et par voie de conséquence communales) est délibéré : il s'agit de faire place nette, et casino libre, au marché, aux spéculateurs, aux grosses entreprises, aux hauts revenus. De réduire Genève à Monaco. D'ailleurs, très monégasquement, Genève a princièrement accordé en 2003 huit allègements fiscaux à de gros contribuables, ce qui a occasionné une perte fiscale de 39 millions de francs. Depuis 1998, la pratique des allègements fiscaux a fait perdre 432 millions aux caisses publiques (en 87 allègements). Et à ces allègements s'ajoutent les forfaits fiscaux : 640 cas en 2003, représentant une " assiette fiscale " de 230 millions. Combien les caisses publiques y ont-elles perdu ? Mystère. On peut seulement, en usant du même pifomètre que celui dont se servent les experts budgétaires de la droite, supposer que cette perte est de plusieurs dizaines de millions de francs chaque année, si ce n'est plus de 100 millions.

Refusant (évidemment) d'admettre sa responsabilité dans cette cacade, la droite cantonale nous ressort aujourd'hui la vieille antienne " c'est la faute aux fonctionnaires " (entendez : à l'ensemble des salariés de la fonction publique), et il s'impose donc de raboter les postes de travail et les subventions aux services publics (en particulier les transports publics, les hôpitaux et l'Université) pour qu'un soleil radieux se lève sur des finances publiques assainies. Ben voyons...

Il suffit pourtant de regarder les chiffres (ceux des comptes, ceux des budgets) pour constater que ce ne sont pas les dépenses qui grimpent mais les recettes qui plongent : 33 millions de moins pour l'impôt sur la fortune, 22 millions de moins pour l'impôt sur le capital, 26 millions de moins pour les parts cantonales à l'impôt fédéral et à la BNS, 60 millions de moins pour les autres impôts… La faute aux fonctionnaires ? A ceux des syndicats patronaux, peut-être, à leurs commis politiques, sans doute. A la pratique des forfaits et des allègements fiscaux, sûrement. A la réduction des impôts pour les hauts salaires et les grosses fortunes, sans conteste. Mais aux infirmières, aux instituteurs, aux assistants sociaux et aux autres salariés de la fonction publique, certainement pas… D'ailleurs, les économies réalisées grâce aux postes laissés vacants par la prise volontaire de retraite anticipée par des fonctionnaires (le " PLEND ") se chiffrent à près de 40 millions, et les charges de personnel se révèlent inférieures à ce que le budget prévoyait.

La droite cantonale fait payer les communes. Pour les étouffer avant de les supprimer ?

La crise des finances publiques cantonales ne serait qu'un épisode tragi-comique de plus du feuilleton politique local, si elle ne se répercutait, mécaniquement, et par le simple fait de l'absence d'autonomie communale, sur les finances publiques municipales en général, et celles de la Ville de Genève en particulier. Résultat de la crise des ressources des finances cantonales : une crise des ressources des finances municipales, puisque l'impôt municipal est fixé en proportion de l'impôt cantonal, et que chaque fois que la droite cantonale fait un cadeau à sa petite clientèle de gros contribuables, elle vide non seulement les caisses du canton, mais aussi celles de la Ville. La droite fédérale fait d'ailleurs exactement la même chose : quand elle propose des allègements fiscaux, elle entend en faire payer la facture aux cantons et aux communes….

La Ville de Genève avait fait un boni de 53,6 millions en 2002. Grâce à la droite cantonale, elle devrait accuser une perte de plus de 30 millions en 2003… alors qu'elle a parfaitement maîtrisé ses charges et ses dépenses. Mais ses recettes ont plongé de 63 millions (6,6 % par rapport aux prévisions), et les impôts de 90 millions.

La droite cantonale n'a donc pas seulement creusé le trou financier cantonal, elle y a aussi entraîné les communes, à commencer par la Ville. D'où l'idée de l'UDC, digne du génie pataphysique qui anime ce parti : puisque le canton est en faillite, dissolvons la Ville ! Le budget cantonal est déficitaire ? Chargeons-le encore des dépenses de la Ville (sans hériter de ses recettes, puisqu'on ne peut prélever un impôt municipal que là où il y a une commune…) ! Soyons résolument modernes : revenons-en à la situation de 1815 , faisons administrer la Ville par le canton (et ajoutons les charges et le déficit de l'une aux charges et au déficit de l'autre) !

Sur ce terrain, à vrai dire, l'UDC ne devrait pas avoir trop de difficulté à entraîner la droite libérale, quelques radicaux amnésiques et quelques technocrates vaguement " de gauche ", puisqu'une proposition du même tonneau (percé) avait déjà, il y a quelques années, été émise (il s'agissait alors non de dissoudre la commune de la Ville, mais d'en faire quatre, cinq ou six communes différentes. Avec quatre, cinq ou six budgets différents…)

A défaut d'idées nouvelles, la droite d'aujourd'hui a de la suite dans les idées de la droite d'avant-hier : celle de 1815 avait aboli le suffrage universel et la Commune de Genève ; la gauche de 1842-1846 les ont rétabli ; la droite de 2004 a toujours ce droit démocratique fondamental (le suffrage universel) et cette institution fondatrice de la démocratie (la commune) en travers de la gorge. Le suffrage universel ayant élu, confirmé et renforcé une majorité de gauche en Ville de Genève, la droite cantonale (et ses supplétifs municipaux) ressort du placard le vieux projet de suppression de la Commune de Genève, faisant ainsi d'une pierre deux mauvais coups : en supprimant la Commune, on abolit le suffrage universel communal, coupable de donner à la Ville une majorité de gauche.

Faites ce que je dis, pas ce que je fais

On notera que le canton impose déjà aux communes des cadres et des normes budgétaires qu'il est lui-même incapable de respecter : par exemple l'exigence de ramener un budget déficitaire à l'équilibre dans un délai de quatre ans.

On notera aussi que les mêmes forces politiques qui prônent les économies budgétaires demandent aux communes en général, et à la Ville en particulier, de se charger de dépenses d'intérêt cantonal, et de balancer aveuglément quelques millions dans des gouffres financiers qu'eux-mêmes se sont acharnés à creuser : le Stade de la Praille, par exemple...

Le canton, ou comment s'en débarrasser

Bref, affublé d'une majorité incapable d'élaborer un budget, incapable d'accepter un budget élaboré par un gouvernement où la droite est également majoritaire, incapable d'accepter que la principale commune genevoise ait choisi une autre majorité politique que la sienne, incapable enfin de donner aux communes en général et à la Ville de Genève en particulier les compétences nécessaires, le canton s'avère aujourd'hui pour ce qu'il est : un poids, en sus de se confirmer pour ce qu'il est depuis des lustres : une excroissance obsolète. Il est donc temps de s'en débarrasser.

Une seule solution, la municipalisation

La commune est non seulement le premier niveau institutionnel de la démocratie, et sa base historique, elle est aussi, aujourd'hui, le seul niveau institutionnel " eurocompatible ", le seul à se retrouver des deux côtés de la frontière qui coupe la région genevoise en deux. A vrai dire, la Commune est d'ailleurs la seule collectivité publique que l'on retrouve dans tous les Etats démocratiques, et en particulier dans tous les Etats européens. C'est donc à partir d'elle que peut se construire une région genevoise, et cette région ne peut se construire qu'autour de la commune qui en est le centre : Genève.


En trois mots comme en cent (et en mai 2004 comme en mai 1871) :

Vive la Commune !



Autonomie communale et démocratie locale : VERS DE NOUVELLES FRANCHISES ?

Il est souvent comique de constater que le terme de "communio" est vilipendé tout à fait de la même façon (au moyen-âge) que le communisme aujourd'hui. C'est ainsi que le clerc Guilbert de Noyon écrit par exemple : "Communio, novum ac pessimum nomen" (Commune, un nouveau terme et bien pernicieux).
Lettre de Karl Marx à Friedrich Engels du 27 juillet 1854

Le constat premier est d'évidence : Genève est de tous les cantons suisses celui où l'autonomie des communes est la plus chichement mesurées, et de toutes les villes de ce pays celle qui détient le plus faible pouvoir sur elle même et ses habitants les compétences les plus réduites sur tout ce qui les concerne.

A Genève, pourtant, la Ville est historiquement première -c'est à partir d'elle et de son long combat pour l'affranchissement que se constituent la République, devenue ensuite (et un peu par accident) République et Canton. Ici comme dans le reste de l'Europe, la ville est le lieu de la liberté, où s'inventèrent la démocratie politique et l'autonomie individuelle. Or le corps politique qui inventa la liberté est moins libre ici qu'ailleurs; cette méfiance à l'égard de la ville, a dans notre pays de fortes racines mythologiques et fait en quelque sorte partie de sa culture politique fondatrice. Le peuple des bergers, par nature pastorale ou instinct politique, se méfie du peuple des commerçants, des artisans, des ouvriers, des clercs et des commis; mais cette méfiance à l'égard de la ville est aussi, à Genève, un héritage historique -un héritage capté pour de fort politiques raisons.

Le paradoxe est donc écident, et d'une certaine manière l'injustice frappante, d'un canton né de la Ville (puisqu'elle se confondait la République) et restreignant autant qu'il est possible son autonomie; d'un canton né de la commune et le laissant aux communes, grandes ou petites, qu'une capacité de décision chichement mesurée; d'un pays, enfin, dont les deux tiers de la population vivent dans des villes mais qui ne leur reconnait aucun statut -sinon le même que celui de la plus petite des communes rurales. La Ville de Genève, mais aussi les grandes communes de son agglomération, est dans la situation absurde d'avoir à demander l'autorisation du canton pour installer un urinoir public tout en assumant la plus grande part de la politique culturelle de toute la région genevoises -ses marches vaudoises et françaises comprises. La Ville ne peut pas choisir seule le nom de ses rues mais doit subventionner seule des institutions culturelles d'importance régionale -voire, comme son opéra, d'audience internationale. A leur niveau, les autres municipalités genevoises sont dans la même situation.

Les communes genevoises sont donc sous tutelle cantonale; mais le canton n'a plus, s'il en a encore la prétention, les moyens de cette tutelle; la crise de l'Etat cantonal -crise financière et crise de légitimité- pourrait se révéler fort opportune pour les communes, et en outre assez utile au renouvellement de la réflexion politique d'un mouvement ("la gauche") et de partis "le PS, entre autres) que leurs habitudes de pensée et d'action poussent plutôt du côté de la centralisation cantonale, voire fédérale, alors même que leurs programmes fondateurs voyaient en la commune le lieu du changement social (et en la Commune de Paris la première tentative cohérente de ce changement). Il y a enfin dans la commune une réponse possible à l'abandon "libéral" des responsabilités sociales de la collectivité : la municipalisation est une alternative à la privatisation, autant qu'une réponse à la crise d'efficacité de l'Etat cantonal et fédéral. Plus proche des citoyennes et des citoyens, plus intimément liée au "tissu associatif", elle peut être une instance de régulation sociale plus "légitime" que les niveaux de décision politique plus lointains -plus légitime, et plus efficace.

Le système genevois est totalement anachronique; né à la fois de la restauration oligarchique de 1814 et des conflits politiques des décennies suivantes, ce système qui donne à Gy les mêmes compétences qu'à Genève, et en donne moins à Genève ou à Carouge que n'en ont Collonges-sous-Salève la française ou Commugny la vaudoise, témoigne plus du souci de contenir politiuement la Ville et ses habitants que de la recherche d'une répartition efficace et démocratique des charges et des droits. La Ville de Genève, d'ailleurs, ne sera reconnue comme une commune genevoise qu'en 1842 (elle avait déjà été une commune auparavant, mais brièvement, par le fait de son annexion à la France et de l'application de la loi du 28 Pluviôse an VII). Du point de vue de l'autonomie municipale, comme d'ailleurs du point de vue de la démocratie en général, la Restauration fut une régression -et la pérénnité du statut actuel des communes genevoises, et en particulier de celui de la Ville, est une absurdité.

La reconquête d'une réelle autonomie municipale est donc un projet progressiste -un projet "de gauche". Il l'était déjà en 1841 : la commune, disait alors James Fazy, "c'est la société vivante en chair et en os, où rien d'abstrait et d'inapplicable ne peut naître, parce que tout s'éprouve à l'instant même, sur les hommes qui la composent". C'est bien à ce niveau là que peuvent se vérifier la pertinence et la légitimité de projets politiques, si l'on veut bien admettre qu'un projet est autre chose qu'un discours -ou pis, une promesse électorale.

Genève fut une République deux siècles et demi avant de devenir, au surplus, un canton; elle ne put être une République que patce qu'elle avait été une Civitas. Cette ville, aujourd'hui, est le coeur d'une agglomération urbaine de 600'000 habitants. C'est dire que la ville réelle (le tissu urbain) dépasse de beaucoup la ville légale (la municipalité), et que la reconquête de l'autonomie communale devra aller de pair avec la construction politique d'une communauté urbaine au sein de laquelle les entités municipales existantes, qu'elles soient genevoises, vaudoises ou françaises, pourraient à la fois confronter leurs expériences, partager leurs besoins et coordonner leurs politiques. Nous avons à "faire le point" d'une situation absurde; nous avons à proposer une nouvelle distribution des tâches et des compétences, un nouveau partage des charges et des pouvoirs; nous avons enfin à nous défaire de réflexes politiques qui nous font oublier que la commune est le lieu premier du débat politique et de l'insertion citoyenne. La démocratie naît de la cité, la République est née de la Ville. L'une et l'autre peuvent aujourd'hui se renforcer par le renforcement de l'autonomie communale.


Pour des Conseils municipaux transfrontaliers

(Motion déposée au Conseil municipal de la Ville de Genève le 24 octobre 1998 et acceptée le 12 janvier 1999)

Considérant :

  • La proximité géographique des villes de Genève et d'Annemasse;

  • le rôle de centre urbain joué par ces deux villes, de part et d'autre de la frontière et dans leur espace respectif, à l'égard des communes avoisinantes;

  • la communauté des problèmes que ces deux villes ont à affronter;

  • la nécessité de développer la collaboration entre les municipalités de Genève et d'Annemasse, et l'ensemble des communes de la région genevoise de part et d'autre de la frontière;

  • l'utilité d'inscrire ces collaborations dans une habitude de rencontres régulières entre les élus municipaux des deux villes;

  • La possibilité d'engager au niveau des Conseils municipaux de la région genevoise le débat sur le projet de communauté urbaine genevoise, et la nécessité de cesser de discourir d'un tel projet pour commencer à le constituer réellement,

Le Conseil municipal demande au Conseil administratif

1. de proposer aux autorités de la Ville d'Annemasse de tenir régulièrement, au moins une fois par année, une réunion commune des Conseils municipaux de nos deux villes, réunion lors de laquelle il serait fait un inventaire des collaborations déjà établies et de leurs résultats, et un examen des possibilités de les développer.
2. De proposer aux municipalités genevoises et françaises voisines, en particulier celles membres du SIVMA (Syndicat d'initiative à vocations multiples d'Annemasse), une réunion commune régulière de délégations de leurs Conseils municipaux afin d'étudier les modalités de création d'une communauté urbaine transfrontalière de la région genevoise, à partir des communes.

Votez pour vous !

PRENEZ LE POUVOIR :

Vive la Commune !

Palimpseste d'un avant-projet de programme socialiste 2003-2007 pour la Ville de Genève

Avertissement : ce texte n'est pas un texte officiel du PS de la Ville de Genève, mais le palimpseste d'un avant-projet de programme,avant-projet rédigé à la demande du PSVG par Pascal Holenweg, et palimpseste rédigé par Pascal Holenweg à sa propre demande. Le programme officiel du PSVG sera disponible sur le site officiel du Parti socialiste genevois

Sommaire

Introduction : VIVE LA COMMUNE

A. EMANCIPER LA VILLE, CONSTRUIRE LA REGION
L’
émancipation de la Ville
La
communauté urbaine
La
municipalisation

B. DÉMOCRATISER LA
DÉMOCRATIE

J’y vis, j’y parle, j’y agis, j’y vote

C. EXCLURE L’EXCLUSION

  1. Lutter contre la pauvreté, pas contre les pauvres
  2. Lutter contre les toxicomanies, pas contre les toxicomanes
  3. L’accueil de la petiteenfance
  4. Autour de l’école
  5. L’âge venant
  6. La solidarité par l’association
  7. Une économie au service de la cité, et non une cité au service des banquiers privés
  8. Partager le travail

D. RÉINVENTER LA VILLE

  1. Un urbanisme par et pour les urbains
  2. Le critère et la mesure : la qualité de la vie
  3. La liberté de déplacement : une liberté des personnes, pas un droit des machines

E. CONCRÉTISER LE DROIT AU LOGEMENT

F. ASSURER LA SÉCURITÉ, POUR ASSURER LES LIBERTÉS

G. SOUTENIR LE SPORT QUI SE PRATIQUE, PAS CELUI QUI SE MARCHANDE

H. PROMOUVOIR LA CRÉATION CULTURELLE

I. GÉRER AUTREMENT

J. LA VILLE DONT LE PAYS EST LE MONDE

RÉSUMÉ : 173 propositions socialistes

CONCLUSION : Si tu n’espères pas l’inespéré, tu ne le trouveras pas (Héraclite)

 

VIVE LA COMMUNE !

La Suisse n’aime pas ses villes, le canton de Genève se méfie de la Ville de Genève, la Ville de Genève doute d’elle-même. Mais à quelque chose crises sont bonnes : celles que nous traversons (crise politique, crise sociale, crise économique, crise culturelle) peuvent être prétexte à une renaissance de la ville -de la ville physique, dont Genève est le centre mais qui s’étend de Ferney à Annemasse et de Saint-Julien à Versoix, mais aussi de la Ville politique : la commune de Genève.

Une renaissance, puisqu’à Genève la ville est première, qu’elle fut Commune avant d’être République, et que c’est la Commune qui fit la République. Mais une réadaptation au monde, aussi : leurs structures et leurs pratiques politiques, leurs constitutions et leurs lois, Genève et la Suisse les ont héritées des révolutions du XIXème siècle : il fallait alors construire la démocratie moderne, et pour cela casser les résistances d’anciennes institutions. Ce qui a été fait alors reste certes, pour l’essentiel, à défendre, mais non comme on entretient pieusement une relique, en quoi quelques uns tentent par exemple de réduire la laïcité. Il faut cependant aussi réinventer une démocratie qui ne peut fonctionner à l’âge de l’internet selon les rythmes, les modes et les procédures du temps des diligences. La démocratie est encore partielle, amputée, exclue du domaine économique, étrangère aux pauvres et fermée aux étrangers. Dans l’invention d’une nouvelle démocratie, la ville a son rôle à jouer -un rôle déterminant, parce que la ville est le lieu de confrontation de tous les problèmes et de mise en débat de tous les projets. Or elle n’est encore dans ce pays, et plus caricaturalement encore dans ce canton, qu’un OPNI, un objet politique non identifié, une réalité dépourvue de toute reconnaissance institutionnelle, de toute compétence propre -alors que l’écrasante majorité de la population suisse, et la totalité de la population genevoise, vit en zone urbaine ou déterminée par la ville.

Le débat politique peut et doit se faire aujourd’hui autour de la ville (et nous entendons bien pour notre part nous y consacrer). Chacun des grands enjeux auxquels nous sommes confrontés peut être abordé à partir de la ville -de la protection sociale à la construction européenne, du partage du travail à la solidarité internationale, de la lutte contre l’exclusion à la lutte contre l’insécurité. C’est aujourd’hui la ville elle-même qui se retrouve au cœur de la démocratie (qui naguère s’y inventa), tout en étant absente des institutions démocratiques. Cela vaut pour Genève, cela vaut pour la Suisse, cela vaut même pour l’Europe, dont la construction s’est faite jusqu’à présent (comme d’ailleurs celle de la Suisse) en agrégeant des Etats les uns aux autres.

Il n’y a pas de sociétés sans villes -sans ville, il n’y a que des communautés, sans politique, sans démocratie, sans autre projet que celui de leur propre conservation, et sans autre destin que celui de leur disparition. Nous avons aujourd’hui à inventer les règles, les institutions et les pratiques qui nous permettront d’entrer dans notre temps autrement qu’à reculons, de nous confronter au monde et de contribuer, si peu que ce soit, à le changer, et non d’en subir passivement le cours. Ces règles, ces institutions et ces pratiques doivent se conjuguer à un double impératif : celui de l’émancipation de la ville, celui de la construction d’une ville politique coïncidant avec la ville réelle. Cette émancipation implique l’accroissement de l’autonomie communale des villes -et de celle de toutes les communes ; cette construction implique la création d’une communauté urbaine.

Partout où les interventions centrales se révèlent inefficaces, gaspilleuses, contraignantes, et où le recours à la " loi du marché " n’est qu’une formidable régression, la commune est une alternative, en particulier la commune urbaine, qui dispose des moyens d’intervenir là où les instances politiques " supérieures " ne le peuvent pas, ne le veulent plus, ou ne peuvent que le faire mal. Nous voulons rompre avec une tradition séculaire : celle de la méfiance à l’égard de la ville. Concentre-t-elle les potentialités de désordre ? Elle concentre surtout celles de création ; est-elle un lieu d’incertitude ? Elle est d’abord une exigence d’inventer. Est-elle concurrente de l’Etat ? C’est parce qu’elle est le lieu de la démocratie, et dans une société où la démocratie est menacée d’être réduite à des programmes de jeux télévisés (ou de télé-achat…), elle est le lieu même d’où le débat démocratique pourra reconquérir l’opinion publique, le lieu où il porte sur ce qui importe et donc sur ce qui fait problème. L’autonomie communale sera la mesure de ce débat, l’émancipation des villes en sera l’objet, la communauté urbaine en sera le moyen, la démocratie locale en sera la méthode : plus les projets seront importants sur lesquels auront à se prononcer les citoyennes et les citoyens d’une commune, ou les habitantes et les habitants d’un quartier, plus le débat démocratique aura de réalité.

La municipalité est un instrument d’action politique ; en temps de crise(s), elle doit être l’instrument d’une action solidaire. Par définition, la commune est la négation du repli sur soi, et les moyens dont elle dispose doivent contribuer à faire de la solidarité autre chose qu’une référence métaphysique. La commune a quelque chose à faire contre l’exclusion sociale, pour l’élargissement de la démocratie, pour une " relance " économique durable ne se réduisant pas à des subventions déguisées aux grosses entreprises de la construction ou à des génuflexions devant le groupement des banquiers privés. Plus la Ville -et les communes, ensemble et avec la Ville- auront de compétences, plus elles seront animées d’une réelle volonté d’agir, mieux cela vaudra pour tout le monde -sauf peut-être pour les forces politiques, économiques et sociales qui se repaissent des crises et s’engraissent de leurs victimes- et plus clairement sera exprimé le refus de voir les collectivités publiques se comporter comme n’importe quelle multinationale " dégraissant " au hasard pour équilibrer des comptes dans lesquels les licenciements se traduisent par des gains en bourse.

En présentant ce programme à l’examen et au jugement de nos concitoyens, nous ne nous livrons pas à un rituel, nous passons un contrat. Nous tentons de décliner, dans chaque domaine de l’action collective où la Ville dispose de quelque compétence, et dans chaque domaine où des compétences nouvelles devraient lui être accordées, les principes qui sont les nôtres : l’égalité des droits, la justice sociale, les libertés individuelles, la souveraineté démocratique. Ce programme est donc un contrat ; nous le passons avec celles et ceux dont nous sollicitons le soutien et nous prenons un engagement : celui de faire tout ce qui est en notre pouvoir pour réaliser ce que nous proposons là où nous le proposons. Nous ne faisons pas d’autre promesse que celle-là, et c’est sur elle que nous entendons être jugés.

 

EMANCIPER LA VILLE, CONSTRUIRE LA RÉGION

On trouvera un avantage aux restrictions absurdes de l’autonomie municipale à Genève -un avantage et un seul : cette autonomie est si réduite qu’elle ne peut guère qu’être accrue, sauf à abolir la commune. Nous ne nous engageons pas dans un projet fondé sur l’autonomie communale par amour idéologique de l’autonomie communale pour elle-même (quoique le premier programme socialiste élaboré à Genève en fit un principe politique -mais ce programme datant de 1869, on pardonnera à ceux qui l’ont oublié, et ce texte ayant été inspiré, voire partiellement rédigé par Bakounine, on ne sera pas surpris qu’il ait été renié…), et moins encore par nostalgie des franchises perdues, mais pour cette raison évidente que la conquête de compétences et de pouvoirs par l’ensemble des communes est une condition de l’émancipation de la Ville et de la constitution d’une communauté urbaine faisant coïncider la ville politique et la ville réelle. Or cette émancipation est elle-même une condition de la rénovation de la démocratie, de son élargissement, de son enrichissement, en même temps que la communauté urbaine est une condition du renforcement de la capacité de la collectivité publique à présenter une alternative à la mercantilisation galopante de tous les rapports sociaux.

 

L’émancipation de la Ville

Le modèle municipal traditionnel, qui lie chaque citoyen à un espace politique local déterminé et un seul, a survécu à la situation historique et aux rapports sociaux qui le justifiaient (lorsque l’on habitait, travaillait, consommait en un seul et même lieu politique). Aujourd’hui, les lieux d’habitation, de travail, de consommation, de loisirs et de formation sont dissociés : une seule et même personne sera habitante, citoyenne et contribuable d’une commune, professionnellement active (et donc, à Genève, également contribuable) dans une autre, consommatrice, créatrice et spectatrice dans plusieurs autres -mais elle ne disposera toujours de droits politiques (quand encore elle en disposera) que dans la première, alors que les décisions prises dans les autres la concerneront tout autant. Parallèlement, la commune centrale de l’agglomération (la Ville de Genève) est chargée d’activités et d’infrastructures dont le champ des bénéficiaires et des usagers déborde largement de ses limites géographiques.


Il ne sera possible d’émanciper la ville qu’en émancipant en même temps et du même coup toutes les communes du canton, de Cologny à Onex : Pour donner plus de pouvoir à la Commune de Genève, il faudra en donner plus à toutes les autres…
La gauche en général (et le PS en particulier) ont à rompre avec de vieux réflexes, de vieilles habitudes centralistes (et à Genève, cantonalistes), à redécouvrir les vertus subversives de la démocratie municipale. Que la situation politique puisse les y inciter ne serait pas sans ironie, mais de solides raisons de principe peuvent également y concourir, en particulier celle-ci : la participation citoyenne s’acquiert aussi lors de la mise en débat de projets concrets, qui concernent directement et matériellement " les gens " (citoyens ou non au sens juridique du vocable) là où ils habitent et là où ils travaillent, et sur lesquels ils peuvent avoir un réel contrôle, et un réel pouvoir de décision. Il y a un bon usage de la commune à retrouver, à Genève comme ailleurs : celui de lieu premier de la démocratie : un lieu de décision et de confrontation politiques, et non une simple instance bureaucratique d’application de décisions prises ailleurs.

Nous proposons

  • La défense et l’usage du droit d’initiative cantonale des communes permettant à une commune présenter une proposition de niveau législatif ou constitutionnel au Grand Conseil.

  • L’Association des Communes Genevoises, amicale de notables devenue par commodité et par opportunité interlocutrice privilégiée (et complaisante) du canton pour tout ce qui concerne ses relations avec les municipalités, est organisée sur un mode qui ne tient compte ni du poids démographique des communes, ni du pluralisme politique qui marque la plupart (et toutes les principales) d’entre elles, ni de leur rôle, ni de leurs charges. Chaque commune dispose à l’ACG d’un représentant (sauf la Ville de Genève, à qui il en a été princièrement concédé un deuxième), indépendamment de sa population : Gy y pèse du même poids que Meyrin, Vernier n’y pèse pas plus que Russin. Cette représentation est de plus monopolisée par les exécutifs municipaux. 27 communes abritant 15 % de la population désignent le 60 % des représentants de l’ACG. La droite " campagnarde " (dans un canton où la campagne elle-même est déterminée par la ville) se trouve donc disposer d’une sur-représentation manifeste, et la droite tout court d’une hégémonie irraisonnée. La légitimité de l’ACG comme représentante des " communes " est donc plus que douteuse, du double point de vue politique et démographique.
  • Mi-octobre, le Conseil fédéral a édicté des " lignes directrices concernant la Confédération, les cantons et les communes ", afin de commencer à concrétiser (prudemment) l’article 50 de la Constitution : les offices fédéraux ne devraient plus pouvoir élaborer de projets de loi ni d’ordonnance sans prendre en considération, si elles sont concernées, les villes et les communes, ainsi que les agglomérations.

Nous proposons

  • De distinguer les communes là où la réalité les distingue : la Ville de Genève, les grandes communes (municipalités à Conseil administratif) ne peuvent être pesées du même poids politique, quand ni leurs populations, ni leur rôle, ni leurs charges, ni leurs besoins ne sont équivalents. Il faut donc donner aux grandes communes plus de compétences.
  • De faire le plus large et le plus efficace usage possible des possibilités données aux villes (et aux autres communes) par les Lignes directrices concernant la collaboration entre la Confédération, les cantons et les communes.
  • De réduire, dans la loi, au strict minimum l’obligation systématique d’approbation par le Conseil d’Etat des décisions de la Ville et des grandes communes, dans tous les domaines où elles disposent d’instruments administratifs, techniques et politiques suffisants, et où elles ont pris des décisions similaires.
  • De réformer le mode de constitution de l’Association des Communes Genevoises en y renforçant le poids des grandes communes et de la Ville par l’introduction d’une représentation des communes proportionnelle à leur poids démographique (avec une représentation minimale et une représentation maximale), et répartie entre représentants des Conseils municipaux et représentants des exécutifs. Faute d’une telle réforme, nous demanderons que la Ville quitte l’ACG.

La communauté urbaine

La Ville de Genève, avec ses 180'000 habitants, est le centre d’une agglomération urbaine de 600'000 habitants (dont 400'000 sur un espace d’urbanisation quasi continue), à cheval sur deux pays, deux cantons et deux départements, et qui se trouve elle-même être le centre d’une région de plus de 2 millions d’habitants (Genève, Vaud, l’Ain et Haute-Savoie), en croissance démographique et économique constante. 24 communes françaises font partie de cette agglomération, et plus de la moitié de leurs habitants travaillent en Suisse (presque tous dans le canton, dont la majorité en ville).

La ville physique (l’agglomération urbaine continue) et la Ville politique (la commune de Genève) sont sans rapport réel l’une avec l’autre, alors que les mêmes problèmes se posent à toutes les municipalités (genevoises, vaudoises et françaises) de l’agglomération, sans que ces municipalités aient les mêmes moyens d’y répondre, sans qu’aucune ait seule les moyens nécessaires pour les résoudre, et alors que le centre géographique de l’agglomération (la Ville politique) est aussi le lieu où se concentrent et se focalisent ces problèmes.

Il faut aujourd’hui pouvoir surmonter les clivages nés de l’organisation politique du territoire héritée des années trente du siècle passé, et dépasser la pluralité des gouvernements municipaux là où il n’y a plus différenciation fondamentale des problèmes concrets. Or on ne dépassera pas cette pluralité en la niant, et moins encore en abolissant la commune, mais en additionnant les compétences et les moyens, en fédérant les énergies et les volontés : c’est le projet de la communauté urbaine.

Une communauté urbaine existe d’ailleurs déjà, de facto, autour de Genève. Il s’agit de la faire exister de jure. La conquête de l’autonomie communale est une condition de cette reconnaissance d’une ville réelle dépassant la ville politique. Pour que l’agglomération ait forme institutionnelle, et pour que cette forme soit démocratique, la ville doit d’abord disposer d’un pouvoir sur elle-même, et accepter de le partager avec les autres municipalités de l’agglomération genevoise, y compris avec celles dont Genève est séparée par une frontière dont nous ne savons plus que faire et qui nous sépare non seulement de la France, mais aussi de l’Europe… Or la commune est le seul échelon institutionnel commun (même avec des compétences différentes) à l’Etat en Suisse et en France (il est d’ailleurs le seul échelon institutionnel commun à tous les Etats démocratiques…) : le canton français n’a rien à voir avec le canton suisse, qui n’a pas grand chose à voir avec le département français, la région française n’ayant quant à elle pas d’équivalent en Suisse…

Genève étant ce qu’elle est, là où elle est -c’est-à-dire sur une frontière-, la construction d’une communauté urbaine genevoise sera donc aussi la construction d’une " Europe " à notre mesure -une manière, en somme, de ne pas nous contenter de tenir sur l’Europe le discours autosatisfait des minoritaires convaincus d’avoir raison et finalement pas peu fiers d’avoir raison contre la majorité (suisse) ; une manière de tenter, là où nous le pouvons (et où nous le devons) de concrétiser un peu de ce discours. Nous sommes en tous cas convaincus qu’il n’y aura pas de coopération intercommunale réelle sans coopération transfrontalière, et pas de coopération transfrontalière concrète qui ne passe par les communes.

  • Depuis le début des années quatre-vingt, les socialistes de la Ville tentent, peut-être trop prudemment, d’introduire dans le débat politique genevois la notion et le projet de communauté urbaine. Sans grand succès jusqu’ici, hélas, et sans grande traduction concrète, faute notamment d’une coordination efficace des efforts des partisans d’un tel projet, mais aussi et surtout faute d’écoute, de réponse et de soutien des autres forces politiques du canton (et des autorités cantonales elles-mêmes). Des organes de concertation existent certes au niveau régional franco-valdo-genevois, mais ils ne disposent pas des compétences politiques nécessaires à leur ancrage dans la réalité, et les communes de l’agglomération n’en sont souvent que des acteurs secondaires : ces organismes sont essentiellement fondés sur des structures cantonales suisses et départementales françaises, et quand les communes y sont représentées, c’est le plus souvent par leurs seuls exécutifs (comme dans la Commission consultative intercommunale transfrontalière Arve-Foron, créée en 1993, d’où Genève et Annemasse sont au surplus absentes). Au sein du Comité régional franco-genevois, Genève est représentée par le Conseil d’Etat ; le Conseil du Léman regroupe des représentants des cantons et du département ; l’AGEDRI est une association privée… Pourquoi les Genevois (autrement dit : les " gens de la région de Genève ", toutes frontières surmontées) ne seraient-ils pas capables de faire, à leurs frontières, par-dessus leurs frontières (cantonales et nationales) ce qu’ont fait en 1998 les communes basques de France et d’Espagne, créant un " organe transfrontalier de coopération intercommunale " ?

Nous proposons

  • L’instauration progressive d’une Communauté urbaine genevoise, réunissant les communes genevoises, vaudoises et française de l’agglomération urbaine. Cette communauté pourra être créée à partir d’accords intercommunaux, dans tous les domaines où l’harmonisation ou la coordination des politiques communales s’impose ou se justifie. L’institutionnalisation de la Communauté urbaine interviendrait dans un deuxième temps. Nous ne concevons cette communauté urbaine que comme une institution démocratique, et représentative : nous ne voulons ni d’un appareil bureaucratique incontrôlé, ni d’une structure technocratique incontrôlable. Elle devra donc être dotée d’instances élues, pour le moins par les Conseils municipaux.
  • Le développement des possibilités de formation de groupements intercommunaux, la réduction du contrôle cantonal sur la formation de ces groupements, et leur ouverture aux communes vaudoises et françaises.
  • Le développement des possibilités de conclure des contrats d’agglomération " à géométrie variable " selon leur objet, entre la Ville et les autres communes de l’agglomération, pour des objectifs précis, dans les domaines de l’habitat social, de la réinsertion et de l’assistance sociale, du sport, de la culture et de la sécurité publique. Ces contrats pourraient par exemple porter sur la création d’institutions culturelles ou sportives communes (autrement dit : gérées et financées en commun), implantées dans le canton de Genève, le canton de Vaud, l’Ain ou la Haute-Savoie. Ils pourraient également faciliter l’implantation de telles institutions (une Maison de la Danse, un Musée d’ethnographie, une Comédie, une Médiathèque, pour citer des exemples au hasard) hors de la Ville avec le soutien de la Ville, et participer à la revalorisation sociale et culturelle de quartiers dépourvus de " lieu central de référence". Dans ce cas, les communes concernées doivent toutes participer à l’élaboration du projet dès le départ, et non pas seulement être " consultées ", de plus ou moins bonne grâce, par la Ville détentrice d’un projet " bouclé " pour lequel elle n’attend qu’une approbation muette -quoique payante.
  • Que les Conseils municipaux de plusieurs municipalités de l’agglomération tiennent à intervalles réguliers des réunions communes avec un ordre du jour et une capacité de décision.

La municipalisation

Les communes genevoises sont sous tutelle d’un canton qui n’a guère les moyens de cette tutelle, et qui se trouve frappé de la même crise de légitimité que celle qui frappe tous les appareils d’Etat -et en particulier les trois appareils d’Etat fondamentaux : l’appareil répressif (l’Etat gendarme), l’appareil idéologique (l’Etat instituteur) et l’appareil économique (l’Etat social). Cette crise donne à une droite caporalisée à Genève par le parti libéral (et entraînée en Suisse par l’UDC) le prétexte, sinon l’occasion, d’entamer un processus de désengagement de la collectivité dans tous les domaines où elle s’était imposée comme un acteur déterminant de la concrétisation des droits fondamentaux.

  • Arc-boutée sur la défense conservatrice des terrains sociaux conquis par l’Etat (cantonal ou fédéral) depuis la fin de la seconde guerre mondiale, une partie de la gauche semble ne plus avoir de programme que celui, purement défensif, d’une résistance à tout ce qui pourrait remettre en cause le mode de gestion des rapports sociaux et économiques auquel nous étions accoutumés, et qui faisait du canton le premier acteur de la vie collective genevoise (principal employeur, principal entrepreneur, première puissance financière locale etc…).
  • Une adhésion technocratique aux règles financières et économiques dominantes convainc en outre quelques secteurs de la gauche (ou qui furent à gauche, en un temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître…) d’abandonner tout projet de changement au profit d’une conduite de simple adaptation des structures existantes aux discours et aux projets en vogue. Vogues et modes ayant cependant pour caractéristique une certaine fugacité, les tenants de cette conduite se retrouvent régulièrement défendre des propositions obsolètes avant même que d’être concrétisées.

Entre ces deux attitudes, qui nous nous convainquent ni ne nous conviennent ni l’une, ni l’autre, nous choisissons la troisième : celle de la municipalisation, autrement dit celle du développement d’un secteur public fort, parallèlement au développement d’un secteur associatif émancipé à la fois des règles administratives et de pesanteurs bureaucratiques, et de la loi du profit sur quoi se fonde, nécessairement, le secteur privé.

Nous proposons

  • D’envisager systématiquement la municipalisation (le cas échéant dans le cadre d’une communauté urbaine et par le moyen de groupements intercommunaux) comme une alternative à toute privatisation d’un service public cantonal. La municipalisation peut consister en une dévolution au secteur associatif d’activités assumées par l’appareil public central. Les droits du personnel doivent être garantis, les droits des usagers étendus, les prestations offertes pour le moins assurées, et si possible, étendues.


DÉMOCRATISER LA DÉMOCRATIE

Depuis des décennies, le clivage s’approfondit entre les citoyens et les institutions politiques ; ce clivage n’est pas une opposition aux institutions, au système politique, aux élus, mais une désaffection, dont la mesure est l’abstention électorale. Entre un quart et un tiers de celles et ceux qui disposent du droit de voter et d’élire n’en font jamais usage et les deux tiers de ceux qui en usent ne le font qu’occasionnellement. La participation citoyenne aux décisions politiques est particulièrement faible dans les zones urbaines, et plus faible dans les quartiers populaires que dans les quartiers " bourgeois " : le critère déterminant de la participation politique est toujours le niveau de formation, et celui-ci est toujours lié au niveau de revenu. Bref : si au XIXème siècle, " les pauvres regardaient voter les riches ", au XXIème siècle, les pauvres regardent toujours voter les autres.

Nous proposons

  • Le développement par la Municipalité de l’information à la population, notamment lors des scrutins municipaux, par tous les moyens disponibles.


J’y vis, j’y parle, j’y agis, j’y vote

Aux citoyennes et aux citoyens qui renoncent à peser sur les décisions politiques, ou qui sont conduits à y renoncer, s’ajoutent celles et ceux qui n’ont pas même le droit d’y prendre part : les étrangers, qui sont pourtant usagers des services publics et contributeurs directs et indirects aux finances publiques -qui sans eux verraient leurs déficit se creuser vertigineusement- et aux assurances sociales -qui ne sont viables que grâce à l’apport massif des salariés immigrés. En outre, une part importante de ces " étrangers " sont nés chez nous : étrangers peut-être, mais pas immigrés, puisqu’ils sont d’ici et pas d’ailleurs…

Nous proposons

  • Le droit de vote et d’éligibilité, aux plans municipal et cantonal, des étrangers nés et résidant à Genève, et des étrangers y résidant depuis 5 ans.
  • La consultation systématique des associations de l’immigration sur tous les projets ayant un impact sur les conditions de vie des immigrés et sur leurs relations avec la population genevoise.
  • Le soutien de la Municipalité aux efforts d’organisation autonome, associative, de l’immigration nouvelle, en particulier de celle en provenance des pays et régions en crise, en évitant la constitution de ghettos communautaristes et en collaborant avec le Bureau de l’Intégration.
  • La poursuite du soutien aux manifestations organisées pour rapprocher les différentes populations, immigrées et indigènes.
  • Le soutien à la régularisation des sans-papiers.
  • La création d’une Commission permanente du Conseil municipal avec pour champ de travail le développement de la participation des immigrés à la vie sociale et culturelle des quartiers et de la Ville.

Le système politique suisse évolue lentement, mais sûrement, vers un système de type oligarchique. On en revient à l’oligarchie que les révolutions démocratiques croyaient (ou voulaient faire croire) avoir abolie : parce qu’elle a accès (culturellement) aux informations qui lui permettent de choisir et de décider, une minorité de la population prend les décisions qui concernent tout le monde, alors qu’une majorité est ou se sent (ce qui politiquement revient au même) exclue du processus de décision. Cette inégalité d’accès aux " ressources " culturelles et aux informations nécessaires s’est accrue ces dernières années, après que les politiques de démocratisation des études, de généralisation de la formation, d’extension de la scolarisation, l’ait réduite. Un nouvel analphabétisme menace (sans d’ailleurs que l’ancien ait disparu) : il ne concerne plus seulement la lecture et l’écriture, mais aussi l’informatique ; il n’éloigne plus seulement du livre, mais aussi de l’ordinateur et de l’internet. Comme le vieil analphabétisme, le nouvel analphabétisme est une privation de pouvoir, un éloignement de la décision, une entrave à l’exercice des droits démocratiques.


Nous proposons

  • L’ouverture de " cafés internet municipaux ", lieux de formation gratuite à l’usage de l’internet, et lieux d’usage de l’internet.

Pour autant, la désaffection à l’égard des institutions n’est pas forcément synonyme de désaffection à l’égard de la chose politique : c’est de " la politique " dont on veut se tenir à l’écart, pas " du politique ", et l’impression donnée par la majorité des citoyennes et des citoyens de n’avoir plus conscience ou fierté de l’être, est trompeuse : en témoignent la multiplicité des mouvements sociaux, le nombre considérable des actions collectives, fussent-elles très localisées et " ciblées " sur des enjeux quotidiens. Le développement de ces mouvements et de ces actions est d’autant plus important qu’il peut entraîner à une action collective des femmes et des hommes qui s’étaient jusqu’alors tenus à l’écart de tout engagement public. Or sans cet engagement de citoyens " neufs ", le mouvement social ne serait que la courroie de transmission du mouvement politique, puisque la minorité politiquement active l’est aussi socialement. Les militantes et militants du mouvement associatif, les bénévoles des organismes d’entraide, des clubs sportifs, des groupements culturels, sont aussi des citoyennes et des citoyens exerçant les droits politiques dont ils disposent : ce n’est pas au sein du monde associatif  que se recrutent les abstentionnistes.

  • Traditionnellement, la gauche cultive une sourde méfiance à l’égard du " bénévolat ", peut-être parce qu’il lui rappelle le vieil engagement caritatif bourgeois (les militantes et militants du monde associatif d’aujourd’hui n’ont pourtant guère de points communs avec les dames patronnesses d’antan), peut-être aussi parce qu’il lui semble menacer, dans une sorte de concurrence déloyale, les droits des travailleurs des secteurs où s’activent, parallèlement aux services publics, les associations. Cette méfiance, cependant, le cède de plus en plus franchement à la reconnaissance de la valeur sociale de l’engagement, de l’action et de la prise de responsabilité directes des militants (et donc des "bénévoles "). Cet engagement est un engagement citoyen, qu’il se définisse ou non comme tel. Il est donc un engagement démocratique.

Nous proposons

  • Des Conseils Généraux de quartier, regroupant toute la population civilement majeure d’un quartier sans distinction de nationalité. Les Conseils de quartier devraient être systématiquement associés à l’étude et à la mise en œuvre des projets d’aménagement et d’équipement de leur quartier. Des enveloppes budgétaires pourraient leur être accordées pour l’aménagement d’espaces publics, d’équipements sportifs ou sociaux destinés prioritairement aux habitants du quartier concerné.
  • Le droit pour les habitants de déposer des motions populaires au Conseil municipal. Ces motions, intermédiaires entre la pétition et l’initiative populaire, seraient traitées par le Conseil municipal comme si elles émanaient de Conseillers municipaux.
  • Un soutien aux associations non encore solidement structurées, ce soutien n’impliquant pas forcément, ni n’exigeant en retour, leur structuration : la force du mouvement associatif est dans sa souplesse, son inventivité, sa capacité de répondre rapidement et sans se perdre ni dans les procédures, ni dans les consultations, à des problèmes, des besoins et des enjeux que la collectivité n’a pas encore pris en charge. Le soutien que la Municipalité peut apporter aux associations peut consister en la mise à disposition gratuite de matériel et/ou de services, ou en la reconnaissance par la Commune de l’activité de l’association. Des enveloppes budgétaires allouées aux Conseil de quartiers peuvent permettre à ceux-ci de soutenir directement des initiatives associatives et des actions bénévoles dans leur quartier. Les initiatives associatives ne doivent pas se substituer aux services publics, mais elles peuvent s’y ajouter, les étendre, les affiner, les " humaniser " là où le besoin s’en fait sentir. Elles peuvent également tester des actions, des méthodes, des services nouveaux : la Municipalité doit apporter son soutien à cette expérimentation sociale, même lorsqu’elle se situe aux limites de la légalité -la loi étant, par nature, toujours en retard sur la réalité sociale.
  • Un soutien à la constitution de réseaux d’associations et de personnes actives sur le même territoire, auprès de la même population ou sur une même thématique, et un soutien aux réseaux existants et à l’utilisation des énergies déjà disponibles et déjà actives. Le " monde associatif " est un monde de réseaux trop souvent mal " connectés " entre eux. La Municipalité doit allouer des moyens à ces réseaux lorsqu’ils en manquent (matériel d’impression, de connexion à l’internet, d’affichage, d’information en général) et doit les inciter à travailler en commun : Il faut mettre les réseaux en réseau (le " réseau de réseaux " est un modèle extraordinairement efficace  : c’est à la fois celui de l’internet et celui d’Al-Qaïda…) et les laisser fonctionner le plus librement possible.

EXCLURE L’EXCLUSION

Il n’y a pas de fatalité de l’exclusion sociale, s’il y a un choix possible de la marginalité. L’exclusion sociale est le produit d’une organisation sociale donnée et d’un mode de développement particulier, imposant des normes de comportement et des critères d’intégration auxquels toutes et tous ne peuvent satisfaire, et qui laissent de plus en plus de monde " sur le carreau ".

L’exclusion sociale est l’exclusion de droits fondamentaux : les exclus sont privés de ces droits, c’est-à-dire privés des moyens concrets, matériels, nécessaires à leur exercice. La lutte contre l’exclusion sociale est donc une lutte pour les droits sociaux, pour leur réalisation, au strict sens du terme : pour qu’ils aient une réalité concrète, tangible. Tout droit, si fondamental qu’il soit, et même un droit aussi " idéal " que la liberté individuelle ou la liberté d’expression, implique en effet des garanties concrètes -et au premier rang de ces garanties, celle de la couverture des nécessités vitales, et celle de la sécurité personnelle. On est loin, ici, de la charité et de l’assistance publique : puisque l’exclusion est une exclusion des droits fondamentaux, et dans la mesure où, parce qu’ils sont fondamentaux ces droits sont inconditionnels, le droit aux moyens de vie, c’est-à-dire aux moyens des droits, ne peut être conditionné ni par l’âge, le sexe, la nationalité, le statut social, ni par un travail, ni par une formation, ni par la conformité à un modèle de comportement, ni même par une adhésion aux normes communes, du moins tant que la non-adhésion à ces normes ne débouche pas sur la négation des droits d’autrui -d’où la légitimité du projet d’allocation universelle, versée à chacune et chacun, sans autre condition que celle de la résidence dans l’espace politique qui la garantit.

Les exclus n’ont pas être rendus coupables de leur exclusion, et l’exclusion n’est pas plus un vice qu’une fatalité. Dès lors, la collectivité n’a pas à exiger de celles et ceux qui en sont victimes qu’ils fassent amende honorable de leur exclusion ou de leur pauvreté, fût-ce en échange d’un revenu minimum. L’exercice concret des droits fondamentaux est lui-même un droit fondamental, et en tant que tel, il ne doit être ni monnayé, ni même contractualisé. Il n’y a pas de " contre-prestation " exigible à l’exercice d’un droit fondamental, puisqu’un tel droit n’est pas octroyé : " les hommes naissent libres et égaux en droit et le demeurent tout au long de leur vie " : toute personne a des droits, et le droit d’avoir ces droits. Toute personne doit donc avoir les moyens de ces droits, la tâche de la collectivité étant d’assurer ces moyens à celles et ceux qui en sont privés, pour quelque raison que ce soit.

On aura fait un grand pas dans la lutte contre l’exclusion sociale lorsqu’on en aura fait reposer le coût sur les " acteurs " socio-économiques qui la provoquent -de même qu’on aura fait un grand pas dans la lutte contre le chômage le jour où l’on aura fait assurer son financement, à commencer par celui de l’assurance-chômage, par ceux qui licencient. En attendant ce jour " où le droit du plus faible aura remplacé sur le trône le droit du plus fort ", la politique sociale, telle que nous la concevons, doit avoir pour objectif de réduire au maximum les risques objectifs d’exclusion sociale, individuelle et/ou collective, en assurant aux personnes et aux groupes les plus menacés d’exclusion la garantie concrète de jouissance des droits fondamentaux dont l’absence, la privation ou la non-concrétisation définit une situation d’exclusion. Aucune discrimination selon la nationalité ne devra être faite : toutes les mesures prises dans le domaine social, au sens large, doivent bénéficier également aux Suisses et aux étrangers, quel que soit leur statut. Aucune discrimination selon le sexe, l’âge ou le statut social n’est acceptable : Lorsqu’une prestation publique correspond à un droit fondamental, cette prestation doit être assurée à toutes et tous, au prix ou au tarif le plus bas possible, et dans toute la mesure du possible gratuitement.

L’objectif d’une politique sociale de proximité, telle qu’elle peut être développée par une commune, est de rétablir le lien social rompu entre la personne et la collectivité, en respectant les droits et l’autonomie de la première, c’est-à-dire en respectant la pluralité des modes de vie, et en ne considérant pas la norme courante (travail salarié à plein temps, famille traditionnelle etc…) comme la seule acceptable.

Nous proposons

  • D’atteindre par une information claire toutes les personnes qui pourraient bénéficier des prestations sociales municipales ou cantonales, voire fédérales, en s’appuyant sur le tissu associatif et en faisant diffuser l’information nécessaire par les associations présentes dans les quartiers et les différents groupes sociaux. Dans un premier temps, un " guide social " devrait être envoyé et distribué à tous les habitants de la ville (on ne peut en effet être sûr de toucher tous les ayant-droit éventuels qu’en se donnant les moyens de toucher tout le monde…)
  • La création (dans le cadre de la communauté urbaine lorsqu’elle aura été créée, ou, avant cela, par concordat intercommunal) d’un fonds intercommunal de lutte contre l’exclusion, commun à la Ville, aux autres communes et au canton, et donc d’une instance politique d’attribution des ressources de ce fonds, instance à laquelle participeraient tous les pouvoirs publics contribuant au fonds. Ce fonds ne doit pas se réduire à une " fusion comptable " de budgets existants, ou de prélèvements sur ces budgets, mais doit être une source nouvelle de financement pour une action socialement intégrée et géographiquement " ciblée " de lutte contre l’exclusion sociale. Il s’agit par ce moyen d’atteindre plusieurs objectifs en même temps : Affirmer la nécessité de l’engagement des collectivités locales dans la lutte contre l’exclusion sociale ; mettre en commun les ressources disponibles, et y ajouter de nouvelles ressources provenant de communes actuellement sans réel engagement dans ce domaine ; coordonner les politiques -ce qui implique un partage du pouvoir de décision entre les contributeurs. Ce fonds créerait un lieu de concertation permanente des politiques sociales menées par l’ensemble des acteurs institutionnels genevois (Ville, communes, canton) et amènerait les communes qui n’ont actuellement aucun engagement social précis et qui se reposent donc sur ceux des autres (en particulier ceux de la Ville, des grandes communes et du canton) à en prendre. Ce fonds serait alimenté par toutes les communes du canton, par exemple sur la base d’une contribution annuelle fixée en fonction du rendement d’un centime additionnel, corrigé par l’indice général de capacité financière des communes.

L’affaiblissement des liens sociaux traditionnels, s’il a permis et accompagné un accroissement de la liberté individuelle (c’est-à-dire de l’autonomie individuelle de comportement), a accru à la fois le sentiment d’isolement d’une partie de la population, l’anonymat (on ne connaît et ne fréquente plus guère son voisinage) et les tensions entre groupes sociaux et générations. De multiples petits conflits naissent de cette fragmentation sociale -de petits conflits qui ne sont certes pas une menace pour l’ordre public, mais qui contribuent à dégrader la qualité de la vie et à restreindre la liberté de celles et ceux qui ne peuvent s’y soustraire : les plus pauvres et les plus faibles.

L’apparente " montée de l’insécurité " est essentiellement faite de l’accroissement de petits délits voire de comportements non délictueux (les " incivilités ") mais perçus comme menaçants, lors même qu’ils ne le sont pas forcément. De ce point de vue, le sentiment d’insécurité n’est pas un fantasme : il est la perception de faits réels, sans doute relativement bénins pris isolément, mais dont l’accumulation et la récurrence constituent la gravité. Les incivilités sont constituées par des actes juridiquement sans gravité (déprédations, attitudes agressives, irrespectueuses des autres, injures etc…) mais dont les conséquences sociales sont d’autant plus importantes qu’elles sont subies par des personnes socialement fragilisées. Les incivilités pourrissent la vie de gens dont la vie est déjà difficile : elles sont une violence de faibles sur de plus faibles encore. Or même excessive, même sans fondement objectifs, la perception subjective d’une insécurité aboutit à une auto-privation de la liberté individuelle. Cette hyper-perception, faussée mais reposant tout de même sur des faits, pousse celles et ceux qui la subissent à se priver de l’exercice de certains de leurs droits les plus fondamentaux (à commencer par la liberté de se déplacer), ou à renoncer à l’utilisation de certains équipements publics. Quand une personne n’ose plus traverser un espace public, suivre un itinéraire, marcher de nuit, elle est privée d’une liberté fondamentale -et il importe peu que ce soit en raison d’une menace réelle ou seulement ressentie : le résultat est le même, et c’est à ce résultat qu’il convient de remédier. Or on ne répondra durablement à l’insécurité réelle qu’en s’attaquant à ses causes, et à l’insécurité perçue qu’en s’attaquant à l’insécurité réelle…

Nous proposons

  • Le renforcement (en effectifs, en horaires, en compétences) de la présence d’une " police de proximité " à partir de l’actuelle police municipale. Les rondes autour des écoles, dans les quartiers et sur les lieux sensibles doivent être plus fréquentes, et se situer dans des plages horaires plus larges. Le personnel nécessaire devra être engagé.
  • La désignation de médiateurs (par les Conseils de quartier lorsque ceux-ci auront été établis), intervenant à la demande de particuliers, de services publics ou sur mandat de la Ville, pour régler les " petits conflits " ne nécessitant pas l’intervention de la justice. Ces médiateurs seront formés à leur rôle. Ils s’agira de bénévoles, remboursés de leurs frais.

 

Lutter contre la pauvreté -pas contre les pauvres


Genève a redécouvert ses pauvres et ses exclus ; ils n’avaient pas disparu de la réalité sociale -ils avaient disparu du regard social : on les avait cachés et ils s’étaient cachés, puis on les avait oubliés. 6000 personnes (la moitié en ville) doivent dans ce canton riche avoir recours à l’assistance publique pour couvrir leurs besoins essentiels. Beaucoup de gens qui auraient besoin d’une aide sociale n’y ont pas droit ; d’autres, qui y auraient droit, ne le savent pas, ou ne l’obtiennent pas. De plus en plus nombreuses sont les personnes qui, ne correspondant pas aux normes traditionnelles de l’insertion et de l’activité sociale (le salariat, la famille, la propriété) sont privées d’accès aux droits théoriquement garantis à tous. La normalité sociale dont nous héritons, et avons si grand-peine à nous défaire, est celle d’un individu adulte échangeant son temps contre un salaire lui permettant de continuer à vendre son temps. Ce qui déroge à cette norme devient par définition " anormal " : " anormale " donc, la pauvreté et donc " anormaux " les pauvres. Mais normaux, les bas salaires des " travailleurs pauvres " contraints de demander une aide sociale, alors qu’ils ont un emploi à plein temps ?

  • A Genève, près de 85'000 salariés (dont 23'350 étaient au " bénéfice " de conventions collectives, les autres travaillant dans des secteurs non conventionnés) touchaient en 2000 des salaires horaires inférieurs à 20 FS/heure. Sans compter les clandestins et les travailleurs au noir…

Nous proposons

  • L’assouplissement des conditions d’octroi des aides ponctuelles : le seul fait qu’une aide soit conditionnelle dissuade d’éventuels bénéficiaires de tenter la démarche de la demander.
  • La généralisation, autant que possible, de la gratuité des prestations municipales : la moindre taxe, le moindre émolument, est exclusif.
  • Le développement d’expériences et d’actions, à Genève et ailleurs, dans le cadre de l’Association mondiale des villes contre la pauvreté.


Lutter contre les toxicomanies, pas contre les toxicomanes

La lutte contre la toxicomanie (ou plutôt : contre les toxicomanies, au pluriel) est depuis une vingtaine d’années un enjeu politique majeur, relevant à la fois de la politique sociale, de la politique de santé publique, de la politique de sécurité publique et de la défense des libertés fondamentales. Genève ne peut évidemment échapper à la remise en cause générale des stratégies suivies traditionnellement dans ce domaine, même si le problème ne prit pas ici le caractère théâtral qu’il eut à Zurich il y a quelques années, avec le spectacle des " scènes ouvertes ".

Il n’y a pas de société sans toxico-manie, il n’y a pas de ré-ponse uni-que et définitive à la toxicomanie, il n’y a pas non plus de toxicomanie plus acceptable qu’une autre, s’il en est de légales et d’illégales. Il n’y a même pas, en réalité, de " toxicomanie en soi " : la situation des cocaïnomanes n’est pas celle des héroïnomanes, qui n’est pas celle des alcooliques, qui n’est pas celle des tabagiques. Aux différentes substances et aux dépendances qu’elles induisent correspondent des situations, des dangers et donc des réponses différentes : il faut reconnaître et assumer la multiplicité des pratiques et des stratégies, et prendre la mesure du triple échec de la prohibition (qui n’a pas rendu les drogues inaccessibles mais a constitué un marché noir contrôlé par un milieu criminel), de la répression de la consommation (qui aggrave la situation des toxicomanes, entrave les efforts de prévention et ajoute aux dangers des drogues ceux de leur consommation clandestine) et de la distinction du statut juridique des drogues en fonction du seul critère de leur usage coutumier ou non (drogues légales en vente pratiquement libre, drogues légales en vente médicalement contrôlée, drogues illégales dont l’usage est toléré mais le commerce interdit, drogues illégales dont l’usage et le commerce sont interdits…).

Nous proposons

  • Que les priorités de l’action publique restent la prévention, l’assistance aux toxicomanes, la réduction des risques, avec comme but à court terme celui de sauver des vies (c’est-à-dire de minimiser les risques d’overdose et d’infection, mais également ceux liés à l’usage de substances légales comme le tabac), comme but à moyen terme de rétablir les liens sociaux des toxicomanes afin de les mettre en situation de s’émanciper de leur drogue (en situation de toxicomanie, la marge peut tuer) et comme but à long terme, dans une action politique, judiciaire, policière et sociale coordonnée à tous les niveaux institutionnels, du local à l’international, de " casser le marché " clandestin (c’est-à-dire le trafic) des drogues. Si, théoriquement, tous les moyens, toutes les méthodes, toutes les stratégies permettant d’atteindre ces objectifs peuvent être envisagés, la limite éthique est évidente : elle est imposée par le respect des droits des personnes. Ce respect exclut à la fois le " tout répressif " et la tolérance des " scènes ouvertes ".
  • Que toutes les possibilités de faire jouer à la police municipale un rôle actif en matière de prévention des risques et de dissuasion de la constitution de " scènes ouvertes " soient étudiées, et mises en œuvre.
  • Que la Ville prenne toute sa part de l’assistance médicale et sociale aux toxicomanes, notamment en participant à la diversification des lieux d’accueil, ainsi qu’à la prévention du sida par l’information, la distribution de préservatifs et l’échange de seringues.
  • Que la Ville prenne toute sa part de la lutte contre l’alcoolisme, le tabagisme et les autres formes de toxicomanies " légales ", dont la dépendance aux anxiolytiques.

L’accueil de la petite enfance

Le besoin de lieux d’accueil pour les petits enfants n’a pas disparu. Le retard pris dans les décennies précédant le changement de majorité politique en Ville de Genève ne pouvait être rattrapé aussi rapidement que la nouvelle majorité le souhaitait, d’autant que la structure même du système d’accueil, avec une multiplicité de crèches et de jardins d’enfants privés (mais subventionnés jusqu’à 95 % par la collectivité) totalement autonomes les uns des autres, gérant eux-mêmes leurs listes d’attente et le champ géographique des bénéficiaires de leurs services, n’a pas facilité les choses. La demande de place en crèches et jardins d’enfants excède toujours de beaucoup l’offre, et les listes d’attentes sont longues : on estime qu’à l’heure actuelle, les deux tiers des gardes de petits enfants relèvent soit du bénévolat, soit du travail au noir. Toute collectivité publique, et la commune comme les autres, est fournisseuse de services et de prestations dont l’offre et les conditions d’offre peuvent soit avantager, soit désavantager les femmes (autrement dit : soit concrétiser le principe d’égalité des droits, soit l’ignorer). Une offre plus abondante de lieux d’accueil pour la petite enfance (et de structures parascolaires) permettra aux femmes de s’engager plus commodément dans une vie professionnelle régulière, et aux parents (femmes et hommes) de s’engager dans une réduction librement choisie, et non plus imposée, de leur temps de travail. En outre, plusieurs études démontrent que la création de places en crèches procure un bénéfice social (et même économique) sans commune mesure avec le coût budgétaire de cette création, pour ne rien dire de l’amélioration de la qualité de vie des parents.

Nous proposons

  • La municipalisation des lieux d’accueil de la petite enfance.
  • Un programme d’ouverture de crèches et jardins d’enfants très décentralisés, jusqu’à l’échelle de l’îlot. Il doit y avoir dans chaque quartier un réseau de crèches, garderies et jardins d’enfant suffisant pour répondre à tous les besoins du quartier.
  • Une coordination intercommunale pour les lieux d’accueil situés, ou à créer, dans les quartiers " à cheval " sur plusieurs communes (Petit Saconnex, Châtelaine, Acacias notamment).
  • La gratuité des crèches et jardins d’enfants.

Autour de l’école

Le confinement et la densité de Genève et donc le manque d’espace disponible, la volonté de rentabiliser le sol au maximum et le refus légitime (d’ailleurs couronné de succès, puisque Genève est la seule des " grandes villes " suisse dont la commune-centre n’ait pas perdu, mais gagné des habitants) d’accepter le dépeuplement de la Ville, tout rend difficile la construction d’écoles et de lieux destinés aux enfants d’âge scolaire. Les projets de construction de tels équipements suscitent souvent une opposition des habitants, opposition compréhensible lorsque ces constructions menacent des espaces publics à disposition de la population, mais beaucoup moins acceptable lorsqu’elle est fondée sur le principe du " touche pas à mon jardin, installe ton école dans celui du voisin "...). Pour autant, de nouvelles écoles et de nouveaux équipements parascolaires doivent être construits, dans les meilleures conditions possibles.

  • Lâché par le canton, le service des patrouilleurs scolaires a été repris par la Ville. Le canton s’étant de plus déchargé des activités parascolaires sur les communes, sans avoir mis en place les dispositifs nécessaires, la Ville s’est retrouvée devoir gérer la moitié des activités parascolaires du canton, dans le cadre d’un " groupement intercommunal " bricolé à la hâte).

Nous proposons

  • Les écoles et les structures parascolaires à construire devront l’être sans réduire l’espace public à disposition des habitants des quartiers concernés.
  • Le développement, dans chaque quartier, de lieux spécifiques pour les préadolescents (12-15 ans, grosso modo), différents des lieux d’accueil des enfants et des lieux destinés aux adolescents. La confusion entre les activités parascolaires et les centres de loisirs est rédhibitoire pour les adolescents (qui font tout pour éviter d’être " mélangés à des gosses "). Les écoles devraient offrir des espaces ouverts sur l’extérieur, capables d’accueillir des jeunes après les classes, si nécessaire avec la présence d’un animateur.
  • Le développement de lieux de rencontres " inter-générationnels ".
  • Un soutien accru aux petites associations de quartier actives auprès des jeunes, dans le respect de l’autonomie de ces associations.

L’âge venant…

Les personnes les plus âgées sont menacées d’une exclusion à la fois sociale, due à la raréfaction de leurs ressources matérielles (en particulier pour celles qui ont atteint l’âge de la retraite avant ou peu après l’introduction du Deuxième Pilier), et physique (due à l’inadaptation de la ville et de la vie urbaine à leurs possibilités). Fragiles dans leurs déplacements face à une circulation automobile insuffisamment maîtrisée (aux risques de laquelle s’ajoutent ceux de l’usage des trottoirs comme pistes cyclables, de skate ou de rollers), ressentant particulièrement le sentiment d’insécurité, elles sont de plus en plus nombreuses, de plus en plus âgées et donc de plus en plus fragiles. Le vieillissement de la population, plus prononcé dans les communes-centre des villes (la " pyramide des âges " y est en effet plus déséquilibrée que dans les autres zones démographiques urbaines, avec une proportion plus élevée de personnes âgées et très âgées, et plus basse de jeunes adultes, d’adolescents et d’enfants), est une tendance lourde de l’évolution démographique depuis des décennies. Or l’action de la collectivité est encore contrainte par des réflexes, des structures et des pratiques héritées d’un temps où les jeunes étaient beaucoup plus nombreux que les vieux; aujourd’hui il n’est pas rare de voir des personnes du " troisième âge " prendre en charge leurs parents.

Nous proposons

  • Que l’action de la collectivité consiste à permettre autant que possible aux personnes âgées qui le souhaitent de continuer à vivre chez elles ; de maintenir les liens sociaux et personnels des personnes âgées et de leur donner la possibilité de participer à la vie de leur quartier. Il faut donc poursuivre et renforcer les efforts déjà engagés en faveur du maintien des personnes âgées à leur domicile, avec l’accompagnement social et médical nécessaire. Il faut également que dans chaque quartier un lieu de rencontres " inter-générationnelles " permette aux aînés de ne pas côtoyer que des aînés…
  • Que dans chaque quartier soient mis à disposition des logements adaptés aux besoins et aux moyens des personnes âgées, avec l’encadrement médical et social nécessaire. Que soit mis en place un système de " familles d’accueil " pour personnes âgées seules, ne nécessitant pas un accompagnement social et médical permanent.
  • Que soit développée l’offre de places dans les établissements spécialisés, pour les personnes les plus âgées, les plus atteintes dans leur santé et les plus restreintes dans leur autonomie. Cela implique la création de nouveaux établissements spécifiques de qualité, en ville.


La solidarité par l’association

Toute politique de solidarité sociale n’est pas forcément vouée à être mise en œuvre par l’administration publique centrale ou des services publics centraux. Si les critères de l’économie privée (la rentabilité, le profit) sont contradictoires de ceux de la politique sociale (la nécessité ou l’utilité des prestations, les besoins des usagers, le respect de leurs droits), les critères et les modes de fonctionnement du secteur associatif rendent parfaitement légitime une délégation de certaines tâches à des associations (ou des fondations de droit public), notamment dès lors qu’il s’agit d’expérimenter des pratiques nouvelles et de répondre à des besoins émergents.

Nous proposons

  • La représentation des usagers et des salariés dans les instances de direction des principaux organismes privés (associations ou fondations) à qui la Ville accorde une subvention régulière importante.
  • La diminution des loyers des locaux pour associations, loués par la Ville.


Une économie au service de la cité -et non une cité au service des banquiers privés

L'ÉCONOMIE EST AU CENTRE DE LA POLITIQUE. COMME LA TUMEUR EST AU CENTRE DU CANCER.

Les économies dites (par elles-mêmes) " dévelop-pées " traversent une crise profonde, plus ou moins douloureuse selon l’état en lequel cette crise les a surprises, et dont l’accroissement brutal du nombre des chômeurs a été la première conséquence. Il s’agit à la fois d’une crise d’adaptation de l’appareil économique aux nouvelles conditions et aux nouvelles capacités de production, et d’une crise de concurrence. Economiquement, la crise se mesure par l’accroissement de l’importance des capitaux spéculatifs par rapport aux capitaux investis dans la production, et par un accroissement des investissements de " rationa-lisation " des méthodes de production au détriment des investissements d’amélioration de la production et des conditions sociales des producteurs.

Face à une telle crise, l’attente d’une " relance " qui serait suscitée par quelque(s) grand(s) projet(s) somptuaires (genre " traversée de la rade "), tient du fétichisme : l’adaptation de l’appareil économique aux possibilités de production et aux conditions des échanges internationaux nécessitera un effort considérable de la part des collectivités publiques, tous niveaux de décision confondus -un effort d’autant plus considérable que l’on ne prendra pas seulement en référence les " grands équilibres macro-économiques ", mais aussi les droits sociaux des gens. L’effort d’ " adaptation économique " ne saurait en effet pour des socialistes se payer de la dégradation des conditions de travail et d’existence : il n’a même de sens et de légitimité que s’il se traduit par leur amélioration constante. Quant aux moyens de cette " adaptation ", les privatisations de services publics sont sans doute à ranger au rang des pires. Du point de vue même de la " modernisation de l’appareil économique ", le maintien, le développement et, là où il a été entamé, la restauration d’un secteur public et de services publics forts s’impose -avec à la clef le renforcement et l’élargissement de leurs prestations.

  • Même si l’autonomie communale est à Genève plus réduite que n’importe où ailleurs en Suisse, et même si les compétences de la Ville sont confinées dans un cadre excessivement étroit, le pouvoir économique d’une collectivité publique qui peut dépenser un milliard par an est loin d’être négligeable. La Ville de Genève est en fait le second acteur économique du canton, après le canton lui-même. Compte tenu de ce poids économique et financier, et dans les limites (à élargir) de ses compétences, la Ville mène donc, qu’elle le veuille ou non, le dise ou non et la planifie ou non, une politique économique.
  • Le système bancaire privé ne joue absolument pas le rôle qui pourrait être le sien (et dont par ailleurs il se targue) en période de crise économique : après avoir financé n’importe quoi, n’importe qui, n’importe comment pendant des années, au prix d’ " affaires " retentissantes et de pertes faramineuses, il pratique une politique d’investissements (et de taux d’intérêts) décourageante pour l’innovation, dommageable au maintien du tissu économique local, et menaçante pour les petites et moyennes entreprises. Face à cela, les banques publiques devraient mener une politique différente, fondée sur les besoins réels de l’économie et de la population locales. On a pourtant vu (avant que d’en payer le prix) la banque publique (dont la Ville est un actionnaire important) aligner ses pratiques, ses critères et ses investissements sur ceux des banques privées.
  • Le canton de Genève compte 60'000 emplois de plus qu'il ne compte d'actifs résidants, la différence s'expliquant par le recours à 36'000 frontaliers français, à des résidants vaudois, à de " faux frontaliers " (des Suisses résidant en France) et à des clandestins.
  • Avec la Fondetec (Fondation pour le développement des emplois et du tissu économique), la Ville s’est dotée d’un instrument de politique économique dont elle pourrait faire meilleur usage que celui qui consiste à faire à la place des banques, mais avec moins de moyens, le travail que les banques ne font pas, ou à investir dans des secteurs économiques déjà sur-concurrentiels à Genève (comme l’hôtellerie et la restauration, par exemple).

Nous proposons

  • Que la Ville contribue, notamment en faisant de la Fondetec l’usage pour lequel elle a été instituée, à créer des conditions favorables au maintien d’un maillage économique local, en soutenant dans la mesure de ses moyens les petits commerçants et artisans et les petites et moyennes entreprises innovantes, dans des secteurs non sur-concurrentiels, et en respectant des critères qualitatifs (utilité sociale des produits et des services proposés, innovation, conditions de travail et de salaire).
  • Que la Banque Cantonale genevoise joue, même au prix d’une baisse de la rentabilité à court terme de ses investissements, un rôle actif dans le soutien à la création d’entreprises nouvelles et au maintien des entreprises existantes, y compris de celles qui sont en difficulté, pour autant qu’elles jouent un rôle positif dans l’économie locale.

Partager le travail

Nous vivons peut- être la fin de la généralisation du salariat stable et à plein temps comme norme des rapports de travail. Le nombre des chômeurs, des travailleurs occasionnels, des exclus du travail, des personnes en formation, des travailleurs (et surtout des travailleuses) à temps partiel, des indépendants et des retraités sortis (bon gré, mal gré) du cycle salarial, est aujourd’hui à Genève plus élevé que celui des salariés " traditionnels " (occupant un emploi salarié, stable, à plein temps). La baisse régulière de la proportion des salariés " tradi-tionnels " au sein de la population résidente (rappelons que le nombre d’emplois est à Genève supérieur au nombre de personnes résidentes " professionnellement actives "), baisse plus prononcée en Ville que dans l’ensemble du canton, est due à la fois à des facteurs structurels (le vieillissement de la population, l’allongement de la durée de la formation, notamment), conjoncturels (le chômage, sans doute la forme la plus stupide de réduction du temps de travail) et sociaux (la difficulté pour les femmes de concilier travail à plein temps et responsabilités familiales, quand ces responsabilités restent toujours mal partagées au sein du couple -du moins quand couple il y a).

La politique sociale et économique (et donc d’emploi) des collectivités publiques tarde à prendre toute la mesure de cette évolution sociale et reste fondée sur le salariat traditionnel au lieu que de l’être sur un projet de partage du travail (c’est-à-dire de coïncidence du travail disponible et du travail nécessaire).

La réduction du temps de travail est la clef d’une nouvelle répartition du travail (entre travail rémunéré et non-rémunéré, travail constitutif du revenu et travail socialement nécessaire, travail des hommes et travail des femmes). Plus cette réduction sera importante, plus la redistribution du travail sera profonde ; plus cette redistribution sera maîtrisée, mieux elle sera acceptée. Nous sortons par la crise d’une société organisée, normée autour d’une certaine conception du travail, qui nous vient du XIXème siècle : salarié, stable, à plein temps, masculin. A la remise en cause de ce modèle, nous opposons encore ce modèle lui-même, sans tenir compte des autres modes d’engagement social -à commencer par celui des femmes, assumant sans rémunération la plus grande part du travail non-marchand, et, avec ou sans rémunération, la plus grande part du travail tout court. L’évolution sociale en ce qui concerne la répartition du travail (du temps et du volume de travail) tend à constituer deux groupes de travailleurs (salariés ou non) : ceux qui sont bien payés pour le travail qu’ils font, mais qui travaillent trop, trop longtemps et trop intensément, et ceux qui sont assistés pour survivre, parce que leur salaire est insuffisant -ou qu’ils n’ont pas de salaire, ni de revenu régulier du travail. On ne sortira de cette situation qu’en procédant à une double répartition du travail : en répartissant le volume de travail rémunéré disponible entre tous les travailleurs potentiels, et en répartissant le volume de travail nécessaire (rémunéré ou non) entre tous ceux qui peuvent en fournir.

Nous proposons

  • La création d’emploi par la collectivité publique municipale. Il doit s’agir d’emplois utiles à la population, correspondant à des tâches d’intérêt collectif, au service et au bénéfice des habitants. Il s’agit également de maintenir et de développer les prestations de la Ville à la population, tout en reprenant le cours d’une réduction du temps de travail hebdomadaire.
  • Le renforcement de la collaboration de la Ville avec le service cantonal de l’emploi. Le développement de projets spécifiques pour chômeurs en fin de droits, offrant un emploi durable (quoique de durée déterminée) pouvant déboucher sur un engagement régulier.
  • Des congés-formation sous la forme d’un échange de poste de travail entre un employé et un demandeur d’emploi pendant le temps consacré par le premier à parfaire sa formation.
  • La réduction du temps de travail dans l’administration municipale, les services publics municipaux et les institutions les plus lourdement subventionnées par la Ville. Cette réduction du temps de travail ne doit pas se traduire par une réduction des plus bas salaires (quartile inférieur de l’échelle des traitements), et ne doit se traduire que par une réduction non proportionnelle des salaires moyens (quartiles intermédiaires). L’économie budgétaire réalisée sur la masse salariale devra être affectée à la création de postes de travail supplémentaires et au financement des actions spécifiques de formation et d’engagement de chômeuses et de chômeurs.
  • L’augmentation de l’offre de postes stables à temps partiel, l’encouragement au partage volontaire d’un poste de travail à plein temps en plusieurs postes de travail à temps partiel.
  • La prise en compte positive des temps de travail inférieurs à 40 heures par semaine (pour un temps plein) dans le choix des mandataires et fournisseurs de la Ville.
  • L‘étude de la possibilité d’une remise partielle de la taxe professionnelle aux entreprises opérant une réduction substantielle du temps de travail et créant des emplois.
  • La prise en compte des années passées par les femmes à assumer les charges familiales et éducatives, comme des années de travail, lors du retour à l’emploi, ou de la prise d’emploi.

 

REINVENTER LA VILLE

Toute action politique porte sur un espace borné par les " frontières " que l’organisation étatique a déterminées. La maîtrise de cet espace est donc un enjeu politique essentiel. Il en découle que le développement de la ville doit faire l’objet d’une planification, sauf à se satisfaire de contempler les ravages de la spéculation immobilière et du champ libre laissé aux intérêts privés. Cette planification, dont le contenu doit pouvoir être régulièrement infléchi, doit être démocratique, soumise à consultation, à négociation et à ratification, sous une forme ou une autre, par les habitants -puisqu’il faut se résoudre à devoir constamment rappeler aux forces économiques et politiques que cette évidence gêne, qu’une ville n’est pas un entrelacs de parkings, d’autoroutes et de supermarchés, mais une collectivité humaine, et que ce sont ceux qui l’habitent qui la font.

Le territoire urbain n’est pas un espace neutre, c’est un champ politique. L’enjeu politique premier de l’organisation de ce territoire concerne la répartition de son affectation (entre logement, commerce, industrie, loisirs, culture, administration publique, circulation des personnes et des biens, espaces verts et espaces libres). Cette répartition détermine l’identité physique de la ville, c’est-à-dire le cadre et les conditions de vie de ses habitants. A Genève, cette identité physique " déborde " très largement des limites politiques de la commune centre : la ville réelle, celle qui se manifeste par une continuité du domaine bâti, traverse tout le canton et se prolonge au-delà de ses frontières et des frontières nationales : politiquement, la Ville de Genève s’arrête au bas des routes de Meyrin et de Chêne, mais physiquement, la ville de Genève va de Ferney à Annemasse… Toute question d’urbanisme et d’aménagement doit donc être posée à l’échelle de la ville réelle. Cette échelle, c’est celle de la communauté urbaine.

  • La Ville de Genève s’est dotée il y a quelques années d’un service de l’aménagement urbain, au travail duquel l’émergence d’une majorité politique de gauche a permis de donner l’écho nécessaire. La Ville dispose de deux instruments politiques importants pour son travail d’aménagement : le Plan directeur, adopté par le Conseil administratif, et les Plans d’utilisation des sols (PUS), issus d’une initiative populaire socialiste, qui fournissent aux communes quelques moyens d’une organisation de l’espace favorisant une répartition la plus harmonieuse possible des différentes activités qui y coexistent. La soustraction de certaines de ces activités à l’application des PUS a cependant été opérée par la droite cantonale, qui n’a pas hésité à modifier une loi de portée générale pour complaire à un promoteur. Si choquantes qu’elles soient, cette absence de considération pour l’intérêt public et cette soumission aux intérêts privés, n’ont rien de surprenant : elles expriment parfaitement le type d’urbanisme -si le mot en pareil cas peut encore avoir un sens- que peut produire le libéralisme économique.

Nous proposons

  • La mise en œuvre de l’ " Agenda 21 " pour le développement durable.
  • Le maintien d’une politique d’équilibre et de pluralisme dans l’affectation de l’espace urbain, et donc le maintien de l’habitat en Ville, et le maintien de la mixité des activités (y compris d’activités industrielles, là où elles ne nuisent pas à la qualité de la vie des habitants).
  • L’adoption par la Ville et les grandes communes d’une politique d’agglomération : les choix urbanistiques et les politiques d’aménagement doivent penser la ville physique au-delà de la Ville politique.
  • Le renforcement des plans d’utilisation des sols (PUS), dans l’optique d’une mixité globale (à l’échelle de l’agglomération et de la commune) et locale (à l’échelle des quartiers), urbanistique (portant sur l’affectation de l’espace) et sociale (concernant le type de populations résidentes et usagères).
  • La possibilité d’implanter dans des zones industrielles non utilisées, ou partiellement utilisées, des activités non industrielles ; la possibilité de transformer ces zones en espaces verts ou minéraux, collectifs.
  • L’étude sérieuse, et en étroite collaboration, dès le départ, avec les autres communes concernées, de projets d’implantation d’institutions culturelles hors de " l’hypercentre  culturel " de la Ville et dans des quartiers sans lieu culturel permanent d’importance (au moins) cantonale.

Un urbanisme par et pour les urbains

" Construire la ville en Ville " fut le mot d’ordre, le programme et effectivement la politique de la gauche dans les années septante et quatre-vingt. Cette politique a permis à Genève de freiner, puis d’inverser un mouvement démographique qui, depuis la fin des années soixante, se traduisait par une déperdition de population pour la ville. L’objectif poursuivi a été atteint : Genève est aujourd’hui la seule des " grandes " villes suisses (soit les communes de plus de 100'000 habitants -elles sont cinq-, qui ne sont toutes à l’échelle européenne que des villes moyenne) dont la population ait augmenté : La population de Genève a dépassé celle de Bâle, et a atteint en 2002 les 182'560 habitants (3123 de plus en un an). Les limites de la Ville politique n’ayant quant à elles pas changé (le territoire communal n’a pas augmenté), Genève est redevenue la ville la plus dense de Suisse. Hors du centre historique de la ville (Cité, Saint-Gervais), qui fut toujours caractérisé par une très forte densité de population et d’activités économiques, une densité excessive est source de conflits de toute nature entre les différents occupants de l’espace, et provoque une péjoration des conditions d’habitat.

Genève manque d’espace : la ville reste confinée dans un périmètre politique étroit, et l’espace dont la ville dispose à l’intérieur de ce périmètre reste mal réparti : la densification de la ville tient aussi à ce qu’on y a fait, et continue d’y faire, la part trop belle aux voies de circulation et de stationnement des automobiles .

Mais la ville n’est pas qu’une addition d’espaces spécifiques (logements, activités économiques, espaces verts, voies de circulation) ; elle est un ensemble, au sein duquel les espaces non-bâtis constituent -quand ils ne sont pas l’objet d’une appropriation privée- des espaces collectifs et des lieux possibles de pratique démocratique et de solidarité : l’Agora n’est pas un bâtiment mais une place.

Nous proposons

  • Le maintien des espaces verts existant et leur protection des atteintes du trafic automobile ; la création de nouveaux espaces verts dans les quartiers qui en manquent, et le long des grandes voies urbaines. Ces nouveaux espaces verts pourront être créés sur des espaces actuellement affectés à la circulation ou au stationnement.
  • En périphérie de la ville, une densification prudente, très localisée, négociée avec les habitants, reste possible, pour des projets de qualité, notamment dans les zones villas.
  • L’introduction d’éléments de paysage de qualité, pour requalifier des lieux parfois négligés, à commencer par la Plaine de Plainpalais.
  • L’achèvement du projet " Au fil du Rhône ".
  • La redéfinition des places de Neuve et Bel-Air et des ronds-points de Rive et de la Jonction comme de véritables places, et non plus des carrefours routiers.
  • Une mise en cohérence de l’ensemble du mobilier urbain.
  • La réhabilitation des quais.

Nous refusons

  • Tout projet de parking en surface : l’espace urbain " ouvert ", à ciel libre, doit être utilisé pour le logement, l’agrément ou des activités économiques socialement utiles, et non polluantes.
  • Toute atteinte irrémédiable au patrimoine architectural et urbanistique de Genève. Pour autant, il est possible de (re)donner un espace à la créativité architecturale et urbanistique, par l’organisation de concours.


Le critère et la mesure : la qualité de la vie

La qualité et la pertinence des choix urbanistiques ne se mesurent pas au plaisir des urbanistes mais à la qualité de la vie des habitants de l’espace urbanisé : la ville doit être faite par et pour ses habitants. A contrario, ce qui pèse sur cette qualité de vie ou la dégrade est le signe d’erreurs d’urbanisme.

A Genève, la principale nuisance subie par les habitants est le bruit (" viennent ensuite ", et dans le désordre, puisque ce classement est en constante modification : la pollution, la saleté, l’encombrement, l’insécurité). Mais au-delà de ce qui directement la dégrade, la qualité de la vie en ville dépend essentiellement de la qualité de l’aménagement de la ville.

Les compétences des communes genevoises en matière d’aménagement sont extrêmement limitées. Cependant, la nécessité n’est pas réduite pour autant d’un engagement actif des collectivités locales dans la défense de la qualité de la vie de leurs habitants. La Ville doit donc agir dans ce domaine, en usant de toutes les compétences dont elle dispose, et en acquérant des compétences nouvelles.

Nous proposons

  • Que lors des soumissions et des commandes passées par la Ville, les critères environnementaux soient des critères de sélection entre les différentes offres ; le choix de produits et de matériaux respectueux de l’environnement, le choix de méthodes de travail et de technologies les moins perturbantes possibles pour les habitants, doit être systématisé, pour tous les services municipaux et organismes dépendant de la municipalité, ou directement financés par elle.

Le bruit est depuis des années la première nuisance citée comme telle par les habitants de la ville, et les mesures effectuées depuis trente ans signalent une dégradation constante de la situation dans ce domaine. La ville semble de plus en plus bruyante (quoique cette nuisance soit inégalement répartie, cette inégalité recouvrant largement celle des ressources financières des habitants), et les moments de silence relatif (ou de moindre bruit) de plus en plus rares. Un bruit de fond continuel et de plus en plus fort accompagne tous les moments de la vie en ville. Ce bruit n’est plus fait de " bruits humains " mais de bruits de machines, d’équipements, de moteurs.

La nuisance sonore dans l’espace urbain est étroitement liée à la circulation automobile motorisée (automobiles, transports publics, deux roues motorisés, les véhicules les plus petits n’étant pas les moins bruyants), laquelle produit un bruit incessant (contrairement au bruit produit par le travail, qui cesse quand cesse le travail, c’est-à-dire sauf exception dès le début de soirée).

  • La lutte contre le bruit correspond à l’un des rares domaines de la politique environnementale où la commune dispose de compétences notables. La Ville de Genève en a fait bon usage dans l’opération de couverture des voies de Saint-Jean…

Nous proposons

  • Une action planifiée de réduction des nuisances sonores, par la réduction de leur production et la réduction de leur perception.
  • La réduction de la production du bruit passe essentiellement par une réduction de la circulation motorisée dans les quartiers d’habitation. La politique des transports et de l’aménagement doit y concourir. Mais il s’agit également de réduire le bruit produit par les engins et les méthodes de travail des services municipaux et des entreprises mandatées par la Ville, en choisissant systématiquement les matériels et les méthodes les moins bruyantes, et le cas échéant, en modifiant (en réduisant et en déplaçant) les horaires de travail des services concernés.
  • La réduction de la perception du bruit consiste essentiellement en un développement de l’isolation phonique des bâtiments qui peuvent le supporter sans dommage (qu’il s’agisse des bâtiments d’habitation ou des lieux de travail). La Ville doit poursuivre, accroître et généraliser son engagement dans ce domaine, sur tout son parc immobilier.

La péjoration des conditions de vie des habitants est également due à la pollution de l’air ; à Genève, cette pollution, comme celle par le bruit, comme une bonne part de l’insécurité et de l’encombrement, comme les difficultés de déplacement dans la zone urbaine- est d’abord la conséquence du trafic automobile -à quoi s’ajoutent dès l’automne les rejets dans l’atmosphère de composants des carburants de chauffage.

Nous proposons

  • Une réduction de la pollution de l’air due au trafic automobile, par une politique des transports privilégiant les transports publics (et d’entre eux, ceux à propulsion électrique) et favorisant les modes de déplacement non motorisés. Le parc automobile de la ville doit être constitué de véhicules électriques. Les nouvelles constructions financées par la ville doivent être systématiquement équipées de capteurs solaires, ainsi que les anciennes constructions qui s’y prêtent. Des réverbères solaires doivent être installés en lieu et place des réverbères traditionnels, partout où cela sera possible.
  • Une réduction de la pollution de l’air due aux installations de chauffage par le remplacement, partout où cela est possible, des chauffages centraux fonctionnant au fuel par des modes de chauffage moins polluants, par une réduction du chauffage lui-même et par la généralisation dans le parc immobilier de la ville des systèmes et des décomptes individuels de chauffage -qui incitent aux économies dans ce domaine.
  • L’amélioration de l’isolation thermique et phonique de tous les bâtiments de la ville.

La qualité de la vie en ville dépend également de la qualité de l’espace urbain mis à la disposition du public, et de la qualité de son aménagement. Cette qualité est notable à Genève -ce qui ne signifie pas qu’elle ne puisse être accrue. Un embellissement de la ville est possible ; il implique évidemment que soit préservé ce qui, fait de Genève une belle ville -moins cependant par son architecture ou son urbanisme que par sa situation et son cadre géographique (la beauté de Genève n’est pas dans ses bâtiments ou ses rues, mais dans son lac, son fleuve, les montagnes qui dessinent son horizon).

Nous proposons

  • Que l’on préserve absolument les parcs de toute circulation motorisée et de tout équipement non indispensable à leur usage par la population -les équipements indispensables devant eux-mêmes se faire les plus discrets possibles.
  • Que l’on substitue des " prairies sèches " aux espaces engazonnés, hors des espaces botaniquement affectés.
  • Que l’on remette à ciel ouvert les ruisseaux (les nants) canalisés en sous-sol.

La propreté d’une ville participe de sa beauté -sachant qu’il n’y a de propreté parfaite que dans l’absence totale de vie. Or la ville est un lieu de consommation, et donc de gaspillage, dans une société qui est elle-même une société de gaspillage (crise ou pas crise) : gaspillage de biens, de ressources, d’énergie. La prise de conscience écologique, " démargina-lisée " dans les années soixante, prudemment concrétisée dès les années septante, a néanmoins permis de développer des stratégies de réduction des gaspillages et de récupération des produits de l’activité humaine, dont les déchets.

La ville (ses habitants, ses services publics, ses entreprises, ses visiteurs) produit une montagne composite de déchets de toute sorte. Cette "montagne" peut ne pas être improductive, à condition qu’un tri systématique soit fait de ce qui la compose, et que la plus grande part possible en soit réutilisée, et non simplement éliminée, puisque l’élimination des déchets produit elle-même des déchets, est source de pollution et consomme une énergie importante pour le plus absurde des usages.

  • 3500 tonnes de déchets au sol sont ramassés chaque année par la voirie municipale. Les décharges sauvages d’objets divers, souvent réutilisables pèsent annuellement 2700 tonnes. Les 11'000 chiens résidant en ville (17'000 dans le canton) y défèquent 2 tonnes de merde par jour, nonobstant caninettes, WC portables et campagnes de sensibilisation de leurs propriétaires (seul un propriétaire de chiens sur quatre nettoient la merde de Medor).

Nous proposons

  • La généralisation non seulement du tri, mais de la récupération et de la réhabilitation des déchets. Toutes les mesures d’incitation de la population à y participer doivent être prises, en collaboration étroite avec les groupements de quartier et les écoles.
  • L’aide de la municipalité aux petites entreprises de récupération des objets encore utilisables.
  • La création d’une décheterie municipale sur un terrain de la Ville. L’organisation périodique de " braderies " des objets réutilisables ramassés par la voirie, et revendus pour un montant symbolique.
  • L’aide de la ville à la récupération, éventuellement la réfection, l’acheminement et la réutilisation dans des pays en construction, en reconstruction ou en situation de pénurie, du matériel et des équipements considérés comme obsolètes ici, mais qui là-bas font encore défaut : ordinateurs, appareils ménagers, équipements audio-visuels, équipements de production, matériel d’enseignement etc…
  • L’information dans leur propre langue des différentes communautés culturelles sur les modalités de tri et de récupération des déchets.
  • L’apposition dans tous les immeubles d’habitation de la ville (en coordination avec les propriétaires et les régies) d’affichettes résumant clairement les modalités de tri et de récupération des déchets.
  • La poursuite et le renforcement des campagnes de sensibilisation à la propreté et l’usage de la possibilité, prévue par la loi, d’amender les propriétaires des chiens qui ne se seront pas souciés d’éliminer les déjections de leur animal.


La liberté de déplacement : une liberté des personnes, pas un droit des machines

Beaucoup reste à faire pour limiter la circulation automobile en ville, et en écarter le trafic de transit. Les opérations menées jusqu’à présent ont certes donné des résultats positifs, mais la ville reste surchargée d’un trafic automobile dont une bonne part pourrait se reporter sur d’autres modes de se déplacer. Or il n’y a pas cinquante manière d’inciter les automobilistes à se déplacer plus rationnellement qu’en voiture -pas cinquante, et pas même deux : il n’y en a qu’une : restreindre l’offre, c’est-à-dire la possibilité même de se déplacer en voiture en ville. A l’inverse, toute augmentation de l’offre, quelque forme qu’elle prenne, se traduit par une augmentation du trafic. Les blocages à surmonter pour mener une politique des transports alternative à l’engorgement auto(im)mobile proviennent essentiel-lement du lobby automobile et de certains commerçants, minoritaires, qui semblent n’avoir rien appris ni rien compris des succès obtenus dans des villes comparables à Genève, ni des avantages que dans ces mêmes villes les commerçants ont retiré de la réalisation de zones piétonnes, et qu’ils en retireront également à Genève. Les prévisions catastrophistes des opposants aux plans de restriction de la circulation (" Circulation 2000, ce sera la mort des commerces ! ") ne se sont évidemment pas réalisées, puisque seuls 25 % des clients des commerces du centre-ville s’y rendaient en voiture, et que ce client sur quatre n’est pas si arrimé à sa bagnole qu’il ne puisse continuer de fréquenter les commerces auxquels il est accoutumé s’ils se retrouvent en zone piétonne. De plus en plus nombreux sont désormais les acteurs économiques du centre-ville, commerçants compris, à admettre l’utilité et les effets positifs de mesures que nombre d’entre eux avaient pourtant combattues, même si quelques uns s’obstinent à se croire encore dans les années ’60 du siècle passé, et à ne pas même envisager que l’on puisse faire l’expérience d’une autre politique que celle du " tout automobile ".

  • En Ville, 80 % de l'énergie acoustique est émise par les véhicules en circulation et la voiture consomme huit fois plus d'espace que l'autobus. Mondialement, les transports sont responsables de 80 % des émissions de gaz carbonique, qui provoquent le réchauffement progressif de la planète.

  • " Circulation 2000 " a permis, pour la première fois depuis les années ’60, de désengorger le centre-ville de la circulation automobile, en en détournant 15'000 véhicules par jour. L’autoroute de contournement, quant à elle, permet chaque jour à plusieurs dizaines de milliers de véhicules d’éviter de traverser la ville.

  • En moyenne, un habitant de Genève se livre chaque jour à trois déplacements, d'un total de 25 kilomètres (et d'une moyenne de 7 kilomètres), pendant au total 75 minutes. De 1994 à 2000, la distance quotidienne parcourue par personne a augmenté de 2 kilomètres et le temps consacré à se déplacer de quinze minutes.

  • Sur l'ensemble du canton de Genève, moins de la moitié des déplacements se font en automobile et un cinquième des ménages n'ont pas de voiture. En Ville de Genève, la proportion des ménages sans voiture atteint le tiers du total des ménages. La bagnole n'est donc pas le moyen de transport "universel" en quoi ses fétichistes la voient.

  • En outre, les personnes qui ont les programmes d'activité les plus complexes, les moins routiniers, utilisent davantage les transports en commun que la moyenne de la population -ce qui contredit l'affirmation de la bagnole comme instrument de "liberté".

  • Enfin, en Ville de Genève, ce sont les moyens de transports "écomobiles" (le vélo, la marche, les transports publics) qui gagnent le plus de terrain. Quant aux "pendulaires", ils utilisent évidemment d'autant plus le bagnole pour se rendre à Genève que l'offre de transports publics sera déficiente : si un quart des déplacements Vaud-Genève se font en train, la part des transports collectifs (publics ou privés) n'est que de 4 % de l'Ain à genève, de 3 % de la Haute-Savoie à Genève. En moyenne, 11 % des "pendulaires" utilisent les transports collectifs.
Source : Enquêtes 2002 sur la mobilité à Genève

  • Le projet récurrent de traversée routière de la rade, qu’elle se fasse en pont ou en tunnel, est un héritage des années soixante, de la frénésie du " tout automobile " -bref, d’une politique dont les hypothèses fondatrices sont aujourd’hui parfaitement obsolètes, et généralement abandonnées après ample mesure de leurs conséquences calamiteuses. Le " grand projet moderne " de la droite genevoise est une vieillerie absurde, auquel nous ne cesserons de nous opposer -en lui opposant une politique des transports et de la circulation fondée sur les avantages comparatifs réels de chaque mode de transport, et visant à une libération de l’espace squatté par l’automobile.
  • Le vélo est sans doute, dans une ville comme Genève, le moyen le plus simple et le plus pratique de se déplacer, la marche mise à part. Ce qui entrave encore son usage tient aux risques que l’on continue à devoir prendre pour emprunter des voies de circulation dominées par l’automobile -ce qui ne justifie d’ailleurs nullement que des cyclistes fassent courir des risques à des piétons (en particulier aux plus fragiles d’entre eux : personnes âgés, personnes à mobilité restreinte, enfants) en utilisant trottoirs ou zones piétonnes comme s’il s’agissait de pistes cyclables.

    La séparation des voies de circulation en fonction des moyens de transports devrait se faire en fonction essentiellement de la vitesse du véhicule (quand véhicule il y a). Genève est une ville concentrée, où les distances sont relativement réduites d’un point à un autre (les deux points les plus éloignés de la ville peuvent être joints à pied en une heure), et que l’on peut assez aisément parcourir en marchant, ce qui est après tout, du moins pour la majorité de la population adulte, le mode de déplacement le plus normal, le plus simple et le plus sain (si les conditions en sont réunies) sur de courtes distances. Mais là encore, comme dans le cas du déplacement à vélo, la confrontation avec la circulation automobile (et les deux roues chassés de la rue par la confrontation avec le trafic automobile) est une entrave au libre déplacement à pied.

    Nous proposons

    • La poursuite des efforts visant à détourner la circulation de transit de la ville, et à concentrer le trafic motorisé sur quelques axes principaux, sur lesquels devraient être également tracées les lignes de trams.
    • La généralisation de la limitation de vitesse à 30 km/heure dans les quartiers d’habitation.
    • La pose, aux abords de toutes les écoles et de tous les lieux fréquentés par des enfants et des personnes à mobilité réduite, d’aménagement rendant matériellement impossible toute vitesse supérieure à 30 km/h.
    • Que l’octroi de droits de superficie pour des parkings soit toujours conditionné à l’adoption de mesures de modération du trafic.
    • La participation active de la Ville au développement des transports publics, notamment par le développement des lignes nocturnes (entre une heure et cinq heures du matin) transversales rive-gauche/rive-droite, du service des Mouettes et des bateaux du Rhône, et la création de dessertes de quartier.
    • La participation de la Ville au projet de relier Genève à sa propre région par le développement d’un réseau ferroviaire régional et local, notamment par le raccordement ferroviaire Cornavin/Eaux-Vives/Annemasse, cette participation devant aussi se traduire par une participation au suivi environnemental et socio-économique du développement d’un tel réseau.
    • La poursuite de l’effort engagé pour l’implantation d’un réseau dense et continu de pistes cyclables, réservées aux vélos (les pistes cyclables ne sont pas plus faites pour les scooters que les trottoirs pour les vélos). Le réseau des pistes cyclables doit permettre de se déplacer d’un point à l’autre de la ville en se confrontant le moins possible à la circulation automobile.
    • La poursuite de la création de zones piétonnes et de parcours piétonniers continus (chaque quartier doit avoir sa zone piétonne, et ces zones doivent être connectées les unes aux autres par des parcours piétonniers). Le prolongement du parcours " au fil du Rhône ", jusqu’au-delà des limites de la commune, en collaboration avec les autres municipalités concernées. La séparation des parcours piétonniers et cyclables (les parcours piétonniers ne sont pas plus faits pour les vélos que les pistes cyclables pour les scooters…).
    • La continuité des voies de communication piétonnes et cyclables, sans rupture aux limites de la commune (le sentier du Rhône, rompu au Pont Butin, doit par exemple être poursuivi).

    Nous nous opposons

    • A toute mesure d’aménagement donnant plus de place aux transports motorisés privés, et à toute voie réservée aux voitures en ville.
    • A toute traversée routière de la rade, en pont ou en tunnel, et à toute participation financière de la Ville à un tel projet.
    • A toute augmentation des tarifs des transports publics.

     

    CONCRÉTISER LE DROIT AU LOGEMENT

    La Ville de Genève est l’un des plus grands propriétaires immobiliers du canton. L’importance de son " parc immobilier " lui donne une capacité considérable d’influence sur la politique du logement dans tout le canton (et, au-delà, dans toute la région), en particulier en période de crise du logement.

    Les dispositifs légaux concernant les logements subventionnés (HLM) ne fonctionnent plus efficacement comme dispositifs de logement social, mais comme dispositifs de logement des classes moyennes, au détriment des couches sociales les plus défavorisées. En trente ans, une politique du logement initialement tournée vers la satisfaction des besoins des " classes populaires " en général a abouti à ce que la majorité des logements subventionnés soient occupés par des locataires dont le niveau de revenu se situe autour ou au-dessus de la moyenne et de la médiane locales. Une redéfinition des moyens de cette politique s’impose donc, pour concrétiser un objectif inchangé : le droit au logement.

    L’évolution sociale concourt à rendre ce changement urgent : les logements disponibles sont souvent affectés de manière gaspilleuse : le nombre de pièces par habitants est élevé à Genève, et des facteurs économiques et sociaux difficilement surmontables dissuadent les personnes âgées et les couples dont les enfants sont partis de quitter des logements devenus trop grand pour eux, alors que des familles aux revenus insuffisants pour leur permettre de se loger sur le marché " libre " doivent se contenter, elles, de logements trop petits. Dans le même temps, des locataires dont les revenus ont, pour une raison ou une autre (dont le chômage), chuté, sont contraints de garder des appartements aux loyers excédant désormais leurs possibilités réelles, faute de pouvoir trouver un nouveau logement, moins cher, sur un marché " hypertendu ". Il est enfin pratiquement impossible à un chômeur (ou une personne endettée, pour quelque raison que ce soit) de se voir accorder un bail.

    • De 1986 à 1990, 1841 logements neufs ont été construits dans le canton, en moyenne annuelle; de 1991 à 1995, cette moyenne a été portée à 1871; depuis, il a été mis sur le marché : 2629 logements neufs en 1996, 2275 en 1997, 1610 en 1998, 1862 en 1999, 1987 en 2000. En % du parc de logement existants, la part des logements neufs a été de 0,9 % de 1986 à 1990 et de 1991 à 1995, et de 1 % en 2000. En % du total des logements construits, la part des logements construits avec l'aide publique (du canton) a été de 31,7 % de 1986 à 1990, de 39,3 % de 1991 à 1995 et de 54 % en 2000.
    • Un projet de loi constitutionnelle, proposé par le Conseiller d’Etat Laurent Moutinot, prévoit de créer un parc de " logements sociaux pérennes " en lieu et place de l’actuel système de logements subventionnés (HBM, HLM, HCM). Ces logements resteraient de manière permanente sous le contrôle de l’Etat, et les loyers seraient fixés en proportion du revenu. Un cinquième des logements locatifs pourraient faire partie de ce parc de logements sociaux. Ce projet mérite un soutien de la Ville.

      Nous proposons

      • Que la Ville de Genève mène une politique active dans le domaine du logement, en acquérant des terrains et des immeubles (sans forcément se limiter au territoire municipal). Ces acquisitions peuvent se faire en ayant recours à l’emprunt, dans la mesure où elles contribuent à la constitution d’un capital immobilier public, lui-même constitutif de la fortune réelle de la Ville. La Ville pourrait par ailleurs acquérir quelques immeubles du fonds de valorisation de la BCG, et les rénover si besoin est.
      • Que se développe la pratique de l’octroi de droits de superficie à des organismes publics, parapublics et associatifs ayant pour objectif de construire des logements sociaux.
      • Que la Ville assure une meilleure affectation du parc immobilier existant (et futur), en évitant les vacances totales ou partielles.
      • Qu’une partie plus importante du parc immobilier de la Ville soit réservée aux groupes sociaux particulièrement défavorisés (chômeurs, personnes et familles à bas revenus, personnes endettées), que leur situation met dans l’impossibilité de trouver un bailleur privé, et auquel la GIM elle-même refuse encore la conclusion d’un bail. Qu’un maximum de souplesse soit la règle face à des situations sociales difficiles. La Ville ne doit par exemple pas refuser d’accorder un logement à une personne au motif qu’elle est au chômage, que ses revenus sont trop bas ou qu’elle est endettée.
      • Que les bureaux et locaux commerciaux inoccupés, propriétés de la ville, soient, quand cela est possible, affectés (ou réaffectés) à l’habitat.
      • Que la location d’arcades ou de locaux commerciaux à des conditions intéressantes soit développée comme instrument de politique économique en direction de petites entreprises nouvelles ou de petits commerçants ou artisans désireux de " se lancer ".
      • Que les entreprises locales du bâtiment (dans la mesure où elles respectent les conventions collectives en vigueur) soient favorisées lors de l’octroi des travaux d’entretien du parc immobilier de la Ville.
      • Que la Ville mise sur l’innovation dans les constructions nouvelles (type d’habitat, économies de moyens, promotion de l’adaptabilité des logements, inventivité architecturale).
      • Que la Ville mène une politique volontariste de mixité sociale et culturelle dans l’attribution de ses logements.
      • Que la Ville soutienne, politiquement et matériellement (en y participant) le projet de transformation de l’ancienne politique HBM/HLM/HCM en une nouvelle politique de logements sociaux pérennes. Dans cette optique, la fondation HLM de la Ville devra être transformée en une Fondation des logements sociaux.
      • Que la Gérance Immobilière municipale soit rattachée au dicastère de l’aménagement, et que s’établisse une collaboration plus étroite entre elle et les services sociaux de la Ville.


      ASSURER LA SÉCURITÉ, POUR ASSURER LES LIBERTÉS

      Le droit à la sécurité est un droit fondamental de la personne, et la défense de ce droit une obligation fondamentale de la collectivité publique -mais une obligation que des mesures de contrainte policière ou judiciaire ne suffisent absolument pas à remplir ; toute politique répressive est au contraire porteuse de risques de dégradation de la situation.

      Ce qui menace au premier chef la sécurité des personnes n’est d’ailleurs pas ce qui constitue le sentiment d’insécurité : l’insécurité ressentie n’est pas fonction des menaces réelles et les groupes sociaux les plus sensibles au sentiment d’insécurité ne sont pas ceux qui sont les plus victimes de l’insécurité réelle. Pour autant, l’insécurité ressentie, même lorsqu’elle n’est pas la conséquence d’une menace réelle, aboutit au même résultat : à une privation de liberté. Il est indifférent qu’une personne n’ose plus sortir seule dans la rue, à certaines heures ou dans certains lieux, sous l’effet d’une crainte objectivement infondée ou à cause d’un risque réel : dans l’un ou l’autre cas, c’est sa liberté de déplacement, son autonomie individuelle, son droit à circuler librement dans la ville, qui sont atteints. Le sentiment d’insécurité et la réalité de l’insécurité n’ont peut-être en commun que de se nourrir l’un et l’autre de la crise sociale, ce qui implique qu’ils soient combattus l’un et l’autre par un travail sur leurs causes sociales, par exemple le chômage, l’exclusion sociale, la précarité -voire l’illégalité- du statut d’un grand nombre d’immigrés, la criminalisation de la toxicomanie...

      Le sentiment d’insécurité se nourrit aussi de petits conflits sans grandes conséquences objectives, mais qui, accumulés, récurrents, finissent par prendre une importance considérable. Les actes de petite délinquance et les " incivilités ", parce qu’ils sont fréquents et visibles, concourent à instaurer une atmosphère de menace permanente, décalée de la réalité mais perçue néanmoins comme une réalité. Les incivilités sont constituées par des actes juridiquement bénins (déprédations, attitudes agressives, irrespectueuses des autres, injures) mais dont les conséquences sociales sont d’autant plus graves qu’elles sont subies par des personnes déjà socialement fragilisées. Les incivilités pourrissent la vie de gens dont la vie est déjà difficile : elles sont une violence de faibles sur de plus faibles encore.

      • Dans les faits, le principal risque d’atteinte à l’intégrité physique est le risque d’accident de la circulation. Dans les faits, le groupe social dont les membres sont les plus menacés d’être victimes de violence physiques sont les jeunes hommes de 18 à 30 ans. Dans les faits, les trois " lieux " sociaux (ou les trois structures sociales) les plus dangereux pour l’individu sont (dans le désordre statistique) le travail, la famille et la route (désolés pour la patrie : précédée par le sport, elle ne vient qu’en cinquième position, grâce aux accidents subis à l’armée…).
        • Selon les statistiques de la police genevoise, les délits et violences commis par des mineurs sont certes en augmentation (+ 13 % d'arrestations entre 2001 et 2002 pour des infractions pénales), mais l'augmentation des délits ne signifie pas une augmentation des délinquants : la Protection de la Jeunesse constate à la fois le fréquence de la récidive (un-e seul-e délinquant commettant plusieurs délits, et étant arrêté-e plusieurs fois), et l'augmentation du nombre des plaintes émanant d'institutions publiques et de parents -ce qui signale d'ailleurs une sorte de transfert de la charge éducative de la famille et de l'école vers la justice, dont ce n'est pas vraiment le rôle.

          En 2002, à Genève, les jeunes de 10 à 18 ans représentaient en moyenne un peu moins d'un tiers (31,3 %) des infractions au Code pénal, un peu plus d'un tiers (35 %) de celles liées à la loi sur les stupéfiants et un dixième de celles concernant le code de la route. Les moins de 19 ans représentent un peu plus du tiers (33,7 %) des arrestations de ressortissants suisses, un peu plus du quart (28,2 %) de celles des étrangers résidants et un peu plus du quart (39,6 %) de celles de requérants d'asile domiciliés hors du canton.

          Globalement, la criminalité et la délinquance ont augmenté de 7,7 % entre 2001 et 2002, selon les statistiques policières (qui concernent les crimes et délits ayant entraîné une intervention de la police, et qui mesurent donc plus l'activité de cette dernière que celle des criminels et délinquants). le 88,1 % des infractions au droit pénal dénombrées concernaient le patrimoine. En 2002, 5607 arrestations ont été effectuées, soit 9,6 % de plus que l'année précédente.

        . Les infractions contre l'autorité publique ont pratiquement doublé, mais elles
        n'ont été que 365 en 2001 (185 en 2001)
        
        . Les vols à la tire ont augmenté d'un tiers (34,1 %), et sont passés de 2258 en 2001
        à 3029 en 2002
        
        . Les crimes et délits contre l'intégrité sexuelle ont augmenté de 40,3 % et sont
        passés de 298 à 418 entre 2001 et 2002
        
        . Les infractions et les crimes contre la vie et l'intégrité corporelle ont augmenté de 
        16,6 % et sont passée de 1325 (dont 6 homicides)  à 1545 (dont 14 homicides) 
        entre 2001 et 2002

          Le nombre de délinquants et criminels Suisse est passé entre 2001 et 2002 de 757 à 821 (+ 8,45 %), celui des étrangers résidants de 564 à 575 (+ 1,95 %), celui des étrangers non résidants de 1452 à 1426 (- 1,79 %), celui des requérants d'asile domiciliés à Genève de 165 à 258 (+ 56,4 %) et celui des requérants d'asile domiciliés dans d'autres cantons (Vaud, essentiellement) de 176 à 402 (+ 128,4 %).

      • La réponse purement répressive à la montée du sentiment d’insécurité est porteuse du risque d’aggraver la réalité de l’insécurité. Au surplus, elle ne fait souvent que déplacer le problème, ou sa face visible : il faut certes " chasser les dealers " de la place des Volontaires ou de Cornavin -mais si cette chasse n’aboutit qu’à les déplacer de quelques centaines de mètres, ou dans un autre quartier, ou de repousser de quelques heures le moment de leur présence, elle n’aura servi qu’à soulager les uns en menaçant les autres. Enfin, la lutte contre la délinquance ne saurait, si l’on tient à ce qu’elle ait quelque efficacité, se réduire à une lutte contre la délinquance étrangère. S’en prendre aux dealers africains en laissant trafiquer les dealers indigènes n’est qu’une forme assez perverse de défense du petit commerce local (par la chasse au faciès). On ne peut attendre que le Département de Justice et Police ait étendu à toute la ville les " périmètres d’exclusion " des étrangers en situation irrégulière, et rétabli l’apartheid, pour mener une politique intégrée de lutte contre l’exclusion et l’insécurité.

      Nous proposons

      • La défense du droit des personnes à la sécurité passe d’abord par une politique de réduction des risques de paupérisation et d’exclusion sociales. Elle implique ensuite une action de la collectivité pour assurer la sécurité physique des personnes, et d’abord des plus fragiles et des plus démunies. Cette politique doit être basée sur le principe du " maillon faible " : les actions à mener dans tous les domaines le sont en fonction des droits, des besoins et des intérêts des catégories les plus fragiles de la population -ce qui leur convient convenant à tous les autres.
      • Cette action doit d’abord porter sur la réduction des risques réels (ceux liés à la circulation, en particulier). La protection contre les risques liés à la circulation ne réside évidemment pas dans la répression, qui intervient par définition lorsque l'accident a déjà eu lieu, c'est-à-dire trop tard, mais dans la prévention. Cette règle vaut d’ailleurs pour tous les risques, toutes les violences, toutes les incivilités : en soi, réprimer est un aveu d’échec.
      • L’action menée pour réduire les risques liés à la circulation ne peut se résumer en des campagnes d’information ou de signalisation (les causes principales d’accidents -la vitesse, l’imprudence, l’alcool ou l’inattention supposent la non-réceptivité ou la faible réceptivité de leurs responsables au discours rationnel), mais dans la pose d’obstacles matériels à la vitesse, voire à la circulation motorisée elle-même. Une attention particulière doit être apportée à la sécurité des enfants face au trafic automobile. Le rôle et le statut des patrouilleuses et patrouilleurs scolaires doit être renforcé. Les aménagements routiers de ralentissement, voire de déplacement, du trafic aux abords des écoles, doivent être systématisés.
      • Le rôle et les compétences respectives des polices municipales et cantonale doivent être clarifiés auprès du public.
      • Les effectifs et la présence des îlotiers doivent être renforcés.
      • Le rôle des concierges doit être revalorisé : à leur responsabilité quant à la propriété des lieux dont ils ont la charge peut s’ajouter un rôle de médiateur et de sécurisation. Une formation adéquate doit leur être dispensée.
      • Les habitants doivent, dans le cadre de la démocratie de quartier, participer aux décisions en matière de prévention de la petite délinquance.
      • Les lieux " insécures " doivent faire l’objet d’un aménagement (notamment d’un éclairage permanent) particulier. Ces lieux doivent être réinvestis : des activités permanentes (marchés de tous genre, par exemple) doivent y être installées, activités pouvant se poursuivre dans la première partie de la nuit, sur un mode convivial, dépourvu de nuisances sonores.

       

      SOUTENIR LE SPORT QUI SE PRATIQUE, PAS CELUI QUI SE MARCHANDE

      Le sport à Genève est d’abord et surtout une pratique d’amateurs qui se livrent à une activité sportive par envie et par jeu, sans autre objectif que le plaisir qu’ils y peuvent prendre. Il s’agit d’un sport populaire, pratiqué à des degrés et des niveaux divers par des dizaines de milliers de personnes, et qui n’a pas grand chose à voir avec les grandes manifestations dites " de prestige " (c’est-à-dire, bien plus trivialement, commerciales) que l’on tente avec plus ou moins de succès de mettre sur pied. C’est en tant qu’il est créateur d’un lien social que le sport mérite d’être soutenu par la collectivité publique, et non pour l’illusion qu’il serait une " thérapeutique " contre quelque mal social, quelque douleur personnelle.

      Le caractère massif de la pratique du sport pose des problèmes de surcharge, d’inadaptation ou de vieillissement des équipements existants (par exemple les piscines, la patinoire des Vernets, le stade des Charmilles). Il incombe aux collectivités locales de remédier à ces problèmes, mais en se concentrant sur les équipements en leurs mains : l’argent public doit aller aux équipements publics.

      Les grandes manifestations sportives, spectaculaires, publicitaires et médiatisées, ne font pas une " politique du sport " mais une politique du spectacle sportif ; autrement dit, elles font du sport une marchandise. D’un point de vue social et culturel (puisque comme pratique de masse, le sport est une pratique culturelle), les manifestations sportives genevoises les plus intéressantes sont celles qui font la plus large place à la participation populaire (Course de l’Escalade, course VTT dans la Vieille ville) : comme la culture le sport est d’abord une pratique sociale (individuelle ou collective), et n’est un spectacle qu’à partir de cette pratique. Pour qu’une manifestation sportive ait un impact local et un effet d’entraînement sur les pratiques individuelles, il faut qu’elle corresponde à une activité sportive à laquelle les amateurs aient la possibilité matérielle de se livrer.

      La pratique individuelle et autonome d’activités sportives est certes, quantitativement, en augmentation constante (surtout si l’on tient compte de la pratique extra-institutionnelle), mais une partie du public qui pourrait être touché, notamment au sein des classes d’âge jeunes postscolaires, ne l’est pas, et refuserait d’ailleurs de s’insérer dans les structures plus ou moins contraignantes des clubs et des associations existantes. Les adolescents refusent par ailleurs de se retrouver dans les mêmes lieux et les mêmes structures que les enfants, et refusent également de voir leurs activités circonscrites à des lieux isolés de l’habitat et de l’animation urbaine. Ils tendent donc à pratiquer les sports (ou, en général, les jeux) auxquels ils s’adonnent dans des espaces voués à d’autres fins, avec les risques de dégradation, les nuisance et les problèmes de sécurité (pour eux-mêmes ou pour les autres) que cela implique.

      Le sport est un domaine dans lequel les communes de l’agglomération genevoise peuvent et doivent collaborer efficacement. Les usagers des installations sportives de la ville proviennent de toute la région, et nombre de sportifs habitant en ville s’entraînent ou se livrent à leur sport hors de la ville.

      • Nous tenons sur le soutien au sport (même si, du vieux mot français desport, qui signifiait amusement on est passé à un synonyme de compétition et de course au profit), le même discours que sur le soutien à toute autre activité sociale, à partir des mêmes principes  : si un équipement (un stade, par exemple) ou une activité (le sport) est d’utilité publique, il peut faire l’objet d’un soutien de la collectivité publique. Mais quel sport est d’utilité publique ? Celui que pratiquent les milliers de membres et de licenciés des clubs de foot amateur, ou celui des usines à fric que sont les grands clubs (dont Servette aspire à être) ? Celui qui se pratique dans de petits équipements décentralisés dans les quartiers, ou celui qui exige de grandes installations centralisées ? Le football, par exemple, se porte bien à Genève, mais grâce aux 5000 joueurs actifs et seniors et aux 8000 juniors, pas grâce aux millions balancés dans un improbable " club phare " (qui n’est que l’un, même s’il est le plus riche, des 66 ou 70 clubs de football du canton), club dont les joueurs, comme tous ceux du " sport d’élite " ont été depuis des années transformés en panneaux publicitaires ambulants, et que les clubs friqués s’échangent comme sous la féodalité les hobereaux leurs serfs. Il y avait en 1999 510 équipes de football à Genève. Le Servette de LNA n’est que l’une de ces 510 équipes... Ainsi, le football auquel nous pensons est-il celui des 13'418 joueurs enregistrés à Genève fin 2000, non celui de la poignée d’investisseurs pour qui " le sport " n’est que le nom d’une marchandise comme une autre. Ni celui de la poignée de lobotomisés fascisants pour qui les matches de football ne sont que l’occasion d’exhaler leurs nausées racistes en poussant des cris de singe dès qu’un joueur noir touche le ballon, ou leurs frustrations homophiles-homophobes en traitant de " pédés " les supporters du camp adverse.

      Nous proposons

      • Que l’action de la Ville se concentre sur les manifestations offrant le plus de possibilités de participation directe des sportifs amateurs de la région, plutôt que sur des manifestation spectaculaires lors desquelles le public est consommateur, mais non acteur participant.
      • Que la politique d’équipement privilégie les équipements de quartier aux équipements centralisés, et calibre les équipements à la taille des besoins. La municipalité ne doit investir dans la construction, la rénovation, voire l’entretien, de grands équipements sportifs que si ceux-ci correspondent à une utilité publique avérée, et à la condition qu’ils soient en mains publiques : l’argent public doit aller aux équipements publics.
      • Que les obstacles financiers (cotisations, tarifs d’utilisation des équipements fixes etc…) à l’accès des jeunes aux activités sportives soient abaissés, et que partout où cela sera concevable, la gratuité soit la règle.
      • Que les structures sportives existantes puissent être davantage utilisées pour des activités parascolaires. Que les salles de gymnastique des écoles soient mises à disposition des jeunes des quartiers, sous la responsabilité des animateurs des maisons de quartier.
      • Que la Ville mette à disposition sans condition ni contrainte des lieux et équipements simples, réalisés sur le domaine public (et non dans des sites " urbains résiduels " ou périphériques) à destination des adolescents et pour la pratique de jeux et de sports de rue sans affiliation à des clubs ou des associations. Ces lieux et ces équipements doivent être polyvalents, non affectés à une pratique particulière mais disponibles pour plusieurs, et situés de telle manière que leur utilisation ne soit pas gênante pour la population du quartier. Le service des sports doit être doté de tous les moyens (en personnel et en matériel) de répondre rapidement aux besoins exprimés de petits équipements légers pour la pratique sportive en plein air ou dans des espaces intérieurs laissés sans affectation précise.
      • Que la concertation intercommunale soit renforcée dans les domaines des tarifs d’utilisation des équipements et de la gestion des terrains. Qu’elle s’étende à l’ensemble de la région, communes vaudoises et françaises comprises.
      • Que soit proposé un " passeport sportif régional " offrant libre accès aux activités et installations sportives de la région.

       

      PROMOUVOIR LA CRÉATION CULTURELLE

      Si par le mot de " culture " on entend toute expression symbolique du rapport des humains les uns avec les autres, avec leur société et avec le monde, ce terme prendra dans un programme politique un sens plus restrictif, désignant les lieux spécifiquement voués à cette expression, les moyens accordés à ces lieux et à ceux qui y œuvrent, et la conception que la collectivité publique se fait de son rôle culturel.

      Il y a ici un paradoxe, constitutif de la politique culturelle elle-même : la création culturelle est aussi, et peut-être surtout, l’expression de l’insatisfaction (pour le moins) de l’individu face à la réalité, ou du refus d’une réalité donnée. Ceux-là même qui veulent décrire le monde ne disent que leur étrangeté au monde. Le mouvement par lequel un individu dit ses relations aux autres, et au monde, est toujours un mouvement qui oppose à la réalité donnée une réalité différente, implicite ou explicite, mais toujours contradictoire, sinon alternative. t&

      Or, s’agissant de " politique culturelle ", nous parlons de l’action d’un pouvoir politique (municipal, en l’occurrence), autrement dit, d’un élément de ce que toute création culturelle conteste, par le fait même qu’elle " créée de la culture ". Dès lors, il n’y a de culture " officielle ", ou de culture soutenue par l’officialité, qui ne recèle quelque contestation de l’officialité. Le temps d’ailleurs se charge de faire le tri : nous ne retenons de la création culturelle passée que ce qu’elle eut et peut encore contenir de subversif, et nous retournons contre la réalité d’aujourd’hui cela même qui fut peut-être dans le passé la commande d’un pouvoir soucieux de susciter sa propre louange (ainsi des opéras baroques).

      La création culturelle est donc toujours inévitablement subversive -et peut le rester même après avoir été réduite à l’état de marchandise, ce qui témoigne bien de sa capacité de résistance. Or c’est cette subversion que l’ " officialité " (la Commune, en l’occurrence) va subventionner. Pour le dire plus clairement : telle que nous la concevons, la politique culturelle consiste à payer des gens pour cracher dans la soupe qu’ils nous servent. Cette conception de la politique culturelle implique l’abandon de toute prétention du politique à dicter le contenu du culturel -et nous combattrons tout tentation de définir une culture officielle, un art officiel, une création officielle.

      Cela étant, il y a bien une hiérarchie culturelle, mais qui ne se mesure pas socialement : les formes les plus " hautes " de la création culturelle ne sont pas par définition celles auxquelles participent les couches " élevées " (matériellement) de la société, mais celles auxquelles on accède par le plus grand effort intellectuel ou sensible. La seule difficulté d’accès à la culture qui se justifie est celle qui est contenue dans la création culturelle, ou dans sa représentation ; hors de cela, aucune ségrégation n’est admissible, et la ségrégation par l’argent moins encore que toute autre. Tout le monde doit pouvoir accéder à tout ce qui se créée ou est représenté -à chacun ensuite de faire l’effort personnel (sensible, intellectuel) que l’œuvre requiert. A l’exigence implicite aux créations culturelles ne doit donc pas s’ajouter l’obstacle financier : toute création culturelle doit pouvoir être socialement d’autant plus accessible à tous qu’elle sera plus exigeante. Ne croyant pas à un accès sans effort à la culture, nous sommes pour cette raison même décidés à réduire les obstacles matériels à cet accès.

      Nous proposons

      • La poursuite de la politique de " démocratisation de la culture " engagée par la Ville (carte " 20 ans/20 francs ", par exemple)
      • L’action culturelle de la collectivité (la politique culturelle de la Commune) doit se concentrer sur ce qui, de la création et de la représentation culturelles, en a le plus besoin, c’est-à-dire ce qui implique la plus haute difficulté d’accès intellectuel ou sensible, et la plus faible espérance de rentabilité marchande. Cette action culturelle doit se décliner sous la double forme du soutien à la création et de la démocratisation de l’accès à sa représentation.
      • Le principe général de gratuité (financière) doit être réaffirmé, maintenu partout où il est déjà appliqué, et appliqué partout où il ne l’est pas et où il pourrait l’être. Ce principe pourrait toutefois être conjugué à l’exigence d’une participation financière accrue des collectivités publiques, et des publics socialement privilégiés, qui profitent actuellement de l’engagement culturel de la Ville sans y prendre la moindre part matérielle alors que les ressources dont ils disposent le leur permettraient. Le principe de la gratuité pourrait se traduire par une gratuité garantie aux résidents de la ville, mais sujette à exceptions pour ceux des communes ne prenant pas leur part du financement de la politique culturelle.

      La politique culturelle, autrement dit : l’action des collectivités publiques dans le(s) domaine(s) culturel(s), s’est longtemps contentée pour l’essentiel d’une politique du patrimoine, c’est-à-dire de la représentation de ce qui a été créé dans un passé plus ou moins lointain. Or une politique culturelle digne de ce nom doit également porter sur la création présente (dite, par pléonasme, " contemporaine ".

      La politique culturelle n’est pas une politique artistique : elle n’a pas à choisir des domaines de la création culturelle ou des formes d’expression et à en exclure d’autres, et moins encore à déterminer des formes et des champs de " culture officielle " ou d’ " art officiel ". Cela étant, si nous ne reconnaissons à aucun pouvoir politique le droit de déterminer les formes et les contenus de la culture, nous considérons que toute politique culturelle se doit de concentrer ses efforts sur cette part de la création et de la représentation culturelles qui a besoin d’un soutien public, parce qu’elle ne représente pas (ou pas encore) une source de profit possible pour le secteur privé, et qu’elle n’est donc pas soutenue par lui.

      La démocratisation de l’accès à la culture, à la formation et à l’expression culturelles et artistiques, passe par la décentralisation de l’équipement culturel dans les quartiers et par l’organisation de manifestations festives, confrontant la création et le patrimoine culturels à un public qui ne se déplace pas, ou rarement, dans les institutions (ni dans les marges) culturelles. La Bâtie-Festival, la Fête de la musique, la Fureur de lire, la Nuit de la science, les Journées du Patrimoine, sont des exemples de cette volonté de " faire sortir la culture du milieu culturel ", des exemples dont on devrait d’ailleurs s’inspirer pour faire des " Fêtes de Genève " autre chose que ce qu’elles sont (exercice sans grand risque, dès lors qu’il serait difficile de faire pire). De même, la politique culturelle d’une ville comme Genève se doit d’apporter tout le soutien possible aux lieux, aux acteurs et aux moments de création et de représentation culturelles des communautés immigrées.

      Nous proposons

      • Le rééquilibrage du budget culturel en faveur de la création, notamment dans les domaines de la danse et du cinéma, et de la culture alternative.
      • L’ouverture à des mouvements culturels émergents.
      • La poursuite, voire le renforcement, du soutien aux événements culturels populaires et festifs, comme la Fête de la musique, la Fureur de lire, la Nuit de la science, les Journées du Patrimoine etc…
      • Le soutien aux lieux, aux associations et aux moments d’expression culturelle des populations immigrées.
      • Le soutien au développement d’activités culturelles dans tous les quartiers, en fonction de leurs spécificités urbanistiques et sociales.
      • La facilitation et le développement des manifestations culturelles, notamment en ce qui concerne les horaires et les autorisations.
      • Le développement d’une politique de communication (affichage, publications, annonces, présence sur l’internet) prenant en compte les limites des moyens des petites institutions et des associations, et les critères de respect de l’environnement.
      • La facilitation du recyclage, de la récupération et de la conservation pour les petites compagnies et les petites institutions des décors, des costumes et des accessoires réalisés par les grandes institutions (notamment le Grand Théâtre).

      Depuis près de cinq siècles, Genève s’est constituée par le fait culturel (religieux, littéraire, philosophique). Cet héritage fait aujourd’hui de Genève la " capitale culturelle " d’une région qui s’étend bien au-delà des frontières cantonales (et à plus forte raison des " frontières " municipales), et un lieu de création et de représentation dont l'importance est totalement disproportionnée de son poids démographique. Pour autant, l’institution reste en deçà de cette réalité, et ne prend pas en compte la dimension régionale de la politique culturelle genevoise.

      La capacité de création culturelle et artistique d’une collectivité (ici, Genève, supra muros) se mesure à l’activité de ses marges. Ce qui se créée hors des institutions culturelles les irrigue et constitue le patrimoine culturel à venir : " c’est par leurs marges que tiennent les pages d’un livre ". Un soutien à la création culturelle implique donc, comme une priorité et non comme un accessoire, un soutien à ce qui est au départ création dans les marges. Il n’y a peut-être par définition de création culturelle que d’avant-garde, décalée de la réalité donnée ; la décadence d’une création culturelle ou d’un mode d’expression, commence là où cesse le conflit entre elle et la société, et où s’accroît sa valeur marchande (pensons, pour ne prendre que cet exemple, au destin du rap). La culture n’aboutit au Marché que par la médiocrité, puisque elle y aboutit par la rentabilité. La collectivité a donc le devoir de soutenir la création culturelle marginale, ce soutien se réduisant au fur et à mesure qu’il produit ses effets, c’est-à-dire au fur et à mesure que cette création sort de la marge.

      Nous proposons

      • L’incitation à la collaboration transfrontalière entre acteurs culturels, par des subventions spécifiques.
      • La création d’une commission culturelle régionale permanente, franco-valdo-genevoise, réunissant les responsables politiques de la culture, pour coordonner l’action culturelle sur un plan régional (y compris du point de vue du financement).
      • Le développement des échanges culturels pour les compagnies de danse, les groupes de musique, les troupes de théâtre etc…, non institutionnels.
      • Le soutien actif de la Ville à la création culturelle émergente (acteurs, producteurs, lieux) par la mise à disposition de locaux, de matériel et de services, et le cas échéant par des subventions.
      • La prise en considération des associations culturelles et des artistes en tant que partenaires de la politique culturelle et partie prenante des débats sur la politique culturelle.
      • Le soutien affirmé aux manifestations culturelles de quartier et aux projets culturels intégrant des contenus et des objectifs sociaux (lutte contre l’isolement, projets intergénérationnels et interculturels, soutien aux plus démunis, lutte contre le racisme, la xénophobie et l’intolérance -y compris l’intolérance religieuse, etc.).

      Toutes collectivités publiques suisses confondues, c’est-à-dire Ville, communes (suburbaines et rurbaines) et canton additionnés, Genève est de tous les cantons celui qui consacre le plus de ressources à la culture (du moins si l’on s’en tient à la définition que donnent des dépenses culturelles des statistiques fédérales qui ne distinguent pas ou distinguent mal éducation, culture et loisirs, investissements et subventions, charges durables et soutiens ponctuels). La statistique fédérale fait de la Ville de Genève la collectivité locale suisse qui consacre la plus grande part de ses ressources budgétaires à la culture et une étude française, portant sur 200 villes européennes en 1989, situait Genève dans le " peloton de tête " du soutien public à la culture.

      La Ville de Genève doit cependant assumer seule l’essentiel de la charge financière de la politique culturelle de la région, et la quasi totalité de la charge financière liée aux grandes institutions culturelles. Le canton a certes un budget culturel, mais il est en grande partie " consommé " par le soutien à quelques institutions -le Conservatoire et le Conservatoire populaire, l’Institut Jacque-Dalcroze, l’OSR- et au total, le canton ne consacre au domaine culturel (hors école) que le tiers de ce qu’y consacre la Ville.

      Le principe général qui domine, par habitude et par héritage bien plus que par réflexion et par choix, la répartition des tâches culturelles, est toujours le suivant : la culture à la Ville, la formation au canton, avec quelques transgressions fondées sur ce paradoxe qui confine politiquement à l’absurde : les institutions les plus " lourdes " à la Ville, les soutiens ponctuels (notamment à la culture de proximité ou d’expérimentation) au canton. Les choses, cependant, pourraient (un peu) bouger, du moins si l’on en croit les intentions exprimées par les responsables de la politique culturelle de la Ville (Alain Vaissade) et du canton (Martine Brunschwig-Graf). Acceptons-en l’augure…

      Que l’essentiel de la vie culturelle genevoise soit pris en charge par la Ville n’est pas en soi absurde, et relève même d’une certaine " fatalité ", puisque cette commune est la commune-centre de la région, celle qui définit la région qui autour d’elle se constitue. Mais qu’il n’y ait aucune participation des autres communes à cette prise en charge, alors que la majorité des habitants de la région habite hors des limites de la Ville, est en revanche parfaitement absurde, et nuisible : cela fragilise les institutions culturelles en les faisant dépendre d’une seule source de financement, cela réduit les capacités de soutien à la culture non-institutionnelle, cela écarte, enfin, les autres communes du pouvoir de décision en matière de politique culturelle. Un financement des institutions culturelles commun à l’ensemble des communes permettrait de conjuguer deux principes-clefs : celui de subsidiarité (puisque les communes resteraient maîtresses du jeu face au canton) et celui d’innovation (puisque des ressources nouvelles seraient dégagées pour le soutien aux formes, aux expressions et aux contenus culturels nouveaux).

      Genève a besoin de rassembler les ressources qu’elle peut consacrer à la culture, et de coordonner les acteurs institutionnels affectant ces ressources. Ce besoin est certes plus évident en période de crise (ou de restrictions) financière(s) qu’en période d’abondance budgétaire, mais il s’agit d’un besoin permanent. L’investissement dans la culture est socialement l’un des plus " rentables " de tous ceux qu’une collectivité publique peut consentir -à condition, évidemment, qu’on ne cherche pas à imposer aux dépenses culturelles publiques les critères de rentabilité de l’investissement privé dans les marchés porteurs de plus-values immédiates.

      Il nous faudra bien sortir de l’invraisemblable enchevêtrement qui caractérise le processus de décision et de subventionnement de la politique culturelle à Genève : un enchevêtrement où les concurrences entre instances, les guerres tribales entre institutions, les égoïsmes locaux, l’inaction des uns compensée par la surcharge des autres, la charge financière des grosses institutions et le coût prévisible des nouveaux investissements, aboutissent non seulement à un gaspillage absurde des ressources, mais aussi et surtout à dresser les intervenants culturels les uns contre les autres dans une chasse aux subventions où chacun est le concurrent de son voisin, où les partisans d’un théâtre sont affrontés à ceux d’un musée, les partisans d’une Maison de la Danse à ceux d’une Maison des Musiques, les créateurs indépendants aux créateurs " institutionnels ", les partisans des premiers aux défenseurs du Grand Théâtre, les partisans des seconds aux défenseurs de l’Usine, les amis du Théâtre de Carouge à la Ville de Genève et finalement les intervenants culturels domiciliés (ou actifs) en Ville à ceux domiciliés (ou actifs) hors des limites politiques de la ville.

      La mise en commun des ressources, en même temps que la création d’une instance subventionnante nouvelle, est la condition de la mise en commun des capacités créatrices des uns et des autres -et donc de l’accroissement de la capacité créatrice de tous. Genève ne peut qu’y gagner, et personne n’a grand-chose à y perdre -à ceci près que cette mise en commun suppose évidemment un partage du pouvoir entre la Ville et le canton, mais surtout entre la Ville et les autres communes, en échange d’un engagement accru de tous les acteurs institutionnels qui se satisfont aujourd'hui que la charge de la politique culturelle genevoise repose essentiellement sur la Ville, laquelle se satisfait non moins aisément d’être à elle seule le " ministère genevois de la Culture " -seul domaine politique, il est vrai, où le principe de subsidiarité est à Genève respecté, et où la Commune s’impose au canton.

      Cela étant, le subventionnement par la collectivité publique des acteurs de la vie culturelle régionale ne doit pas aboutir à l’octroi de rentes de situation, mais doit inciter à la recherche, à l’innovation, à l’émergence de nouvelles formes culturelles, de nouveaux langages et de nouveaux contenus culturels -mais également de nouveaux modes de " gestion de la création culturelle " -et de gestion des institutions culturelles.

      • Avec le Grand Théâtre, Genève dispose d’une institution d’importance régionale, reconnue internationalement pour la qualité de ses productions ; reste que l’insertion d’un tel paquebot dans le tissu culturel local ne se fait pas sans problèmes, et que sa vocation n’est pas clairement définie : on ne peut en effet être à la fois un opéra de prestige et un théâtre municipal de province, on ne peut prétendre être l’un avec le financement de l’autre, et on peine toujours à réaliser l’émulsion des publics de la création contemporaine et des ouvrages du répertoire.
      • Genève est, entre bien d’autres qualités culturelles, une ville de musées -de musées de toutes natures et de toutes importances. Cet atout et cette richesse sont cependant mal utilisés. Les responsables des musées genevois sont certes compétents (les éventuelles exceptions confirmant la règle), mais aucune ligne d’activité claire n’a été définie, qui permettrait à ces " entrepreneurs artistiques " de réaliser leurs projets. Certains musées sont globalement inadaptés aux besoins et aux demandes. Les services pédagogiques des musées (quand ils en disposent) relèvent d’autorités différentes (le Département de l’Instruction publique, la Ville, le musée lui-même…). Une politique cohérente des musées est donc nécessaire. Il en va de même des bibliothèques, qui doivent développer leurs services.
      • Depuis Voltaire (et malgré Rousseau), Genève s’est construite une tradition théâtrale importante, en qualité et en volume de production et de public. Il faut néanmoins mieux définir ce que l’on en attend. La tendance à accueillir de plus en plus de productions " étrangères " (moins coûteuses) pourrait porter préjudice à la création et à l’emploi régionaux, et l’insuffisance du financement de l’art dramatique pourrait conduire, à terme, à la mort (lente, par étouffement) de la production locale.

      Nous proposons

      • Que la Ville et le canton se répartissent rationnellement les compétences et que la Ville, les autres communes et le canton se partagent le financement, de manière permanente et non plus seulement ponctuelle, l’engagement financier permanent du canton et des autres communes s’accompagnant, logiquement, d’une participation accrue au processus de décision, à toutes les étapes de ce processus. Ainsi, dès lors qu’une participation substantielle du canton et des communes au financement du Grand Théâtre sera acquise, place devra être faite au sein du Conseil de Fondation du GT à leurs représentants.
      • Que les différentes communes de la région (Ville comprise, évidemment), élaborent conjointement les projets de création de nouvelles institutions culturelles (Maison de la Danse, par exemple), et travaillent en collaboration étroite sur tout autre projet le justifiant.
      • Que l’allocation de ressources financières par la Ville aux grandes institutions culturelles d’importance cantonale (Grand Théâtre, Comédie, BPU etc…) soit fixée en fonction (en proportion ou en multiple) de l’effort conjoint du canton et des autres communes (la subvention de la Ville au Grand Théâtre, par exemple, pourrait être plafonnée au décuple de celles du canton et des autres communes).
      • La création d’un fonds de financement culturel, commun à la Ville, aux autres communes et au canton, et donc d’une instance politique d’attribution des ressources de ce fonds, instance à laquelle participeraient tous les pouvoirs publics contribuant au fonds. Il s’agit de l’un des moyens possibles, et sans doute de l’un des plus simple, de conjuguer les efforts et de coordonner les décisions -à la condition évidente que ce fonds ne se résume pas en une " fusion comptable " de budgets existants, ou de prélèvements sur ces budgets, mais soit une source nouvelle de financement des grandes institutions culturelles d’importance régionale : le Grand Théâtre, la FAD, le Théâtre de Carouge, les grands musées (y compris celui, à venir, d’ethnographie), pour le moins. Le soutien à la création culturelle et aux acteurs culturels non-institutionnels resteraient de la responsabilité et du domaine des financements par les budgets communaux, le cas échéant par le budget cantonal. Un fonds intercommunal, c’est-à-dire régional, aurait ainsi fort logiquement pour tâche le financement des institutions d’importance régionale, et les budgets municipaux, non moins logiquement, celui de la culture de proximité, de la culture non-institutionnelle, de la culture expérimentale et " alternative " (au sens non-politicien du terme).
      • Le développement des conventions quadriennales de subventionnement, basées sur des contrats de prestations, avec les grandes institutions culturelles, et des contrats de partenariat avec les associations culturelles subventionnées.
      • Le renforcement des efforts pour faire " sortir la culture exposée " des musées (et d’une manière générale, faire sortir la culture de ses lieux de représentation traditionnels) afin d’aller à la rencontre de la population (ou des populations) qui ne s’y confronte(nt) pas spontanément.
      • Le développement des programmes d’activités proposés aux élèves et aux étudiants par les services pédagogiques des musées, la mise en place d’une collaboration plus soutenue avec le DIP.
      • Le développement de la collaboration entre les bibliothèques, et entre la future " Bibliothèque de Genève " (regroupement de la BPU et des bibliothèques universitaires) avec les bibliothèques municipales, y compris celle de Champ-Dollon.
      • L’installation dans toutes les bibliothèques municipales de " cafés internet " et de lieux de formation à l’usage de l’internet (et d’usage de l’internet).
      • Le soutien à la production dramatique locale, et aux institutions permettant son " exportation ".
      • La création d’un office de cautionnement et d’avances sur recettes, dans le cadre du Département de la Culture, et par domaine d’expression (musique, théâtre, arts plastiques, audiovisuels etc…).
      • Le soutien à la construction d’un nouveau théâtre (une " Nouvelle Comédie "), extra muros.

       

      GÉRER AUTREMENT

      L'AMBITION SOUVENT FAIT ACCEPTER LES FONCTIONS LES PLUS BASSES. C'EST AINSI QU'ON GRIMPE DANS LA MÊME POSTURE QUE L'ON RAMPE (Jonathan Swift)

      Le mot " politique " désigne à la fois la gestion des intérêts collectifs et le projet social, c’est-à-dire les règles que l’on propose au jeu social, les droits et les libertés que l’on entend garantir, les devoirs et les contraintes que l’on entend accepter. Un programme politique exprime pour l’essentiel cette deuxième définition de la politique. Reste la première : la manière dont sont conduites et gérées les " affaires publiques " détermine en effet les chances de réalisation d’un projet social, dans un contexte donné. Le contexte dans lequel nous présentons ce programme est un contexte de crises (nous ne risquons rien à l’affirmer, dès lors que " nos sociétés " sont en crises depuis trente ans), ce qui impose une gestion d’autant plus efficace et inventive que nous avons précisément pour projet de changer les règles du jeu, en mettant en œuvre tous les moyens (même légaux) disponibles.

      Une politique de rigueur dans la gestion financière n’est donc pas une fin en soi (la rigueur pour la rigueur relève de la psychorigidité, et il y a sans doute mieux à trouver dans l’héritage calviniste), mais le moyen de financer les engagements collectifs, notamment dans le domaine social, dans la culture et dans les réformes de structure.

      La Commune est une collectivité publique, mais elle n’est pas l’Etat (d’où, d’ailleurs, la persistante méfiance en laquelle l’Etat la tient). N’étant pas l’Etat, elle n’est pas un appareil de contrainte, mais un prestataire de services à la population. Ses services publics ne sont pas des appareils de contrôle social, et ne sont pas de ceux (les services publics centraux) qui ont constitué les capitalismes nationaux. A sa mesure, la Commune réalise d’une certaine manière autant le projet des premiers socialistes (" passer du gouvernement des hommes à l’administration des choses ") que la rhétorique social-libérale  (faire du service public un service au public) ; les services publics municipaux sont, en effet, des services au public. Ils ne sont (pas plus que la rigueur) une fin en soi, et ne sont pas vraiment des appareils d’Etat (même s’ils s’insèrent dans le cadre légal qui structure les appareils d’Etat). Ils peuvent donc réellement être les instruments d’une concrétisation des droits fondamentaux, et de couverture des besoins sociaux. Les moyens (financiers, humains, techniques) mis à leur disposition, les compétences légales qui leur sont accordées, doivent être déterminés en fonction de ce projet, des principes d’universalité et d’égalité d’accès aux prestations publiques et des critères d’utilité des prestations et d’efficacité de leur fourniture : il s’agit de remplir le mieux possible, en respectant les droits des usagers et ceux des travailleurs du secteur public municipal, le rôle de prestataires qu’ont les services publics municipaux. De ce point de vue au moins, l’extrême restriction de l’autonomie municipale à Genève a un avantage : la Commune n’est pas un appareil de contrainte. Certes, cette caractéristique " libertaire " des municipalités genevoise ne tient pas tant à une adhésion aux thèses de Bakounine ou de Luigi Bertoni qu’à la volonté du canton de se réserver le monopole de la capacité de contrainte, mais le fait est là : il est possible, ici et maintenant, de renforcer des services publics " au service du public ", de développer des modalités d’appropriation sociale et de démocratisation radicale des services publics -bref, de prouver par la Commune que " collectivité publique " n’est pas le petit nom euphémique de " collectivisme policier ".

      "Je hais les grands. Je hais leur état, leur dureté, leurs préjugés, leurs petitesses et leurs vices. Et je les haïrais bien davantage si je les méprisais moins." (Jean-Jacques Rousseau)

      Nous proposons

      • La prise en compte de la municipalisation comme alternative à la fois au maintien de services publics dans le cadre de l’Etat central (ou cantonal) et aux privatisations. Toute municipalisation doit s’effectuer dans une absolue transparence, avec garantie des prestations au public et des droits du personnel.
      • Que dans le cadre municipal, des espaces indépendants, autonomes, hors du contrôle des appareils étatiques, soient rendus possibles, où puisse être mise en œuvre une authentique démocratie directe.
      • Que la Commune prenne sa part du soutien aux services publics, à leur démocratisation et à leur socialisation (laquelle peut se traduire en une " désétatisation ".
      • Que soit mis en place un système de budget participatif : les Conseils de quartier et les associations pourront exprimer leur avis sur le projet de budget soumis par le Conseil administratif au Conseil municipal, avant que celui-ci ne se prononce. Ces avis seront transmis aux commissions du Conseil municipal pendant leur travail d’étude et d’élaboration finale du projet de budget.
      • Que la maîtrise des dépenses de la Ville ne se fasse pas au détriment des prestations à la population, mais par une rationalisation du fonctionnement des services publics municipaux, sans péjoration des conditions de travail de leurs employés.
      • Qu’une partie des excédents budgétaires à venir soient utilisés pour constituer des réserves, réaliser des subventions et assurer des amortissements, et que les dispositions légales l’empêchant soient abrogées.
      • Que dans les appels d’offres publics pour toute attribution de marchés, il soit fait l’usage socialement et économiquement le plus inventif possible de la possibilité d’inclure dans les critères de détermination de " l’offre économiquement la plus avantageuse " les aspects liés au soutien du tissu économique local, à la défense des droits des travailleurs, à la protection de l’environnement et à la solidarité internationale.
      • Que les horaires d’ouverture au public des services publics municipaux soient élargis (prolongation en fin d’après-midi et en début de soirée, ouverture le samedi, ouverture tous les jours -féries comprises- des bibliothèques municipales). La charge de travail nécessitée par cet élargissement doit être compensée par une réduction du temps de travail hebdomadaire, et par l’embauche de personnel supplémentaire.

      La fonction publique est depuis des années un bouc-émissaire commode pour des forces politiques qui, n’ayant aucun projet crédible de gestion (ainsi que l’ont prouvées les diverses affaires laissées derrière lui par le précédent gouvernement cantonal, et son prédécesseur " monocolore ", de la Banque Cantonale aux Offices des Poursuites) tentent de faire accroire qu’il suffit de réduire la masse salariale en supprimant des postes de travail, en plafonnant les salaires et en péjorant les conditions de travail pour " rétablir l’équilibre des finances publiques " sinon améliorer le fonctionnement de l’Etat. Or les tâches assumées par la fonction publique sont indispensables, à quelques exceptions près (qui sont précisément celles auxquelles la droite tient le plus : l’armée, par exemple) ; ces tâches consistent en la concrétisation des droits fondamentaux proclamés par ailleurs ; la fonction publique assume bien ces tâches, dans des conditions souvent difficiles ; et le secteur privé ne les assumerait pas mieux, ainsi que l’ont démontré les effets des privatisations de services publics opérées dans certains pays d’Europe (voyez les chemins de fer britanniques…), et surtout ne pourrait les assumer qu’au prix d’un report de charge sur les usagers, puisque son critère d’efficacité n’est ni l’utilité de la prestation fournie, ni la qualité de sa fourniture, mais le profit qu’il peut en tirer : une poste à Saint-Jean, cela n’est pas " rentable " : que les petits vieux de Saint-Jean se débrouillent, ils n’ont qu’à se mettre à l’internet…

      Cela dit, le travail politique de rationalisation et de démocratisation du fonctionnement de l’administration et des services publics est essentiel. Il est la condition de leur légitimité, et du soutien que les citoyens peuvent apporter à la résistance aux privatisations et à la mercantilisation du " service au public ". Ce travail a commencé, il doit se poursuivre, et sans doute, lui aussi, se radicaliser.

      • L’administration et la fonction publique municipales ne sauraient être considérées comme hors d’atteinte de toute réforme (quant aux révolutionnaires, s’il en reste, ils devraient prendre garde à ne pas se muer en statues de sel conservatrices). Au sein de l’administration et de la fonction publique municipales perdure une chefferie excessive, source de rigidité, de lenteur et de conformisme dans le fonctionnement des services publics. Et nous ne sommes pas convaincus que le taux d’encadrement des armées sud-américaines soit un bon modèle pour l’administration et les services publics…
      • Des dirigeants d’institutions publiques autonomes financées par la Commune peuvent encore être engagés, selon des contrats de droit privé, à des conditions salariales excédant la limite maximale prévue par l’échelle des traitements de la Ville. La même pratique est d’ailleurs fréquente au niveau cantonal .
      • Le " feuilleton " du Grand Casino a illustré la contradiction possible entre la fonction d’élu dans un exécutif municipal et celle de président d’une entreprise autonome (en l’occurrence, une SA). La présence de représentants de la Ville, Conseillers administratifs, Conseillers municipaux ou représentants du Conseil municipal, dans les institutions et les entreprises financées par la Ville, ou dont le champ d’activité correspond à un intérêt public, est certes légitime, et souvent indispensable. Pour autant, il n’est pas souhaitable que ces représentants assument des fonctions exécutives dans les instances de direction de ces institutions ou entreprises.

      Nous proposons

      • Que la Ville reconnaisse, en terme d’évaluation des fonctions, et donc de classification et de salaires, les années consacrées dans le cadre familial à l’éducation des enfants comme des années de travail effectif.
      • Une " dé-hiérarchisation " de l’administration municipale à partir d’un travail d’enquête comprenant la consultation des employés municipaux (mais pas de leurs chefs, chefs-adjoints, sous-chefs et chefs putatifs).
      • Qu’il ne soit plus possible à un(e) représentant(e) du Conseil administratif de remplir des fonctions de présidence d’une entreprise publique ou privée.
      • L’introduction d’un congé paternité et d’un droit de garde des enfants malades pour les salariés de la fonction publique municipale, et des institutions autonomes financées par la Ville

      • L’attribution des subventions aux associations se fait encore le plus souvent " association par association " et non de manière regroupée. Cette méthode a le double désavantage de privilégier les associations les plus anciennes et de ratifier la concurrence entre associations travaillant de manière comparable dans les mêmes domaines, au détriment parfois des intérêts des usagers.

      Nous proposons

      • Le développement de la pratique des contrats de prestation entre la Ville et les grandes institutions autonomes subventionnées par la Ville, et des contrats de partenariat avec les associations régulièrement subventionnées. Les modalités de collaboration avec des établissements publics ou avec des associations ou fondations privées, doivent être différenciées selon les champs d’activité, selon les partenaires, et selon le volume des subventions. Les contrats de prestations ne devraient être passés qu’avec des entreprises publiques autonomes, des entreprises majoritairement détenues par la Ville ou des fondations de droit public, et devraient être passés avec tout partenaire public autonome recevant une subvention importante. Les allocations annuelles de subventions prévues par le contrat de prestations doivent se faire dans le cadre du débat budgétaire normal. Il ne peut donc y avoir de garantie " scellée et non négociable " portant sur le montant annuel des subventions. Dans tous les cas, les tranches annuelles de subventions restent à approuver annuellement par le Conseil municipal, la possibilité restant réservée d’une compensation d’une année sur l’autre. Les contrats de prestation doivent être ratifiés par le Conseil municipal.
      • Avec les associations et les fondations de droit privé, il convient de passer des contrats de partenariat, plus souples et moins contraignants pour les deux partenaires, et n’impliquant pas une garantie de subvention. Les contrats de partenariat peuvent être négociés par le seul département le plus directement concerné, mais doivent être signés par le Conseil administratif. Les contrats de partenariat devraient reposer sur une charte de partenariat exprimant les grandes lignes, les modalités générales et les conditions cadres de la collaboration régulière entre les collectivités publiques d’une part, les associations et fondations de droit privé d’autre part. L’adhésion à cette charte devrait être la condition nécessaire à la conclusion par une association ou une fondation d’un contrat de partenariat avec une collectivité publique. Des associations et fondations pourraient cependant adhérer à la charte sans pour autant passer un contrat de partenariat.

      Toute fiscalité a mauvaise presse : il n’y a pas d’impôt populaire, sinon celui qui n’est payé que par les autres. Il ne faut cependant pas désespérer de la capacité de compréhension (plus simplement dit : de l’intelligence) des contribuables : la réaction " antifiscale " est plus une critique de l’usage que font les pouvoirs publics des impôts qu’ils perçoivent qu’un refus de l’impôt " en soi ". Un travail d’information et d’explication du rôle et de la nature de la fiscalité est donc nécessaire, afin de faire comprendre le mécanisme de redistribution des richesses à partir de l’impôt direct, et de faire connaître l’usage que la collectivité fait des ressources qu’elle obtient.

      La dépense publique est toujours un investissement. Reste à en convaincre les contribuables, et on n’y parviendra que si l’affectation des ressources de la collectivité est conforme aux besoins de celle-ci, et évite les gaspillages improductifs -s’il en est de productifs…

      Nous proposons

      • L'augmentation de deux ou trois centimes additionnels de l’impôt municipal direct, afin de financer l'accroissement des dépenses sociales, le soutien à l’activité économique locale et le soutien à la création culturelle non-institutionnelle.
      • Le soutien à une réforme de la fiscalité cantonale (à partir de laquelle est fixée la fiscalité municipale) impliquant un déplafonnement de la fiscalité directe et un allégement de la charge fiscale pour les plus bas revenus.
      • Une réforme de la taxe professionnelle communale, permettant des réductions, voire des exonérations, pour les entreprises locales pratiquant une politique d’embauche positive, diminuant le temps de travail et augmentant les bas salaires.


      LA VILLE DONT LE PAYS EST LE MONDE

      "Dans la naissance du mouvement socialiste genevois (et, plus généralement, du mouvement socialiste suisse), la part des réfigués et des immigrés fut considérable. Les premières organisations réellement socialistes à Genève furent créées par des révolutionnaires russes, allemands, français, italiens; animées par des militants venus de toute l'Europe, puis du reste du monde. La solidarité internationale a été le creuset du socialisme genevois et suisse; elle reste aujourd'hui une préoccupation constante; elle le sera encore à l'avenir. cette solidarité internationale est enfin la condition de la résolution pacifique des conflits et du maintien de la paix. C'est là un engagement d'importance pour la social-démocratie" (Micheline Calmy-Rey, en 1989)


      Genève n’existe que par son rapport privilégié au monde : cette cité s’est constituée comme un carrefour, cette commune comme un lieu d’échange, cette République comme le centre de débats d’idées, puis de négociations internationales. Ce qui a constitué Genève reste sa raison d’être, et son avenir : l’approfondissement, l’élargissement et la perfection du rôle que lui lègue son histoire, de ville dont le pays est le monde. Encore faut-il ne pas oublier que le monde réel n’est pas celui qui parade dans les conférences internationales, les forums économiques mondiaux et les conseils d’administrations des multinationales. La géographie peut être trompeuse : nous devons être plus proches de Porto Alegre que de Davos. Le rapport de Genève au monde doit se concrétiser dans un rapport plus étroit, et plus égalitaire, avec les marges et les périphéries du monde riche. Genève n'a pas besoin de s’ouvrir au monde, mais aux mondes.

      Cette ouverture aux mondes correspond déjà à la réalité de la Genève pluriculturelle (un tiers de la population étrangère de Genève, laquelle représente près de la moitié de la population tout court de la Ville, est ressortissante de pays non membres de l’Union européenne, et la majorité des ressortissants de pays de l’Union européenne le sont de pays du sud de l’Europe -France non comprise). Nous savons que cette réalité peut poser problèmes -mais nous sommes de celles et ceux pour qui ces problèmes sont bien moins graves que ceux que subiraient une ville fermée aux autres cultures, une société repliée sur elle-même, une communauté refusant de confronter ses valeurs à celles des autres. Les conflits qui secouent le monde suscitent toujours dans un pays qui en est plutôt préservé des réactions d’intolérance, des discours d’amalgame, des expressions de rejet de l’ " autre ". Nous condamnons ces réactions, nous récusons ces discours, nous refusons ces expressions. Nous ignorerons ce rejet.

      • Tout récemment encore, le choix du Conseil administratif d’autoriser l’ouverture de " carrés " musulmans et juifs dans les cimetières de la ville, a provoqué le lancement d’une véritable croisade purificatrice, lancée au nom de la défense de la laïcité du XIXème siècle, et se traduisant par la volonté de continuer à imposer le respect des normes funéraires chrétiennes aux fidèles d’autres religions. Nous n’avons pas de leçons de laïcité à recevoir de ceux qui transforment la laïcité en objet de musée. Notre combat est un combat contre l’intégrisme -contre tous les intégrismes, parce qu’il est un combat pour le pluralisme et les libertés. Et donc pour la laïcité. Or il n’y a pas plus sûr moyen de tuer la laïcité que la laisser se scléroser, et ne pas vouloir admettre que sa pratique ne peut plus être la même aujourd’hui qu’il y a un siècle : la laïcité doit se décliner " ici et maintenant ", dans une société où la moitié de la population ne se définit plus comme " chrétienne pratiquante " (toutes confessions chrétiennes confondues), et non plus dans société où les " non-chrétiens " ne représentaient que 5 % de la population. Cela étant, il ne faut pas se faire d’illusion : quelque décision que l’on prenne sur des sujets aussi sensibles que les pratiques funéraires (ou les signes vestimentaires religieux), on se retrouvera être la cible d’intégristes. Entre un intégrisme religieux fondé sur des prescriptions du premier siècle de l'Islam et un intégrisme pseudo-laïc fondé sur des règlements du XIXème siècle chrétien, nous n’avons pas à choisir. Entre l’Hégire et le Kulturkampf, nous choisissons le respect de la liberté et de la dignité des personnes. Cela s’appelle : le pluralisme. Et c’est la condition de la laïcité.

      Nous proposons

      • Que Genève abandonne son attitude de refus arrogant de tout jumelage avec d’autres villes, et développe des liens de jumelage avec des villes symboles et victimes des désordres du monde. Ces liens de jumelage doivent pouvoir se concrétiser matériellement par une participation de la Ville de Genève à des opérations de rétablissement des services publics essentiels, là où ils ont été anéantis.
      • Qu’une " citoyenneté d’honneur " de Genève soit accordée à celles et ceux qui sont menacés parce qu’ils combattent pour les droits fondamentaux de la personne, et les libertés des peuples.
      • Que Genève puisse parrainer des prisonniers d’opinion.
      • Que la Ville signe la Charte européenne des droits de l’Homme dans la ville.
      • Que la Ville soutienne matériellement l’implantation à Genève de représentations des pays et des organisations non gouvernementales, financièrement les plus démunis.
      • Que la Ville s’engage dans la défense du droit d’asile, et pour la régularisation des sans-papiers.
      • Que la Ville s’engage pour le droit de vote et d’éligibilité des étrangers établis, au plan communal en tous cas et si possible aux plans cantonal et fédéral.



      173 propositions socialistes

      EMANCIPER LA VILLE, CONSTRUIRE LA RÉGION

      L’émancipation de la Ville

      • 1. Défense du droit d’initiative cantonale des communes
      • 2. Possibilité de donner plus de compétences aux communes qui ont plus de charges.
      • 3. Réforme du mode de constitution de l’Association des Communes Genevoises en y renforçant le poids des grandes communes et de la Ville. Faute d’une telle réforme, nous demanderons que la Ville quitte l’ACG.

      La Communauté urbaine

      • 4. Instauration progressive d’une Communauté urbaine genevoise, réunissant les communes genevoises, vaudoises et françaises de l’agglomération urbaine.
      • 5. Développement des possibilités de formation de groupements intercommunaux.
      • 6. Développement des possibilités de conclure des contrats d’agglomération " à géométrie variable " selon leur objet, entre la Ville et les autres communes de l’agglomération, pour des objectifs précis.
      • 7. Réunion à intervalles réguliers, de Conseils municipaux communs à la Ville et aux autres (ou à d’autres) communes de l’agglomération, avec un ordre du jour et une capacité de décision.

      La municipalisation

      • 8. Prise en compte de la municipalisation (le cas échéant dans le cadre d’une communauté urbaine et par le moyen de groupements intercommunaux) comme une alternative à toute privatisation.

      DÉMOCRATISER LA DÉMOCRATIE

      • 9. Développement par la Municipalité de l’information à la population, notamment lors des scrutins municipaux, par tous les moyens disponibles.
      • 10. Ouverture de " cafés internet municipaux ", lieux de formation gratuite à l’usage de l’internet, et lieux d’usage de l’internet.

      J’y vis, j’y parle, j’y agis, j’y vote

      • 11. Le droit de vote et d’éligibilité, aux plans municipal et cantonal, des étrangers nés et rnésidant à Genève, et des étrangers y résidant depuis au moins 5 ans.
      • 12. La consultation systématique des associations de l’immigration sur tous les projets ayant un impact sur les conditions de vie des immigrés et sur leurs relations avec la population genevoise.
      • 13. Le soutien de la Municipalité aux efforts d’organisation autonome et associative de l’immigration nouvelle, en particulier de celle en provenance des pays et régions en crise, et cela en évitant la constitution de ghettos communautaristes, et en collaborant avec le Bureau de l’Intégration.
      • 14. La poursuite du soutien aux manifestations organisées pour rapprocher les différentes populations résidantes, immigrées et indigènes.
      • 15. Le soutien à la régularisation des sans-papiers.
      • 16. La création d’une Commission permanente du Conseil municipal avec pour champ de travail le développement de la participation des immigrés à la vie sociale et culturelle des quartiers et de la Ville.
      • 17. L’institution de Conseils Généraux de quartier, regroupant toute la population civilement majeure d’un quartier sans distinction de nationalité.
      • 18. Le droit pour les habitants de déposer des motions populaires au Conseil municipal.
      • 19. Le soutien aux associations non encore solidement structurées, ce soutien pouvant prendre d’autres formes que celui de la subvention (mise à disposition de locaux, de matériel, de services, reconnaissance politique etc…).
      • 20. Le soutien à la constitution de réseaux d’associations et/ou de personnes, actives sur un même territoire, auprès d’une même population ou sur une même thématique. Le soutien aux réseaux existants, et à leur coordination (la " mise en réseau des réseaux ").

      EXCLURE L’EXCLUSION

      • 21. Atteindre par une information claire toutes les personnes qui pourraient bénéficier des prestations sociales municipales ou cantonales, voire fédérales, en usant notamment du tissu associatif et en faisant diffuser l’information nécessaire par les associations présentes dans les quartiers et les différents groupes sociaux. Dans un premier temps, un " guide social " devra être envoyé et distribué à tous les habitants de la ville.
      • 22. Créer (dans le cadre de la communauté urbaine lorsqu’elle aura été créée, ou, avant cela, par concordat intercommunal) un fonds intercommunal de lutte contre l’exclusion, commun à la Ville, aux autres communes et au canton, et donc d’une instance politique d’attribution des ressources de ce fonds, instance à laquelle participeraient tous les pouvoirs publics contribuant au fonds. Ce fonds serait alimenté par toutes les communes du canton.
      • 23. Renforcer (en effectifs, en horaires, en compétences) la présence d’une " police de proximité " à partir de l’actuelle police municipale.
      • 24. Désigner des médiateurs intervenant à la demande de particuliers, de services publics ou sur mandat de la Ville, pour régler les " petits conflits " ne nécessitant pas l’intervention de la justice.

      Lutter contre la pauvreté, pas contre les pauvres

      • 25. Assouplir les conditions d’octroi des aides ponctuelles .
      • 26. Généraliser autant que possible la gratuité des prestations municipales.
      • 27. Développer des expériences et des actions, à Genève et ailleurs, dans le cadre de l’Association mondiale des villes contre la pauvreté

      Lutter contre les toxicomanies, pas contre les toxicomanes

      • 28. Les priorités de l’action publique doivent rester la prévention, l’assistance aux toxicomanes, la réduction des risques, avec comme but : à court terme celui de sauver des vies, à moyen terme de rétablir les liens sociaux des toxicomanes afin de les mettre en situation de s’émanciper de leur drogue.
      • 29. Toutes les possibilités de faire jouer à la police municipale un rôle actif en matière de prévention des risques et de dissuasion de la constitution de " scènes ouvertes " doivent être étudiées, et mises en œuvre.
      • 30. La Ville doit prendre toute sa part de l’assistance médicale et sociale aux toxicomanes, notamment en participant à la diversification des lieux d’accueil, ainsi qu’à la prévention du sida par l’information, la distribution de préservatifs et l’échange de seringues.
      • 31. La Ville doit prendre toute sa part de la lutte contre l’alcoolisme, le tabagisme et les autres formes de toxicomanies " légales ", dont la toxicodépendance aux anxiolytiques.

      L’accueil de la petite enfance

      • 32. Les lieux d’accueil de la petite enfance doivent être municipalisés.
      • 33. Un programme d’ouverture de crèches et jardins d’enfants très décentralisés, jusqu’à l’échelle de l’îlot, doit être mis en œuvre.
      • 34. Une coordination intercommunale doit s’établir pour les lieux d’accueil situés, ou à créer, dans les quartiers " à cheval " sur plusieurs communes.
      • 35. La gratuité des crèches et jardins d’enfants doit être instaurée pour toutes les familles à bas revenu.

      Autour de l’école

      • 36. Les écoles et les structures parascolaires à construire devront l’être sans réduire l’espace public à disposition des habitants des quartiers concernés.
      • 37. Il faut ouvrir dans chaque quartier des lieu(x) spécifique(s) pour les préadolescents. Les écoles devraient offrir des espaces ouverts sur l’extérieur, capables d’accueillir des jeunes après les classes.
      • 38. Des lieux de rencontres " inter-générationnels " doivent être ouverts.
      • 39. Un soutien accru doit être apporté aux petites associations de quartier actives auprès des jeunes, dans le respect de l’autonomie de ces associations.

      L’âge venant

      • 40. L’action de la collectivité doit consister à permettre autant que possible aux personnes âgées qui le souhaitent de continuer à vivre chez elles, à maintenir leurs liens sociaux et personnels et à leur donner la possibilité de participer à la vie de leur quartier.
      • 41. Dans chaque quartier doivent être mis à disposition des logements adaptés aux besoins et aux moyens des personnes âgées, avec l’encadrement médical et social nécessaire. Un système de " familles d’accueil " pour personnes âgées seules, ne nécessitant pas un accompagnement social et médical permanent, doit être mis en place.
      • 42. L’offre de places dans les établissements spécialisés, pour les personnes les plus âgées, les plus atteintes dans leur santé et les plus restreintes dans leur autonomie, doit être développée. Cela implique la création de nouveaux établissements spécifiques de qualité, en ville.

      La solidarité par l’association

      • 43. La représentation des usagers et des salariés doit être assurée dans les instances de direction des principaux organismes privés (associations ou fondations) à qui la Ville accorde une subvention régulière importante.
      • 44. Les loyers des locaux pour associations, loués à la Ville, doivent être baissés.

      Une économie au service de la cité, et non une cité au service des banquiers privés

      • 45. La Ville doit contribuer à créer des conditions favorables au maintien d’un maillage économique local, notamment en soutenant dans la mesure de ses moyens les petits commerçants et artisans et les petites et moyennes entreprises innovantes, dans des secteurs non sur-concurrentiels, et en respectant des critères qualitatifs (utilité sociale des produits et des services proposés, innovation, conditions de travail et de salaire).
      • 46. La Banque Cantonale genevoise doit jouer un rôle actif dans le soutien à la création d’entreprises nouvelles et au maintien des entreprises existantes, y compris de celles qui sont en difficulté, pour autant qu’elles jouent un rôle positif dans l’économie locale.

      Partager le travail

      • 47. La collectivité publique municipale doit créer des emplois utiles à la population, correspondant à des tâches d’intérêt collectif, au service et au bénéfice des habitants, afin de maintenir et de développer les prestations de la Ville à la population.
      • 48. Il faut renforcer la collaboration de la Ville avec le service cantonal de l’emploi et développer des projets spécifiques pour chômeurs en fin de droits, offrant un emploi durable (quoique de durée déterminée) pouvant déboucher sur un engagement régulier.
      • 49. Des congés-formation sous la forme d’un échange de poste de travail entre un employé et un demandeur d’emploi pendant le temps consacré par le premier à parfaire sa formation, doivent être rendus possibles.
      • 50. La réduction du temps de travail dans l’administration municipale, les services publics municipaux et les institutions les plus lourdement subventionnées par la Ville doit reprendre. Cette réduction du temps de travail ne doit pas se traduire par une réduction des plus bas salaires. L’économie budgétaire réalisée sur la masse salariale devra être affectée à la création de postes de travail supplémentaires et au financement des actions spécifiques de formation et d’engagement de chômeuses et de chômeurs.
      • 51. L’offre de postes stables à temps partiel doit être accrue. Il faut encourager au partage volontaire d’un poste de travail à plein temps en plusieurs postes de travail à temps partiel.
      • 52. Il convient de favoriser les entreprises où le temps de travail est inférieur à 40 heures par semaine (pour un temps plein) lors du choix des mandataires et fournisseurs de la Ville.
      • 53. La possibilité d’une remise partielle de la taxe professionnelle aux entreprises opérant une réduction substantielle du temps de travail et créant des emplois doit être étudiée.
      • 54. Les années passées par les parents à assumer les charges familiales et éducatives doivent être prises en compte comme des années de travail lors du retour à l’emploi, ou de la prise d’emploi.

      MAÎTRISER LE CADRE DE VIE

      • 55. L’ " Agenda 21 " pour le développement durable doit être mis en œuvre.
      • 56. Une politique d’équilibre et de pluralisme dans l’affectation de l’espace urbain doit être poursuivie, maintenant l’habitat en Ville, et maintenant la mixité des activités (y compris d’activités industrielles).
      • 57. La Ville et les grandes communes doivent adopter une politique d’agglomération : les choix urbanistiques et les politiques d’aménagement doivent penser la ville physique au-delà de la Ville politique.
      • 58. Les plans d’utilisation des sols (PUS) doivent être renforcés, dans l’optique d’une mixité globale (de l’agglomération et de la commune), locale (des quartiers), urbanistique (de l’affectation de l’espace) et sociale (du type de populations résidentes et usagères).
      • 59. Il faut se réserver la possibilité d’implanter des activités non-industrielles dans des zones industrielles non utilisées, ainsi que la possibilité de transformer ces zones en espaces verts.
      • 60. L’étude sérieuse, et en étroite collaboration dès le départ avec les autres communes concernées, doit être entreprise de projets d’implantation d’institutions culturelles hors de " l’hypercentre  culturel " de la Ville et dans des quartiers sans lieu culturel permanent d’importance (au moins) cantonale.

      Un urbanisme par et pour les urbains

      • 61. Le maintien des espaces verts existant et leur protection des atteintes du trafic automobile doivent être assurés ; la création de nouveaux espaces verts dans les quartiers qui en manquent, et le long des grandes voies urbaines doit être engagée. Ces nouveaux espaces verts pourront être créés sur des espaces actuellement affectés à la circulation ou au stationnement automobiles.
      • 62. En périphérie de la ville, une densification négociée avec les habitants, reste possible pour des projets de qualité, notamment dans les zones villas.
      • 63. Des éléments de paysage de qualité doivent être introduits pour requalifier des lieux parfois négligés, à commencer par la Plaine de Plainpalais.
      • 64. Le projet " Au fil du Rhône " doit être poursuivi et achevé.
      • 65. La place de Neuve, la place Bel-Air et les ronds-points de Rive et de la Jonction doivent être redéfinis et aménagés comme de véritables places, et non plus des carrefours routiers.
      • 66. Une mise en cohérence de l’ensemble du mobilier urbain doit être effectuée.
      • 67. Les quais doivent être réhabilités.
      • 68. Nous refuserons tout projet de parking en surface : l’espace urbain " ouvert ", à ciel libre, doit être utilisé pour le logement, l’agrément ou des activités économiques socialement utiles, et non polluantes.
      • 69. Nous combattrons toute atteinte irrémédiable au patrimoine architectural et urbanistique de Genève. Pour autant, il est possible de (re)donner un espace à la créativité architecturale et urbanistique, par l’organisation de concours.

      Le critère et la mesure : la qualité de la vie

      • 70. Lors des soumissions et des commandes passées par la Ville, les critères environnementaux doivent être posés comme des critères de sélection entre les différentes offres ; le choix de produits et de matériaux respectueux de l’environnement, le choix de méthodes de travail et de technologies les moins perturbantes possibles pour les habitants, doit être systématisé, pour tous les services municipaux et organismes dépendant de la municipalité, ou directement financés par elle.
      • 71. Une action planifiée de réduction des nuisances sonores, par la réduction de leur production et la réduction de leur perception, doit être engagée.
      • 72. La réduction de la production du bruit passe essentiellement par une réduction de la circulation motorisée dans les quartiers d’habitation. Il s’agit également de réduire le bruit produit par les engins et les méthodes de travail des services municipaux et des entreprises mandatées par la Ville.
      • 73. La réduction de la perception du bruit consiste essentiellement en un développement de l’isolation phonique des bâtiments, qu’il s’agisse des bâtiments d’habitation ou des lieux de travail. La Ville doit poursuivre, accroître et généraliser son engagement dans ce domaine, sur tout son parc immobilier.
      • 74. Il convient d’assurer la réduction de la pollution de l’air due au trafic automobile, par une politique des transports privilégiant les transports publics (et d’entre eux, les transports publics à propulsion électrique) et favorisant les modes de déplacement non motorisés. Le parc automobile de la ville doit être constitué de véhicules électriques. Les nouvelles constructions financées par la ville doivent être systématiquement équipées de capteurs solaires, ainsi que les anciennes constructions qui s’y prêtent. Des réverbères solaires doivent être installés en lieu et place des réverbères traditionnels, partout où cela sera possible.
      • 75. Il convient également d’assurer la réduction de la pollution de l’air due aux installations de chauffage par le remplacement, partout où cela est possible, des chauffages centraux fonctionnant au fuel par des modes de chauffage moins polluants, par une réduction du chauffage lui-même et par la généralisation dans le parc immobilier de la ville des systèmes et des décomptes individuels de chauffage -qui incitent aux économies dans ce domaine. L’amélioration de l’isolation thermique de tous les bâtiments de la ville doit être effectuée.
      • 76. Les parcs doivent être absolument préservés de toute circulation motorisée et de tout équipement non indispensable à leur usage par la population.
      • 77. Des " prairies sèches " doivent se substituer aux espaces engazonnés, hors des espaces botaniquement affectés.
      • 78. Nous proposons que l’on remettre à ciel ouvert les ruisseaux (les nants) canalisés en sous-sol.
      • 79. Il faut procéder à la généralisation non seulement du tri, mais de la récupération et de la réutilisation des déchets. Toutes les mesures d’incitation de la population à y participer doivent être prises, en collaboration étroite avec les groupements de quartier et les écoles.
      • 80. L’aide de la municipalité doit être apportée aux petites entreprises de récupération des objets encore utilisables.
      • 81. Une décheterie doit être créée sur un terrain de la Ville. Nous proposons l’organisation périodique de " braderies " des objets réutilisables ramassés par la voirie, et revendus pour un montant symbolique.
      • 82. L’aide de la ville doit être assurée à la récupération, éventuellement la réfection, l’acheminement et la réutilisation dans des pays en construction, en reconstruction ou en situation de pénurie, du matériel et des équipements considérés comme obsolètes ici, mais qui là-bas font encore défaut : ordinateurs, appareils ménagers, équipements audiovisuels, équipements de production, matériel d’enseignement etc…
      • 83. L’information dans leur propre langue des différentes communautés culturelles sur les modalités de tri et de récupération des déchets doit être assurée.
      • 84. Dans tous les immeubles d’habitation de la ville doivent être apposées des affichettes résumant clairement les modalités de tri et de récupération des déchets.
      • 85. Il faut poursuivre et renforcer les campagnes de sensibilisation à la propreté et ne pas hésiter à faire usage de la possibilité, prévue par la loi, d’amender les propriétaires des chiens qui ne se seront pas souciés d’éliminer les déjections de leur animal.

      La liberté de déplacement : une liberté des personnes, pas un droit des machines

      • 86. Nous demandons la poursuite des efforts visant à détourner la circulation de transit de la ville, et à concentrer le trafic motorisé sur quelques axes principaux, sur lesquels devraient être également tracées les lignes de trams.
      • 87. Nous demandons la généralisation de la limitation de vitesse à 30 km/heure dans les quartiers d’habitation.
      • 88. Nous demandons la pose, aux abords de toutes les écoles et de tous les lieux fréquentés par des enfants et, d’une manière générale, des personnes à mobilité réduite, d’aménagement rendant matériellement impossible toute vitesse supérieure à 30 km/h.
      • 89. Nous demandons que l’octroi de droits de superficie pour des parkings soit systématiquement conditionné à l’adoption de mesures de modération du trafic.
      • 90. Nous demandons la participation active de la Ville au développement des transports publics, notamment par le développement des lignes nocturnes transversales, du service annuel des Mouettes et des bateaux du Rhône, et la création de dessertes de quartier.
      • 91. Nous demandons la participation de la Ville au projet de relier Genève à sa propre région par le développement d’un réseau ferroviaire régional et local.
      • 92. Nous demandons la poursuite de l’effort engagé pour l’implantation d’un réseau dense et continu de pistes cyclables, réservées aux seuls vélos.
      • 93. Nous demandons que l’on poursuive la création de zones piétonnes et de parcours piétonniers continus (chaque quartier doit avoir sa zone piétonne, et ces zones doivent être connectées les unes aux autres par des parcours piétonniers). Le prolongement du parcours " au fil du Rhône " doit être assuré jusqu’au-delà des limites de la commune, en collaboration avec les autres municipalités concernées. Les parcours piétonniers et cyclables doivent être séparés, et exclusifs.
      • 94. La continuité des voies de communication piétonnes et cyclables doit être assurée sans rupture aux limites de la commune
      • 95. Nous nous opposerons à toute mesure d’aménagement donnant plus de place aux transports motorisés privés, et à toute voie réservée aux voitures en ville.
      • 96. Nous nous opposerons à toute traversée routière de la rade, en pont ou en tunnel, et à toute participation financière de la Ville à un tel projet.
      • 97. Nous nous opposerons à toute augmentation des tarifs des transports publics.

      CONCRÉTISER LE DROIT AU LOGEMENT

      • 98. La Ville de Genève doit mener une politique active dans le domaine du logement, en acquérant des terrains et des immeubles (sans forcément se limiter au territoire municipal). Ces acquisitions peuvent se faire en ayant recours à l’emprunt. La Ville pourrait par ailleurs acquérir quelques immeubles du fonds de valorisation de la BCG, et les rénover si besoin est.
      • 99. La pratique de l’octroi de droits de superficie à des organismes publics, parapublics et associatifs ayant pour objectif de construire des logements sociaux, doit être développée.
      • 100. La Ville doit assurer une meilleure affectation du parc immobilier existant (et futur), en évitant les vacances totales ou partielles.
      • 101. Une partie plus importante du parc immobilier de la Ville doit être réservée aux groupes sociaux particulièrement défavorisés (chômeurs, personnes et familles à bas revenus, personnes endettées). Nous demandons qu’un maximum de souplesse soit la règle face à des situations sociales difficiles. La Ville ne doit pas refuser d’accorder un logement à une personne au motif qu’elle est au chômage, que ses revenus sont trop bas ou qu’elle est endettée.
      • 102. Les bureaux et locaux commerciaux inoccupés, propriétés de la ville, doivent autant que possible être affectés (ou réaffectés) à l’habitat.
      • 103. La location d’arcades ou de locaux commerciaux à des conditions intéressantes doit être développée comme instrument de politique économique en direction de petites entreprises nouvelles ou de petits commerçants ou artisans désireux de " se lancer ".
      • 104. Les entreprises locales du bâtiment (dans la mesure où elles respectent les conventions collectives en vigueur) peuvent être favorisées lors de l’octroi des travaux d’entretien du parc immobilier de la Ville.
      • 105. La Ville doit miser sur l’innovation dans les constructions nouvelles (type d’habitat, économies de moyens, promotion de l’adaptabilité des logements, inventivité architecturale).
      • 106. La Ville doit mener une politique volontariste de mixité sociale et culturelle dans l’attribution de ses logements.
      • 107. La Ville doit soutenir, politiquement et matériellement (en y participant) la transformation de l’ancienne politique HBM/HLM/HCM en une nouvelle politique de logements sociaux pérennes. Dans cette optique, la fondation HLM de la Ville devra être transformée en une Fondation des logements sociaux.
      • 108. La Gérance Immobilière municipale doit être rattachée au dicastère de l’aménagement, et une collaboration plus étroite entre elle et les services sociaux de la Ville doit s’établir.

      ASSURER LA SÉCURITÉ, POUR ASSURER LES LIBERTÉS

      • 109. La défense du droit des personnes à la sécurité passe d’abord par une politique de réduction des risques de paupérisation et d’exclusion sociales. Elle implique ensuite une action de la collectivité pour assurer la sécurité physique des personnes, et d’abord des plus fragiles et des plus démunies. Cette politique doit être basée sur le principe du " maillon faible " : les actions à mener, dans tous les domaines, sont définies en fonction des droits, des besoins et des intérêts des catégories les plus fragiles de la population, et doivent porter d’abord sur la réduction des risques réels (ceux liés à la circulation, en particulier).
      • 110. L’action menée pour réduire les risques liés à la circulation ne peut se résumer en des campagnes d’information ou de signalisation mais doit déboucher sur la pose d’obstacles matériels à la vitesse, voire à la circulation motorisée elle-même. Une attention particulière doit être apportée à la sécurité des enfants face au trafic automobile. Le rôle et le statut des patrouilleuses et patrouilleurs scolaires doit être renforcé. Les aménagements routiers de ralentissement, voire de déplacement, du trafic aux abords des écoles, doivent être systématisés.
      • 111. Le rôle et les compétences respectives des polices municipales et cantonale doivent être clarifiés auprès du public.
      • 112. Les effectifs et la présence des îlotiers doivent être renforcés.
      • 113. Le rôle des concierges doit être revalorisé : à leur responsabilité quant à la propriété des lieux dont ils ont la charge peut s’ajouter un rôle de médiation et de sécurisation. Une formation adéquate doit leur être dispensée.
      • 114. Les habitants doivent, dans le cadre de la démocratie de quartier, pouvoir participer aux décisions en matière de prévention de la petite délinquance.
      • 115. Les lieux " insécures " doivent faire l’objet d’un aménagement (notamment d’un éclairage permanent) particulier. Des activités permanentes doivent y être installées.

      SOUTENIR LE SPORT QUI SE PRATIQUE, PAS CELUI QUI SE MARCHANDE

      • 116. L’action de la Ville doit se concentrer sur les manifestations offrant le plus de possibilités de participation directe des sportifs amateurs de la région plutôt que sur des manifestation spectaculaires lors desquelles le public n’est que consommateur.
      • 117. Nous demandons que la politique d’équipement privilégie les équipements de quartier aux équipements centralisés, et calibre les équipements à la taille des besoins. L’argent public doit aller aux équipements en mains publiques.
      • 118. Les obstacles financiers (cotisations, tarifs d’utilisation des équipements fixes etc…) à l’accès des jeunes aux activités sportives doivent être abaissés, et partout où cela sera concevable, la gratuité doit être la règle.
      • 119. Les structures sportives existantes doivent être davantage utilisées pour des activités parascolaires.
      • 120. La Ville doit mettre à disposition sans condition ni contrainte des lieux et équipements simples, réalisés sur le domaine public (et non dans des sites " urbains résiduels " ou périphériques) à destination des adolescents et pour la pratique de jeux et de sports de rue sans affiliation à des clubs ou des associations.
      • 121. La concertation intercommunale doit être renforcée dans les domaines des tarifs d’utilisation des équipements et de la gestion des terrains. Elle doit pouvoir s’étendre à l’ensemble de la région, communes vaudoises et françaises comprises.
      • 122. Un " passeport sportif régional " doit être institué, offrant libre accès aux activités et installations sportives de la région.

      PROMOUVOIR LA CRÉATION CULTURELLE

      • 123. Nous soutenons la poursuite de la politique de " démocratisation de la culture " engagée par la Ville.
      • 124. L’action culturelle de la collectivité doit se concentrer sur ce qui, de la création et de la représentation culturelles, en a le plus besoin, c’est-à-dire sur ce qui est dénué de rentabilité commerciale.
      • 125. Le principe général de gratuité (financière) doit être réaffirmé et maintenu partout où il est déjà appliqué, du moins pour les habitants de la Ville et des collectivités publiques contribuant à la politique culturelle.
      • 126. Nous proposons le rééquilibrage du budget culturel en faveur de la création, notamment dans les domaines de la danse et du cinéma, et de la culture alternative.
      • 127. Nous demandons une plus grande ouverture à des mouvements culturels émergents.
      • 128. Nous soutenons la poursuite, voire le renforcement, du soutien aux événements culturels populaires et festifs, comme la Fête de la musique, la Fureur de lire, la Nuit de la science, les Journées du patrimoine etc…
      • 129. Nous demandons le soutien aux lieux, aux associations et aux moments d’expression culturelle des populations immigrées.
      • 130. Nous demandons le soutien au développement d’activités culturelles dans tous les quartiers, en fonction de leurs spécificités (urbanistiques et sociales).
      • 131. Nous demandons la facilitation et le développement des manifestations culturelles, notamment en ce qui concerne les horaires et les autorisations.
      • 132. Nous demandons le développement d’une politique de communication (affichage, publications, annonces, présence sur l’internet) prenant en compte les limites des moyens des petites institutions et des associations, et les critères de respect de l’environnement.
      • 133. Nous proposons la facilitation du recyclage, de la récupération et de la conservation pour les petites compagnies et les petites institutions des décors, des costumes et des accessoires réalisés par les grandes institutions (notamment le Grand Théâtre).
      • 134. Nous proposons l’incitation à la collaboration transfrontalière entre acteurs culturels, par des subventions spécifiques.
      • 135. Nous proposons la création d’une commission culturelle régionale permanente, franco-valdo-genevoise, réunissant les responsables politiques de la culture, pour coordonner l’action culturelle sur un plan régional (y compris du point de vue du financement).
      • 136. Nous soutenons le développement des échanges culturels pour les compagnies de danse, les groupes de musique, les troupes de théâtre etc…, non institutionnels.
      • 137. Nous demandons à la Ville un soutien actif à la création culturelle émergente (acteurs, producteurs, lieux) par la mise à disposition de locaux, de matériel et de services, et le cas échéant par des subventions.
      • 138. Nous soutenons la prise en considération des associations culturelles et des artistes en tant que partenaires de la politique culturelle et, par conséquent, que partie prenante des débats sur la politique culturelle.
      • 139. Nous demandons le soutien affirmé de la Ville aux manifestations culturelles de quartier et aux projets culturels intégrant des contenus et des objectifs sociaux.
      • 140. Nous demandons que la Ville et le canton se répartissent rationnellement les compétences et que la Ville, les autres communes et le canton se partagent le financement culturelle, de manière permanente et non plus seulement ponctuelle, l’engagement financier permanent du canton et des autres communes s’accompagnant, logiquement, d’une participation accrue au processus de décision, à toutes les étapes de ce processus.
      • 141. Nous demandons que les différentes communes de la région (Ville comprise, évidemment), élaborent conjointement les projets de création de nouvelles institutions culturelles.
      • 142. Nous proposons que l’allocation de ressources financières par la Ville aux grandes institutions culturelles d’importance cantonale (Grand Théâtre, Comédie, BPU etc…) soit fixée en fonction (en proportion ou en multiple) de l’effort conjoint du canton et des autres communes.
      • 143. Nous soutenons le développement des conventions de subventionnement quadriennales avec les grandes institutions, sur la base de contrats de prestations, et de conventions de partenariat avec les associations.
      • 144. Nous proposons la création d’un fonds de financement culturel, commun à la Ville, aux autres communes et au canton, et donc d’une instance politique d’attribution des ressources de ce fonds, instance à laquelle participeraient tous les pouvoirs publics y contribuant. Le soutien à la création culturelle et aux acteurs culturels non-institutionnels resteraient de la responsabilité et du domaine des financements par les budgets communaux, le cas échéant par le budget cantonal. Le fonds intercommunal aurait pour tâche le financement des institutions d’importance régionale, et les budgets municipaux celui de la culture de proximité, de la culture non-institutionnelle, de la culture expérimentale et " alternative " (au sens non-politicien du terme).
      • 145. Nous soutenons le renforcement des efforts pour faire " sortir la culture exposée " des musées (et d’une manière générale faire sortir la culture de ses lieux de représentation traditionnels), pour aller à la rencontre de la population, en particulier de la population (ou des populations) qui ne s’y confronte(nt) pas spontanément.
      • 146. Nous demandons le développement de la collaboration entre les bibliothèques, et entre la future " Bibliothèque de Genève " (regroupement de la BPU et des bibliothèques universitaires) et les bibliothèques municipales, y compris celle de Champ-Dollon.
      • 147. Nous proposons l’installation dans toutes les bibliothèques municipales de " cafés internet " et de lieux de formation à l’usage de l’internet (et d’usage sur place de l’internet).
      • 148. Nous demandons à la Ville qu’elle soutienne la production dramatique locale, et les institutions permettant son " exportation ".
      • 149. Nous proposons la création d’un office de cautionnement et d’avances sur recettes, dans le cadre du Département de la Culture, et par domaine d’expression (musique, théâtre, arts plastiques, audiovisuels etc…).
      • 150. Nous soutenons la construction d’un nouveau théâtre (une " Nouvelle Comédie "), extra muros.

      GÉRER AUTREMENT

      • 151. La municipalisation doit être prise en compte comme une alternative aux privatisations.
      • 152. Dans le cadre municipal, des espaces indépendants, autonomes, hors du contrôle des appareils étatiques, doivent être rendus possibles.
      • 153. La Commune doit prendre sa part du soutien aux services publics, à leur démocratisation et à leur socialisation.
      • 154. Nous proposons la mise en place d’un système de budget participatif : les Conseils de quartier et les associations pourront exprimer leur avis sur le projet de budget soumis par le Conseil administratif au Conseil municipal, avant que celui-ci ne se prononce.
      • 155. Nous considérons que la maîtrise des dépenses de la Ville ne doit pas se faire au détriment des prestations à la population, mais par une rationalisation du fonctionnement des services publics municipaux, sans péjoration des conditions de travail de leurs employés.
      • 156. Une partie des excédents budgétaires à venir doivent être utilisés pour constituer des réserves, réaliser des subventions et assurer des amortissements. Les dispositions légales l’empêchant encore doivent être abrogées.
      • 157. Dans le cadre des appels d’offres publics ouvertes à la concurrence nationale, il doit être fait l’usage socialement et économiquement le plus inventif possible de la possibilité d’inclure dans les critères de détermination de " l’offre économiquement la plus avantageuse " les aspects liés au soutien du tissu économique local, à la défense des droits des travailleurs, à la protection de l’environnement et à la solidarité internationale.
      • 158. Les horaires d’ouverture au public des services publics municipaux peuvent être élargis (prolongation en fin d’après-midi et en début de soirée, ouverture le samedi, ouverture tous les jours -féries comprises- des bibliothèques municipales). La charge de travail nécessité par cet élargissement doit être compensée par une réduction du temps de travail hebdomadaire, et par l’embauche de personnel supplémentaire.
      • 159. La Ville doit reconnaître, en terme d’évaluation des fonctions, de classification et de salaires, les années consacrées dans le cadre familial à l’éducation des enfants comme des années de travail effectif.
      • 160. Une " dé-hiérarchisation " de l’administration municipale doit être engagée à partir d’un travail d’enquête comprenant la consultation des employés municipaux.
      • 161. Nous proposons qu’il ne soit plus possible à un(e) représentant(e) du Conseil administratif de remplir des fonctions de présidence d’une entreprise publique ou privée.
      • 162. Nous proposons l’introduction d’un congé paternité et d’un droit de garde des enfants malades pour les salariés de la fonction publique municipale, et des institutions autonomes financées par la Ville
      • 163. Nous soutenons le développement de la pratique des contrats de prestation entre la Ville et les grandes institutions autonomes subventionnées par la Ville, et des contrats de partenariat avec les associations régulièrement subventionnées. Les modalités de collaboration avec des établissements publics ou avec des associations ou fondations privées, doivent être différenciées selon les champs d’activité, les partenaires et le volume des subventions. Avec les associations et les fondations de droit privé, il convient de passer des contrats de partenariat, plus souples et moins contraignants pour les deux partenaires, et n’impliquant pas une garantie de subvention. Les contrats de partenariat devraient reposer sur une charte de partenariat exprimant les grandes lignes, les modalités générales et les conditions cadres de la collaboration régulière entre les collectivités publiques d’une part, les associations et fondations de droit privé d’autre part.
      • 164. Nous proposons l'augmentation de l’impôt municipal direct de deux ou trois centimes additionnels), sauf en cas de détérioration de la conjoncture, afin de couvrir les dépenses d’aide sociales, de soutien à l’activité économique locale et à la culture de création.
      • 165. Nous soutenons une réforme de la fiscalité cantonale (à partir de laquelle est fixée la fiscalité municipale), impliquant un déplafonnement de la fiscalité directe et un allégement de la charge fiscale pour les plus bas revenus.
      • 166. Nous proposons l’étude d’une réforme de la taxe professionnelle communale, permettant des réductions, voire des exonérations, pour les entreprises locales pratiquant une politique d’embauche positive, diminuant le temps de travail et augmentant les bas salaires.

      LA VILLE DONT LE PAYS EST LE MONDE

      • 167. Nous demandons que Genève abandonne son attitude de refus arrogant de tout jumelage avec d’autres villes, et qu’elle développe des liens de jumelage avec des villes symboles et victimes des désordres du monde.
      • 168. Nous proposons qu’une " citoyenneté d’honneur " de Genève puisse être accordée à celles et ceux qui sont menacés parce qu’ils combattent pour les droits fondamentaux de la personne, et les libertés des peuples.
      • 169. Nous proposons que Genève puisse parrainer des prisonniers d’opinion.
      • 170. Nous proposons que la Ville signe la Charte européenne des droits de l’Homme dans la ville.
      • 171. Nous proposons que la Ville soutienne matériellement l’implantation à Genève de représentations des pays et des organisations non gouvernementales financièrement les plus démunis.
      • 172. Nous demandons que la Ville s’engage dans la défense du droit d’asile, et pour la régularisation des sans-papiers.
      • 173. Nous demandons que la Ville s’engage pour le droit de vote et d’éligibilité des étrangers établis, au plan communal en tous cas, et si possible au plan cantonal.

      Si tu n’espères pas l’inespéré, tu ne le trouveras pas (Héraclite

      Genève, 21 mars 2007, 1er Germinal

      Ma très chère,

      Je n’étais plus revenu à Genève depuis quatre ans ; tu sais ce qui m’en avait tenu éloigné : je ne m’étais pas exilé, mais ce qui me requérait ailleurs avait singulièrement plus de force que ce qui m’aurait retenu dans ma ville. Ma ville ? J’ai toujours la même impression d’étrangeté à m’entendre dire ce possessif. Genève n’appartient à personne, et surtout pas à ceux qui croient en détenir les clefs. Ni même à ceux qui croient pouvoir parler en son nom. Mais à ceux qui l’habitent, d’où qu’ils viennent. Et à ceux qui la rêvent, où qu’ils soient.

      Revenant sur mes pas, j’ai retrouvé la ville changée, comme agrandie. Mais si Genève est autre qu’il y a quatre ans, c’est pour avoir été fidèle à elle-même, à ce qui l’avait constituée, à ce qu’elle continuait d’être même sans le savoir ou sans qu’elle s’en souvienne. Genève ne s’est changée que pour pouvoir à nouveau ressembler à elle-même.

      Il faut bien que je te dise ce changement : il est à la fois profond et, pour chaque chose changée, presque imperceptible. J’avais quitté une ville ankylosée, ne sachant plus très bien ce qu’elle voulait faire d’elle-même, se remettant encore lentement d’avoir, quelques années auparavant, abandonné à d’autres le soin de lui assigner un destin -et quel destin ! celui d’un centre commercial, d’un parking, d’un échangeur d’autoroutes… Genève s’est réveillée, et se réveillant s’est ébrouée, et s’ébrouant s’est émancipée. Il a d’abord fallu qu’elle échappe à ses propres frontières, celles de la commune, celles du canton, celle de la Suisse même. Cela s’est appelé la " communauté urbaine ". La communauté, qui vient de la Commune, et urbaine, pour retrouver la ville. S’ébrouant, la Ville s’est reconnue vieille de 2000 ans, Commune depuis 1000 ans, République depuis 500 ans, et canton pour l’accessoire, puisque, revenus dans les fourgons d’une armée autrichienne, quelques notables avaient encore si grande peur des révolutions de France qu’ils virent en la Suisse une assurance-vie.

      Lasse de contempler à ses portes l’Europe en train de se faire, fatiguée d’attendre que se déchirent les mythes et que se dissipent les peurs pour que la Suisse en soit, Genève a décidé de sauter à communes jointes par dessus cette frontière qui traversait la ville réelle. Les élus municipaux, les associations, les lieux culturels de toute la région travaillent désormais en commun, sur tous les problèmes qu’ils ont en commun. Une évidence, dis-tu ? une évidence, sans doute, mais qui mit si longtemps à s’imposer qu’on avait fini par la prendre pour un projet révolutionnaire. Eppur si muove…

      Il en fut d’autres évidences comme de celle-ci, et je mesure encore mal les obstacles qu’il aura fallu surmonter pour que des mots comme " solidarité ", " démocratie ", " qualité de la vie ", sortent des discours pour prendre leur vrai sens, lourd, palpable, vérifiable… On a toujours beaucoup parlé ici, et beaucoup écrit. Genève est une ville de mots. Il aura fallu en dire et en écrire beaucoup, longtemps, pour que les actes suivent. Ils ont suivi.

      Genève caracolait en tête des statistiques de chômage ? la Ville a créé des emplois, réduit le temps de travail, partagé le travail, soutenu des activités nouvelles…

      Genève étouffait sous les bagnoles ? Elles en sont sorties. Le croiras-tu ? On peut marcher dans les rues sans risquer de s’y faire écraser, et je puis aujourd’hui, premier jour de printemps, écouter de la musique fenêtres ouvertes, sans devoir me couvrir les oreilles d’un casque pour que le vacarme des moteurs ne se mêle pas aux notes et aux chants.

      La démocratie s’était endormie ? Les Conseils généraux de quartier, le budget participatif, le droit de vote et d’éligibilité des étrangers, l’ont réveillée…

      Genève était enserrée dans ses frontières ? la Communauté urbaine les a estompées…

      Il fut un temps où l’on pouvait croire que la démocratie ne pouvait fonctionner que si les citoyens ne s’en servaient pas. Les taux massifs d’abstention qu’elle connaissait n’étaient pas une faiblesse du système, et moins encore une menace pesant sur lui, mais une condition même de son fonctionnement. Ainsi la décision politique restait-elle en mains d’un petit nombre de gens (surtout des hommes, surtout des universitaires, surtout des membres actifs d’organisations politiques, sociales ou économiques puissantes, surtout des gens aisés…) décidant pour le grand nombre. Fermée aux étrangers, étrangère aux pauvres, méfiante à l’égard des femmes, ignorante des jeunes, cette vieille démocratie était devenue un jeu d’initiés, cette vieille République un club privé.

      Tu le vois : il s’est passé quelque chose ici. Genève n’a peut-être pas été révolutionnée mais (pardonne-moi ce jeu de mot que l’Histoire me souffle) réformée, et au fond c’est un peu la même chose. Elle est à nouveau cette ville un peu orgueilleuse, résistant dans le même mouvement où elle s’ouvre, provinciale et planétaire tout à la fois. Nous avons retrouvé le monde -le vrai, pas celui des chiffres et des quantités, celui des hommes et des femmes, des idées et des peuples. Celles et ceux que l’on pourchasse pour leur parole libre trouvent à nouveau ici un asile ; les villes que l’ordre du monde déchirent trouvent en la nôtre une amie. Genève ne donne plus de leçons, elle tend la main. Elle sut le faire autrefois, puis elle l’oublia. Elle prit pour une raison d’être ce qui n’était qu’un moyen d’exister ; sa richesse l’avait assoupie, elle sommeillait sur son matelas d’or, bercée par le murmure de ses banquiers, quelques souvenirs héroïques meublant ses rêves. De profondes crises l’ont réveillée, et contrainte à des choix parfois rudes. Ce n’est pas si facile qu’on le dit de rompre avec des habitudes dont avait fait des lois, et avec des lois que l’on prenait pour une fatalité. Ce fut fait pourtant, et bien fait.

      J’avais envie de revenir à Genève, j’ai désormais envie d’y rester. Et je t’y attends.

      Fidèlement,

      Jean-Jacques


      L'engagement de Barcelone

      Aucune ville n'est une île. Le réseau des villes parcourt le monde actuel et en fait un organisme vivant, souple, connecté sans cesse. Cependant, nous savons que des humeurs différentes peuvent couler dans ses veines. La ville a été -est souvent- un instrument de libération, une vraie machine de réduction de la pauvreté et l'espace où sont nés les droits de la personne. Mais nous savons aussi que l'espace urbain peut jouer le rôle d'une puissante machine d'exclusion sociale et que, au cours de ce XXe siècle qui s'achève, la barbarie s'est acharnés contre les villes, laissant dans nos mémoires un chapelet de noms : Verdun, Guernica, Berlin, Hiroshima, Vucovar, Sarajevo, Srebenica.

      C'est pour cette raison que, à l'occasion du cinquantième anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l'Homme, nous tenons à affirmer notre volonté que ces droits nourrissent la vie de nos villes. Leur caractère universel possède une valeur extraordinaire lorsqu'il s'agit d'unir les villes du monde entier pour créer une nouvelle culture des droits de l'Homme. Les valeurs d'égalité et de solidarité, de justice, de démocratie dans la proximité, de participation, de transparence et de bon gouvernement inspirent la mise en place des droits de l'Homme dans le domaine des villes. Le respect de ces valeurs implique que, partout, les villes puissent s'unir pour défendre un même concept de la dignité humaine afin que la citoyenneté puisse s'approprier l'ancienne devise : l'air de la ville nous rend libres.

      A l'horizon du siècle qui vient, dans un contexte de globalisation, d'urbanisation croissante et de fractures sociales, nous sommes conscients que l'interrelation est un trait fondamental de notre monde et rend indissociables la satisfaction des besoins minimaux de l'ensemble de la population mondiale, la protection de l'environnement et le respect des droits des générations futures. Dans ce monde futur, la ville est appelée à devenir l'un des principaux acteurs pour la promotion du développement durable et pour la défense des droits de l'Homme, interdépendants et indivisibles. Dans un monde globalisé, la ville est plus proche des citoyennes et des citoyens, ce qui lui permet d'assurer la visibilité des situations de vulnérabilité des droits et la légitimité pour agir en conséquence.

      La culture de la communication, qui donne lieu aux transfert du savoir entre différents domaines et à la transmission des actions et des idées, fait émerger progressivement les villes comme une nouvelle voix dans la vie internationale. À travers les nombreuses initiatives de la société civile et des politiques municipales, la ville joue à l'heure actuelle un rôle dans les politiques actives de défense des droits de l'Homme, dans la coopération internationale ; elle est un bastion pour les victimes des violations des droits ; elle peut se montrer généreuse dans l'accueil des réfugiés... Dans un contexte d'échanges multiples, il devient impératif d'encourager de toutes nos forces l'Alliance mondiale des villes contre la pauvreté, pour renforcer les droits économiques, sociaux et culturels, qui sont une partie intrinsèque des droits de l'Homme.

      Pour une culture des droits de l'Homme dans la ville

      Nous, maires de villes et de capitales européennes et représentants des pouvoirs locaux, nous assumons l'héritage de cinquante ans de développement de la Déclaration universelle des droits de l'Homme et le défi des nouveaux contextes dans lesquels vivent les hommes et femmes d'aujourd'hui. En vertu du principe de subsidiarité et de proximité de l'administration municipale des citoyens et citoyennes, nous affirmons notre volonté de promouvoir la culture des droits de l'homme et de la responsabilité humaine dans la ville et, au regard des nouvelles réalités, nous assumons les engagements suivants :

      1. Nous voulons l'extension du droit de participation politique, le droit de suffrage et la liberté d'association dans le domaine municipal pour tous les citoyens et citoyennes, incluant tous ceux qui, résidant en ville depuis un certain temps, n'ont pas la nationalité de l'Etat. Dans ce sens, il faudra décidément travailler avec les organismes ou instances compétentes pour changer, de façon appropriée, les lois électorales. Il faudra entre-temps créer, dans nos villes, des mécanismes aptes à faciliter la participation réelle et effective de tous les citoyen(ne)s, et surtout des membres des groupes politiquement plus exclus.
      2. Les droits de l'Homme sont indivisibles, et les droits sociaux, économiques et culturels en sont une partie inaliénable. Le principe de proximité fait que l'administration municipale est plus sensible aux réalités où ces droits sont particulièrement vulnérables. Ainsi, nous soutenons que les politiques urbaines contre l'exclusion sociale, les politiques pour l'emploi, la promotion du droit à un logement adéquat, et les actions citoyennes visant à protéger les collectifs vulnérables (enfants, femmes, homosexuels, personnes âgées, personnes avec différents handicaps...), ainsi que les politiques visant à reconnaître aux immigrés en situation irrégulière leur droit à l'accès aux services sociaux, à l'éducation et à la santé publique, font de la ville un bastion des droits de l'Homme.
      3. La promotion des droits sociaux et le développement économique sont de nos jours indissociables de la protection de l'environnement. Nous devons mener des actions de prévention de l'atteinte à l'environnement mais également sanctionner les responsables des dégradations écologiques et environnementales et coopérer avec les autorités locales des pays de l'est et du sud dans une alliance pour protéger le climat, l'eau, la terre et la bio-diversité. Dans ce but, nous voulons engager les villes à réaliser et à appliquer les programmes locaux 21 en tenant compte de l'article 28 du Programme général 21 et de la Charte Européenne d'Aalborg.
      4. Enracinées dans la culture de leur pays, les villes sont aussi un pôle d'attraction pour les personnes et les communautés d'autres cultures. La ville doit protéger le pluralisme et la convivialité. Elle doit respecter la culture de chacun par le biais d'une action politique diversifiée comprenant : la défense des droits des communautés linguistiques qui habitent le pays et des droits linquistiques de chacun, l'adoption de politiques multiculturelles, la promotion du dialogue entre les religions, le suivi et l'action permanente contre la discrimination éthnique et la création de centres d'assistance communautaire aux réfugiés.
      5. Il s'avère nécessaire de mettre en place des mécanismes de protection et de surveillance des droits de l'Homme dans toutes les villes européennes -grandes, moyennes et petites- par le biais d'institutions objectives et indépendantes du pouvoir local, chargées de défendre les citoyens et de les soutenir en ce qui concerne leurs droits en matière de compétence municipale.
      6. Nous constatons le rôle actuel des villes dans la promotion de la culture des droits de l'Homme à l'échelle internationale. Nous lançons donc un appel aux institutions internationales pour qu'elles ouvrent des espaces qui permettraient d'entendre notre voix. Dans ce nouveau contexte, nous désirons favoriser la coopération entre les villes des différentes cultures, aux situations économiques différentes et, surtout, avec des villes des régions en conflit. Chaque ville doit assumer sa responsabilité dans la coopération internationale et dans la participation aux réseaux des villes pour la défense des droits de l'Homme.
      Le droit à la ville

      Les politiques municipales en ce domaine exigent un dialogue permanent avec la société civile et une étroite collaboration avec les associations et les organisations non gouvernementales (ONG). Il faut que les conseils municipaux maintiennent de façon permanente le contact avec les différents agents sociaux impliqués dans la défense des droits de l'Homme et que les politiques municipales puissent être mises en place en partenariat ou à travers l'action des organisations.

      La culture des droits de l'Homme dans la ville se développera vraiment à partir de la plus vaste participation de tous les citoyens. La démocratie de proximité doit faire en sorte que, dans l'image de l'administration locale, tous les habitants puissent se reconnaître : citoyennes et citoyens, population autochtone et groupes d'immigration, membres des minorités religieuses et culturelles.

      Nous voulons humaniser l'espace urbain, lui donner corps par le biais de la protection et de la promotion des droits de l'homme. Le droit à la ville que nous affirmons est le suivant : le droit de chacun à la participation active dans la vie de la ville. Le droit à être le protagoniste de sa citoyenneté.

      Objectifs

      Ã Barcelone
      , le 17 octobre 1998, journée internationale pour l'élimination de la pauvreté, nous signons cet engagement et nous convenons d'en diffuser le contenu et l'esprit partout et, pour le faire, nous assumons les objectifs suivants :

      1. Maintenir un rapport permanent entre nos villes afin de partager les actions, les pratiques et les politiques qui font avancer les droits de l'Homme dans les villes et dans les multiples domaines de celles-ci.
      2. Continuer à aller de l'avant dans la réflexion sur le rôle présent et futur des villes comme bastion des droits de l'Homme, en partenariat avec les associations spécialisées dans leur défense et leur promotion, comme nous l'avons fait jusqu'à présent. À partir de la synthèse des travaux des séminaires préparatoires et des résultats de la Conférence de Barcelone, et à partir de la collaboration avec les Nations Unies et le Conseil de l'Europe ainsi que d'une collaboration souhaitée avec la Commission Européenne, nous voulons continuer à coopérer en vue de la rédaction d'une future Charte des droits de l'Homme dans la ville, et parvenir ainsi à avoir, par la voix des villes, une répercussion utile sur les délibérations de ces organismes internationaux.
      3. Faciliter les mécanismes pertinents pour promouvoir les contenus de cet Engagement dans nos villes avec la participation municipale et le rattachement des personnes appartenant à la société civile pouvant être des points de référence indiscutables de l'engagement dans la défense et la promotion des droits de l'Homme, et qui puissent assurer la présence permanente du souci pour les droits de l'Homme dans les structures de gouvernement des villes.
      4. Mettre en place des mécanismes d'évaluation du respect de cet Engagement dans chaque ville et proposer, dans ce sens, la création d'un groupe de travail au sein d'un des organismes européens ayant des pouvoirs locaux déjà existants.
      5. Inviter les villes signataires à étudier ce document et à l'approuver dans une séance plénière municipale.
      6. Faire connaître les contenus et les valeurs de ce document à nos concitoyens et concitoyennes et travailler pour les étendre à d'autres villes.
      Nous chargeons les villes de Barcelone, Saint-Denis et Gérone d'assurer la diffusion internationale de cet engagement et la coordination de la poursuite des travaux ainsi que d'encourager la création d'un groupe de travail, au sein d'un organisme européen de coordination municipale déjà existant, afin qu'ait lieu, en l'an 2000, la deuxième Conférence européenne des villes pour les droits de l'Homme.

      Villes signataires :

      Anvers, Badalona, Barcelone, Belfast, Berlin, Bordeaux, Bruxelles, Cornellà de Llobregat, Donostia, San Sebastian, Genève, Guernica, Gijon, Gérone, Granollars, Irun, Karklees, L'Hospitaler de Llobregat, Ljubliana, Logrono, Orléans, Palerme, Palma de Majorque, Perpignan, Reading, Riga, Rome, Sabadell, Saint-Denis, Sta. Coloma de Gramenet, Santiago de Compostela, Stockholm, Strasbourg, Turin, Venise, Varsovie, Vitoria-Gazteiz, Zaragoza, Zgierz.

      Barcelone, Conférence des Villes Européennes pour les droits de l'Homme,

      16 octobre 1998

      CONCLUSION

      Nous avons à (ré)apprendre à nous passer de ce que nous combattons, à dépasser ce dont nous proposons " théoriquement " le dépassement, à renoncer à ce dont nous proposons l'abolition. Ce qui est depuis toujours affaire de cohérence est désormais aussi affaire d'efficacité : c'est ainsi que se marquera (ou ne se marquera pas, si l'on s'y refuse) la différence de nature entre un refus du monde tel qu'il est fondé sur un projet, et une opposition populiste aux apparences du pouvoir plastronnant dans ce monde.

      Nous ne nous contentons pas de demander un changement des maîtres apparents du jeu social, mais nous entendons proposons un changement des règles de ce jeu. C'est une chose, en effet, que de proposer de nouveaux maîtres, et c'en est une autre que de récuser la maîtrise dans la réalité et la pratique politiques, en tendant de construire déjà, face au monde tel qu'il est, le monde tel qu'il devrait être.

      Nous avons donc d'abord à appliquer pour nous mêmes, entre nous-mêmes, et dans nos rapports avec les autres (en particulier avec nos alliés) ce que nous proposons à la société toute entière : notre programme. Nous avons ensuite à pousser ce programme à son terme logique, en renonçant à le configurer (c'est-à-dire à le réduire) en fonction de ce que l'on croit possible de faire admettre à court terme à une majorité de l'électorat ou de l'opinion publique. Or qu'est-ce qu'un programme socialiste ? Pas seulement (ni même forcément) le programme d'une organisation socialiste, ou se disant telle, mais essentiellement un programme exprimant une alternative -une altérité, et donc un conflit- aux fondements du capitalisme, et à ses manifestations contingentes.

      Cette alternative ne peut pas ne pas heurter des situations acquises et remettre en cause des pratiques communes. Elle ne peut donc pas ne pas heurter et remettre en cause des situations et des pratiques qui sont celles d'une partie de l'électorat socialiste -cette partie de l'électorat " petit bourgeois " conquis par les partis socialistes en mettant entre parenthèses, ou sous vitrine, les éléments les plus distinctifs d'un programme socialiste, c'est-à-dire les éléments qui, fondamentalement, le distinguent d'autres programmes : la critique et la proposition de dépassement de l'Etat, du salariat et de la propriété privée.

      Réintégrer ses éléments dans un programme et dans une pratique socialistes aura évidemment son prix : à être socialistes, les socialistes peuvent évidemment perdre des électeurs, mais à ne pas l'être, ils se perdent eux-mêmes -et on ne voit pas très bien à quoi peut bien servir un parti socialiste qui ne serait pas socialiste.


      Bibliographie

      Janet Biehl
      Le municipalisle libertaire
      Editions Ecosociété, Québec, 1998











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